Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... G... I... épouse E... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision en date du 28 septembre 2017 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a confirmé la décision de l'autorité consulaire française à Kinshasa lui refusant un visa d'entrée et de long séjour en qualité de conjointe d'un ressortissant français.
Par un jugement n° 1710550 du 28 juillet 2020, le tribunal administratif de Nantes a annulé cette décision et enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer le visa sollicité dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 16 octobre 2020 sous le n°20NT03291, le ministre de l'intérieur demande à la cour de prononcer le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Nantes du 28 juillet 2020.
Il soutient que :
- Mme G... C... épouse E... ne justifie ni de son intention matrimoniale, ni de l'existence d'un projet de vie commun, ni du maintien d'une relation affective depuis le mariage ;
- elle a sollicité en août 2014 un visa de court séjour auprès du consulat d'Espagne sous une autre identité ;
- l'union des intéressés ne peut être tenue pour sincère et doit être assimilée à un mariage de complaisance.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 décembre 2020, Mme G... C... épouse E..., représentée par Me Touglo, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés par le ministre de l'intérieur ne sont pas fondés.
Vu :
- le recours n° 20NT03290, enregistré le 16 octobre 2020 par lequel ministre de l'intérieur a demandé l'annulation du jugement n°1710550 du 28 juillet 2020 du tribunal administratif de Nantes.
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus lors de l'audience publique :
- le rapport de Mme Douet a été entendu au cours de l'audience publique ;
- et les observations de Me Gausseres, représentant Mme G... I... épouse E....
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article R. 811-15 du code de justice administrative : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement ". Aux termes de l'article R. 222-25 du même code : " Les affaires sont jugées soit par une chambre siégeant en formation de jugement, soit par une formation de chambres réunies, soit par la cour administrative d'appel en formation plénière, qui délibèrent en nombre impair. / Par dérogation à l'alinéa précédent, le président de la cour ou le président de chambre statue en audience publique sur les demandes de sursis à exécution mentionnées aux articles R. 811-15 à R. 811-17. ".
2. Mme G... C... épouse E..., née le 28 décembre 1988, ressortissante de la République démocratique du Congo, a épousé le 2 juillet 2015 à Kinshasa, M. E... H..., ressortissant français, né le 25 août 1956. Par une décision du 28 septembre 2017 la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours de Mme C... épouse E... contre le refus de l'autorité consulaire française à Kinshasa de lui délivrer un visa d'entrée et de long séjour en qualité de conjoint d'un ressortissant français.
3. Pour refuser de délivrer le visa sollicité, la commission de recours s'est fondée sur le motif tiré de l'absence de preuves du maintien d'échanges réguliers et constants entre les époux, qu'il n'a été établi ni que le couple ait un projet concret de vie commune ni que Mme G... C... épouse E... participe aux charges du mariage selon ses facultés propres, ces éléments constituant un faisceau d'indices suffisamment précis et concordants attestant d'une absence de maintien des liens matrimoniaux et du caractère complaisant du mariage contracté à des fins étrangères à l'institution matrimoniale dans le seul but de faciliter l'établissement en France de la demanderesse, laquelle a sollicité, en 2014 et sous une autre identité, un visa de court séjour auprès du consulat d'Espagne à Kinshasa.
4. Aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Outre le cas mentionné au deuxième alinéa, le visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ne peut être refusé à un conjoint de français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public ". En application de ces dispositions, il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer au conjoint étranger d'un ressortissant français dont le mariage n'a pas été contesté par l'autorité judiciaire le visa nécessaire pour que les époux puissent mener une vie familiale normale. Pour y faire obstacle, il appartient à l'administration, si elle allègue une fraude, d'établir, sur la base d'éléments précis et concordants, que le mariage a été entaché d'une telle fraude, de nature à justifier légalement le refus de visa.
5. En l'état de l'instruction, aucun des moyens invoqués par le ministre de l'intérieur à l'appui de sa requête ne paraît être de nature à justifier, outre l'annulation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement.
6. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à demander qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n° n° 1710550 du tribunal administratif de Nantes en date du 28 juillet 2020, jusqu'à ce que la cour ait statué sur la requête n° 20NT03290.
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à Mme G... C... épouse E... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens
DECIDE :
Article 1er : La requête du ministre de l'intérieur est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à Mme G... C... épouse E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme B... G... C... épouse E....
Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour le 27 janvier 2021.
La présidente-rapporteur,
H. Douet
Le greffier,
A. BRISSET
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT3291