VU I), sous le n° 90PA00220, la requête enregistrée le 7 mars 1990 au greffe de la cour, présentée par M. X..., demeurant ... ; M. X... demande à la cour d'annuler l'article 3 du jugement du 5 décembre 1989 du tribunal administratif de Paris rejetant ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du ministre des postes et des télécommunications en date du 5 août 1985 réduisant le taux de sa pension de 1,08 % et d'annuler ledit arrêté en tant qu'il a prévu cette réduction ;
VU II), sous le n° 90PA00273, la requête enregistrée au greffe de la cour le 16 mars 1990, présentée par le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET ; le ministre demande à la cour d'annuler les articles 1 et 2 du jugement du 5 décembre 1989 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 5 août 1985 en tant qu'il fixait au 5 août 1985 le droit de M. X... à bénéficier de la révision de sa pension et a fixé au 5 août 1981 le droit de l'intéressé à bénéficier de cette révision ; VU les autres pièces du dossier ;
VU la loi n° 81-736 du 4 août 1981 portant amnistie ;
VU le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 mai 1992 :
- le rapport de Mme LACKMANN, conseiller,
- et les conclusions de M. DACRE-WRIGHT, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que les requêtes de M. X... et du MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET sont dirigées contre un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Considérant que M. X..., contrôleur des postes et télécommunications, a été révoqué sans suspension de ses droits à pension par arrêté du ministre chargé des postes et télécommunications en date du 7 juillet 1951 ; qu'en application des dispositions de la loi du 6 août 1953 portant amnistie, le bénéfice d'une pension proportionnelle lui a été accordée à compter du 1er janvier 1954 ; que sa carrière a été reconstituée par arrêté du ministre des postes et télécommunications en date du 5 août 1985 en application des dispositions de la loi du 4 août 1981 portant amnistie ; que, par arrêté du ministre des finances du 10 mai 1988 portant concession de pension, la pension de M. X... a d'une part été révisée à compter du 5 août 1985 et d'autre part, frappée d'une suspension de 1,08 % des émoluments de base ;
Sur la date d'effet de la révision de la pension :
Considérant que l'article 22 de la loi précitée du 4 août 1981 dispose : "L'amnistie n'entraîne de droit ni la réintégration dans les fonctions, emplois, professions, grades, offices publics ou ministériels, ni la reconstitution de carrière. Elle entraîne la réintégration dans les divers droits à pension à compter de la date de publication de la présente loi en ce qui concerne l'amnistie de droit et à compter du jour où l'intéressé est admis à son bénéfice en ce qui concerne l'amnistie par mesure individuelle" ;
Considérant, d'une part, que si ces dispositions prévoient que la réintégration dans les droits à pension sera effectuée à compter de la date de publication de la loi portant amnistie, ce texte n'est pas applicable à M. X... qui bénéficie d'une pension proportionnelle à jouissance immédiate à compter du 1er janvier 1954 en application d'une précédente loi d'amnistie ; qu'au surplus, les dispositions invoquées ne concernent que les bénéficiaires de l'amnistie de droit et ne sont, en tout état de cause, pas applicables au requérant ;
Considérant, d'autre part, que si le législateur a entendu ouvrir aux administrations la faculté de procéder, de manière purement gracieuse, à la reconstitution de carrière des agents bénéficiant de la loi portant amnistie, cette reconstitution ne constitue pas un droit pour les intéressés ; qu'ainsi, l'arrêté portant reconstitution de la carrière de M. X... ne saurait, en vertu du principe de non rétroactivité des actes administratifs, avoir une date d'effet antérieure à sa date d'édiction dès lors que les dispositions du premier paragraphe de l'article 22 précité, seules applicables au requérant, ne le prévoient pas ; qu'en l'espèce c'est à bon droit que le ministre des finances a fixé au 5 août 1985 la date de révision de la pension de M. X... ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre des finances est fondé à soutenir que c'est à tort que, par les articles 1 et 2 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé les arrêtés du 5 août 1985 et 10 mai 1988 en tant qu'ils fixaient au 5 août 1985 le bénéfice de la reconstitution de carrière et de la révision de la pension de M. X... ;
Sur la réduction de 1,08 % du taux de la pension :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête de M. X... :
Considérant d'une part que selon l'article L.84 du code des pensions civiles et militaires de retraite, les dispositions du titre III de ce code relatif au cumul de pensions des rémunérations d'activité ou d'autres pensions, sont applicables aux personnels civils et militaires des collectivités suivantes : "1° Administrations de l'Etat, des départements et des communes, des départements et territoires d'outre-mer, des offices et établissements publics de ces collectivités à caractère administratif ; 2° Offices, établissements publics ou entreprises publiques à caractère industriel ou commercial et dont la liste est fixée par décret contresigné par le ministre des finances dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat ; 3° Organismes publics ou privés dont le budget de fonctionnement est alimenté en permanence et pour plus de 50 % de son montant, soit par des taxes fiscales ou parafiscales, soit par des cotisations rendues obligatoires en vertu d'un texte légal ou réglementaire, soit par des subventions allouées par l'une des collectivités visées au présent article 1° et 2°" ; que l'article L.87 du même code précise : "En aucun cas, le temps décompté dans la liquidation d'une pension acquise au titre du présent code ou de l'un des régimes de retraites des collectivités visées à l'article L.84 ou d'un régime de retraites d'un organisme international ne peut intervenir dans la liquidation d'une autre pension rémunérant des services accomplis à l'Etat" ;
Considérant que M. X... bénéficie d'une pension allouée par le régime de retraite complémentaire du Groupement interprofessionnel de retraite des salariés, affilié à l'UNIRS, au titre des services qu'il a effectués auprès de l'Union coopérative du personnel des postes et télécommunications pendant la période du 3 mai 1951 au 2 mai 1956 ; que l'administration soutient qu'en raison de la reconstitution de sa carrière et de la révision de sa pension, M. X... ne pouvait bénéficier également d'une pension civile au titre de cette même période et a, en conséquence, pratiqué un abattement de 1,08 % sur le taux de la pension accordée à M. X... ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est pas contesté, que le budget de l'Union coopérative du personnel des postes et télécommunications n'est alimenté ni par des taxes fiscales ou parafiscales, ni par des cotisations obligatoires ; que l'administration ne verse aucune subvention à cet organisme ; qu'ainsi l'Union coopérative du personnel des postes et télécommunications n'entre dans aucune des catégories de services ou organismes énumérées à l'article L.84 dont le personnel est soumis aux dispositions du titre III du code relative au cumul des pensions ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X..., alors même qu'il aurait donné son accord à l'abattement pratiqué, est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 3 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 10 mai 1988 du ministre des finances en tant qu'il réduit de 1,08 % le taux de sa pension civile afin d'éviter le cumul de deux pensions au titre d'une même période d'affiliation ;
Article 1er : Le jugement du 5 décembre 1989 du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : L'arrêté du ministre des finances du 10 mai 1988 est annulé en tant qu'il a réduit de 1,08 % le taux de la pension de M. X....
Article 3 : La demande de M. X... tendant à l'annulation des arrêtés du ministre des postes, des télécommunications et de l'espace et du ministre des finances des 5 août 1985 et 10 mai 1988 en tant qu'ils révisent sa pension à compter du 5 mai 1985 et non du 5 mai 1981 est rejetée.