(1ère Chambre)
VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 2 septembre 1994, présentée par le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU TOURISME ; le ministre demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9009960/7 du 21 avril 1994 par lequel le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser à la ville de Paris une somme de 11.122.577,95 F ;
2 ) de rejeter la demande présentée par la ville de Paris devant le tribunal administratif de Paris ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code de l'urbanisme, notamment ses articles L.332-1 et R.332-1 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 janvier 1997 :
- le rapport de M. DACRE-WRIGHT, conseiller,
- les observations du cabinet FOUSSARD, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour la ville de Paris,
- et les conclusions de Mme PHEMOLANT, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser à la ville de Paris une somme de 11.122.577,95 F, avec les intérêts et les intérêts des intérêts, au motif que la ville de Paris avait droit à réparation du préjudice résultant pour elle du remboursement, auquel elle avait dû procéder, des participations pour dépassement de coefficient d'occupation des sols qui lui avaient été versées par différentes sociétés, dès lors que ces participations étaient dépourvues de base légale en raison de l'irrégularité de la procédure d'élaboration des dispositions concernées du plan d'occupation des sols du fait de l'adjonction fautive par l'Etat au groupe de travail, chargé de cette élaboration, de personnes qui ne pouvaient légalement en faire partie ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'ensemble des participations pour dépassement du coefficient d'occupation des sols dont il s'agit, ont été définitivement regardées comme dépourvues de base légale en raison de l'illégalité, résultant du motif rappelé ci-dessus, des articles UA 14-3, UC 14-3, UH 14-3 et UM 14-3 du plan d'occupation des sols de la ville de Paris, par des décisions juridictionnelles tant du conseil d'Etat statuant au contentieux que du tribunal administratif de Paris, lesquelles en ont, en conséquence, déchargé les sociétés concernées ; que, dans tous les cas, la destination des locaux existants avait été modifiée par des travaux nécessitant la délivrance d'un permis de construire et que leur densité excédait, du fait même de ces travaux, le coefficient d'occupation des sols applicable ; que, nonobstant leur illégalité formelle, les dispositions des articles précités, qui prévoyaient le versement d'une participation pour dépassement du coefficient d'occupation des sols dans le cas où l'affectation existante des lieux n'est pas conservée et induit, de ce fait, un accroissement de la surface hors oeuvre nette, étaient légalement justifiées dès lors que le deuxième alinéa de l'article R.332-1 susvisé du code de l'urbanisme n'a pas pour objet et ne peut avoir pour effet d'exclure du champ d'application de cette participation les cas où le dépassement résulte de telles circonstances ; qu'il suit de là que le ministre requérant n'est pas fondé à soutenir qu'en dépit de la faute commise par l'Etat, la ville de Paris ne peut prétendre avoir été privée, du fait de cette faute, de recettes fiscales auxquelles elle n'avait pas droit légalement ;
Considérant que, s'il résulte des pièces produites par la ville de Paris elle-même que les participations litigieuses ont été perçues et n'ont pas encore été remboursées, l'autorité de la chose jugée par les décisions juridictionnelles précitées impose aux services de l'Etat, qui ont procédé à leur perception pour le compte de la ville, d'en assurer le remboursement, conformément aux propositions de mandatement de cette dernière ; qu'il suit de là que le préjudice subi par la ville de Paris revêt un caractère certain et doit être indemnisé par l'Etat à due concurrence de la totalité des sommes auxquelles elle a légalement droit et dont elle est ainsi privée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU TOURISME n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser à la ville de Paris la somme de 11.122.577,95 F avec les intérêts et les intérêts des intérêts ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande de la ville de Paris ;
Article 1er : La requête du MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU TOURISME est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la ville de Paris tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, sont rejetées.