(4ème chambre B)
VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 15 novembre 1996, sous le n 96PA04225, présentée par Mme Annie X..., demeurant ... ; Mme X... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9111686/5 en date du 11 juillet 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de la défense du 24 décembre 1991 refusant de prendre en compte les services militaires accomplis au-delà de la durée légale lors de son reclassement dans le corps des attachés des services administratifs du ministère de la défense ;
2 ) d'annuler ladite décision ;
3 ) de fixer, en application des dispositions des articles L.8-2 et L.8-3 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, un délai pour qu'une nouvelle décision soit prise ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU la loi n 70-2 du 2 janvier 1970 ;
VU la loi n 72-662 du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires ;
VU la loi n 93-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
VU la loi n 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions relatives à la fonction publique d'Etat ;
VU le décret n 70-1326 du 23 décembre 1970 modifié relatif au statut particulier du corps administratif supérieur des services extérieurs ;
VU le décret n 82-452 du 28 mai 1982 relatif aux commissions administratives paritaires ;
VU le décret n 84-588 du 10 juillet 1984 relatif aux instituts régionaux d'administration ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 octobre 1998 :
- le rapport de Mme de SALINS, premier conseiller,
- et les conclusions de M. LAMBERT, commissaire du Gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que les premiers juges n'ont pas répondu aux moyens tirés de l'inexacte application du décret du 10 juillet 1984 qui aurait été faite à Mme X... ainsi que de la violation, par le décret du 23 décembre 1970 et la décision attaquée, du droit à la mobilité et du droit au déroulement de la carrière ; qu'ainsi, le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 11 juillet 1996, qui est insuffisamment motivé, doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Sur la légalité de la décision attaquée :
Considérant que Mme X..., ancien sous-officier de carrière, a été nommée à compter du 1er avril 1991, à l'issue de sa scolarité à l'institut régional d'administration de Lille, attachée de service administratif de 2ème classe dans le corps administratif supérieur des services extérieurs du ministère de la défense ; que, par décision du 24 septembre 1991, le ministre de la défense a refusé de prendre en compte ses services militaires antérieurs au-delà de la durée légale lors de ce reclassement ; qu'il est constant que sa situation n'entre dans le champ d'application ni des dispositions de l'article 97 de la loi du 13 juillet 1972 ni de celles de la loi du 2 janvier 1970 modifiée ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 26, dernier alinéa, du décret susvisé du 10 juillet 1984 : " ... Les élèves sont titularisés à compter du lendemain du dernier jour de leur scolarité et classés à un échelon du grade de début du corps dans lequel ils ont été nommés, déterminé, en fonction du temps de scolarité et éventuellement de services antérieurement accomplis, par les dispositions du statut particulier du corps ..." ; que ces dispositions renvoient aux statuts des corps dans lesquels les élèves des instituts sont intégrés le soin de prévoir, le cas échéant, la prise en compte des services qu'ils ont antérieurement accomplis pour leur reclassement, sans imposer le principe d'une telle prise en compte ; que les dispositions des articles 9-1 à 9-4 du décret susvisé du 23 décembre 1970, qui définissent les conditions de classement des personnes intégrées dans le corps des attachés des services extérieurs du ministère de la défense, concernent exclusivement les anciens fonctionnaires et agents non titulaires de l'Etat ;
Considérant que les militaires sont régis par le statut général de la loi du 13 juillet 1972 ; que, pour leur part, les fonctionnaires et agents non titulaires de l'Etat relèvent du statut général résultant de la loi du 13 juillet 1983 et de la loi du 11 janvier 1984 ; que ni ces statuts ni aucune autre disposition législative ou réglementaire n'ont établi d'assimilation entre le corps des sous-officiers et un corps de fonctionnaires ou une catégorie d'agents de l'Etat ; que Mme X... ne peut donc pas se prévaloir utilement des services qu'elle a accomplis comme sous-officier pour bénéficier des dispositions précitées du décret du 23 décembre 1970 ;
Considérant, en deuxième lieu, que Mme X... soutient que le décret du 23 septembre 1970 est illégal en ce qu'il ne prévoit une reprise des services antérieurs qu'au bénéfice des agents qui, antérieurement à leur nomination et à leur scolarité dans un institut régional d'administration, avaient la qualité d'agents ou de fonctionnaires de l'Etat et que l'obligation d'exercer le pouvoir réglementaire a été méconnu à défaut de modification des dispositions des articles 9-1 à 9-4 de ce décret pour mettre fin à cette illégalité ; que, toutefois et contrairement à ce que soutient la requérante, il ne résulte d'aucun principe général qu'un agent titularisé dans un corps de la fonction publique doive y être nommé dans des conditions tenant compte de l'ancienneté de services qu'il a pu acquérir dans des emplois publics antérieurement occupés ; que ledit décret a pu, sans méconnaître le principe d'égalité de traitement des agents d'un même corps tant lors de leur recrutement que dans le déroulement de leur carrière, prévoir des modalités de reclassement différentes selon l'emploi occupé par les agents avant leur nomination ; que ni le décret susmentionné ni la décision attaquée n'ont méconnu le principe de mobilité entre les fonctions publiques posé à l'article 14 de la loi susvisée du 13 juillet 1983, laquelle s'effectue principalement par la voie du détachement suivi ou non d'intégration ; que, par suite, le décret précité et la décision attaquée n'ont méconnu aucune disposition législative ni aucun principe général du droit ; que l'administration n'était dès lors pas tenue de modifier les dispositions dudit décret ;
Considérant, enfin, qu'aucune des dispositions du décret du 23 décembre 1970 et du décret du 28 mai 1982 relatif aux commissions administratives paritaires ne fait obligation à l'administration de consulter ces commissions lorsqu'elles procèdent au calcul de l'ancienneté de service d'un fonctionnaire lors de son intégration dans un corps ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X... n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision en date du 24 septembre 1991 par laquelle le ministre de la défense a refusé de prendre en compte, lors de son intégration dans le corps supérieur des attachés des services administratifs du ministère de la défense, ses services antérieurs en qualité de sous-officier ;
Sur les conclusions tendant à ce qu'un délai soit fixé pour qu'une nouvelle décision soit prise :
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions susanalysées doivent être rejetées ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 11 juillet 1996 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Paris et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.