(4ème Chambre A)
VU, enregistrés au greffe de la cour, d'une part, les 10 février et 6 mai 1999, la requête et le mémoire complémentaire présentés par M. Pierre X..., demeurant ..., d'autre part le 25 mai 1999, le mémoire complémentaire en régularisation et rectification présenté pour M. X... par Me Y..., avocat ; M. X... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9415351/5 du 30 novembre 1998 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris en tant que celui-ci n'a fait que partiellement droit à sa demande en limitant à 3.000 F la somme que lui devait l'Etat au titre du remboursement des retenues opérées sur ses indemnités d'expatriation et de sujétions spéciales pour la période du 2 décembre 1990 au 31 janvier 1991 ;
2 ) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 44.046,08 F, déduction faite de la somme de 3.000 F accordée par le jugement, majorée des intérêts de droit ;
3 ) de condamner l'Etat, sur le fondement des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, à lui verser la somme de 5.000 F ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le décret n 78-571 du 25 avril 1978 fixant le régime de rémunération du personnel civil de coopération culturelle, scientifique et technique auprès de certains Etats étrangers, et notamment ses articles 5 et 7 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 juillet 2000 :
- le rapport de Melle PAYET, premier conseiller,
- et les conclusions de M. BROTONS, commissaire du Gouvernement ;
Considérant qu'en vertu des dispositions du décret n 78-571 du 25 avril 1978 susvisé fixant le régime de rémunération du personnel civil de coopération culturelle scientifique et technique auprès de certains Etats étrangers, notamment de ses articles 5 et 7, les personnels concernés perçoivent, outre leur rémunération et ses accessoires, une "indemnité d'expatriation et de sujétions spéciales" dont l'attribution est destinée à "compenser les sujétions et les conditions d'existence particulières aux lieux d'affectation", indemnité qui leur est acquise pendant toute la durée de leur emploi dans l'Etat où est accompli le service, "de la veille incluse de leur arrivée au lendemain inclus de leur départ"; qu'en vertu des dispositions de l'article 7, 5ème alinéa du même décret, lorsque les coopérants sont envoyés en mission en France ils ne perçoivent ladite indemnité au taux plein que durant les trente premiers jours de la durée de leur service en situation de mission, l'indemnité étant ensuite ramenée au taux de 30 % au-delà du trentième jour ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier, et qu'il n'est pas contesté, qu'à raison de troubles survenus à N'djamena, les agents de coopération technique, au nombre desquels se trouvait M. X..., furent rapatriés d'office par leur ministère le 2 décembre 1990 et ne reçurent l'ordre de rejoindre de nouveau leur poste au Tchad que le 28 décembre 1990 à l'exception toutefois de M. X... que son administration retint en France jusqu'au 31 janvier 1991, le temps nécessaire à la remise en état de son logement de fonction qui avait été saccagé et pillé ; que, pendant la durée de leur présence en France les coopérants rapatriés furent placés en position de "congé exceptionnel" et leur indemnité d'expatriation et de sujétions spéciales ramenée au taux de 30 % par une décision qui, à la demande de certains coopérants, fut infirmée par un jugement du 5 juillet 1993 du tribunal administratif de Paris ; que M. X... s'étant prévalu dudit jugement dans un recours administratif du 8 juin 1994, le ministère de la coopération y fit droit mais en le plaçant dans la même situation que les coopérants qui avaient rejoint leur poste le 28 décembre 1990, et ne régularisa sa situation pécuniaire que jusqu'à cette date par une décision qu'il lui notifia le 2 novembre 1994 ; que M. X... ayant déféré ladite décision à la censure du tribunal administratif de Paris le magistrat délégué fit droit à sa demande en annulant la décision litigieuse mais au motif que le taux plein indemnitaire lui était dû jusqu'au 31 décembre 1990 et non pas seulement jusqu'au 28 décembre, et lui alloua à ce titre la somme de 3.000 F tous intérêts compris par un jugement du 30 novembre 1998 dont l'intéressé fait appel ;
Considérant que, durant la période du 2 décembre 1990 au 31 janvier 1991, M. X... qui, ainsi qu'il est exposé plus haut, fut rapatrié sur ordre de son administration, s'est trouvé hors de l'Etat dans lequel il exerçait ses fonctions et s'est tenu constamment à la dispositions du ministère jusqu'à ce qu'il lui fut enjoint de regagner son poste au Tchad ; que, dans cette situation particulière de disponibilité aux ordres du gouvernement français M. X... se trouvait dans une position de service mais sans que pour autant celle-ci dusse être assimilée à une position de mission ; que, dans la mesure où aucune des dispositions du décret n 78-571 du 25 avril 1978 fixant le régime de rémunération du personnel civil de coopération culturelle, scientifique et technique auprès de certains Etats étrangers, ni aucun autre texte, ne prévoit que le coopérant doive, dans une telle situation, subir une quelconque réfaction sur le montant de l'indemnité d'expatriation et de sujétions spéciales, M.BOISSON a droit au remboursement des sommes indûment prélevées sur ladite indemnité durant la période du 2 décembre 1990 au 31 janvier 1991 ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. X... est fondé à demander la réformation du jugement attaqué en tant que celui-ci n'a fait que partiellement droit à sa demande en limitant le remboursement des sommes indûment prélevées sur l'indemnité d'expatriation et de sujétions spéciales à la période du 2 au 31 décembre 1990 ;
Sur le montant de l'indemnité :
Considérant que la cour ne trouve pas au dossier les textes réglementaires fixant le taux de l'indemnité d'exapatriation et de sujétions spéciales applicables au Tchad durant la période en cause ni les justifications des sommes précédemment versées à ce titre à M. X..., notamment en exécution du jugement attaqué ; qu'il y a lieu, par suite, de renvoyer l'intéressé devant son administration afin qu'il soit procédé à la régularisation de sa situation indemnitaire durant la période du 2 décembre 1990 au 31 janvier 1991 ;
Sur les intérêts :
Considérant que M. X... a droit aux intérêts des sommes devant lui être remboursées selon les modalités susénoncées, et ce, à compter du 31 juillet 1991, date à laquelle, en l'absence au dossier d'un accusé de réception de son recours administratif en date du 27 mai 1991, l'administration est réputée en avoir eu connaissance au plus tard à la date de sa réponse intervenue le 31 juillet 1991 ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation de sommes non comprises dans les dépens :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat, sur le fondement des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, à payer à M. X... la somme réclamée de 5.000 F ;
Article 1er : L'Etat est condamné à rembourser à M. X... les sommes indûment retenues sur l'indemnité d'expatriation et de sujétions spéciales qui lui étaient dues au titre de la période du 2 décembre 1990 au 31 janvier 1991.
Article 2 : Le jugement n 9415351/5 du 30 novembre 1998 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : M. X... est renvoyé devant l'administration pour qu'il soit procédé au calcul de ses droits dans les conditions indiquées à l'article 1er du présent arrêt, en tenant compte des sommes qui auraient pu lui être versées dans l'hypothèse où le jugement susmentionné aurait été exécuté. Les sommes dues porteront intérêts au taux légal à compter du 31 juillet 1991.
Article 4 : l'Etat est condamné, sur le fondement des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, à payer à M. X... la somme de 5.000 F.