Vu ( I ) la requête, enregistrée au greffe de la cour le 9 août 2002 et régularisée le 12 août 2002, sous le n° 02PA03005, présentée pour la société d'économie mixte d'aménagement et de gestion du marché d'intérêt national de la région parisienne ( SEMMARIS ), dont le siège social est situé 1, rue de la Tour, BP 316 à Chevilly-Larue ( Val-de-Marne), représentée par son président-directeur général en exercice, par Me CHASLOT, avocat ; la SEMMARIS demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 001946 et n° 021328 du 19 juillet 2002 du tribunal administratif de Melun en tant qu'il a annulé, à la demande de l'association Les riverains de la voie des laitières, de M. Frérot, de M. Y, de M. Z, de M. A, de M. B, de M. Chaleum, de M. D et de M. Bérard, le permis de construire quatre entrepôts agroalimentaires sur un terrain situé rue Charles Lindberg, R-D 65, à Chevilly-Larue (Val-de-Marne), que lui a délivré le Préfet du Val-de-Marne le 14 mars 2000 ;
Classement CNJ : 68-03-02-01
C+ 68-03-03-01-02
2°) de rejeter la demande présentée par les intimés devant le tribunal administratif de Melun ;
3°) de condamner solidairement les intimés à lui payer la somme de 5 000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu ( II ) le recours, enregistré au greffe de la cour le 27 août 2002 et régularisé le 29 août 2002, sous le n° 02PA03172, présenté par le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer ; le ministre demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 00 1946 et n° 02 1238 du 19 juillet 2002 du tribunal administratif de Melun en tant qu'il a annulé, à la demande de l'association Les riverains de la voie des laitières , de M. Frérot, de M. Y, de M. Z, de M. A, de M. B, de M. Chaleum, de M. D et de M. Bérard, le permis de construire quatre entrepôts agroalimentaires sur un terrain situé rue Charles Lindberg, R-D 65, à Chevilly-Larue ( Val-de- Marne), délivré le 14 mars 2000 par le préfet du Val-de-Marne à la SEMMARIS
2°) de rejeter la requête présentée par les intimés devant le tribunal administratif de Melun ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le décret n°77-1441 du 12 octobre 1977 modifié ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 septembre 2003 :
- le rapport de M. JARDIN, premier conseiller,
- les observations de Me CHASLOT, avocat, pour la Société SEMMARIS ; de Me POUILHE, avocat, pour l'Association Des riverains de la voie des laitières , pour M. Frérot, pour M. et Mme Y, pour M. et Mme Z, pour M. et Mme A, pour M. et Mme B, pour M. Chaleum, pour M. et Mme D, pour M. et Mme Bérard ;
- et les conclusions de M. DEMOUVEAUX, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que la requête enregistrée sous le numéro 02PA03005, présentée par la société d'économie mixte d'aménagement et de gestion du marché d'intérêt national de la région parisienne ( SEMMARIS), et le recours enregistré sous le numéro 02PA03172, présenté par le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, sont dirigés contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur la régularité du jugement
Considérant que la seule circonstance que l'exemplaire du jugement attaqué notifié à la SEMMARIS ne comporte pas les signatures exigées par l'article R.741-7 du code de justice administrative est sans incidence sur la régularité de la procédure à l'issue de laquelle le permis de construire litigieux a été annulé ; qu'il ressort au surplus des pièces du dossier de première instance que la minute du jugement est revêtue des signatures du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience, conformément aux prescriptions de l'article R.741-7 du code de justice administrative ;
Sur le bien-fondé du jugement
Considérant que l'article R.111-4 du code de l'urbanisme dispose : Le permis de construire peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à l'importance ou à la destination de l'immeuble ou de l'ensemble d'immeubles envisagé, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficiles la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie. Il peut également être refusé si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu, notamment de la position des accès, de leur configuration ainsi que de la nature et de l'intensité du trafic.(...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces produites en appel par le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, ainsi que par la SEMMARIS, et notamment des plans faisant apparaître la situation du poste de péage sur la voie parallèle à la rue Charles Lindberg donnant accès au terrain d'assiette du projet de construction, lesquels peuvent être pris en compte par la cour pour statuer sur le bien-fondé du moyen de légalité interne tiré de la violation de l'article R.111-4 du code de l'urbanisme alors même qu'ils ne figurent pas au dossier annexé à la demande de permis de construire, que les usagers des quatre entrepôts agroalimentaires dont la construction est autorisée par le permis de construire délivré à la SEMMARIS le 14 mars 2000 par le préfet du Val-de-Marne disposeront de deux voies de circulation pour franchir le poste de péage ; que, compte tenu des flux de circulation prévisibles, de la capacité d'accueil du poste de péage et de la longueur de la voie d'accès parallèle à la rue Charles Lindberg, il ne ressort pas des pièces du dossier que le fonctionnement du poste de péage est susceptible d'entraîner l'interruption de la circulation autour du rond-point de la RD 65 où convergent les voies publiques qu'emprunteront les usagers des immeubles à édifier ;que c'est dès lors à tort que le tribunal administratif de Melun a annulé le permis de construire litigieux en jugeant qu'il était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en raison de l'existence de risques de paralysie du trafic s'écoulant par ce rond-point ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les intimés en première instance et en appel ;
Considérant que l'article R.421-2 du code de l'urbanisme dispose : A- Le dossier joint à la demande de permis de construire comporte : (...) 8° L'étude d'impact, lorsqu'elle est exigée. ; qu'en vertu des dispositions combinées de l'article 3-C et du 9° de l'annexe III au décret susvisé du 12 octobre 1977,la procédure d'étude d'impact est applicable aux constructions soumises à permis de construire créant une superficie hors oeuvre nette supérieure à 5 000 mètres carrés sur le territoire d'une commune non dotée d'un plan d'occupation des sols à la date du dépôt de la demande ; que l'article 2 dudit décret dispose : Le contenu de l'étude d'impact doit être en relation avec l'importance des travaux et l'aménagement projetés et avec leurs incidences prévisibles sur l'environnement.
L'étude d'impact présente successivement :
1° Une analyse de l'état initial du site et de son environnement, portant notamment sur les richesses naturelles et les espaces naturels agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, affectés par les aménagements ou ouvrages ;
2° Une analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents du projet sur l'environnement, et en particulier sur la faune et la flore, les sites et paysages, le sol, l'eau, l'air, le climat, les milieux naturels et les équilibres biologiques, sur la protection des biens et du patrimoine culturel et, le cas échéant, sur la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuse) ou sur l'hygiène, la sécurité et la salubrité publique ;
3° Les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue des préoccupations d'environnement, parmi les partis envisagés, le projet présenté a été retenu ;
4° Les mesures envisagées par le maître de l'ouvrage ou le pétitionnaire pour supprimer, réduire et, si possible, compenser les conséquences dommageables du projet sur l'environnement, ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes ;
5° Une analyse des méthodes utilisées pour évaluer les effets du projet sur l'environnement mentionnant les difficultés éventuelles de nature technique ou scientifique rencontrées pour établir cette évaluation ;
Afin de faciliter la prise de connaissance par le public des informations contenues dans l'étude, celle-ci fera l'objet d'un résumé non technique.(...) ;
Considérant que le permis de construire litigieux, qui a pour objet la construction de bâtiments dont la surface hors-oeuvre nette s'élève à 43 739 m2 sur un terrain situé dans des zones du territoire des communes de Chevilly-Larue, Fresnes et Rungis où aucun plan d'occupation des sols n'est applicable, nécessite une étude d'impact ;
Considérant que, malgré l'importance de cette question, en raison de l'intensité des flux de circulation nouveaux entraînés par le fonctionnement quotidien des entrepôts à construire, évalués à 335 unités véhicule personnel en entrée à l'heure de pointe, l'étude d'impact, qui, d'ailleurs, pas plus que le dossier de la demande de permis de construire, ne contient de précision sur la localisation exacte du poste de péage, n'analyse pas les risques pour la sécurité publique susceptibles d'être créés par la présence du poste de péage à proximité du rond-point de la RD 65 si sa capacité d'accueil s'avère insuffisante ;
Considérant de plus que les flux de circulation de poids-lourds seront les plus denses en fin de nuit et en matinée alors qu'il existe des bâtiments à usage d'habitation, et notamment une zone pavillonnaire sur le territoire de la commune de Rungis, situés au voisinage des voies publiques d'accès aux entrepôts à construire ;que si l'étude d'impact, en exploitant les résultats de mesures effectuées sur vingt-quatre heures en 1994, affirme que le trafic routier supplémentaire dû au fonctionnement des entrepôts provoquera un niveau sonore dont l'émergence sera négligeable par rapport au bruit de fond, elle n'explicite pas de manière suffisamment détaillée les méthodes utilisées pour déterminer la variation de niveau sonore induite par l'augmentation du trafic routier ;
Considérant enfin qu'alors que les vestiges archéologiques font partie du patrimoine culturel, au sens du 2° de l'article 2 du décret précité du 12 octobre 1977 et que, selon l'avis du conservateur régional de l'archéologie d'Ile-de-France émis le 15 février 1999,le terrain d'assiette du projet de construction est susceptible de contenir des vestiges archéologiques protégés par les lois du 27 septembre 1941 et du 22 juillet 1992, l'étude d'impact ne contient aucun élément d'analyse des effets du projet sur ce point ;
Considérant qu'en raison des insuffisances susanalysées, l'étude d'impact ne satisfait pas aux prescriptions de l'article 2 du décret précité du 12 octobre 1977 ;
Considérant que l'article R.421-5-2 du code de l'urbanisme dispose : Lorsque les travaux projetés concernent des locaux autres que les établissements recevant du public et sont soumis aux règles d'accessibilité aux personnes handicapées fixées en application de l'article L.111-7 du code de la construction et de l'habitation, le dossier de la demande de permis de construire est complété par l'engagement du demandeur et, le cas échéant de l'architecte, de respecter lesdites règles. Cet engagement est assorti d'une notice décrivant les caractéristiques générales des locaux, installations et aménagements extérieurs au regard de ces règles d'accessibilité. ;
Considérant qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que les travaux projetés concerneraient des établissements recevant du public, au sens de l'article R 421-5-1 du code de l'urbanisme, contrairement à ce que soutient le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer ; qu'il est constant que l'engagement de la SEMMARIS de respecter les règles mentionnées à l'article R.421-5-2 du code de l'urbanisme n'a pas été joint au dossier de la demande de permis de construire ; que la pièce figurant audit dossier sous l'intitulé Notice fixant les mesures permettant l'accessibilité des personnes handicapées , ne portant d'ailleurs que la signature de l'architecte du projet, ne saurait à elle seule tenir lieu de l'engagement du pétitionnaire faisant défaut ; que cette irrégularité substantielle affectant la composition du dossier de la demande de permis de construire est également de nature à entacher d'illégalité l'acte attaqué ;
Considérant qu'aucun des autres moyens soulevés par les intimés ne paraît de nature, en l'état du dossier, à justifier l'annulation du permis de construire litigieux ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que ni la SEMMARIS, ni le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer ne sont fondés à se plaindre que c'est à tort que le tribunal administratif de Melun, par le jugement attaqué, a annulé le permis de construire délivré le 14 mars 2000 par le préfet du Val de Marne ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ;que les conclusions présentées à ce titre par la SEMMARIS doivent dès lors être rejetées ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat et la SEMMARIS à payer chacun la somme globale de 1000 euros à M. et Mme Y, à M. et Mme Z, à M. et Mme A, à M. et Mme Danniaud, à M. et Mme D, à M. et Mme Bérard, à M.Chaleum et à l'association Les riverains de la voie des Laitières au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête présentée par la SEMMARIS et le recours présenté par le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sont rejetés.
Article 2 : L'Etat et la SEMMARIS paieront chacun la somme globale de 1.000 euros à M. et Mme Y, à M. et Mme Z, à M. et Mme A, à M. et Mme Danniaud, à M. et Mme D, à M. et Mme Bérard, à M.Chaleum et à l'association Les riverains de la voie des Laitières en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
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