Vu, enregistrée le 13 juillet 2000 au greffe de la cour, la requête présentée pour la Société SODIANK ANTENNES ET SYSTEMES dont le siège social est ... le Buisson, par Me X..., avocat ; la Société SODIANK ANTENNES ET SYSTEMES demande à la cour :
1') d'annuler le jugement n° 9519535/1 en date du 26 avril 2000 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1987 et 1988 ainsi que des pénalités dont elles ont été assorties ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 20.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
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Classement CNIJ : 19-04-02-01-01-03
C
VU les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 novembre 2003 :
- le rapport de M. BOSSUROY, premier conseiller,
- les observations de Me X..., avocat, pour la Société SODIANK ANTENNES ET SYSTEMES,
- et les conclusions de M. MAGNARD, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que la Sarl SODIANK ANTENNES ET SYSTEMES, qui a pour objet la commercialisation d'antennes et de matériels électroniques de télécommunications fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des cotisations à l'impôt sur les sociétés qui ont été mises à sa charge au titre des années 1987 et 1988 à la suite de la remise en cause par l'administration de l'exonération prévue pour les entreprises nouvelles par l'article 44 quater du code général des impôts ;
Sur la régularité de la procédure suivie devant les premiers juges :
Considérant que le mémoire du directeur des services fiscaux de la région Ile-de-France-Ouest par lequel l'administration faisait état pour le première fois de ce que le service n'est tenu de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires que si le litige concerne une matière pour laquelle la commission est compétente en vertu de l'article L 59 A du livre des procédures fiscales a été adressé à la Sarl SODIANK ANTENNES ET SYSTEMES le 27 mars 2000, soit deux jours avant l'audience à laquelle était appelée l'affaire en cause ; que la Sarl SODIANK ANTENNES ET SYSTEMES n'a pas été mise en mesure de répondre à ce nouveau mémoire ; que, par suite, le caractère contradictoire de la procédure contentieuse n'a pas été respecté ; qu'ainsi le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 26 avril 2000 doit être annulé ;
Considérant qu'il a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la Sarl SODIANK ANTENNES ET SYSTEMES devant le tribunal administratif de Paris ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
En ce qui concerne la régularité de l'avis de vérification :
Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose à l'administration de viser dans l'avis de vérification de comptabilité prévu à l'article L 47 du livre des procédures fiscales, les dispositions de cet article ou de celles des articles L 10 et L 13 du même livre ; que contrairement à ce que soutient la Sarl SODIANK ANTENNES ET SYSTEMES, l'absence de mention de ces dispositions ne porte pas atteinte au caractère contradictoire de la procédure d'imposition ;
En ce qui concerne la régularité de la notification de redressement :
Considérant que, contrairement à ce que soutient la Sarl SODIANK ANTENNES ET SYSTEMES, l'administration pouvait, sans méconnaître les dispositions de l'article L 57 du livre des procédures fiscales ni le caractère contradictoire de la procédure d'imposition, s'abstenir de mentionner dans la notification de redressement adressée à l'intéressée les dispositions des articles L 10, L 13 et L 55 du même livre ;
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L 54 B du livre des procédures fiscales :
Considérant qu'aux termes de l'article L 54 B du livre des procédures fiscales : La notification d'une proposition de redressement doit mentionner, sous peine de nullité, que le contribuable a la faculté de se faire assister d'un conseil de son choix pour discuter la proposition de redressement ou pour y répondre ; que si les imprimés de notification adressés au requérant mentionnent que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix sans rappeler expressément que cette faculté a pour but de discuter la proposition de redressement ou d'y répondre, cette mention est assortie de l'indication de l'article du livre des procédures fiscales instaurant la garantie en cause et précédée de l'information que le contribuable dispose d'un délai de trente jours pour faire parvenir son acceptation ou ses observations sur les redressements effectués ; que l'objet auquel répond la faculté pour le contribuable de se faire assister par un conseil de son choix étant ainsi précisé, la requérante ne saurait soutenir avoir été privée d'une garantie ; qu'il ne résulte ni de la lettre des dispositions précitées ni des travaux parlementaires invoqués par la requérante que la sanction de nullité de la procédure d'imposition s'attacherait à la seule omission du membre de phrase susrappelé dans la proposition de redressement ; que la Sarl SODIANK ANTENNES ET SYSTEMES n'est pas fondée à se prévaloir de l'irrégularité de la procédure d'imposition au regard des dispositions combinées de l'article L 54 B et de l'article L 80 CA du livre des procédures fiscales ;
Considérant qu'à supposer même que les dispositions invoquées de la documentation administrative de base (13 L 1413 1er juillet 1989) puissent être regardées comme imposant la mention du membre de phrase susrappelé dans la proposition de redressement, cette instruction instituerait une règle de procédure nouvelle, non prévue par les dispositions du livre des procédures fiscales, que son auteur n'avait pas compétence pour instituer et serait ainsi contraire aux lois et règlements, au sens de l'article 1er du décret du 28 novembre 1983 ; que la Sarl SODIANK ANTENNES ET SYSTEMES n'est par suite et en tout état de cause pas fondée à s'en prévaloir sur le fondement de cet article ;
En ce qui concerne l'absence de mise en oeuvre de la procédure prévue à l'article L.64 du livre des procédures fiscales :
Considérant que lorsqu'elle conteste la qualité d'entreprise nouvelle au regard des dispositions de l'article 44 quater du code général des impôts, l'administration fiscale se borne à apprécier si l'entreprise remplit les conditions légales pour bénéficier de l'exonération qu'elles prévoient ; qu'une telle appréciation n'entre pas, par elle-même, dans le champ d'application de l'article L 64 du livre des procédures fiscales, qui permet notamment à l'administration de requalifier une opération en écartant les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses qui déguisent une réalisation ou un transfert de bénéfices ou de revenus ; que par suite la Sarl SODIANK ANTENNES ET SYSTEMES ne saurait valablement soutenir qu'en se fondant sur la circonstance que l'activité effective de l'intéressée, laquelle différait de l'activité revendiquée par celle-ci, la faisait échapper au bénéfice des dispositions de l'article 44 quater du code général des impôts, le service se serait fondé implicitement mais nécessairement sur un abus de droit commis par le contribuable, sans le faire bénéficier des garanties de procédure prévues dans cette hypothèse ;
En ce qui concerne l'absence de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires :
Considérant qu'aux termes de l'article L 59 du livre des procédures fiscales : Lorsque le désaccord persiste sur les redressements notifiés, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis... de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires... ; qu'aux termes de l'article L 59 A du même livre : La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient : 1° Lorsque le désaccord porte... sur le montant du bénéfice industriel et commercial, ...déterminé selon un mode réel d'imposition... ;
Considérant que le différend qui opposait à l'administration la société SODIANK ANTENNES ET SYSTEMES, après réception par celle-ci de la réponse aux observations du contribuable du 23 octobre 1990, portait exclusivement sur la remise en cause du régime d'exonération d'imposition à l'impôt sur les sociétés des bénéfices des années 1987 et 1988, et n'entrait donc pas dans le champ de la compétence de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires tel que défini par les dispositions précitées de l'article L 59 A du livre des procédures fiscales ; qu'ainsi, l'absence de saisine de l'instance consultative n'a pas entaché d'irrégularité la procédure contradictoire appliquée au redressement en cause, alors même que le désaccord aurait porté sur l'appréciation ou la matérialité des faits motivant ce dernier ;
En ce qui concerne la régularité de la décision d'homologation du rôle :
Considérant qu'il résulte de la copie de la décision d'homologation du rôle produite au dossier que les cotisations à l'impôt sur les sociétés mises à la charge de la société SODIANK ANTENNES ET SYSTEMES au titre des années 1987 et 1988 ont été établies par voie de rôle mis en recouvrement le 31 décembre 1993 et homologué par décision en date du 20 décembre 1993 ; que la société SODIANK ANTENNES ET SYSTEMES ne saurait utilement se prévaloir de la différence entre le nombre d'articles et le montant d'impositions afférent au rôle litigieux mentionnés dans ladite décision et le nombre d'articles et le montant d'impositions également mentionnés dans ladite décision mais cumulés au 20 décembre 1993, pour soutenir que cette décision serait entachée d'irrégularité ;
Sur la prescription :
Considérant que la date de la mise en recouvrement de l'impôt établi par voie de rôle est celle de la décision administrative homologuant le rôle conformément aux dispositions de l'article 1659 du code général des impôts et non celle de la réception de l'avertissement délivré au contribuable ; qu'il résulte de l'instruction que le rôle dans lequel sont comprises les cotisations d'impôt sur les sociétés litigieuses a été mis en recouvrement le 31 décembre 1993, date à laquelle expirait le délai de prescription ; que, dès lors, l'imposition litigieuse a été régulièrement établie nonobstant la circonstance que l'avis d'imposition correspondant, dont la régularité et les modalités de notification sont sans influence sur la régularité de l'imposition, ne serait parvenu à l'intéressée qu'après l'expiration du délai ; que le moyen tiré de ce que seule la réception de l'avis d'imposition peut interrompre la prescription à l'égard du contribuable doit donc être écarté, sans que la société requérante puisse utilement invoquer les règles applicables en matière de taxe sur la valeur ajoutée ; que les modalités ainsi définies établissement des impôts directs ne méconnaissent, en tout état de cause, ni la règle de l'égalité des armes ni les principes de sécurité juridique et de confiance légitime ;
Sur l'application du régime des entreprises nouvelles :
Considérant qu'aux termes des dispositions du 1er alinéa de l'article 44 quater du code général des impôts : Les entreprises créées du 1er janvier 1983 au 31 décembre 1986, soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d'imposition de leurs résultats et répondant aux conditions prévues à l'article 44 bis II, 2° et 3°, et III, sont exonérées d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices industriels et commerciaux qu'elles réalisent à compter de la date de leur création jusqu'au trente -cinquième mois suivant celui au cours duquel cette création est intervenue... ; que le III du même article dispose que : Les entreprises créées dans le cadre d'une concentration ou d'une restructuration d'activités préexistantes ou pour la reprise de telles activités, ne peuvent bénéficier de l'abattement ci-dessus... ;
Considérant que l'activité de la société SODIANK ANTENNES ET SYSTEMES dans les années qui ont suivi sa création a été consacrée pour partie à la vente en France des produits de la société Y... ; qu'il n'est en outre pas sérieusement contesté que le reste de son activité était consacré à la vente de produits de même nature que ceux fabriqués par ladite société ; que M. Z..., gérant de la société SODIANK ANTENNES ET SYSTEMES exerçait avant la création de cette dernière l'activité de représentant en France de la société Y..., dont il commercialisait les produits ; que M. Y..., propriétaire de cette dernière société, détient 51 % des parts de la société SODIANK ANTENNES ET SYSTEMES ; qu'il suit de là que la société SODIANK ANTENNES ET SYSTEMES doit être regardée comme une entreprise créée dans le cadre d'une restructuration d'activités préexistantes, au sens du III de l'article 44 bis du code général des impôts ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société SODIANK ANTENNES ET SYSTEMES n'est pas fondée à demander la décharge des cotisations à l'impôt sur les sociétés qui ont été mises à sa charge au titre des années 1987 et 1988 ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant qu'aux termes de l'article L 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire droit à la demande de la société SODIANK ANTENNES ET SYSTEMES ;
D E C I D E
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 26 avril 2000 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la société SODIANK ANTENNES ET SYSTEMES devant le tribunal administratif de Paris et le surplus des conclusions de sa requête devant la cour sont rejetés.
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00PA02176