Vu la requête enregistrée le 10 février 2004, présentée par Mme X épouse Menyié Nga élisant domicile ... par Me Afoua-Geay ; Mme X demande à la cour d'annuler le jugement du 5 novembre 2003 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet du préfet du Val-de-Marne en date du 12 juillet 2001 contre l'arrêté du 9 mai 2001 par laquelle il a refusé de lui accorder un titre de séjour ; dans la présente instance en appel, elle conclut à l'annulation de la décision de refus de séjour du 9 mai 2001 et demande qu'il soit enjoint au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de 30 jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et à la condamnation de l'État à lui verser la somme de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance 45 - 2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 mai 2006 :
- le rapport de M. Treyssac, rapporteur,
- et les conclusions de Mme Giraudon, commissaire du gouvernement ;
Considérant que par arrêté en date du 9 mai 2001 le préfet du Val-de-Marne a refusé l'admission au séjour de Mme Gisèle X, ressortissante camerounaise ; qu'à la suite du recours gracieux qu'elle a formé le 12 juillet 2001, une décision implicite de rejet est née du silence gardé par le préfet du Val-de-Marne sur ce recours ; qu'elle a demandé au Tribunal administratif de Melun l'annulation de ladite décision implicite de rejet, ensemble l'arrêté du 9 mai 2001 ; que par jugement du 5 novembre 2003 le Tribunal d'administratif de Melun a rejeté sa demande au motif que la décision attaquée n'était pas entachée d'illégalité au regard des dispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée alors applicable : «Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit (…) 7° à l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus(…) » ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1°Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la requérante, entrée en France en octobre 1990 munie d'un visa de court séjour, a donné naissance à quatre enfants dont les deux premiers sont nés respectivement en 1985 et en 1987 au Cameroun, les deux derniers en 1991 et en 1995 sur le territoire national solarisés dans des établissements français et n'ayant pas quitté le territoire français depuis 1990 ; qu'elle est séparée de son mari qui est retourné au Cameroun ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, le préfet du Val-de-Marne a, en rejetant sa demande de titre de séjour, porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect à une « vie privée et familiale » normale en méconnaissance des dispositions de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée, ainsi à celle de l'article 12 bis 7° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ;
Considérant qu'il suit de ce qui précède que Mme X épouse Y est fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Melun, a, par jugement du 5 novembre 2003, rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 9 mai 2001 par laquelle le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour ; qu'il s'ensuit que le jugement entrepris doit être annulé ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant qu'il y a lieu de faire droit aux conclusions de la requérante en enjoignant au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention « vie privée familiale » dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions relatives à l'application de l'article L. 761 -1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761 - 1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat le paiement à Mme X la somme de 1500 euros au titre des frais qu'elle a exposés dans le cadre de la présente procédure et qui ne sont pas compris dans les dépens ;
DECIDE
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Melun du 5 novembre 2003 est annulé.
Article 2 : La décision du préfet du Val-de-Marne du 9 mai 2001 refusant la délivrance d'un titre de séjour à Mme X épouse Y est annulée.
Article 3 : Il est enjoint au préfet du Val-de-Marne de délivrer à Mme X épouse Y un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : : L'Etat (préfet du Val-de-Marne) versera à Mme X épouse Y la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761 - 1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme ANGUE MVO épouse Y est rejeté.
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N° 01PA02043
SOCIETE EUROSIC
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N° 04PA00531