Vu la requête, enregistrée le 14 mars 2003 au greffe de la cour, présentée pour la SA KRS INVESTISSEMENTS, venant aux droits de la SA PELETIER HAUSSMANN, dont le siège social est situé 31, Avenue de Wagram à Paris 75008, par Me SOLLIER, avocat ; la SA KRS INVESTISSEMENTS demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9616479/1 en date du 14 janvier 2003 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles la SA PELETIER HAUSSMANN a été assujettie au titre des années 1989 à 1991 mises en recouvrement le 31 mars 1995 ;
2°) de lui accorder la décharge des impositions contestées ;
3°) de lui accorder la somme de 1500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu à l'audience publique du 23 juin 2006 :
- le rapport de Mme Evgenas, rapporteur,
- les observations de Me Rue du Can, pour la SA KRS INVESTISSEMENTS,
- et les conclusions de M. Bataille, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité de la SA PELETIER HAUSSMANN, l'administration a remis en cause l'imputation, sur les exercices non prescrits 1989 et 1990, des déficits et amortissements réputés différés des exercices prescrits 1984 à 1986 après avoir réintégré auxdits exercices le montant des apports en espèces en compte courant regardés comme injustifiés effectués par M. X, dirigeant et associé de la société ; qu'elle a en outre, réintégré aux résultats imposables des exercices 1989 à 1991, le montant des intérêts de l'emprunt de 567 000 F contracté en 1989 par la société pour rembourser le solde créditeur du compte courant de M. X ; que la SA KRS INVESTISSEMENTS, venant aux droits de la SA PELETIER HAUSSMANN, demande la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés en résultant au titre des années 1989 à 1991 ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : « L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. » ;
Considérant que la notification de redressement du 11 décembre 1992 adressée à la SA PELETIER HAUSSMANN rappelle les conditions du droit de contrôle de l'administration sur les exercices prescrits, indique, date par date, les apports en compte courant de M. X considérés comme injustifiés au titre des années prescrites 1984 à 1986, précise, pour ces années, le montant rectifié de déficits reportables en avant et d'amortissements réputés différés et conclut en relevant que le montant du déficit reportable à la clôture de la période prescrite, soit au 31décembre 1986, est de 0 ; qu'un tableau récapitulatif retrace, enfin, les conséquences de l'annulation de ces déficits sur les exercices non prescrits 1989 et 1990 en précisant le montant des redressements et le résultat fiscal rectifié ; que si la société requérante fait valoir que les conséquences de cette remise en cause sur les années 1987 et 1988 ne sont pas mentionnées, il résulte de l'instruction que les résultats de ces années n'ont pas été modifiés ; qu'ainsi contrairement à ce que soutient la SA KRS INVESTISSEMENTS, l'administration a exposé les éléments de fait et de droit permettant à la SA PELETIER HAUSSMANN de formuler utilement ses observations ; que le moyen tiré du défaut de motivation doit donc être écarté ;
Sur le bien fondé :
En ce qui concerne la remise en cause sur 1989 et 1990 de l'imputation des déficits des années 1984 à 1986 :
Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts : « 2. le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt …l'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiées » ;
Considérant, en premier lieu, que l'administration a réintégré aux résultats imposables des exercices prescrits 1984 à 1986, le montant des apports en espèces en compte courant effectués par M. X, dirigeant et associé de la société, pour les montants de 464 000 F en 1984, 478 500 F en 1985 et 388 000 F en 1986 ; que si la société requérante a produit quelques bordereaux bancaires de remises d'espèces indiquant que les versements émanaient de M. X, des notes manuscrites d'un employé faisant état de remises d'espèces par M. X et des attestations du commissaire aux comptes, établies a posteriori en 1994, indiquant que des sommes ont été portées au crédit du compte courant et précisant le montant du solde à chaque fin d'exercice, elle n'a produit aucun document permettant d'établir l'origine des apports comme provenant bien de fonds personnels de M. X ; que la délibération du conseil d'administration de la société du 29 novembre 1984 faisant état de la souscription au capital par M. X pour une somme de 200 000 F par compensation avec son compte courant et celle du 15 mars 1989 indiquant que l'intéressé souhaite le remboursement de son compte courant pour 567 000 F et qu'un emprunt va être contracté, n'apportent pas davantage de justifications sur l'origine des fonds ; que la circonstance que la comptabilité n'a pas été écartée comme non probante n'exonère pas la société de justifier de la réalité et du montant des dettes qu'elle constate ; que dans ces conditions, la SA PELETIER HAUSSMANN n'ayant pas justifié de la réalité de sa dette, c'est à bon droit que l'administration a réintégré lesdits apports aux résultats imposables des exercices prescrits 1984 à 1986 et a annulé, par voie de conséquence, les déficits de ces exercices reportés et imputés sur les exercices non prescrits 1989 et 1990 ;
Considérant, en deuxième lieu, que la SA KRS INVESTISSEMENTS fait valoir que l'administration n'était pas en droit de réintégrer aux résultats des exercices prescrits les apports en compte courant de M. X regardés comme injustifiés mais la seule variation du solde créditeur du compte qui, en vertu de l'article 38-2 du code général des impôts aurait seule affecté le bénéfice net de chaque exercice ; que toutefois, ces écritures d'apport litigieuses ont entraîné, à due concurrence, la détermination d'un solde erroné du compte courant de M. X et ont, de ce fait, directement influé sur l'actif net et donc sur le bénéfice net de la société ; que l'administration pouvait ainsi valablement rectifier à hauteur de ces versements injustifiés le montant des résultats imposables des exercices prescrits et, par voie de conséquence, réduire le montant des déficits reportables sur les exercices 1989 et 1990 non prescrits ;
Considérant, en troisième lieu, que la SA KRS INVESTISSEMENTS fait valoir que le mécanisme de la correction symétrique des bilans fait obstacle à ce que l'administration remette en cause, sur les exercices non prescrits 1989 et 1990, la dette de la société à l'égard de M. X, pour un montant de 567 000 F, constituée par le solde créditeur de son compte courant figurant au passif du bilan au 31 décembre 1988 dès lors que cette dette ne figurait ni au passif du 1er exercice de la période prescrite, au 1er janvier 1984, ni au passif du dernier exercice de la période non prescrite, au 31 décembre 1991, ayant été annulée par le remboursement opéré par la société courant 1989 ; que toutefois, l'administration n'a pas remis en cause, au titre des exercices non prescrits 1989 et 1990, la régularité de l'écriture de passif elle-même qui ne figurait d'ailleurs plus aux bilans de clôture de ces exercices mais a procédé à l'annulation, sur les résultats imposables de cette période, de l'imputation des déficits reportables en avant constatés au titre de la période prescrite du 1er janvier 1984 au 31 décembre 1986 et qui avaient été déterminés en tenant compte des écritures d'apport en compte courant de M. X considérées comme injustifiées ; que dès lors, la société requérante ne saurait utilement opposer la circonstance que la dette de la société à l'égard de M. X, pour un montant de 567 000 F ne figurait plus aux passifs des bilans de clôture des exercices non prescrits ;
En ce qui concerne la remise en cause sur 1989 à 1991 de la déduction des intérêts d'emprunt :
Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu du 1 de l'article 209 du même code : Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (…) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (…) ; qu'il appartient au contribuable de justifier de la réalité et du montant des frais dont il demande la déduction ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a réintégré aux résultats des exercices non prescrits 1989 à 1991, les intérêts d'un montant de 48 960 F en 1989, 49 321 F en 1990 et 37 909 F en 1991 de l'emprunt contracté en 1989 par la SA PELETIER HAUSSMANN pour rembourser sa dette constituée par le solde créditeur du compte courant de M. X d'un montant de 567 000 F au 1er janvier 1989 ; qu'ainsi qu'il vient d'être rappelé, la SA PELETIER HAUSSMANN n'a pas justifié des apports en espèces effectués par son dirigeant et donc de la réalité de cette dette ; que par suite, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause la déduction des intérêts afférents à l'emprunt destiné à la rembourser, dépenses qui ne pouvaient être regardées comme exposées dans l'intérêt de l'exploitation ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SA KRS INVESTISSEMENTS, venant aux droits de la SA PELETIER HAUSSMANN, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions de la SA KRS INVESTISSEMENTS tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante verse à la SA KRS INVESTISSEMENTS la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la SA KRS INVESTISSEMENTS est rejetée.
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N° 03PA01164