Vu la requête, enregistrée le 20 juin 2005, présentée pour Mme Françoise X, demeurant ..., par Me Ledoux ; Mme X demande à la cour :
1°) d'infirmer le jugement n° 0115214/6-1 en date du 19 avril 2005 du Tribunal administratif de Paris en ce qu'il n'a pas fait une juste appréciation du préjudice que lui a causé sa contamination par le virus de l'hépatite C ;
2°) de condamner l'Etablissement français du sang à lui verser la somme de
304 900 euros en réparation de son préjudice spécifique de contamination ;
3°) de mettre à la charge de l'Etablissement français du sang la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 52-854 du 21 janvier 1952 modifiée relative aux établissements agréés en vue de la préparation des produits sanguins ;
Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, notamment son article 102 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 octobre 2006 :
- le rapport de Mme Pierart, rapporteur,
- les observations de Me Perinetti, pour l'Etablissement français du sang,
- et les conclusions de Mme Folscheid, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme X, née en 1941, a reçu par transfusion de nombreux produits sanguins labiles, au cours des opérations de la hanche qu'elle a subies en 1985 dans le service d'orthopédie de l'hôpital Cochin, qui ont été à l'origine de sa contamination par le virus de l'hépatite C découverte à l'occasion d'une sérologie pratiquée en 1997 ; que le Tribunal administratif de Paris, par jugement du 19 avril 2005, a déclaré responsable l'Etablissement français du sang qui a succédé dans les droits et obligations de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris prise en qualité de gestionnaire de centres de transfusion sanguine et l'a condamné à la réparation des préjudices subis par Mme X ; que cette dernière fait appel de ce jugement en ce qu'elle estime très insuffisant le montant de 18 000 euros qui lui a été alloué par les premiers juges ; que l'Etablissement français du sang conclut au rejet de la requête de Mme X et demande la confirmation du jugement attaqué en toutes ses dispositions ;
Sur la fin de non recevoir soulevée par l'Etablissement français du sang :
Considérant que la requête d'appel présentée pour Mme X, dirigée contre le jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 19 avril 2005, a été enregistrée au greffe de la cour le 20 juin 2005 ; qu'une copie du jugement attaqué portant également mention de la date d'enregistrement du 20 juin 2005 figure au dossier ; qu'ainsi le moyen invoqué par l'Etablissement français du sang, tiré de ce que ladite requête n'était pas accompagnée de la décision attaquée manque en fait ; que par suite la fin de non recevoir susvisée ne peut qu'être écartée ;
Sur la réparation :
Considérant que la contamination par le virus de l'hépatite C peut n'entraîner aucune maladie et aucun symptôme ; qu'elle n'est pas irréversible, un certain nombre de personnes contaminées guérissant spontanément ou après traitement ; que les effets d'une hépatite chronique varient considérablement d'une personne à l'autre et que cette maladie n'évolue fatalement que dans un nombre limité de cas ; qu'ainsi Mme X ne saurait se prévaloir d'un préjudice du seul fait de sa contamination par le virus de l'hépatite C ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que
Mme X présente une hépatite chronique d'activité minime avec fibrose portale très peu extensive ; qu'elle a suivi un traitement par bithérapie à compter de janvier 2003 qu'elle a du interrompre en avril 2003 en raison de la mauvaise tolérance et des nombreux effets secondaires liés à ce traitement ; que celui-ci a en effet provoqué chez l'intéressée des céphalées, des douleurs articulaires, des syndromes grippaux, des nausées et des troubles du sommeil ; que l'expert a évalué à 3 sur une échelle de 1 à 7 le pretium doloris dû aux examens et traitements, incluant une ponction hépatique douloureuse ; qu'il a fixé à 2 sur une même échelle le préjudice esthétique lié à un amaigrissement très important, un prurit, des lésions cutanées et des ecchymoses aux points d'injection, la perte des cheveux et un vieillissement prématuré ; que l'asthénie modérée et l'état de fatigue permanent dont souffre la requérante perturbent sa vie personnelle et sont à l'origine d'un préjudice d'agrément auquel s'ajoutent les souffrances morales dues aux incertitudes et aux inquiétudes légitimes qu'elle éprouve quant à l'évolution de son hépatite ; que la recherche d'ARN du virus de l'hépatite C reste positive ; que, toutefois, si l'expert a noté chez Mme X de lourdes séquelles de sa pathologie orthopédique congénitale, il n'a relevé, lors de l'examen pratiqué le 4 mars 2004, aucun signe pathologique pouvant se rapporter à l'hépatite C dont elle est atteinte ; que, compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, les premiers juges n'ont pas fait une inexacte appréciation de l'ensemble des troubles subis par Mme X dans ses conditions d'existence du fait de sa contamination en fixant à 18 000 euros l'indemnité qu'il a condamnée l'Etablissement français du sang à lui verser de ce chef ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etablissement français du sang, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à
Mme X la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.
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N° 05PA02461