La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/10/2006 | FRANCE | N°06PA01220

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, Juge des reconduites a la frontiere, 24 octobre 2006, 06PA01220


Vu la requête, enregistrée le 4 avril 2006, présentée pour M. Ibrahima X, demeurant chez M. David X ...), par Me Levildier ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0600639/8 du 17 février 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 5 janvier 2006 décidant sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une autorisation provisoir

e de séjour sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l...

Vu la requête, enregistrée le 4 avril 2006, présentée pour M. Ibrahima X, demeurant chez M. David X ...), par Me Levildier ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0600639/8 du 17 février 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 5 janvier 2006 décidant sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du 1er septembre 2006 par laquelle le président de la cour a délégué les pouvoirs qui lui sont attribués par l'article L.512-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à M. Jannin ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 octobre 2006 :

- le rapport de M. Jannin, magistrat délégué,

- les observations de Me Levildier, pour M. X,

- et les conclusions de Mme Giraudon, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;

Considérant que M. X, ressortissant ivoirien, déclare sans être contredit avoir contracté en décembre 2001 un mariage coutumier avec une compatriote et être entré en France le 18 janvier 2002 ; que son épouse l'y a rejoint le 1er novembre 2002 avec leur premier enfant né le 24 avril 2002 ; qu'un deuxième enfant est né en France le 17 novembre 2003 et un troisième était attendu à la date de l'arrêté du préfet de police du 5 janvier 2006 décidant la reconduite à la frontière de l'intéressé ; que Mme X a obtenu le 22 mai 2003 la délivrance d'une carte de résident valable jusqu'au 21 mai 2013 ; que l'existence de la communauté de vie entre les époux est suffisamment établie par les pièces du dossier ; que, dans ces circonstances, alors même que M. X ne serait pas complètement dépourvu d'attaches dans son pays d'origine, et dès lors qu'il n'est pas établi qu'il pourrait bénéficier d'un regroupement familial, l'arrêté attaqué du 5 janvier 2006 a porté à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et a ainsi méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que M. X est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 janvier 2006 par lequel le préfet de police a ordonné sa reconduite à la frontière ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé, … l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas » ; qu'il y a lieu, par application de cette disposition, d'ordonner au préfet de police de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. X et de se prononcer sur son droit à un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les frais irrépétibles :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. X la somme de 1000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 17 février 2006 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 5 janvier 2006 du préfet de police ordonnant la reconduite à la frontière de M.X sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M. X une autorisation provisoire de séjour et de statuer sur son droit à un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. X la somme de 1000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

N°06PA01220

3


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : Juge des reconduites a la frontiere
Numéro d'arrêt : 06PA01220
Date de la décision : 24/10/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. le Prés François JANNIN
Rapporteur public ?: Mme GIRAUDON
Avocat(s) : LEVILDIER

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-10-24;06pa01220 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award