Vu la requête, enregistrée le 18 avril 2006, présentée pour M. Moussa X, demeurant chez M. Sekou X ...), par Me El Abdouli ; M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0601286-9 du 10 mars 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 20 février 2006 décidant sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du 1er septembre 2006 par laquelle le président de la cour a délégué les pouvoirs qui lui sont attribués par l'article L.512-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à M. Jannin ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 octobre 2006 :
- le rapport de M. Jannin, magistrat délégué,
- et les conclusions de Mme Giraudon, commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité malienne, est entré en France en 2001 à l'âge de seize ans pour rejoindre sa soeur, titulaire d'une carte de résident, et son frère, titulaire d'une carte de séjour temporaire vie privée et familiale, chez qui il habite ; qu'il a entrepris en France des études qui lui ont permis d'obtenir un certificat d'aptitude professionnelle en juin 2005 et préparait, à la date de l'arrêté attaqué du préfet de police du 20 février 2006 ordonnant sa reconduite à la frontière, un brevet d'études professionnelles au lycée Fernand-Léger d'Ivry-sur-Seine ; qu'il n'est pas établi que, depuis le décès de sa mère survenu en 1999, il ait conservé des attaches familiales au Mali, à l'exception de son père handicapé et indigent ; que, dans ces circonstances, bien que l'intéressé soit majeur, célibataire et sans enfants, l'arrêté par lequel le préfet du Val-de-Marne a ordonné sa reconduite à la frontière a porté à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et a ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que M. X est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation dudit arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé, … l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas » ; qu'il y a lieu, par application de cette disposition, d'ordonner au préfet du Val-de-Marne de réexaminer la situation de M. X dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;
Sur les frais irrépétibles :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. X la somme de 1000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du 10 mars 2006 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Melun et l'arrêté du 20 février 2006 du préfet du Val-de-Marne ordonnant la reconduite à la frontière de M. X sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Val-de-Marne de réexaminer la situation de M. X dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. X la somme de 1000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.
N° 06PA01395 3