Vu la requête, enregistrée le 19 juillet 2004, présentée pour la SNC ROBE, ayant son siège 22 rue Bayen à Paris (75017), représentée par son gérant, M. Rochelois, par Me Verdier, ainsi que pour M. ROCHELOIS, également représenté par Me Verdier ; la SNC ROBE et M. ROCHELOIS demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9710585/1 du 17 mai 2004 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande en décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels M. ROCHELOIS a été assujetti au titre des années 1990 à 1992 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 décembre 2006 :
- le rapport de M. Vincelet, rapporteur,
- et les conclusions de M. Jardin, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'à l'issue de le vérification de comptabilité de la société en nom collectif ROBE dont il était l'associé et le gérant, M. ROCHELOIS a été assujetti au titre des années 1990 à 1992 et au prorata de sa participation, à des compléments d'impôt sur le revenu résultant de la remise en cause par le vérificateur, de provisions constituées à la clôture des mêmes exercices ; que M. ROCHELOIS et la SNC ROBE relèvent appel du jugement en date du 17 mai 2004 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande en décharge de ces impositions présentée par M. ROCHELOIS ;
Sans qu'il y ait lieu d'examiner la recevabilité de la requête en tant qu'elle émane de la SNC ROBE ;
Sur la régularité de la vérification :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : « Un examen contradictoire… ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. Cet avis doit … mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix » ;
Considérant que le vérificateur a fait parvenir à la SNC ROBE, le 1er décembre 2003, un avis conforme aux dispositions précitées lequel, d'une part, l'informait qu'il allait être procédé à la vérification de sa comptabilité des exercices 1991, 1992 et 1993 et d'autre part fixait au 13 décembre la date de sa première intervention sur place ;
Considérant, en premier lieu, que ledit avis a régulièrement été notifié au 28 rue Boissy d'Anglas à Paris (8ème), qui était la dernière adresse du siège de la société, alors connue du service ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des mentions de l'accusé de réception signé, produit par le ministre, que le pli contenant l'avis a été présenté au siège de la société le 2 décembre 2003 puis distribué le 3 décembre suivant ; qu'ainsi l'administration établit avoir respecté les prescriptions de l'article L. 47 précité du livre des procédures fiscales, en laissant notamment au contribuable un délai suffisant pour se faire assister d'un conseil ; qu'est sans incidence la circonstance que l'exemplaire de l'accusé de réception en possession de la société n'est pas signé ;
Considérant, en troisième lieu, que, faute d'apporter aucune précision sur l'identité de la personne signataire de l'avis litigieux ni de dresser la liste des personnes qui, en l'absence de toute habilitation, auraient eu néanmoins qualité pour signer un tel avis, le requérant ne peut être regardé comme établissant, ainsi qu'il lui appartient de le faire, que le signataire de l'avis n'avait pas qualité pour recevoir le pli dont il s'agit ; que cette preuve ne saurait résulter des seuls témoignages des associés et salariés de la société, au demeurant postérieurs de près de quatre ans à la notification du pli ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant que la SNC ROBE, qui a pour objet la gestion d'un ensemble immobilier à usage de bureaux, a conclu le 29 décembre 1989 un contrat de crédit bail en vertu duquel elle prenait en location, pour une durée de quinze ans courant à compter du 1er juillet 1991, un immeuble sis 22 rue Bayen à Paris (17ème), alors en l'état futur d'achèvement ; que cette convention, qui a fait l'objet d'avenants ultérieurs, était assortie d'une option d'acquisition en faveur du preneur et mettait à sa charge un montant total de redevances de 347 000 F, l'immeuble étant évalué à 165 000 F ; qu'à compter du 1er juillet 1991, la SNC ROBE donna l'immeuble en location à une société civile professionnelle de notaires également gérée par M. ROCHELOIS ;
Considérant qu'au titre de l'exercice 1990, la SNC ROBE constitua deux provisions pour un montant total de 51 000 000 F correspondant, selon la note annexée à sa déclaration de résultats, d'une part à concurrence de 26 700 000 F à un litige né du procès en cours contre les promoteurs et constructeurs de l'immeuble, d'autre part à concurrence de 24 300 000 F à des charges dues aux sociétés Fructibail et Axamur, qui assuraient le financement du crédit bail ; qu'au cours de l'exercice 1991, la provision fut qualifiée dans la même annexe de «charges financières dues aux sociétés Fructibail et Axamur» et son total porté à la somme de 53 690 000 F après prise en compte de la baisse transactionnelle du prix de l'immeuble et de la chute persistante du marché immobilier, ainsi que des redevances versées ; que cette somme fut ramenée à 50 629 000 F en 1992, compte tenu des nouvelles redevances versées ;
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : «1°) Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant… notamment : 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des évènements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient effectivement été constatées dans les écritures de l'exercice» ;
Considérant qu'il résulte de l'intitulé des provisions litigieuses, éclairé par les explications de la société au cours de la procédure de redressement, qu'elles étaient destinées à prévenir la perte financière induite par le coût trop élevé des redevances de crédit bail en raison de la dévalorisation ultérieure de l'immeuble résultant à la fois de la baisse du marché immobilier et de la non conformité partielle du bâtiment à sa destination initiale ; que, toutefois, la société, qui n'avait pas levé l'option dont elle disposait pour l'achat de l'immeuble et n'avait pas immobilisé celui-ci à l'actif de son bilan, ne pouvait légalement en provisionner la dépréciation ;
Considérant, par ailleurs, que devant la cour, M. ROCHELOIS entend justifier dans sa totalité la provision litigieuse par l'anticipation du risque probable de charge auquel la SNC ROBE s'était estimée exposée envers ses partenaires au contrat de crédit bail en raison de la responsabilité pesant contractuellement sur le preneur, des conséquences du non respect des règles d'urbanisme ainsi que de l'impossibilité, même partielle, d'utiliser l'immeuble conformément aux stipulations de la convention ;
Considérant, d'une part que M. ROCHELOIS peut, eu égard au libellé susrappelé des provisions, notamment au titre de l'exercice 1991, présenter cette nouvelle justification ;
Considérant, d'autre part et toutefois, que les articles incriminés du contrat de crédit-bail ne faisaient que permettre au crédit bailleur de demander la résiliation du bail aux torts du preneur ainsi qu'une indemnité, dans le cas où ce dernier n'userait pas du bien conformément à sa destination ; que cette seule virtualité n'entraînait en elle même aucun risque probable de condamnation, en l'absence de toute instance engagée contre la société avant la clôture des exercices concernés ;
Considérant, enfin, compte tenu de ce qui précède, que le contribuable n'établit l'existence d'aucun des deux risques de perte ou de charge auxquels la société se serait successivement sentie exposée ; qu'il ne prouve en conséquence pas le bien fondé des provisions litigieuses et que c'est dès lors, à bon droit, que le vérificateur en a réintégré le montant dans les résultats des exercices concernés ;
Sur les pénalités :
Considérant que le montant des provisions constituées à tort par la SNC ROBE a été imputé par M. ROCHELOIS sur son revenu global des mêmes années et que ce dernier s'est, en conséquence, rendu non imposable ; que l'administration établit la mauvaise foi de l'intéressé, qui, en qualité de professionnel averti, ne pouvait ignorer le caractère non déductible des provisions ; que la reprise ultérieure des provisions et le simple différé de l'impôt qui s'en suit ne constitue pas une cause exonératoire ; qu'enfin, et en tout état de cause, la mention manuscrite jointe à la déclaration, qui ne peut entraîner que la décharge des intérêts de retard, est sans incidence sur la mise à la charge du contribuable des pénalités de mauvaise foi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. ROCHELOIS et la SNC ROBE ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris, qui n'a pas commis d'omission à statuer, a rejeté la demande de la M. ROCHELOIS ; que par voie de conséquence leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la SNC ROBE et de M. ROCHELOIS est rejetée.
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N° 04PA02537