Vu la requête, enregistrée le 7 novembre 2006, présentée pour la société CHINATOWN BELLEVILLE, dont le siège est situé 27 rue du Buisson Saint-Louis à Paris (75010), par Me Cottet ; la société CHINATOWN BELLEVILLE demande à la cour : de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 1993 et 1994, ainsi que des pénalités y afférentes et la décharge des suppléments de droits à la taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 1993 au 31 décembre 1995, ainsi que des pénalités y afférentes ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 mai 2008 :
- le rapport de Mme Appèche-Otani, rapporteur,
- et les conclusions de Mme Evgenas, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : « L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...). Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée. » ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le courrier adressé par l'administration le 28 août 1997 répond point par point aux observations concernant l'année 1995 faites par la société requérante dans le délai de trente jours qui lui était imparti ; que dans cette lettre, l'administration répond notamment de manière suffisamment motivée, aux remarques formulées par le contribuable concernant la prise en compte par le vérificateur des repas de groupes ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions susrappelées, manque en fait concernant l'année 1995 ; que s'agissant des autres années d'imposition en litige, la société CHINATOWN BELLEVILLE n'ayant répondu aux notifications de redressements qu'après expiration du délai d'un mois qui lui était imparti, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la réponse de l'administration à ces observations formulées tardivement manque en tout état de cause en droit ;
Sur le bien-fondé des impositions contestées :
S'agissant des redressements portant sur les minorations de recettes :
- En ce qui concerne le caractère probant de la comptabilité et la charge de la preuve :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : « Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière, lorsque le litige ou le redressement est soumis au juge. » ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au titre des exercices en litige, la société CHINATOWN BELLEVILLE, n'a pu présenter qu'un récapitulatif mensuel de ses recettes, le logiciel informatique utilisé pour la tenue de sa comptabilité ne lui permettant pas d'éditer a posteriori le montant quotidien des recettes ni le détail des recettes journalières ni leur ventilation en fonction du moyen de paiement ; que de plus, lors du contrôle, il a été constaté que des achats d'eaux minérales ont été effectués sans facture, et que d'autres produits comme le thé, lequel constitue pourtant une boisson de consommation courante dans un restaurant asiatique, n'ont pas été portés en stock ; que, dès lors, comme l'a estimé le tribunal dans le jugement attaqué, c'est à bon droit, qu'après avoir écarté la comptabilité de la société CHINATOWN BELLEVILLE comme non probante, l'administration a procédé à la reconstitution des recettes pour les exercices 1993 et 1994 ;
Considérant que les impositions résultant de cette reconstitution ayant été établies conformément à l'avis de la commission départementale notifié à la société requérante le 29 janvier 1999, il appartient à cette dernière d'apporter la preuve de leur caractère exagéré ;
- En ce qui concerne la reconstitution des recettes dissimulées :
Considérant que pour reconstituer les recettes de la société CHINATOWN BELLEVILLE au cours des exercices 1993 et 1994, l'administration a utilisé la méthode dite des vins, et consistant au vu des notes de restaurant dépouillées par le vérificateur, à déterminer d'une part, les recettes de vins et le rapport « chiffre d'affaires vins / chiffre d'affaires global » et d'autre part, les achats revendus de vins et à reconstituer par application d'un coefficient de pondération aux achats revendus réels, le chiffre d'affaires global ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que dans l'application de la méthode de reconstitution de recettes susdécrite qui était justifiée au regard des seules pièces et justificatifs à la disposition du vérificateur, l'administration a tenu compte d'une part, de l'existence de repas de groupe facturés « vin compris » et d'autre part, des quantités de vin offertes à la société CHINATOWN BELLEVILLE par ses fournisseurs ; que si la société CHINATOWN BELLEVILLE soutient que l'administration a sous-estimé le nombre de menus groupes facturés vin inclus, elle n'établit pas, y compris dans les reconstitutions qu'elle-même propose, qu'en estimant que la consommation de vin nécessaire aux « menus groupes » était couverte par les bouteilles offertes par les fournisseurs, le vérificateur aurait sous-estimé la consommation de vin nécessaire à ces menus ; que la société ne justifie pas davantage que le pourcentage correspondant au coulage aurait dû être fixé à 3 % contre 1 % retenu par le vérificateur ; qu'il suit de là que la société CHINATOWN BELLEVILLE n'apporte pas la preuve qui lui incombe du caractère excessif du chiffre d'affaires reconstitué sur la période litigieuse ;
- En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :
Considérant qu'aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : « Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens meubles et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. » ;
Considérant que faute pour la société CHINATOWN BELLEVILLE d'avoir déclaré les recettes correspondant à la reconstitution susmentionnée, c'est à bon droit que celles-ci ont été, en application des dispositions susénoncées, assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée ;
- En ce qui concerne le profit sur le Trésor :
Considérant que l'administration ayant à bon droit opéré des rappels de taxe sur la valeur ajoutée afférente à des recettes non comptabilisées, la société CHINATOWN BELLEVILLE n'est pas fondée à contester la réintégration par l'administration du profit correspondant à l'avantage dont elle a bénéficié au détriment du Trésor à raison du non-paiement de la taxe sur la valeur ajoutée litigieuse ;
- En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :
Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 38 du code général des impôts : « (... ) Le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. » ;
Considérant que les montants de recettes retenus par l'administration ont pu en application des dispositions susrappelées être réintégrés dans les résultats imposables de la société CHINATOWN BELLEVILLE au titre des exercices 1993 et 1994 ;
S'agissant du redressement portant sur les dettes injustifiées :
Considérant qu'aux termes de l'article 38-2 du code général des impôts : « Le bénéfice est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt, diminué des suppléments d'apports et augmenté des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. » ;
Considérant que la société CHINATOWN BELLEVILLE n'apporte pas plus devant la cour qu'elle ne l'a fait devant le tribunal, d'éléments de nature à établir qu'elle aurait effectivement emprunté en 1987, à M. X, la somme de 350 000 F figurant au passif de son bilan au titre de l'exercice 1993 ; que par suite l'administration était fondée à réintégrer ladite somme dans les résultats imposables de la société CHINATOWN BELLEVILLE au titre de l'exercice 1993, en vertu des dispositions de l'article 38-2 du code général des impôts précité ;
Considérant, que la société CHINATOWN BELLEVILLE n'a pas non plus été en mesure de justifier les dettes de 95 466 F et de 58 431 F figurant au passif du compte 408 « Fournisseurs, factures non parvenues » au titre des exercices 1993 et 1994 ; qu'elle n'est dès lors pas fondée à contester la réintégration par l'administration desdites sommes dans les résultats imposables des exercices litigieux, en vertu des dispositions de l'article précité ;
Sur les pénalités :
Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : «1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (...) » ;
Considérant que, comme l'ont estimé les premiers juges dans le jugement attaqué, compte tenu des irrégularités entachant la comptabilité, de l'importance des redressements notifiés en raison des minorations de recettes et du caractère répété de ces minorations sur l'ensemble de la période vérifiée, l'administration doit être regardée comme établissant l'intention délibérée de la société CHINATOWN BELLEVILLE d'éluder l'impôt pour des montants importants, et, par suite, sa mauvaise foi ; qu'il suit de là que l'administration était fondée à assortir les droits et impositions rappelés de la majoration de 40 % prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts précité ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société CHINATOWN BELLEVILLE est rejetée.
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N° 06PA03766