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26/05/2010 | FRANCE | N°08PA00716

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 26 mai 2010, 08PA00716


Vu la requête, enregistrée le 12 février 2008, présentée par le PREFET DE POLICE, lequel demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0716376/5-3, en date du 9 janvier 2008, par lequel le Tribunal administratif de Paris a, à la demande de M. Toufik A, d'une part, annulé son arrêté en date du 21 septembre 2007 refusant à ce dernier le renouvellement de son titre de séjour en l'obligeant à quitter le territoire français et en fixant du pays de destination, et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un certificat de résidence algérien dans un délai

de deux mois à compter de la notification du jugement ;

2°) de rejeter la ...

Vu la requête, enregistrée le 12 février 2008, présentée par le PREFET DE POLICE, lequel demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0716376/5-3, en date du 9 janvier 2008, par lequel le Tribunal administratif de Paris a, à la demande de M. Toufik A, d'une part, annulé son arrêté en date du 21 septembre 2007 refusant à ce dernier le renouvellement de son titre de séjour en l'obligeant à quitter le territoire français et en fixant du pays de destination, et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un certificat de résidence algérien dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Paris ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, et ses avenants ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, ensemble le décret

n° 91-1266 du 19 décembre 1991 relatif à son application ;

Vu l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades, pris en application de l'article 7-5 du décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 2010 :

- le rapport de M. Bernardin, rapporteur,

- et les conclusions de M. Egloff, rapporteur public ;

Considérant que le PREFET DE POLICE relève régulièrement appel du jugement en date du 9 janvier 2008, par lequel le Tribunal administratif de Paris a, à la demande de M. A, ressortissant algérien, d'une part, annulé son arrêté en date du 21 septembre 2007 refusant à ce dernier le renouvellement du titre de séjour dont il l'avait jusque là muni, en l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai d'un mois en fixant le pays de destination d'une éventuelle mesure d'éloignement, et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un certificat de résidence algérien dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ; que M. A demande à la cour, outre le rejet de la requête en appel du PREFET DE POLICE, d'annuler l'arrêté en date du 21 septembre 2007 pris par cette autorité et qu'il lui soit enjoint, si l'annulation demandée est prononcée pour un motif de fond, de lui délivrer un certificat de résidence algérien et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du 30ème jour suivant la notification de l'arrêt à intervenir, par application des articles L. 911-2 et L. 911-3 du code de justice administrative, ou, si l'annulation demandée est prononcée pour un motif de forme, de réexaminer son dossier dans le mois qui suivra la notification de l'arrêt à intervenir et ce, sous astreinte définitive de 100 euros par jour de retard, par application des articles L. 911-1 et L. 911-3 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions du PREFET DE POLICE :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé : Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : / [...] / 7°) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays ;

Considérant qu'il est constant que, le 7 juin 2007, le médecin, chef du service médical de la préfecture de police a émis, au vu du rapport médical confidentiel transmis par M. A, ressortissant algérien qui avait obtenu un premier titre de séjour en qualité de malade le 29 septembre 2004, renouvelé jusqu'au 2 mars 2007, un avis défavorable au maintien de ce dernier sur le territoire français en estimant que si son état de santé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, le demandeur pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et en particulier des certificats médicaux produits par M. A en mars et septembre 2006, ainsi que du certificat établi le 15 octobre 2007 par le docteur Torrès, que l'intéressé a été opéré de l'oeil droit en octobre 2003 et de l'oeil gauche en janvier 2004 en raison d'une cataracte bilatérale; qu'en outre, il souffrait d'une insuffisance rénale avec trouble du métabolisme phosphocalcique, découverte en décembre 2006, ayant entraîné une atteinte oculaire et neurologique prise en charge par le service de néphrologie spécialisé, et d'une hypocalcémie avec hyperphosphatémie découverte en 1997 en Algérie et qui se caractérise par une insuffisance de son taux de calcium conjugué à un taux excessif de phosphates dans son sang ; que cette hypocalcémie est à l'origine de crampes musculaires, de crises de tétanie et d'épilepsie et d'une hypoparathyroïdie, nécessitant une surveillance semestrielle ; que ce diagnostic a été confirmé en février 2007 par le docteur Mignon de l'hôpital Bichat et le 15 octobre 2007 par le docteur Urena Torres, néphrologue, qui a précisé que M. A devait suivre des traitements pour son hypocalcémie, pour sa cataracte et pour son épilepsie ; qu'ainsi, M. A doit faire l'objet d'une surveillance semestrielle pour l'hypoparathyroïdie et l'hypocalcémie, et biannuelle pour l'insuffisance rénale chronique et éventuellement d'une biopsie rénale pour rechercher les causes de sa pathologie néphrétique ; qu'en outre, il doit suivre un traitement consistant en la prise d'un médicament dénommé Calcium Sandoz ; que, toutefois, alors que les certificats médicaux produits par M. A ne précisent pas que les examens comme le traitement nécessités par son état, ne sont pas disponibles en Algérie, l'intéressé ne conteste pas sérieusement qu'il existe dans ce pays des infrastructures adéquates en matière de néphrologie, d'ophtalmologie et de neurologie susceptibles d'assurer la surveillance dont il a besoin ainsi que la prise du médicament qui lui a été prescrit ; qu'en outre, les certificats médicaux versés par l'intéressé en première instance, comme le certificat médical du 17 septembre 2008 versé aux débats, postérieur à la décision litigieuse, précisant que le suivi de M. A nécessite un arbitrage médical compte tenu des possibles effets secondaires de ses différents traitements, sans préciser lesquels, ne permettent pas de remettre en cause les conclusions rendues par le médecin chef ; que, par suite, le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que pour annuler son arrêté du 21 septembre 2007, le Tribunal administratif de Paris a considéré que le suivi et le traitement dont M. A avait besoin, ne pourraient pas être assuré en Algérie et, qu'ainsi cette autorité avait méconnu les stipulations susrappelées de l'article 6-7° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié ;

Considérant qu'il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. A devant le tribunal comme devant la cour ;

Considérant, en premier lieu, que M. A soutient qu'en l'absence d'avis de M. le médecin-chef de la préfecture de police, il existe un doute sérieux sur la légalité de la décision de refus de renouvellement du titre de séjour qui lui a été opposée ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que le médecin chef du service médical de la préfecture de police a été régulièrement saisi par le PREFET DE POLICE et a émis le 7 juin 2007 un avis défavorable, lequel est d'ailleurs produit au dossier ; qu'en tout état de cause, la circonstance que le PREFET DE POLICE n'a pas communiqué à M. A ledit avis, n'est pas de nature à entacher d'illégalité l'arrêté préfectoral litigieux ; qu'enfin, si M. A entend exprimer, en appel, ses doutes sur la régularité de cet avis, ce moyen n'est pas assorti de précisions suffisantes pour permettre au juge d'en apprécier la portée ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté attaqué, qui énonce les considérations de fait et de droit sur lesquelles il se fonde, et notamment vise les dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en particulier celles de l'article L. 511-1, est suffisamment motivé au regard des dispositions de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : / [...] / 5°) Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus [...] ; qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté par M. A, que ce dernier, célibataire et sans charge de famille sur le territoire français, n'est pas démuni d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident ses parents et ses cinq frères et soeurs et où lui-même a vécu jusqu'à l'âge de trente ans ; que, dans ses conditions, le PREFET DE POLICE n'a pas méconnu les stipulations susrappelées de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, nonobstant la circonstance, à la supposer établie que M. A est bien intégré dans la société française, qu'il a effectué quatre mois de formation professionnelle en vue de l'obtention de diplômes délivrés par la brigade des sapeurs pompiers de Paris, qu'il travaille sous contrat à durée indéterminé, qu'il n'a pas troublé l'ordre public et qu'il est à jour de ses impôts et cotisations sociales ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 7c de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle soumise à autorisation reçoivent, s'ils justifient l'avoir obtenue, un certificat de résidence valable un an renouvelable et portant la mention de cette activité ; et qu'aux termes de l'article 7 bis du même accord : Les ressortissants algériens visés à l'article 7 peuvent obtenir un certificat de résidence de dix ans s'ils justifient d'une résidence ininterrompue en France de trois années. Il est statué sur leur demande en tenant compte des moyens d'existence dont ils peuvent faire état, parmi lesquels les conditions de leur activité professionnelle et, le cas échéant, des justifications qu'ils peuvent invoquer à l'appui de leur demande ; que M. A, qui avait été admis au séjour sur le fondement des stipulations de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien, et n'établit ni même n'allègue avoir sollicité la délivrance de titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article 7 c susvisé, ne peut utilement se prévaloir des stipulations de l'article 7 bis de l'accord précité qui prévoient les conditions d'octroi d'une carte de dix ans aux ressortissants algériens déjà titulaires d'un titre de séjour en application des stipulations de l'article 7 dudit accord ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. : / [...] / ; que M. A, qui pourra bénéficier en Algérie d'un suivi médical spécialisé et d'un arbitrage médical pour la prise en charge de ses différentes pathologies, n'est pas fondé à soutenir qu'il remplit les conditions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en sixième lieu, qu'eu égard à ce qui précède, tant en ce qui concerne la possibilité pour M. A d'obtenir en Algérie les soins que nécessite son état de santé, que son absence de justification d'attaches privées et familiales en France, l'arrêté du 21 septembre 2007 n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation de ce dernier au regard de son droit au séjour ;

Considérant, en septième lieu, qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : [...] Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ; que ce dernier texte énonce que Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ; que le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations, s'il est inopérant lorsqu'il est dirigé à l'encontre de décisions portant refus de séjour ou obligation de quitter le territoire français, lesquelles ne fixent pas en elles-mêmes de pays de destination, peut, en revanche, être utilement soulevé à l'encontre d'une décision distincte fixant le pays de renvoi ; que M. A fait valoir qu'en l'absence dans son pays d'origine, du traitement spécifique qu'il suit en France, un retour en Algérie l'expose à des traitements contraires aux stipulations susvisées ; que, toutefois, dès lors que M. A peut disposer dans ce pays du suivi et des traitements dont il fait état, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 21 septembre 2007 et lui a enjoint de délivrer un certificat de résidence à M. A ; que la demande présentée devant ce tribunal par celui-ci doit donc être rejetée ;

Sur les conclusions présentées par M. A :

Considérant que M. A demande à la cour d'annuler l'arrêté en date du 21 septembre 2007, pris par le PREFET DE POLICE et qu'il soit enjoint à cette autorité, si l'annulation est prononcée pour un motif de fond, de lui délivrer un certificat de résidence algérien et ce, sous astreinte, ou, si l'annulation demandée est prononcée pour un motif de forme, de réexaminer son dossier dans le mois qui suivra la notification de l'arrêt à intervenir et ce, également sous astreinte ; que la cour, qui rejette la demande présentée par M. A, ne peut que rejeter par voie de conséquence les conclusions sus analysées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ; qu'en vertu de ces dispositions les conclusions présentées à ce titre par M. A, partie perdante, doivent être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Paris en date du 9 janvier 2008 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Paris et ses conclusions présentées devant la Cour administrative d'appel de Paris sont rejetées.

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N° 08PA00716


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 08PA00716
Date de la décision : 26/05/2010
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : Mme ADDA
Rapporteur ?: M. André-Guy BERNARDIN
Rapporteur public ?: M. Egloff
Avocat(s) : CERF

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2010-05-26;08pa00716 ?
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