Vu la requête, enregistrée le 7 avril 2014, sous le N°14PA1512, présentée pour M. B... D..., demeurant au..., par MeE... ;
M. D... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°1202876 du 28 janvier 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a, d'une part, rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision par laquelle le maire de la commune de Souppes sur Loing a refusé de prendre en charge au titre de la protection fonctionnelle les factures des 1er et 13 septembre 2011 correspondant aux frais de justice engagés ensemble la décision implicite de rejet de sa demande de protection fonctionnelle présentée le 5 décembre 2011, d'autre part, a limité la condamnation de la commune de Souppes sur Loing à la somme de 2.750 euros au titre de la moitié du montant des condamnations civiles prononcées à son encontre ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision précitée ;
3°) de condamner la commune de Souppes sur Loing à lui payer la somme de 3.500 euros au titre des condamnations civiles prononcées par l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 18 octobre 2011 et la somme de 2.000 euros prononcée par le tribunal correctionnel de Fontainebleau ainsi que les sommes de 695,10 euros et 163,61 euros réclamées à l'appui du commandement de payer du 4 novembre 2013 ;
4°) de condamner la commune de Souppes sur Loing à lui payer la somme de 4.903,60 euros au titre des frais exposés pour sa défense devant la chambre criminelle de la cour de cassation ;
5°) de mettre à la charge de la commune de Souppes sur Loing le versement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et la somme de 35 euros correspondant à la contribution pour l'aide juridique prévue par l'article R. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors qu'il est insuffisamment motivé et qu'il a été rendu en méconnaissance du principe du contradictoire dès lors que le mémoire en duplique de la commune ne lui a pas été communiqué par le greffe du tribunal ;
- la décision par laquelle la commune lui a accordé sa protection fonctionnelle est créatrice de droits et que, par suite, son retrait est illégal ;
- les faits de harcèlement moral ne sont pas constitutifs d'une faute personnelle et qu'ainsi c'est à tort que la commune lui a retiré le bénéfice de la protection fonctionnelle ;
- en l'absence de faute personnelle de sa part, la commune est tenue de le garantir de l'ensemble des sommes mises à sa charge par le juge judiciaire et de prendre en charge ses frais d'avocat ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 septembre 2014, présenté pour la commune de Souppes-sur-Loing qui conclut au rejet de la requête et demande en outre que soit mise à la charge de M. D...une somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient qu'aucun des moyens du requérant n'est fondé ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 15 janvier 2015, présenté pour M. D...qui conclut par les mêmes moyens aux mêmes fins que sa requête ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 janvier 2015 :
- le rapport de Mme Amat, premier conseiller,
- les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public,
- et les observations de Me Dokhan, avocat de M.D... ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
1. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés " ; que les premiers juges qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments avancés par le requérant ont écarté chacun des moyens invoqués par l'intéressé ; que, par suite, M. D...n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
2. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues ....Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux. " ; qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que le premier mémoire en défense de la commune de Souppes sur Loing du 25 septembre 2012 a été communiqué à M. D...le 1er octobre 2012 ; que si la commune de Souppes sur Loing a ensuite produit un nouveau mémoire le 7 janvier 2014 qui n'a pas été communiqué au requérant, celui-ci ne comportait aucun élément nouveau ; qu'au demeurant M. D...ne soutient ni même n'allègue que les premiers juges se seraient fondés sur ce dernier mémoire, et non sur celui qui lui a été communiqué, pour fonder leur décision ;
3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué est irrégulier ;
Sur le bien fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne les conclusions aux fins d'annulation :
4. Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions, d'une protection organisée par la collectivité publique dont ils dépendent, conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales. Lorsqu'un fonctionnaire a été poursuivi par un tiers pour faute de service et que le conflit d'attribution n'a pas été élevé, la collectivité publique doit, dans la mesure où une faute personnelle détachable de l'exercice de ses fonctions n'est pas imputable à ce fonctionnaire, le couvrir des condamnations civiles prononcées contre lui. (...) La collectivité publique est tenue d'accorder sa protection au fonctionnaire ou à l'ancien fonctionnaire dans le cas où il fait l'objet de poursuites pénales à l'occasion de faits qui n'ont pas le caractère d'une faute personnelle (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, lorsqu'elle est saisie d'une demande visant au bénéfice de la protection prévue par celles-ci, l'administration ne peut refuser d'y faire droit qu'en opposant, si elle s'y croit fondée au vu des éléments dont elle dispose à la date de la décision, le caractère de faute personnelle des faits à l'origine des poursuites au titre desquelles la protection est demandée ; que, dans le cas où, à l'inverse, elle a accordé la protection, elle peut mettre fin à celle-ci pour l'avenir si elle constate postérieurement, sous le contrôle du juge, l'existence d'une faute personnelle ; qu'en revanche le caractère d'acte créateur de droits de la décision accordant la protection de l'administration fait obstacle à ce qu'elle puisse légalement la retirer, plus de quatre mois après sa signature, hormis l'hypothèse où celle-ci aurait été obtenue par fraude ;
5. Considérant, d'une part, que la prise en charge par la commune de Souppes sur Loing des frais de justice de M. D...exposés dans le cadre de la procédure pénale devant le Tribunal de grande instance de Fontainebleau par le règlement, les 19 août et 22 septembre 2010, des honoraires de l'avocat de celui-ci, la note de soutien rédigée par le maire de la commune le 22 septembre 2010 à l'attention de l'ensemble de son personnel et la lettre de M. D...du 20 octobre suivant révèlent la décision implicite de la commune de Souppes sur Loing d'accorder la protection fonctionnelle à M.D... pour la procédure intentée à son encontre devant le Tribunal de grande instance de Fontainebleau statuant en matière correctionnelle ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que la commune ait décidé d'accorder sa protection fonctionnelle à M. D...pour les procédures d'appel et de cassation ; qu'il ne résulte d'aucun texte, ni principe général du droit, que la décision d'accorder la protection fonctionnelle soit créatrices de droit pour l'ensemble des procédures pénales, notamment les procédures d'appel et de cassation, concernant un fonctionnaire ou un agent public ; qu'ainsi la commune en refusant d'accorder sa protection fonctionnelle à M. D...pour ces deux procédures n'a pas retiré une décision créatrice de droits mais s'est bornée à abroger, pour l'avenir, sa décision de protection fonctionnelle ; que par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que par jugement du 20 septembre 2010, le Tribunal de grande instance de Fontainebleau a déclaré M. D...coupable des faits de harcèlement moral ; qu'en outre, postérieurement au jugement du Tribunal de grande instance de Fontainebleau, la commune a recueilli divers témoignages oraux puis écrits, notamment ceux de Mme C...et de M. A...confirmant les faits de harcèlement moral reprochés au requérant ; que, les actes de harcèlement moral sont des faits injustifiés au regard des pratiques administratives normales et doivent être regardés ainsi comme une faute personnelle détachable du service ; que, dès lors, c'est à bon droit que la commune de Souppes sur Loing a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, décider, après le jugement pénal de première instance de ne plus accorder la protection fonctionnelle à M.D... à raison de la faute personnelle de celui-ci ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle le maire de la commune de Souppes sur Loing a refusé de lui accorder la protection fonctionnelle ;
En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :
7. Considérant qu'au soutien de ces conclusions, M. D...fait valoir qu'il n'a commis aucune faute personnelle et qu'ainsi la commune devait prendre en charge l'ensemble des frais de justice qu'il a exposés ainsi que l'intégralité des condamnations civiles mises à sa charge par le juge judiciaire ; que, toutefois, M. D... n'apporte aucun élément de fait ou de droit de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le Tribunal administratif de Melun sur son argumentation de première instance, reprise en appel sans élément nouveau ; qu'il y a lieu, dès lors, d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal Administratif de Melun a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Souppes sur Loing, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. D...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de M. D...une somme de 1.500 euros à verser à la commune de Souppes sur Loing sur le fondement des mêmes dispositions ; qu'enfin, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à la charge de M. D...la contribution prévue par les dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : M. D...versera à la commune de Souppes sur Loing une somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D...et à la commune de Souppes-sur-Loing.
Délibéré après l'audience du 20 janvier 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Krulic, président de chambre,
- M. Luben, président assesseur,
- Mme Amat, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 février 2015.
Le rapporteur,
N. AMATLe président,
J. KRULIC
Le greffier,
L. BARRIERELa République mande et ordonne au réfet de la Seine-et-Marne et au ministre de l'intérieur en ce qui les concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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