Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme F...H...G...a demandé au Tribunal administratif de Melun :
1°) d'annuler les décisions des 10 octobre 2011 et 1er décembre 2011 par lesquelles le maire de la commune de Oissery (77178) a refusé de la radier des effectifs de la commune ;
2°) d'enjoindre au maire de la commune de Oissery de prendre un arrêté de radiation ;
3°) de condamner la commune de Oissery à lui verser une somme de 2 500 euros en réparation de son préjudice.
Par un jugement n° 1300389/9 du 21 janvier 2015, le Tribunal administratif de Melun a annulé les décisions attaquées, enjoint au maire de la commune de Oissery de procéder à la radiation de Mme H...G...des cadres de la commune et rejeté le surplus de demandes de la requérante.
Procédure devant la Cour :
I°) Par une requête n° 15PA00871 et des mémoires enregistrés les 24 février et
5 novembre 2015, la commune de Oissery, en la personne de son maire, représentée par
Me B...D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1300389/9 du 21 janvier 2015 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) de rejeter les conclusions à fin d'annulation des courriers du 10 octobre 2011 et 1er décembre 2011 ;
3°) de rejeter les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme H...G... ;
4°) de rejeter les conclusions indemnitaires de Mme H...G... ;
5°) de condamner Mme H...G...à verser à la commune une somme de 750 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La commune soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier, faute pour les premiers juges d'avoir soulevé d'office le moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité de la requête, en ce qu'elle était dirigée contre des actes non décisoires ;
- la requête doit être rejetée :
- du fait de son irrecevabilité ;
- la commune était tenue, avant de prononcer une radiation, de procéder au reclassement de son agent, et pour ce faire, une demande en ce sens devait être présentée par Mme H...G...; aucun délai spécifique pour le reclassement n'est prévu par les textes ;
- si la requête de Mme H...G...avait dû être interprétée comme dirigée à l'encontre des décisions implicites nées du silence gardé par la commune sur ses demandes, celle-ci devrait être regardée comme irrecevable en raison de son caractère tardif ;
- les conclusions indemnitaires de Mme H...G...sont irrecevables faute de demande préalable ; subsidiairement elles ne sont ni fondées ni justifiées.
Par un mémoire en défense enregistré le 13 octobre 2015, Mme F...H...G..., représentée par Me E...A..., demande à la Cour de :
1°) rejeter la requête ;
2°) confirmer le jugement du Tribunal administratif de Melun du 21 janvier 2015 ;
3°) juger que la commune de Oissery a engagé sa responsabilité en refusant de la licencier et de la radier des effectifs de la commune ;
4°) condamner la commune de Oissery à lui verser la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
5°) enjoindre à la commune de Oissery de la licencier et de la radier des effectifs de la commune à compter de la notification de l'arrêt à venir et de lui verser ses indemnités à compter du 18 janvier 2011 ;
6°) mettre à la charge de la commune de Oissery une somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- les décisions contestées lui font grief et lui causent des préjudices résultant de l'épuisement de ses droits statutaires, du non versement de ses indemnités de licenciement, de l'impossibilité pour elle de percevoir des allocations de remplacement ou de suivre des formations ;
- le refus de la commune d'exécuter le jugement attaqué constitue une faute qui engage sa responsabilité et justifie le versement d'une indemnisation de 20 000 euros au titre de dommages et intérêts.
II°) Par une requête n° 15PA00872 et un mémoire enregistrés les 24 février 2015 et
le 5 novembre 2015, la commune de Oissery, en la personne de son maire, représentée par MeD..., demande à la Cour :
1°) d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement n° 1300389/9 rendu par le Tribunal administratif de Melun le 21 janvier 2015 ;
2°) de mettre à la charge de Mme H...G...le versement à la commune de Oissery d'une somme de 750 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
3°) de rejeter toutes les demandes présentées par Mme H...G....
La commune soutient que les conditions fixées par l'article R.811-15 du code de justice administrative sont en l'espèce remplies.
Par un mémoire en défense enregistré le 20 octobre 2015, Mme F...H...G..., représentée par MeA..., demande à la Cour de :
1°) rejeter la demande de sursis à exécution présentée par la commune de Oissery ;
2°) condamner la commune de Oissery à exécuter le jugement rendu le 21 janvier 2015 sous astreinte de 1 000 euros par mois de retard depuis le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, soit, à compter du 23 février 2015, jusqu'à son exécution en application des articles L. 911-3 et suivants du code de la justice administrative ;
3°) mettre à la charge de la commune de Oissery le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Mme G...invoque les mêmes moyens que ceux développés dans la requête 15PA00871.
Mme H...G...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décisions du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du
5 août 2015.
Par ordonnances du 7 octobre 2015, la clôture d'instruction a été fixée, pour ces deux affaires, au 9 novembre 2015 à 12 heures.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, articles 81 à 86 ;
- le décret du 30 septembre 1985 relatif au reclassement des fonctionnaires territoriaux reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions ;
- le décret n°86-68 du 13 janvier 1986 relatif aux positions de détachement, hors cadres, de disponibilité, de congé parental des fonctionnaires territoriaux et à l'intégration ;
- le décret n°2006-1691 du 22 décembre 2006 portant statut particulier du cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Legeai,
- les conclusions de M. Egloff, rapporteur public ;
- et les observations de MeC..., représentant la commune.
Une note en délibéré, enregistrée le 10 mars 2016, a été présentée par Me C...pour la commune de Oissery.
1. Considérant les requêtes visées ci-dessus, introduites par la commune de Oissery, sont relatives à la situation de Mme H...G...et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt ;
Sur la requête n° 15PA00871 :
2. Considérant que la commune de Oissery, située en Seine-et-Marne, relève régulièrement appel du jugement n° 1300389/9 du 21 janvier 2015, par lequel le Tribunal administratif de Melun a annulé les décisions des 10 octobre 2011 et 1er décembre 2011 du maire de cette commune refusant de radier des cadres de la commune Mme H...G..., adjointe technique de 2ème classe, au motif que lorsqu'il a été médicalement constaté qu'un agent se trouve de manière définitive atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, il appartient à l'employeur de le reclasser dans un autre emploi et, en cas d'impossibilité, de prononcer, dans les conditions prévues, son licenciement ; que ledit jugement a également enjoint au maire de procéder à la radiation de l'intéressée des cadres, dans un délai d'un mois à compter de sa notification, et rejeté le surplus des conclusions des demandes de Mme H...G...;
3. Considérant qu'il ressort du dossier que Mme H...G...a été placée en disponibilité d'office du 19 janvier 2008 au 17 janvier 2011 ; que par avis du 27 janvier 2011, le comité médical départemental a estimé que l'intéressée se trouvait de manière définitive atteinte d'une inaptitude physique à occuper tout emploi ; que par courrier des 27 septembre et 7 novembre 2011, Mme H...G...a demandé au maire de la commune de Oissery, de régulariser en conséquence sa situation en procédant à sa radiation des effectifs de la commune ; qu'en réponse à ces demandes, le maire de la commune indiquait à l'intéressée, par courriers en date des 10 octobre et 1er décembre 2011, que la commune " disposait d'outils et d'organismes de formation pouvant répondre à sa demande ", et " souhaitait procéder à son reclassement en établissant un bilan de compétence " ;
En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué et sur la recevabilité de la requête de première instance :
4. Considérant que les courriers susmentionnés du maire de la commune de Oissery, en date des 10 octobre et 1er décembre, dès lors qu'ils opposaient, ne serait-ce qu'implicitement, un refus aux demandes expresses de Mme H...G...tendant à ce que soit prononcée sa radiation des effectifs de la commune, constituaient des décisions de refus, de nature à léser les intérêts de la personne à laquelle elles étaient opposées, contre lesquelles l'intéressée pouvait valablement former un recours ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que la requête de Mme H...G...dirigée contre ces deux décisions était recevable ; qu'il est constant, par ailleurs, que ces décisions, ne comportaient aucune mention des voies et délai de recours ; qu'il suit de là que la commune de Oissery n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué est irrégulier faute pour le tribunal d'avoir soulevé d'office l'irrecevabilité de la requête ; qu'en conséquence de ce qui précède, la commune de Oissery n'est pas fondée à soutenir qu'à supposer que les demandes présentées par Mme H...G...aient fait naître des décisions implicites de rejet, le recours formé contre ces décisions implicites serait tardif ;
En ce qui concerne le fond du litige :
5. Considérant qu'aux termes de l'article 19 du décret 86-68 du 13 janvier 1986: " (...) La durée de la disponibilité prononcée en vertu du premier alinéa du présent article ne peut excéder une année. Elle peut être renouvelée deux fois pour une durée égale. Si le fonctionnaire n'a pu, durant cette période, bénéficier d'un reclassement, il est, à l'expiration de cette durée, soit réintégré dans son administration s'il est physiquement apte à reprendre ses fonctions dans les conditions prévues à l'article 26, soit, en cas d'inaptitude définitive à l'exercice des fonctions, admis à la retraite ou, s'il n'a pas droit à pension, licencié. " ; qu'aux termes de l'article 1er du décret n° 85-1054 du 30 septembre 1985 relatif au reclassement des fonctionnaires territoriaux reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions : " Lorsque l'état physique d'un fonctionnaire territorial ne lui permet plus d'exercer normalement ses fonctions et que les nécessités du service ne permettent pas d'aménager ses conditions de travail, le fonctionnaire peut être affecté dans un autre emploi de son grade après avis de la commission administrative paritaire/L'autorité territoriale procède à cette affectation après avis du service de médecine professionnelle et de prévention, dans l'hypothèse où l'état de ce fonctionnaire n'a pas rendu nécessaire l'octroi d'un congé de maladie, ou du comité médical si un tel congé a été accordé (...)" ; qu'aux termes de l'article 2 du même décret : " Lorsque l'état physique d'un fonctionnaire territorial, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas d'exercer des fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'autorité territoriale ou le président du centre de gestion, après avis du comité médical, invite l'intéressé, soit à présenter une demande de détachement dans un emploi d'un autre corps, soit à demander le bénéfice des modalités de reclassement prévues à l'article 82 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 " ;
6. Considérant qu'il résulte d'un principe général du droit, dont s'inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés qui, pour des raisons médicales, ne peuvent plus occuper leur emploi, que des règles statutaires applicables dans ce cas aux fonctionnaires, que lorsqu'il a été médicalement constaté qu'un salarié se trouve de manière définitive atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, il appartient à l'employeur de le reclasser dans un autre emploi et, en cas d'impossibilité, de prononcer, dans les conditions prévues pour l'intéressé, son licenciement ;
7. Considérant qu'il ressort du dossier qu'après l'avis émis par le comité médical
le 27 janvier 2011, la commune n'a proposé à Mme H...G...aucun reclassement ; que, si elle soutient qu'une telle proposition supposait que l'intéressée présente une telle demande, il ressort des textes précités qu'il appartient à la commune d'inviter son agent à présenter une demande en ce sens ; qu'au demeurant et en tout état de cause, il ressort tant du courrier du 14 décembre 2010, par lequel le maire saisissait le comité médical, que de l'avis de ce comité, en date du 27 janvier 2011, que Mme H...G...était atteinte d'une inaptitude physique définitive à exercer ses fonctions et toutes fonctions ; qu'il en résulte qu'aucune possibilité de reclassement n'était envisageable et qu'il appartenait, dès lors, à la commune, en application des dispositions précitées, de la licencier ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Oissery n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif a annulé les deux décisions contestées et lui a enjoint de procéder à la radiation des cadres de Mme H...G... à compter du 18 janvier 2011 ;
En ce qui concerne les conclusions incidentes de Mme H...G... :
9. Considérant que Mme H...G...soutient que l'appel n'étant pas suspensif le jugement prononçant l'annulation des décisions des 10 octobre 2011 et 1er décembre 2011 et faisant injonction au maire de la commune de la licencier et de la radier s'applique dans un délai d'un mois à compte de sa notification ; que, dés lors, c'est illégalement que la commune s'est octroyée le droit de ne pas exécuter l'article 2 dudit jugement et qu'en conséquence une faute a été commise par la commune justifiant une indemnisation de 20 000 euros au titre de dommages et intérêts ;
10. Considérant, d'une part, que la demande de dommages et intérêts qui a été adressée à la commune par courrier en date du 30 janvier 2015 a été rejetée par le maire de la commune de Oissery le 17 février 2015 ce qui a eu pour effet de lier le contentieux ; que, toutefois, en toute hypothèse, à supposer même l'existence d'une faute, Mme H...G...n'établit pas le caractère réel et certain de son préjudice en se bornant à demander l'allocation d'une somme de 20 000 euros sans justifier des modalités de chiffrage de cette demande ; que, par suite, ces conclusions incidentes de Mme H...G...ne peuvent qu'être rejetées ;
11. Considérant, d'autre part, que la demande d'exécution, par Mme H...G..., du jugement dont il est fait appel, fait l'objet d'une procédure distincte en cours d'instance devant la Cour ; qu'il n'y a pas lieu dans le présent arrêt d'enjoindre une nouvelle fois à la commune de Oissery de licencier et de radier Mme G...des effectifs de la commune à compter du 18 janvier 2011 ;
Sur la requête n° 15PA00872 :
12. Considérant que, par le présent arrêt, la Cour statue sur la requête en annulation dirigée contre le jugement du 21 janvier 2015 du Tribunal administratif de Melun ; que, par suite, les conclusions de la requête n° 15PA00872 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont devenues sans objet ; que, dés lors, il n'y a plus lieu d'y statuer ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme H...G...la somme demandée par la commune de Oissery, qui succombe dans la présente instance ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Oissery une somme de
1 500 euros à verser à MeA..., sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle, au titre de l'instance n° 15PA00871, et de rejeter les conclusions présentées par Mme H...G..., sur le fondement des mêmes dispositions, dans le cadre de l'instance n° 15PA00872 ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête n° 15PA00871 de la commune de Oissery est rejetée.
Article 2 : La commune de Oissery versera au conseil de Mme H...G...une somme de
1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle.
Article 3 : Le surplus des conclusions de Mme H...G...dans l'instance n° 15PA00871 est rejeté.
Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 15PA00872 de la commune de Oissery.
Article 5 : Les conclusions présentées par Mme H...G...dans l'instance n° 15PA00872 sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Oissery, à Mme F...H...G...et à MeA....
Délibéré après l'audience du 9 mars 2016, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- M. Magnard, premier conseiller,
- M. Legeai, premier conseiller.
Lu en audience publique le 23 mars 2016.
Le rapporteur,
A. LEGEAI Le président,
I. BROTONS Le greffier,
S. DALL'AVA
La République mande et ordonne au préfet de Seine-et-Marne en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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Nos 15PA00871, 15PA00872