Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E...D...a demandé au Tribunal administratif de Paris, notamment, d'annuler la décision implicite de rejet de sa demande de protection fonctionnelle du 31 janvier 2014.
Par un jugement n° 1408548/2-2 du 10 novembre 2014 le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés respectivement les 6 janvier 2015 et 16 mars 2016, MmeD..., représentée par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1408548/2-2 du 10 novembre 2014 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler la décision implicite de rejet de sa demande de protection fonctionnelle en date du 31 janvier 2014 ;
3°) d'enjoindre à l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) de cesser toutes attaques à son encontre, de lui offrir un poste correspondant à ses compétences, de " nettoyer " son dossier administratif ;
4°) de condamner l'AP-HP à lui verser une somme de 2 700 euros à titre de remboursement des pertes de salaires et des primes normalement perçues ainsi qu'une somme de 40 000 euros au titre de l'indemnisation des préjudices moraux, financiers et professionnels subis ;
5°) de mettre à la charge de l'AP-HP une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme D... soutient qu'elle a été victime de harcèlement moral de la part de membres de l'administration hospitalière ; que sa demande de protection fonctionnelle est justifiée par cette situation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 juin 2015, l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et demande à ce qu'une somme de 1 200 euros soit mise à la charge de Mme D...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
L'AP-HP soutient que :
- la requête en appel est irrecevable ;
- le jugement est bien fondé en ce qu'il a, notamment, prononcé le rejet des conclusions de la requérante.
Vu les autres pièces du dossier.
Par ordonnance du 23 février 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 16 mars 2016 à 12 heures.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Legeai,
- les conclusions de M. Egloff, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., représentant l'AP-HP.
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête :
1. Considérant que Mme E... D..., adjoint administratif hospitalier au sein de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) depuis 1991, a été affectée en février 2012 au sein de l'hôpital Henri Mondor en qualité d'agent d'accueil de la médiathèque ; qu'elle a alors bénéficié d'une formation professionnelle adaptée à ses nouvelles fonctions ; qu'en février 2013 un poste d'adjointe bibliothécaire lui a été proposé ; qu'un rapport interne du 28 février 2013 a fait état de problèmes relationnels et d'un manque d'assiduité, rapport à la suite duquel Mme D...a été convoquée, le 27 mars 2013, à un " entretien de recadrage " ; qu'à la suite des entretiens professionnels des 14 mai 2013 et 27 mai 2013, il lui a été proposé un poste de faisant fonction de secrétaire médicale, qu'elle a refusé, puis un poste de secrétaire médicale situé à Créteil, localisation conforme à ses voeux ; que, dès le 3 juin 2013, l'intéressée a sollicité une nouvelle affectation au motif que " les conditions de travail rencontrées au centre médico-psychologique de Créteil [étaient] trop difficiles ", et, à compter du 4 juin 2013, a bénéficié d'un congé maladie ; que le 31 janvier 2014, la requérante a adressé une demande de protection fonctionnelle au directeur général de l'AP-HP en invoquant une situation de harcèlement moral ; qu'elle relève appel du jugement n° 1408548/2-2 du 10 novembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande, tendant, notamment, à l'annulation du refus implicite de l'AP-HP de lui octroyer la protection fonctionnelle demandée ;
Sur le harcèlement moral invoqué et la demande de bénéfice de la protection fonctionnelle :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 quinquies de la loi n° 83-634 du
13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. / Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus. (... ) " ; qu'aux termes de l'article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée : " les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions et conformément aux règles fixées par le Code pénal et les lois spéciales, d'une protection organisée par la collectivité publique qui les emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire au fonctionnaire. (...). La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté " ;
3. Considérant qu'il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement ; qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile ; que, d'autre part, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral ;
4. Considérant que Mme D... reprend en appel ses moyens de première instance, tirés de ce qu'elle a été victime de la part de membres de l'administration hospitalière, de harcèlement moral au sens des dispositions de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, et que, dès lors, est justifiée sa demande de protection fonctionnelle, telle que prévue par l'article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; que, toutefois, et ainsi que l'a estimé dans son jugement le Tribunal administratif de Paris, l'argumentation développée par la requérante n'apporte pas, à l'appui de ces moyens, d'éléments de nature à accréditer l'hypothèse de l'existence de faits de harcèlement dont elle allègue avoir été victime ; qu'en particulier, les seules allégations de l'appelante, relatives aux propos qui auraient été tenus à son égard par ses supérieurs hiérarchiques, ainsi que les pièces qu'elle verse au dossier, dont le compte-rendu de l'entretien du 28 mars 2013 signé par des représentants syndicaux et établi à la demande de l'intéressée, ou encore les justificatifs d'arrêts de travail et certificats médicaux dont l'un, établi à la demande de l'exposante le 14 mai 2013, relevant que " Mme D... présente un épisode dépressif majeur réactionnel, selon ses dires, à des évènements survenus sur son lieu de travail " ne permettent pas, eu égard notamment au contexte rappelé au point 1, de faire naître une présomption de harcèlement moral de la part de l'employeur de l'appelante ; qu'en outre, l'intéressée ne peut sérieusement soutenir que l'AP-HP aurait " brisé " son projet professionnel consistant à devenir adjointe bibliothécaire, alors qu'elle ne conteste pas avoir déclaré, au cours de l'entretien du 28 mars 2013, vouloir interrompre sa participation au projet de création d'une médiathèque sur le site de l'hôpital Henri Mondor, et, cela, en dépit de la formation, financée par l'AP-HP et réalisée à 50 % sur son temps de travail, qui devait lui permettre d'obtenir le poste de responsable de cette structure ; qu'il est, par ailleurs, constant qu'à la suite de ce premier refus de Mme D..., deux nouvelles affectations lui ont été proposées, dont la dernière près de son domicile conformément à ses voeux, et qu'elle les a successivement rejetées au motif que les postes envisagés ne lui semblaient pas appropriés ; qu'il résulte de ce qui précède, que les éléments apportés par la requérante, tant devant le tribunal que devant la Cour, ne sont pas de nature à laisser présumer qu'elle aurait été victime de faits constitutifs de harcèlement moral ; que, par suite, dans ces conditions, l'AP-HP a pu, sans commettre d'illégalité, refuser de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle demandée en raison du prétendu harcèlement dont elle aurait été victime dans le cadre professionnel ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet de sa demande de protection fonctionnelle du 31 janvier 2014, et à ce que soit engagée la responsabilité de l'AP-HP en raison des fautes constituées par ce harcèlement et l'illégalité du refus de protection fonctionnelle ; que, dès lors, les conclusions à fin d'annulation et les conclusions indemnitaires présentées par l'appelante devant la cour doivent être rejetées ; que, par suite, le présent arrêt n'appelant aucune mesure d'exécution, ses conclusions à fin d'injonction doivent être également rejetées ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur ce fondement par la requérante ; qu'enfin, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme D...la somme demandée par l'AP-HP au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er: La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'AP-HP sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à MmeE... D... et au directeur général de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris.
Délibéré après l'audience du 3 mai 2016, à laquelle siégeaient :
Mme Appèche, président assesseur,
M. Magnard, premier conseiller,
M. Legeai, premier conseiller.
Lu en audience publique le 18 mai 2016.
Le rapporteur,
A. LEGEAILe président assesseur,
En application de l'article R. 222-26 du code
de justice administrative
S. APPECHE
Le greffier,
P. LIMMOIS
La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA00146