Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... A...a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler l'arrêté du 23 février 2015 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination, d'autre part, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation administrative, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard.
Par un jugement n° 1504028/2-2 du 28 septembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 28 octobre 2015, M. A..., représenté par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1504028/2-2 du 28 septembre 2015 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 23 février 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation administrative dans les mêmes conditions ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision lui refusant l'admission au séjour est entachée d'un vice de procédure pour défaut de saisine de la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'illégalité interne pour méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 de ce code et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que pour erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision l'obligeant à quitter le territoire français et celle fixant le pays de renvoi sont privées de base légale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour, elle-même illégale et vouée à l'annulation contentieuse.
La requête a été communiquée au préfet de police, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Auvray ;
- les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public ;
- et les observations de Me C...pour M. A....
1. Considérant que M. A..., ressortissant béninois né le 11 octobre 1980 à Guéné, s'est vu refuser, par l'arrêté préfectoral contesté du 23 février 2015, la délivrance d'une carte de séjour temporaire en qualité de salarié ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et, notamment, de la carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant-élève " délivrée en dernier lieu le 10 septembre 2010 à M. A..., que celui-ci est entré en France le 11 janvier 2002, qu'il y a obtenu une licence de génie des procédés décernée par l'Université Paris 13 en 2004, puis un master de sciences, technologie, santé, spécialité " procédés pour la qualité de l'environnement " en 2008 et suivi un enseignement en master 2 sciences et techniques industrielles mention " ingénierie chimique " auprès du Conservatoire national des Arts et Métiers au cours de l'année universitaire
2009-2010, étant précisé que l'intéressé soutient, sans être nullement contredit, avoir été mis en possession, durant neuf ans consécutifs, de titres de séjour portant la mention " étudiant " ; qu'en outre, M. A... se prévaut d'une relation maritale avec une compatriote, titulaire d'une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " et mère d'une enfant de quatre ans née d'une précédente union ; que si le préfet de police soutient que cette relation est très récente, il ressort des pièces du dossier que celle-ci remonte au moins à 2012, ainsi qu'en atteste un courrier de Pôle Emploi en date du 29 septembre 2012, confirmé par divers autres documents ultérieurs adressés à " Mme D...chez M. A... ", le directeur de la caisse d'allocations familiales de Paris certifiant, le 29 septembre 2015, que Mme D...et M. A... ont perçu une allocation de logement pour les mois de janvier à août 2015 ; qu'eu égard aux circonstances particulières de l'espèce, et nonobstant le fait, relevé par le préfet de police, que les parents de M. A... résident au Bénin, l'appelant, qui se prévaut en outre de ce qu'un frère et une soeur sont de nationalité française, est fondé à soutenir qu'en lui refusant l'admission au séjour, le préfet de police a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels la décision contestée du 23 février 2015 a été prise ; que, pour ce seul motif, M. A... est fondé à demander l'annulation, en toutes ses dispositions, de l'arrêté préfectoral en cause ;
4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant qu'eu égard au motif d'annulation retenu par le présent arrêt, il y a lieu d'accueillir les conclusions de M. A... tendant à ce que la Cour enjoigne au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A... d'une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par ce dernier et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1504028/2-2 en date du 28 septembre 2015 du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté en date du 23 février 2015 du préfet de police sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M. A... une carte de séjour temporaire
portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. A... une somme de 1 000 (mille) euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A..., au ministre de l'intérieur et au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 24 mai 2016 à laquelle siégeaient :
M. Krulic, président de chambre,
M. Auvray, président-assesseur,
Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,
Lu en audience publique le 7 juin 2016.
Le rapporteur,
B. AUVRAY
Le président,
J. KRULIC
Le greffier,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice, à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA03932