Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...C...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 29 août 2014 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de sa destination.
Par un jugement n° 1504112 du 1er juin 2015, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 23 décembre 2015, M.C..., représenté par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1504112 du 1er juin 2015 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 29 août 2014 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant son pays de destination ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour ;
4°) à défaut, d'enjoindre au préfet de police de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnait les stipulations de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne en ce qu'il n'a pas été mis à même de présenter ses observations sur la décision le concernant portant obligation de quitter le territoire français ;
- la décision de reconduite à la frontière est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense enregistré le 27 juin 2016, le préfet de police conclut à l'annulation du jugement en ce que le juge délégué a statué sur les conclusions relatives à la décision de refus de titre de séjour et, pour le surplus, au rejet de la requête.
Vu la lettre en date du 17 juin 2006 par laquelle la Cour a informé les parties de ce que la formation de jugement était susceptible de se fonder sur un moyen relevé d'office en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative.
Vu la réponse du préfet de police au moyen relevé d'office, enregistrée le 27 juin 2016.
Vu la décision n° 2015/035217 du 16 octobre 2015 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris a admis M. C...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Delamarre a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. C..., ressortissant bangladais, né le 7 août 1978, est entré en France le 17 janvier 2011 selon ses déclarations ; que, par l'arrêté attaqué du 29 août 2014, le préfet de police a rejeté sa demande d'admission au séjour sur le fondement du 8° de l'article L. 314-1 et de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que M. C... relève appel du jugement en date du 1er juin 2015 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation dudit arrêté ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que les dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, ne donnent pas au magistrat délégué compétent pour statuer sur l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français, compétence pour connaître aussi de conclusions en annulation du refus de titre de séjour qui lui a préalablement été opposé et quand bien même le requérant aurait été placé en rétention administrative ; qu'ainsi c'est à tort que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Melun n'a pas renvoyé au tribunal statuant collégialement les conclusions de la requête de M. C...tendant à l'annulation de la décision du 29 août 2014 par lequel le préfet de police lui a refusé le séjour au titre de l'asile ; que le jugement litigieux doit être annulé dans la mesure où il statue sur ces conclusions ;
3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer sur les dites conclusions ;
Sur la légalité du refus du titre de séjour :
4. Considérant que les conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus d'admission au séjour du 29 août 2014 ne comportent l'énoncé d'aucun moyen ; que ces conclusions sont dès lors irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
5. Considérant qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union " ; qu'aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) " ; qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 51 de la charte : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union. (...) " ;
6. Considérant que le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne ; que, toutefois, dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour ; que le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ;
7. Considérant que lorsqu'il sollicite la délivrance d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'à l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande ; qu'il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles ; qu'il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux ; que le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour ;
8. Considérant qu'il ressort de la décision attaquée que M. C...a été reçu, en dernier lieu, par la préfecture de police, le 30 mai 2014 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C... ait sollicité, sans réponse, un entretien avec les services préfectoraux ni qu'il ait été empêché de présenter ses observations avant que ne soit prise la décision litigieuse ; que, dans ces conditions, M. C... n'est pas fondé à se prévaloir d'une méconnaissance de son droit à être entendu au sens des stipulations précitées de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
Sur la légalité de la décision portant reconduite à la frontière :
9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; que cet article stipulant que " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;
10. Considérant le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté dès lors que, d'une part, M. C...n'apporte aucun élément de nature à démontrer qu'il aurait fait l'objet de menaces dans son pays d'origine et que, d'autre part, l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides avait rejeté sa demande de reconnaissance de la qualité de réfugié par une décision du 26 juin 2014 ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 29 août 2014 doivent être rejetées ; que doivent être également rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement en date du 1er juin 2015 du magistrat délégué du Tribunal administratif de Melun est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du préfet de police en date du 29 août 2014, refusant un titre de séjour à M.C....
Article 2 : La requête présentée par M. C... devant le Tribunal administratif de Melun est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 30 juin 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Bouleau, premier vice-président,
- M. Polizzi, président assesseur,
- Mme Delamarre, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 30 septembre 2016.
Le rapporteur,
A-L. DELAMARRELe président,
M. BOULEAU
Le greffier,
M. D...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 10PA03855
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N° 15PA04756