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21/03/2018 | FRANCE | N°16PA01871

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 21 mars 2018, 16PA01871


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes enregistrées sous les nos 1508151 et 1514894, le syndicat national des collaborateurs parlementaires-Force ouvrière (SNCP-FO) a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler, d'une part, le rejet implicite du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile de France, puis la décision de rejet explicite de son recours gracieux contre la décision implicite du 17 novembre 2014 refusant l'organisation d'élections de délégué

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes enregistrées sous les nos 1508151 et 1514894, le syndicat national des collaborateurs parlementaires-Force ouvrière (SNCP-FO) a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler, d'une part, le rejet implicite du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile de France, puis la décision de rejet explicite de son recours gracieux contre la décision implicite du 17 novembre 2014 refusant l'organisation d'élections de délégués de site à l'Assemblée nationale, d'autre part d'annuler la lettre d'attente du 24 mars 2015.

Par un jugement nos 1508151 et 1514894 du 31 mars 2016, le tribunal administratif, après avoir joint les requêtes, a rejeté les demandes du syndicat.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 juin 2016, le syndicat national des collaborateurs parlementaires-Force ouvrière (SNCP-FO) représenté par Me B...A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 31 mars 2016 ;

2°) d'enjoindre au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France d'organiser l'élection de délégués de site à l'Assemblée Nationale dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal qui n'a pas répondu à la totalité de ses arguments, et notamment ceux relatifs à l'accès au site de l'inspection du travail, à la précarité de l'emploi, à la santé au travail, à la durée du travail et à l'allaitement matériel, n'a pas suffisamment motivé son jugement ;

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal les restrictions d'accès résultant du plan Vigipirate affectent leurs conditions de travail ;

- en exigeant que les problèmes posés soient d'une importance particulière, le tribunal, qui a ajouté une condition qui ne figure pas à l'article L. 2312-5 du code du travail, a commis une erreur de droit ;

- pour le surplus, il maintient les différents moyens soulevés en première instance.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 juin 2017, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France, qui conteste les faits conclut au rejet de la requête par les moyens et arguments figurant dans son mémoire en défense de première instance.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 29 janvier 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu la décision du Conseil Constitutionnel n° 2014-705 DC du 11 décembre 2014.

Vu :

- la Constitution ;

- le règlement de l'Assemblée Nationale ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bernier,

- les conclusions de Mme Delamare, rapporteur public,

- et les observations de Me B...A..., représentant le SNCP-FO.

1. Considérant d'une part qu'aux termes du 1 de l'article 15 du règlement de l'Assemblée Nationale : " Les questeurs, sous la haute direction du Bureau, sont chargés des services financiers et administratifs " ; qu'aux termes de l'article 17 du même règlement : " Le Bureau détermine par des règlements intérieurs l'organisation et le fonctionnement des services de l'Assemblée, les modalités d'application, d'interprétation et d'exécution, par les différents services, des dispositions du présent Règlement, ainsi que le statut du personnel et les rapports entre l'administration de l'Assemblée et les organisations professionnelles du personnel " ;

2. Considérant d'autre part qu'aux termes du 2 de l'article 18 du règlement de l'Assemblée Nationale : " Les députés peuvent employer sous contrat de droit privé des collaborateurs parlementaires, qui les assistent dans l'exercice de leurs fonctions et dont ils sont les seuls employeurs. Ils bénéficient à cet effet d'un crédit affecté à la rémunération de leurs collaborateurs " ;

3. Considérant enfin que par une décision n° 2014-705 DC du 11 décembre 2014, le Conseil constitutionnel s'est prononcé sur la conformité à la constitution d'une résolution du 28 novembre 2014 tendant à modifier le règlement de l'Assemblée nationale ; qu'il a considéré que l'article 4 de la résolution qui habilitait les questeurs à déterminer et mettre en oeuvre les conditions de la négociation d'un " statut " des collaborateurs parlementaires avec les organisations représentatives de ces derniers, qui sont liés par un contrat de droit privé aux députés qu'ils assistent, et que la dernière phrase insérée dans l'article 18 du règlement par l'article 5 de la résolution qui prévoyait que ces collaborateurs bénéficiaient du statut mentionné ci-dessus, n'étaient relatives ni à l'organisation ou au fonctionnement de l'Assemblée nationale, ni à la procédure législative, ni au contrôle de l'action du Gouvernement ; qu'il en a déduit qu'elles n'étaient pas au nombre de celles qui pouvaient figurer dans le règlement de l'Assemblée nationale et les a, en conséquence, déclarées contraires à la Constitution ;

4. Considérant que le syndicat national des collaborateurs parlementaires-Force ouvrière (SNCP-FO), à qui les questeurs de l'Assemblée Nationale avaient opposé un refus, a demandé au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France " d'imposer l'élection de délégués du personnel de site pour les collaborateurs des députés à l'Assemblée Nationale en application de l'article L. 2312-5 du code du travail " ; que cette demande, réitérée à plusieurs reprises, a été rejetée par le directeur régional le 30 juin 2015, au motif que la nature et l'importance des problèmes communs à l'ensemble des parlementaires employeurs de droit privé ne justifiaient pas, au regard des attributions reconnues aux délégués du personnel par le code du travail, la mise en place de délégués du personnel communs ; que le syndicat national des collaborateurs parlementaires-Force ouvrière relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2312-5 du code du travail : " Dans les établissements employant habituellement moins de onze salariés et dont l'activité s'exerce sur un même site où sont employés durablement au moins cinquante salariés, l'autorité administrative peut, de sa propre initiative ou à la demande des organisations syndicales de salariés, imposer l'élection de délégués du personnel lorsque la nature et l'importance des problèmes communs aux entreprises du site le justifient. / Les conditions de ces élections sont définies par accord entre l'autorité gestionnaire du site ou le représentant des employeurs concernés et les organisations syndicales de salariés, conclu selon les conditions de l'article L. 2314-1. / A défaut d'accord, l'autorité administrative fixe le nombre et la composition des collèges électoraux ainsi que le nombre des sièges et leur répartition entre les collèges par application des dispositions du présent titre... " ; qu'aux termes de l'article L. 2314-1 : " Sauf dispositions législatives contraires, la validité du protocole d'accord préélectoral conclu entre l'employeur et les organisations syndicales intéressées est subordonnée à sa signature par la majorité des organisations syndicales ayant participé à sa négociation, dont les organisations syndicales représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles ou, lorsque ces résultats ne sont pas disponibles, la majorité des organisations représentatives dans l'entreprise " ; qu'aux termes de l'article L. 2316-1 : " Le fait de porter ou de tenter de porter atteinte à la libre désignation des délégués du personnel ou à l'exercice régulier de leurs fonctions est puni d'un emprisonnement d'un an et d'une amende de 3 750 euros " ; qu'aux termes de l'article R. 2312-1 : " Le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi est compétent pour prendre les décisions prévues à l'article L. 2312-5 " ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2311-1 du code du travail qui détermine le champ d'application du titre I du livre III du code du travail qui traite des délégués du personnel (articles L. 2311-1 à L. 2316-1) : " Les dispositions du présent titre sont applicables aux employeurs de droit privé ainsi qu'à leurs salariés. / Elles sont également applicables : / 1° Aux établissements publics à caractère industriel et commercial ; / 2° Aux établissements publics à caractère administratif lorsqu'ils emploient du personnel dans les conditions du droit privé... " ;

7. Considérant qu'il résulte de l'article 24 de la Constitution que le parlementaire a pour fonction de concourir au vote de la loi, au contrôle de l'action du gouvernement et à l'évaluation des politiques publiques par le Parlement ; que les règles particulières du statut du parlementaire découlent de la nature de ses fonctions ; que dès lors le député, eu égard à la nature de sa mission constitutionnelle, et quand bien même il lui est possible d'employer des collaborateurs recrutés par contrat de droit privé, ne saurait être regardé comme une " entreprise " ni même comme un " établissement employant moins de onze salariés " au sens des dispositions citées au point de l'article L. 2312-5 du code du travail dont les dispositions ne sont pas, en ce qu'il s'agit des collaborateurs parlementaires, applicables à l'Assemblée Nationale ; que par ailleurs, en application du principe de la séparation des pouvoirs et de l'autonomie des assemblées parlementaires qui en découle, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France ne saurait " imposer ", ainsi que le prévoient les dispositions précitées, à l'Assemblée Nationale, qu'il s'agisse des questeurs, chargés de la direction des services administratifs et financiers de l'Assemblée, ou de chaque député en sa qualité d'employeur, l'élection de délégués du personnel ou de délégués de site ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 2312-5 du code du travail est donc inopérant ;

8. Considérant que les demandes du syndicat requérant tendant à l'annulation d'une décision du 15 janvier 2014 et d'un courrier du 24 mars 2015 du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail sont irrecevables ; que celles tendant à l'annulation d'une décision implicite née le 18 mars 2015 de rejet par la même autorité du recours gracieux formé par le syndicat sont dépourvues d'objet ; qu'il ne saurait donc y être fait droit, ainsi que l'a estimé le tribunal administratif dont il y a lieu d'adopter les motifs du jugement sur ces points ; que c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté aux points 7 et 8 du jugement les moyens tirés de l'absence de motivation de la décision implicite, née le 17 novembre 2014, par laquelle le DIRECCTE a rejeté la demande du SNCP-FO, formée par courrier du 15 septembre 2014, tendant à l'organisation d'élections de délégués du personnel à l'Assemblée nationale, et celui tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire ; que les demandes tendant à l'annulation des décisions en litige ne pouvaient en tout état de cause qu'être rejetées dès lors que les dispositions de l'article L. 2312-5 du code du travail ne trouvaient pas en l'espèce à s'appliquer ;

9. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 2312-5 du code du travail étant inopérant, la circonstance de ce que le tribunal, pour l'écarter, n'aurait pas répondu à l'ensemble des arguments soulevés par le syndicat ne saurait entacher la régularité de ce jugement ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le syndicat national des collaborateurs parlementaires-Force ouvrière n'est donc pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

11. Considérant que l'Etat n'étant pas la partie qui succombe, les conclusions du syndicat présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête du syndicat national des collaborateurs parlementaires-Force ouvrière est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat national des collaborateurs parlementaires-Force ouvrière et au ministre du travail. Copie en sera adressée pour information au président de l'Assemblée nationale et au directeur général des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 6 mars 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- M. Bernier, président assesseur,

- Mme Pena, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 21 mars 2018.

Le rapporteur,

Ch. BERNIERLe président,

M. BOULEAU

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre du travail en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 16PA01871


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA01871
Date de la décision : 21/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: M. Christian BERNIER
Rapporteur public ?: Mme DELAMARRE
Avocat(s) : BATOT

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-03-21;16pa01871 ?
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