Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner Pôle Emploi à lui verser la somme de 300 000 euros, en réparation des préjudices subis du fait de ses manquements fautifs.
Par un jugement n°1314823 du 23 février 2016, le tribunal administratif de Paris d'une part, n'a pas admis l'intervention du syndicat CGT des chômeurs et précaires de Gennevilliers et Villeneuve-la-Garenne et Asnières et, d'autre part, a rejeté la demande de M.A....
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 12 juillet 2016, M. B...A..., représenté par la SELARL Bernard et Videcoq, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 23 février 2016 ;
2°) de condamner Pôle Emploi à lui verser une indemnité de 300 000 euros en réparation des préjudices résultant de sa carence fautive ;
3°) de mettre à la charge de Pôle Emploi la somme de 3 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la motivation du jugement est imprécise ;
- la motivation du rejet de sa demande d'indemnisation préalable est stéréotypée ;
- Pôle Emploi, chargé d'assurer un droit à l'emploi effectif, a commis des manquements graves dans l'accomplissement de sa mission de service public ;
- il ne lui a assuré aucun accompagnement renforcé ni de suivi personnalisé avant 2013 alors qu'il était travailleur handicapé ;
- il ne l'a pas mis en contact avec des employeurs potentiels ;
- il ne l'a pas accompagné dans son projet de création d'entreprise ;
- il ne lui a proposé de formation qu'au bout de quatre ans ;
- il n'a pas tenu compte de ses difficultés de déplacement ;
- il a négligé la mise à jour de son dossier ;
- Pôle Emploi ne peut s'exonérer de sa carence en lui opposant que ses exigences salariales étaient excessives, ni que son déménagement a compliqué sa recherche d'emploi.
Par un mémoire enregistré le 13 juillet 2016, le syndicat CGT des chômeurs et précaires de Gennevilliers Villeneuve Asnières par la SELARL Bernard et Videcoq intervient à l'appui des conclusions de la requête de M. A...et conclut à ce que soit mise à la charge de Pôle Emploi la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, il a intérêt à agir ;
- le jugement est insuffisamment motivé sur ce point.
Par un mémoire en défense enregistré le 16 janvier 2017, Pôle Emploi, représenté par la SCP Nicolas Boulez demande à la cour :
1°) de rejeter comme irrecevable l'intervention du syndicat CGT des chômeurs et précaires de Gennevilliers - Villeneuve-la-Garenne - Asnières ;
2°) de rejeter comme infondée la requête de M.A... ;
3°) de mettre à la charge de M. A...et du syndicat CGT des chômeurs et précaires de Gennevilliers - Villeneuve-la-Garenne - Asnières la somme de 1 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'intervention du syndicat constitue un appel tardif et donc irrecevable ;
- le syndicat, dont le champ d'activité est local, ne justifie pas son intérêt à intervenir dans un litige indemnitaire ;
- l'intervention n'est pas motivée ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;
- Pôle Emploi n'a commis aucune faute ;
- il n'y a pas de causalité directe et certaine entre les fautes alléguées et les préjudices ;
- la perte de chance de M. A...de retrouver un emploi était nulle ou très faible.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 juin 2016 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 27 décembre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution du 24 juin 1793 ;
- le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ;
- le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels du
16 décembre 1966 ;
- la charte sociale européenne ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Bernier,
- les conclusions de Mme Delamarre, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant M. A...et le syndicat CGT des chômeurs et précaires de Gennevilliers - Villeneuve-la-Garenne - Asnières.
1. Considérant que M. A...s'est inscrit sur la liste des demandeurs d'emploi de Pôle Emploi Nancy à l'expiration d'un contrat à durée déterminée le 31 décembre 2008 ; que par lettre du 5 juillet 2013, M. A...a demandé à Pôle Emploi de lui verser une somme de 300 000 euros au titre du préjudice subi du fait de défaillances dans le suivi de ses efforts pour retrouver un emploi ; que par une décision du 26 août 2013, Pôle Emploi a rejeté sa demande ; que M. A...relève appel du jugement du 23 février 2016 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de Pôle Emploi au versement d'une somme de 300 000 euros en réparation de son préjudice ;
Sur la recevabilité de l'intervention du syndicat CGT des chômeurs et précaires de Gennevilliers - Villeneuve-la-Garenne - Asnières :
2. Considérant d'une part que le mémoire en intervention enregistré le 13 juillet 2016, présenté par le syndicat CGT des chômeurs et précaires de Gennevilliers - Villeneuve-la-Garenne - Asnières, en tant qu'il tend à l'annulation de l'article 1er du jugement du 23 février 2016 par lequel le tribunal administratif de Paris n'a pas admis son intervention, doit être regardé comme un appel principal dirigé contre cette partie du jugement ; que le jugement, notifié au syndicat le 25 février 2016 à l'adresse figurant sur son mémoire, a été renvoyé au greffe du tribunal le 21 mars 2016 avec la mention " Destinataire inconnu à l'adresse " ; que Pole Emploi est fondé à soutenir qu'en tant qu'elles constituent un appel du jugement, les conclusions du syndicat, reçues alors que le délai d'appel était expiré, sont tardives et donc irrecevables ;
3. Considérant que si le syndicat CGT des chômeurs et précaires de Gennevilliers - Villeneuve-la-Garenne - Asnières entend intervenir à l'appui des conclusions de la requête d'appel de M. A...il ne peut, toutefois, au regard de son objet statutaire, être regardé comme disposant d'un intérêt suffisant pour être recevable à intervenir dans un contentieux indemnitaire opposant l'un de ses membres à une personne morale de droit public ; qu'en outre, son mémoire, qui se borne à contester le jugement du tribunal en tant qu'il n'a pas admis son intervention en première instance, est dépourvu de motivation s'agissant des mérites de la requête de M.A... ; que par suite, son intervention n'est pas admise ;
Sur la régularité du jugement :
4. Considérant qu'il résulte des motifs mêmes du jugement que le tribunal administratif de Paris, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments soulevés, a expressément répondu aux moyens du requérant ; que si M. A...soutient que la motivation, outre qu'elle serait imprécise, comporterait des contradictions, sa critique porte sur le bien-fondé du jugement et non sur sa régularité ;
Sur le bien-fondé du jugement :
5. Considérant que M. A...ne peut, au soutien de ses conclusions indemnitaires, utilement invoquer l'insuffisante motivation de la décision par laquelle Pôle Emploi a rejeté sa réclamation préalable ;
6. Considérant que M. A...ne peut utilement invoquer, à l'appui de ses conclusions tendant à la condamnation de Pôle Emploi à réparer le préjudice subi résultant de la méconnaissance de ses obligations de service public, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 24 juin 1793 qui ne fait pas partie des normes juridiques de droit positif ; qu'il ne peut, davantage, au soutien de son argumentation tirée de la méconnaissance par Pôle Emploi de son obligation d'accompagnement, utilement invoquer les dispositions du 5ème alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, auquel renvoie le Préambule de la Constitution du 4 octobre 1958, aux termes desquelles " Chacun a le devoir de travailler et le droit d'obtenir un emploi " dès lors qu'une éventuelle insuffisance de Pôle Emploi dans sa mission d'accompagnement des chômeurs n'implique pas pour autant qu'il aurait été porté atteinte au " droit d'obtenir un emploi " au sens des dispositions qui viennent d'être rappelées ;
7. Considérant que, si le requérant se prévaut de l'article 6 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et de l'article 1er de la Charte sociale européenne révisée, ces stipulations ne produisent pas d'effet direct dans l'ordre juridique interne et ne peuvent donc pas être utilement invoquées à l'appui des conclusions indemnitaires présentées par M.A... ;
8. Considérant d'une part qu'aux termes de l'article 29 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit d'accéder à un service gratuit de placement " ;
9. Considérant d'autre part qu'aux termes de l'article L. 5311-1 du code du travail : " Le service public de l'emploi a pour mission l'accueil, l'orientation, la formation et l'insertion ; il comprend le placement, le versement d'un revenu de remplacement, l'accompagnement des demandeurs d'emploi et l'aide à la sécurisation des parcours professionnels de tous les salariés " ; que l'article L. 5312-1 du même code établit une institution nationale publique dotée de la personnalité morale et de l'autonomie financière et lui confère les missions de : " [...] : / 1° Prospecter le marché du travail, développer une expertise sur l'évolution des emplois et des qualifications, procéder à la collecte des offres d'emploi, aider et conseiller les entreprises dans leur recrutement, assurer la mise en relation entre les offres et les demandes d'emploi et participer activement à la lutte contre les discriminations à l'embauche et pour l'égalité professionnelle ; 2° Accueillir, informer, orienter et accompagner les personnes, qu'elles disposent ou non d'un emploi, à la recherche d'un emploi, d'une formation ou d'un conseil professionnel, prescrire toutes actions utiles pour développer leurs compétences professionnelles et améliorer leur employabilité, favoriser leur reclassement et leur promotion professionnelle, faciliter leur mobilité géographique et professionnelle et participer aux parcours d'insertion sociale et professionnelle ; / [...] " ; que l'article L. 5411-6 du même code dispose que " Le demandeur d'emploi immédiatement disponible pour occuper un emploi est orienté et accompagné dans sa recherche d'emploi par l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1. [...] " ; qu'aux termes de l'article L. 5411-6-1 dudit code : " Un projet personnalisé d'accès à l'emploi est élaboré et actualisé conjointement par le demandeur d'emploi et l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 [...]. / Ce projet précise, en tenant compte de la formation du demandeur d'emploi, de ses qualifications, de ses connaissances et compétences acquises au cours de ses expériences professionnelles, de sa situation personnelle et familiale ainsi que de la situation du marché du travail local, la nature et les caractéristiques de l'emploi ou des emplois recherchés, la zone géographique privilégiée et le niveau de salaire attendu. Le projet personnalisé d'accès à l'emploi retrace les actions que l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 s'engage à mettre en oeuvre dans le cadre du service public de l'emploi, notamment en matière d'accompagnement personnalisé et, le cas échéant, de formation et d'aide à la mobilité " ; qu'aux termes de l'article R. 5411-11 du code du travail : " [...], le demandeur d'emploi immédiatement disponible accomplit de manière permanente, tant sur proposition de l'un des organismes mentionnés à l'article L. 5311-2, en particulier dans le cadre du projet personnalisé d'accès à l'emploi prévu à l'article L. 5411-6-1, que de leur propre initiative, des actes positifs et répétés en vue de retrouver un emploi, de créer ou de reprendre une entreprise " ; qu'enfin aux termes de l'article R. 5411-14 du même code dans sa rédaction issu du décret n°2014-524 du 22 mai 2014 : " Le projet personnalisé d'accès à l'emploi est élaboré conjointement par le demandeur d'emploi et Pôle emploi ou un des organismes mentionnés à l'article L. 5411-6-1 lors de l'inscription sur la liste des demandeurs d'emploi ou au plus tard dans les quinze jours suivant cette inscription. Il est actualisé selon la périodicité et les modalités définies avec le demandeur d'emploi. A l'issue de l'élaboration ou de l'actualisation du projet, Pôle emploi ou l'un des organismes mentionnés à l'article L. 5411-6-1 le communique au demandeur d'emploi " ; que le même article dans ses dispositions issues du décret n°2008-1056 du 13 octobre 2008 prévoyait une actualisation du projet personnalisé au moins tous les trois mois ;
10. Considérant enfin qu'aux termes de l'article L. 5312-3 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable : " Une convention pluriannuelle conclue entre l'Etat, l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage mentionné à l'article L. 5427-1 et l'institution publique mentionnée à l'article L. 5312-1 définit les objectifs assignés à celle-ci au regard de la situation de l'emploi et au vu des moyens prévisionnels qui lui sont alloués par l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage et l'Etat. / Elle précise notamment : / 1° Les personnes devant bénéficier prioritairement des interventions de l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 ; / 2° Les objectifs d'amélioration des services rendus aux demandeurs d'emploi et aux entreprises et en particulier le nombre de demandeurs d'emplois suivis en moyenne par conseiller et les objectifs de réduction de ce ratio ; / [...] " ; que par une convention tripartite, conclue le 11 janvier 2012 pour les années 2012-2014, l'Etat et l'UNEDIC ont fixé à Pôle Emploi l'objectif de favoriser l'accès à l'emploi des demandeurs d'emploi ;
11. Considérant que la seule circonstance d'être privé d'emploi n'ouvre pas droit, en elle-même, à être indemnisé, en dehors des conditions posées par la loi ; que toutefois, une carence de Pôle Emploi dans la mise en oeuvre de ses missions définies à l'article L. 5311-1 du code du travail précité est susceptible d'engager sa responsabilité pour faute lorsqu'elle entraîne un préjudice direct et certain pour la personne privée d'emploi ; qu'il incombe au juge d'apprécier dans chaque cas les diligences accomplies par Pôle Emploi en tenant compte du comportement de la personne en recherche d'emploi ;
12. Considérant que si M. A...soutient que de 1994 à 2009 il n'a pas bénéficié d'un accompagnement approprié par le service public d'aide au retour à l'emploi, ses griefs ne sont pas assortis de précisions suffisantes pour permettre à la cour d'en apprécier le bien-fondé ;
13. Considérant que le projet personnalisé d'accès à l'emploi de M. A...a été mis au point le 16 juin 2009 ; qu'il recherchait alors un emploi de veilleur de nuit, de réceptionniste-standardiste ou d'agent d'entretien d'espaces verts ; qu'il s'est entretenu par téléphone le 7 juillet 2009, puis sur le site les 19 novembre 2009, 4 février 2010, 3 mai 2011, 15 juin 2011 avec des conseillers de l'agence Pôle Emploi de Nancy ; qu'après son déménagement dans le Lot et Garonne, il a été suivi par l'agence de Villeneuve sur Lot où il aurait été reçu, selon Pôle Emploi, le 30 septembre 2011 ; que son projet a été actualisé le 29 décembre 2011 ; qu'il recherchait alors un emploi d'agent d'accueil ou de réceptionniste ; qu'après avoir été reçu le 15 mars 2012, il a refusé de déférer à une convocation en juin 2012 ; que les entretiens pour lesquels il avait été convoqué ont été remplacés par des échanges téléphoniques les 28 aout 2012 et 19 septembre 2012 ; qu'il a été reçu par le directeur de l'agence le 28 novembre 2012, puis par un conseiller emploi le 15 janvier 2013, puis à nouveau par le directeur de l'agence le 27 mars 2013 ; que
M. A...a été orienté vers le cabinet de consultant C3 groupe sud-ouest avec lequel il a signé un contrat d'accompagnement de six mois, pour la période d'avril à septembre 2013 ; qu'il a eu un entretien téléphonique avec la directrice adjointe de l'agence le 9 juillet 2013 ; qu'après un déménagement sur Marmande, l'entretien prévu en octobre 2013 a été reporté à la demande de l'intéressé ; que M. A...a été convoqué à un forum de recrutement qui s'est tenu le
22 mai 2014, suivi d'un entretien le 6 juin 2014 et d'un entretien téléphonique le 23 octobre 2014 ; qu'il a bénéficié, au cours de cette année, d'un accompagnement et d'un financement afin de lui permettre de bénéficier d'une formation en droit dispensée par le CNED ; que de juin 2015 à juin 2016, il a perçu l'allocation spécifique de solidarité ; que son projet de retour à l'emploi a été modifié à l'occasion des entretiens du 21 juillet 2016, 8 aout 2016, 23 septembre 2016,
15 novembre et 25 novembre 2016 en vue de l'obtention d'un emploi administratif, notamment dans le secteur scolaire ;
14. Considérant que la simple circonstance qu'il ait été reçu par des personnes différentes ne révèle pas une défaillance dans le suivi ; qu'il ne ressort pas des comptes-rendus d'entretien, qui reprennent sous une forme stéréotypée des données pertinentes relatives à sa situation et à l'emploi souhaité, qui au demeurant évoluaient peu, que l'accompagnement aurait été négligent ; qu'en particulier, les conseillers de Pôle Emploi ont conseillé à M. A...d'adapter ses exigences aux besoins du marché local du travail, ont procédé à des bilans réguliers, l'ont convoqué à plusieurs reprises à des forums d'emplois et l'ont finalement orienté vers des formations qualifiantes ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que la discontinuité du suivi en 2010 aurait été à l'origine d'une perte de chance de retrouver un emploi dans la région de Nancy ; que les difficultés rencontrées par M. A...pour trouver un emploi de réceptionniste ou d'agent d'accueil dans le Lot et Garonne doivent être imputées à la rareté de ce type d'emploi dans cette région rurale, à l'absence de mobilité du requérant qui ne dispose pas du permis de conduire et recherchait un travail à proximité de son domicile et à ses exigences salariales, et non à une défaillance de Pôle Emploi dans sa mission d'assurer un suivi personnalisé et régulier ;
15. Considérant que si M. A...soutient que sa situation de travailleur handicapé aurait justifié la mise en place d'un accompagnement renforcé de la part de Pôle Emploi, il ne résulte pas de l'instruction que le service n'aurait pas tenu compte de sa situation de travailleur handicapé qui limitait les possibilités d'emploi et de ses difficultés de déplacement liées à l'absence de permis de conduire ; qu'en tout état de cause, le requérant qui ne précise pas la nature de " l'accompagnement renforcé " dont il aurait du bénéficier ne met pas la cour en mesure de se prononcer sur une défaillance éventuelle de Pôle Emploi de ce seul chef ;
16. Considérant qu'il résulte de la combinaison des articles L. 5411-6 et L. 5412-1 du code du travail qu'il appartient au demandeur d'emploi, lui-même, d'accomplir des actes positifs et répétés de recherche d'emploi ; que M. A...a été convoqué par Pôle Emploi à plusieurs forums destinés notamment aux travailleurs handicapés sur la période 2009 à 2014 ; que
M.A..., qui réside en zone rurale et souhaitait un emploi adapté à son état situé à maximum cinq minutes de son domicile, ne saurait faire grief au service de ne pas lui avoir proposé d'offres correspondant à ses voeux dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que des emplois susceptibles de le satisfaire existaient ;
17. Considérant que s'il résulte de l'instruction que M. A...s'est inscrit en octobre 2012 comme auto-entrepreneur pour exercer une activité de " conseil pour les affaires et consultant en gestion ", l'échec rapide de son projet ne saurait être imputé à Pôle Emploi qui, s'il peut fournir des conseils à un demandeur d'emploi qui souhaiterait créer une activité, n'a pas en tout état de cause pour mission d'aider directement à la création d'entreprise ;
18. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que M.A..., qui a longtemps persisté à rechercher des emplois de veilleur de nuit, de réceptionniste-standardiste, d'agent d'entretien ou d'accueil, alors même que les offres adaptées à ses exigences étaient rares, et qui a cherché à deux reprises à créer son entreprise dans des secteurs différents ait été alors demandeur d'une formation particulière ; qu'il n'en résulte pas davantage que Pôle Emploi l'aurait encouragé à persévérer dans des voies dépourvues de perspective ; que si ce n'est qu'en 2013 que le service l'a orienté vers un accompagnement plus particulièrement destiné à des personnes handicapées, CAP Emploi et C3 sud-ouest, et si des formations d'assistant juridique lui ont été alors proposées, notamment auprès du CNED, cette réorientation tardive répondait au bilan, dressé par l'intéressé lui-même, de l'échec de ses efforts initiaux ; que la carence de Pole Emploi à lui proposer en temps voulu cette réorientation n'est pas établie ;
19. Considérant que la circonstance que le dossier de M. A...ait pu comporter occasionnellement des données obsolètes ne l'a pas privé d'une chance sérieuse d'obtenir un emploi dès lors que les informations relatives à sa situation et à ses souhaits en matière d'emploi étaient exactes ; qu'elle n'a pas dès lors été à l'origine de son préjudice ;
20. Considérant que les préjudices pour lesquels M. A...demande réparation, et notamment sa souffrance morale, sa perte de compétence technique et la privation de ressources n'étant pas consécutives à des fautes de Pôle Emploi qui a suivi sa situation sans l'abandonner à lui-même et qui n'était pas tenu à une obligation de résultat, le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes ;
Sur les demandes présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
21. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Pôle Emploi, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, soit condamné à verser à M. A...et au syndicat CGT des chômeurs et précaires de Gennevilliers - Villeneuve-la-Garenne - Asnières les sommes qu'ils demandent au titre de ces dispositions ; que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées par Pôle Emploi sur le même fondement.
DÉCIDE :
Article 1er : L'intervention du syndicat CGT des chômeurs et précaires de Gennevilliers - Villeneuve la Garenne - Asnières n'est pas admise.
Article 2 : La requête de M. A...est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de Pôle Emploi présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., à Pôle Emploi et au syndicat des chômeurs CGT de Gennevilliers - Villeneuve-la-Garenne - Asnières.
Copie en sera adressée au ministre du travail.
Délibéré après l'audience du 6 mars 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Bouleau, premier vice-président,
- M. Bernier, président assesseur,
- Mme Pena, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 21 mars 2018.
Le rapporteur,
Ch. BERNIERLe président,
M. BOULEAU
Le greffier,
E. MOULIN
La République mande et ordonne au ministre du travail en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
5
N° 10PA03855
2
N° 16PA02233