Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 26 septembre 2016 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de destination.
Par un jugement n°1618365 du 25 avril 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 24 mai 2017, Mme A..., représenté par Me Cerf, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 25 avril 2017 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de faire droit à ses conclusions de première instance ;
3°) d'enjoindre au préfet de police, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du 30ème jour suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les juges de première instance ont omis de statuer sur le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire, sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par l'obligation de quitter le territoire français, ainsi que sur l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales soulevé à l'appui de l'obligation de quitter le territoire français ;
- le tribunal administratif a commis une erreur de droit en se fondant sur l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979, abrogé à la date de l'arrêté attaqué ;
- le tribunal a méconnu les dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;
- le refus de titre est insuffisamment motivée ;
- le préfet de police a méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et s'est cru, à tort, lié par l'avis du médecin chef du service médical de la préfecture de police est irrégulier ;
- le préfet a méconnu les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il a également commis une erreur manifeste d'appréciation concernant sa situation personnelle ;
- elle est fondée à exciper de l'illégalité du refus de titre au soutien de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français ;
- la décision d'obligation de quitter le territoire français est également insuffisamment motivée ;
- elle est également illégale pour les mêmes raisons que l'est le titre de séjour ;
- en prenant cette mesure d'éloignement à son encontre, le préfet a méconnu l'article
L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Pena,
- et les observations de Me Cerf, avocat de Mme A....
1. Considérant que Mme B...A..., ressortissante chinoise née le 1er mars 1971, entrée en France le 24 mars 2012, a sollicité une carte de séjour dans le cadre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par une décision du 26 septembre 2016, le préfet de police a rejeté sa demande ; que Mme A...relève appel du jugement du 25 avril 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant, en premier lieu, que si Mme A...soutient que le tribunal aurait omis de répondre à ses moyens tirés de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire français et de la méconnaissance de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par cette décision, il ressort de la lecture du jugement qu'il a été statué sur ces deux moyens aux points 3 et 12 du jugement contesté ; que si l'appelante fait également valoir qu'il n'aurait pas été statué sur le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qu'elle aurait soulevé à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire, il ne ressort pas de ses écritures de première instance que celui-ci aurait été invoqué à l'encontre de la mesure d'éloignement ; qu'ainsi, le jugement dont appel n'est entaché d'aucune omission à statuer ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'en se fondant sur les dispositions de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 et non sur celles de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration pourtant applicables compter du 1er janvier 2016, le tribunal administratif n'a pas entaché son jugement d'irrégularité dès lors dont les dispositions dont s'agit sont en tous points identiques ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : [...] 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ; qu'ainsi, en se fondant sur l'absence de preuve de résidence habituelle en France, le tribunal administratif n'a pas soulevé un moyen d'ordre public mais fait application des conditions prévues par l'article ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la violation, par le tribunal, des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative doit être écarté ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation dirigées contre le refus de titre de séjour :
5. Considérant, en premier lieu que l'arrêté attaqué vise les textes applicables et comporte les considérations de fait qui en constituent le fondement ; qu'il est ainsi suffisamment motivé au sens des dispositions de la loi du 11 juillet 1979, nonobstant la circonstance que le préfet n'aurait pas précisément mentionné l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans les visas de l'arrêté ; que le moyen invoqué doit ainsi être écarté ;
6. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, dans son avis du 30 août 2016, le médecin, chef du service médical de la préfecture, a estimé au vu des éléments qui lui avaient été transmis, que le séjour de Mme A...en France n'était pas justifié dès lors que si son état de santé nécessitait une prise en charge médicale de longue durée dont le défaut était susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle pouvait néanmoins bénéficier d'un traitement et d'un suivi appropriés en Chine ; qu'aucun des certificats médicaux produits au dossier par la requérante n'est de nature à remettre en cause l'avis en question quant à la possibilité pour elle de bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que Mme A...ne saurait davantage reprocher au médecin, chef du service médical de la préfecture, de ne pas avoir mentionné, dans son avis, sa capacité à voyager sans risque vers le pays de renvoi, dès lors que rien au dossier, notamment pas l'hépatite B dont elle se trouve atteinte, ne pouvait laisser penser qu'elle n'était pas en mesure de supporter un tel voyage ; que, dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la condition de résidence habituelle en France, Mme A...n'est pas fondée à soutenir qu'en lui refusant le titre sollicité, le préfet de police aurait méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
7. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police, qui a procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressée, se serait cru lié par l'avis du médecin, chef du service médical de la préfecture de police, et aurait ainsi méconnu l'étendue de sa compétence ;
8. Considérant, en quatrième lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté comme inopérant à l'encontre de la décision de refus de titre de séjour ; qu'il n'est en revanche opérant qu'à l'encontre de la décision désignant le pays à destination duquel un étranger sera renvoyé s'il ne quitte pas volontairement le territoire français ;
9. Considérant, en cinquième et dernier lieu, que les moyens tirés de ce que l'arrêté aurait été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de ce qu'il serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, au soutien desquels Mme A...ne fait valoir aucun élément nouveau, doivent être écartés par adoption des motifs retenus par le tribunal au point 7 du jugement attaqué ;
En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français :
10. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision portant refus de titre à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
11. Considérant, en deuxième lieu, que la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique ; que, dès lors, le refus de titre de séjour étant suffisamment motivé, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire serait insuffisamment motivée doit être écarté ;
12. Considérant, en quatrième lieu, qu'ainsi qu'il a été rappelé au point 8 du présent arrêt, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
13. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux développés au point 9 du présent arrêt, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de ce que le préfet de police aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation, doivent être écartés ;
14. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux développés au point 6 du présent arrêt, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la violation doit être écarté ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
15. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que MmeA..., de nationalité chinoise persiste à soutenir devant la Cour que sa vie serait menacée en cas de retour dans son pays d'origine en raison de l'absence de traitement médical approprié ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'appelante, dont la demande d'admission au séjour au titre de l'asile a été rejetée par décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides le 13 juin 2013, confirmée par la cour nationale du droit d'asile le 8 juin 2014, ne justifie pas davantage en appel qu'en première instance que sa vie serait menacée en cas de retour en Chine ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne saurait être retenu ;
16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 22 mai 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Bouleau, premier vice-président,
- M. Bernier, président assesseur,
- Mme Pena, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 12 juin 2018.
Le rapporteur,
E. PENALe président,
M. BOULEAU
Le greffier,
E. MOULIN
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
5
N° 10PA03855
2
N° 17PA01768