Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. J... K... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande de mutation à La Réunion ainsi que l'arrêté ministériel prononçant les mutations au titre de l'année 2017 pour le poste sur lequel il a présenté une demande, et d'enjoindre au ministre de l'intérieur de modifier la liste des fonctionnaires mutés et de lui accorder sa mutation.
Par un jugement n° 1717115/5-1 du 20 juin 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 20 août 2019 et 10 février 2021, M. K..., représenté par Me L... A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1717115/5-1 du 20 juin 2019 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler la décision implicite rejetant sa demande de mutation, ensemble l'arrêté ministériel en tant qu'il prononce la mutation de Mme N... E... F..., M. C... B..., M. D... I... et M. G... H... au titre de l'année 2017 ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de modifier la liste des fonctionnaires mutés et de lui accorder la mutation qu'il demande ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement a été rendu en méconnaissance du principe du contradictoire à défaut pour les premiers juges d'avoir pris en compte le mémoire en réplique qu'il avait produit et de l'avoir visé ; le tribunal s'est exclusivement fondé sur le mémoire en défense, produit après la clôture de l'instruction, sans qu'il ait été mis à même de discuter utilement les éléments sur lesquels il s'est fondé ;
- les premiers juges n'ont pas répondu au moyen, qui n'était pas inopérant, tiré du défaut d'indication des motifs de la décision implicite rejetant sa demande de mutation malgré la demande de communication des motifs qu'il avait formulée en ce sens ;
- les décisions attaquées ne sont pas intervenues après un examen particulier de sa situation ;
- ces décisions ont été prises à l'issue d'une procédure irrégulière compte tenu de l'irrégularité entachant la composition de la commission administrative paritaire au regard des articles 34 et 35 du décret du 28 mai 1982 ;
- le ministre de l'intérieur s'est cru à tort lié par l'avis de la commission administrative paritaire ;
- les décisions attaquées, qui ne sont pas fondées sur des critères objectifs, sont entachées d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 ; l'administration ne justifie pas des critères qui l'ont conduite à s'écarter du barème et à prononcer la mutation d'agents ayant un moins bon profil que le sien et un nombre de points inférieur ; c'est à tort que le tribunal a relevé que les mutations devaient être uniquement prononcées en tenant compte de l'intérêt du service et de la situation familiale ; le barème édicté par l'administration est l'unique instrument qui permet de vérifier que le principe d'égalité a été respecté ; les critères pris en compte par l'administration méconnaissent le principe d'égalité de traitement des fonctionnaires placés dans une même situation ; les comparaisons opérées par l'administration au titre du mérite respectif des candidats sont entachées de contradiction dès lors qu'elle valorise l'expérience des agents mutés en tenant compte des années durant lesquelles ils n'étaient pas fonctionnaire et minimise son expérience ; en ce qui concerne Mme E... F..., elle n'a pas une plus grande ancienneté que la sienne ni une plus grande expérience en matière de sécurité publique et a une situation familiale différente de la sienne ; compte tenu de son affectation en zones sensibles, il disposait, au regard du barème, d'une ancienneté plus importante que celle de Mme E... F... ; l'administration n'a pas respecté le barème qu'elle a édicté.
Par un mémoire en défense enregistré le 1er février 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
La requête de M. K... a été communiquée à Mme N... E... F..., M. C... B..., M. D... I... et à M. G... H... qui n'ont pas produit de mémoire en défense.
Par ordonnance du 23 février 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 mars 2021 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 82-451 du 28 mai 1982 :
- le décret n° 95-654 du 9 mai 1995 ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme M...,
- les conclusions de Mme Jimenez, rapporteur public,
- et les observations de M. K....
Considérant ce qui suit :
1. M. K..., gardien de la paix, affecté à la direction de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne de la préfecture de police, a sollicité, dans le cadre du mouvement de mutation organisé au titre de l'année 2017, sa mutation au secrétariat général de l'administration de la police nationale (SGAP) de La Réunion. A l'issue de la séance de la commission administrative paritaire nationale du 28 juin 2017, le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande et prononcé, notamment, l'affectation de Mme N... E... F..., M. D... I... et M. G... H... au secrétariat général pour l'administration de la police (SGAP) de La Réunion, à compter du 1er septembre 2018. M. K... relève appel du jugement n° 1717115/5-1 du 20 juin 2019, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande de mutation, et des décisions portant mutation de " Mme N... E... F..., M. D... I..., M. C... B... et M. G... H... ". M. B..., dont il ressort du dossier qu'il est toujours en exercice au sein de la circonscription de sécurité publique de Marseille, n'ayant pas bénéficié d'une mutation dans le cadre du mouvement en litige, la requête de M. K... doit être regardée comme ne visant pas l'intéressé.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, l'article R. 741-2 du code de justice administrative dispose que la décision " contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait mention ". L'omission dans les visas de la mention ou de l'analyse d'un mémoire produit avant la clôture de l'instruction n'est, par elle-même, de nature à vicier la régularité du jugement attaqué que s'il ressort des pièces du dossier que ces écritures apportaient des éléments nouveaux auxquels il n'aurait pas été répondu dans les motifs.
3. M. K... soutient que le tribunal s'est fondé sur le mémoire en défense, produit après la clôture de l'instruction, sans qu'il ait été mis à même de discuter utilement les éléments contenus dans ce mémoire, le tribunal n'ayant pas tenu compte de son mémoire en réplique, qu'il n'a pas visé. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le tribunal, qui avait fixé la clôture de l'instruction au 30 avril 2019 par une ordonnance du 29 mars 2019, a communiqué le premier mémoire en défense produit par le ministre de l'intérieur et qui a été enregistré le 24 mai 2019. Cette communication a donc eu pour effet de rouvrir l'instruction. Si M. K... a produit un mémoire en réplique le 31 mai 2019, soit avant la clôture automatique de l'instruction trois jours francs avant l'audience, le tribunal n'était pas tenu de le viser dès lors qu'il ne contenait aucun élément nouveau relatif aux moyens qu'il avait soulevés à l'encontre des décisions contestées devant le tribunal. Il suit de là que le moyen invoqué ne peut qu'être écarté.
4. En second lieu, M. K... fait valoir que le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré du défaut de motivation du refus implicite de le muter à La Réunion alors qu'il avait demandé communication des motifs de cette décision. Il ressort toutefois des motifs du jugement attaqué que les premiers juges ont correctement répondu au moyen au point 2. du jugement, en rappelant que les décisions de refus de mutation n'avaient pas à être formellement motivées, l'administration ayant, au demeurant, précisé dans le cadre de la présente instance les motifs qui l'ont conduit à écarter la candidature du requérant. Dans ces conditions, il n'y avait pas lieu pour le tribunal de répondre de façon plus détaillée à ce qui ne constituait pas un moyen opérant. M. K... ne peut donc faire grief au tribunal d'avoir omis de répondre au moyen qu'il avait soulevé.
5. Il résulte de ce qui précède que le tribunal n'a entaché son jugement d'aucune irrégularité susceptible d'entraîner son annulation.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
6. En premier lieu, la mutation n'est pas un avantage dont l'attribution constitue un droit pour le fonctionnaire qui l'a demandée, au sens de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Il suit de là, à supposer que M. K... ait entendu soutenir que les décisions litigieuses n'étaient pas motivées, que le refus de mutation n'est pas au nombre des décisions administratives défavorables dont l'article L. 211-2 impose la motivation. M. K... ne peut davantage faire grief au ministre de l'intérieur de ne pas lui avoir communiqué les motifs du refus implicite qu'il lui a opposé. Le moyen tiré de l'absence de motivation des décisions contestées doit donc être écarté.
7. En deuxième lieu, aux termes de l'article 34 du décret du 28 mai 1982 : " Les commissions administratives siègent en formation restreinte lorsqu'elles sont saisies de questions résultant de l'application des articles (...) 60, (...) de la loi du 11 janvier 1984 (...) ". Aux termes de l'article 35 du même décret : " Lorsque les commissions administratives paritaires siègent en formation restreinte, seuls les membres titulaires et, éventuellement, leurs suppléants représentant le grade auquel appartient le fonctionnaire intéressé et les membres titulaires ou suppléants représentant le grade immédiatement supérieur ainsi qu'un nombre égal de représentants de l'administration sont appelés à délibérer ".
8. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du procès-verbal de la commission administrative paritaire nationale du 28 juin 2017, produit en première instance, que seuls les représentants du personnel pour les grades de gardiens de la paix et de brigadier de police ont pris part au délibéré et ont procédé au vote, s'agissant de l'examen des demandes de mutation des gardiens de la paix. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la composition de cette commission manque en fait et doit être écarté.
9. En troisième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 : " L'autorité compétente procède aux mouvements des fonctionnaires après avis des commissions administratives paritaires ".
10. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le ministre de l'intérieur, qui a exposé les circonstances justifiant le rejet de la demande de mutation de M. K... dans le cadre de ses écritures devant les premiers juges, aurait entaché les décisions attaquées d'un défaut d'examen de la situation particulière de l'intéressé ou se serait estimé, à tort, lié par l'avis de la commission administrative paritaire. Il suit de là que les moyens invoqués à cet égard ne peuvent qu'être écartés.
11. En quatrième lieu, aux termes de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 : " L'autorité compétente procède aux mouvements des fonctionnaires après avis des commissions administratives paritaires. / (...). / Dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service, les affectations prononcées doivent tenir compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille. Priorité est donnée aux fonctionnaires séparés de leur conjoint pour des raisons professionnelles, aux fonctionnaires séparés pour des raisons professionnelles du partenaire avec lequel ils sont liés par un pacte civil de solidarité lorsqu'ils produisent la preuve qu'ils se soumettent à l'obligation d'imposition commune prévue par le code général des impôts, aux fonctionnaires handicapés (...) et aux fonctionnaires qui exercent leurs fonctions (...) dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles, (...) ". Aux termes de l'article 47 du décret du 9 mai 1995 : " Sans préjudice de l'application des dispositions de l'article 60, alinéa 4, de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, les fonctionnaires de police peuvent obtenir, après avis de la commission administrative paritaire et dans la mesure compatible avec les nécessités du service, des mutations dérogeant aux règles d'établissement des tableaux périodiques de mutation, pour raisons de santé ou autres circonstances graves ou exceptionnelles ". Lorsque dans le cadre d'un mouvement de mutation un poste a été déclaré vacant, alors que des agents se sont portés candidats dans le cadre du mouvement, l'administration doit procéder à la comparaison des candidatures dont elle est saisie en fonction, d'une part, de l'intérêt du service, d'autre part, si celle-ci est invoquée, de la situation de famille des intéressés, appréciée compte tenu des priorités fixées par les dispositions précitées de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984.
12. M. K... soutient qu'il justifiait, dans le cadre du mouvement de mutation des gardiens de la paix au titre de l'année 2017, d'une ancienneté et d'un nombre de points supérieur aux trois agents affectés sur les postes qu'il demandait et dont il conteste les mutations. Toutefois, les dispositions précitées de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 ne subordonnent la légalité des mutations prononcées lors des mouvements de personnels, ni au respect d'un régime de priorité, ni à l'observation d'un barème de mutation, lequel, quand bien même il serait mentionné dans une instruction ministérielle du 21 avril 2017, est purement indicatif. Par suite, la circonstance que M. K... justifiait d'une ancienneté et d'un " barème de mutation " supérieurs à ceux des agents susmentionnés ayant fait l'objet des décisions de mutation attaquées n'est pas, à elle seule, de nature à établir que les décisions attaquées seraient entachées d'erreur de droit ou d'erreur manifeste d'appréciation.
13. En outre, si M. K... fait valoir qu'il a davantage d'ancienneté et d'aptitude au poste, étant entré dans la police en 2006, affecté de 2006 à 2009 à la circonscription de sécurité publique (CSP) de Vitry-sur-Seine, puis durant six mois à la direction départementale de sécurité publique, et à compter de septembre 2009 à la direction de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne, il ressort, toutefois, des pièces du dossier, et notamment du mémoire produit en première instance par le ministre de l'intérieur, que Mme E... F... a exercé pendant douze ans au sein de la CSP de Châlons-sur-Saône, que M. I... a exercé à la préfecture de police au sein de la direction de la police urbaine de proximité pendant neuf ans et au sein de la direction de l'ordre public et de la circulation pendant deux ans et qu'enfin M. H... a été affecté au sein d'une compagnie républicaine de sécurité pendant seize ans. Au surplus, le ministre fait valoir que la situation familiale de chaque agent a été prise en compte. Par suite, eu égard à l'ensemble de ces considérations, le ministre de l'intérieur n'a pas, en tenant compte dans l'intérêt du service, de la nature et de la richesse des expériences acquises par les intéressés au cours de leurs carrières respectives, et en tenant compte de leur situation familiale, commis une erreur de droit ou une erreur manifeste dans l'application des dispositions précitées de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 et de l'article 47 du décret du 9 mai 1995. Le ministre de l'intérieur n'a pas plus méconnu le principe d'égalité de traitement entre fonctionnaires d'un même corps.
14. Il résulte de tout ce qui précède que M. K... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter sa requête en toutes ses conclusions, ensemble celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1 : la requête de M. K... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. J... K... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à Mme N... E... F..., M. D... I..., M. G... H... et M. C... B....
Délibéré après l'audience du 7 avril 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- M. Magnard, premier conseiller,
- Mme M..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 avril 2021.
Le rapporteur,
S. M...Le président,
I. BROTONS
Le greffier,
I. BEDR
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19PA02763