Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiées unipersonnelle (SASU) Menarini Diagnostics France a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des compléments de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, de la taxe additionnelle à cette cotisation, des frais de gestion et de la retenue à la source auxquels elle a été assujettie au titre des années 2011, 2012 et 2013.
Par un jugement n° 1912702/9 et n° 1912706/9 du 7 octobre 2021, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 décembre 2021 et 19 septembre 2022, la SASU Menarini Diagnostics France, représentée par Me Olivier Goldstein, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1912702/9 et n° 1912706/9 du 7 octobre 2021 du Tribunal administratif de Montreuil ;
2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses, en droits et pénalités ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier en ce qu'il est entaché d'une insuffisance de motivation ;
- les transactions qui la lient au groupe Menarini sont exclusives de tout transfert indirect de bénéfices au sens de l'article 57 du code général des impôts et l'administration ne peut s'immiscer dans la gestion de la société en l'absence d'acte anormal de gestion ;
- pour le calcul des rehaussements, l'application de la médiane au détriment du premier intervalle interquartile n'est pas adaptée compte tenu de la situation du groupe et du contexte économique.
Par deux mémoires en défense enregistrés les 21 février et 21 novembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens présentés par la requérante ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 21 novembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 22 décembre 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Fullana,
- les conclusions de M. Segretain, rapporteur public,
- et les observations de Me Baccarani, substituant Me Goldstein, représentant la SASU Menarini Diagnostics France.
Considérant ce qui suit :
1. La SASU Menarini Diagnostics France (AMDF), qui exerce une activité d'achat et de revente d'appareils et de produits de diagnostics dans le domaine de l'autodiagnostic et des laboratoires, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, à l'issue de laquelle une proposition de rectification du 22 juin 2015 lui a été notifiée, l'administration estimant que la politique de prix pratiquée par le groupe dont elle fait partie conduisait à un transfert de bénéfices au profit de deux sociétés italiennes au sens de l'article 57 du code général des impôts. Au terme de la procédure, la société AMDF a été assujettie à des compléments de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises et à une retenue à la source au titre des années 2011 à 2013 assortis des intérêts de retard et, pour la retenue à la source, de majorations. Par la présente requête, la société AMDF relève appel du jugement du 7 octobre 2021 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments présentés par la société requérante, ont statué aux points 6 à 13 du jugement attaqué sur le moyen tiré de l'absence d'un transfert indirect de bénéfices, en examinant notamment la situation économique et financière de la société AMDF, le contexte économique et technologique du marché du diagnostic, les difficultés étrangères au groupe alléguées par la requérante, la politique tarifaire pratiquée au sein du groupe, et non en se fondant sur la seule existence de pertes récurrentes. Les premiers juges se sont également prononcés sur le recours par l'administration à la méthode transactionnelle de la marge nette et la méthode du prix comparable pour procéder à la réintégration dans les bénéfices imposables de la rémunération que la société requérante aurait dû percevoir. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué manque en fait et doit être écarté.
Sur le bien-fondé des impositions :
3. Aux termes de l'article 57 du code général des impôts : " Pour l'établissement de l'impôt sur le revenu dû par les entreprises qui sont sous la dépendance ou qui possèdent le contrôle d'entreprises situées hors de France, les bénéfices indirectement transférés à ces dernières, soit par voie de majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont incorporés aux résultats accusés par les comptabilités. Il est procédé de même à l'égard des entreprises qui sont sous la dépendance d'une entreprise ou d'un groupe possédant également le contrôle d'entreprises situées hors de France. / (...) A défaut d'éléments précis pour opérer les rectifications prévues aux premier, deuxième et troisième alinéas, les produits imposables sont déterminés par comparaison avec ceux des entreprises similaires exploitées normalement ". Ces dispositions instituent, dès lors que l'administration établit l'existence d'un lien de dépendance et d'une pratique entrant dans leurs prévisions, une présomption de transfert indirect de bénéfices par les entreprises qui sont sous la dépendance ou qui possèdent le contrôle d'entreprises situées hors de France au profit de ces dernières, qui ne peut être utilement combattue par les entreprises imposables en France qu'à charge, pour elles, d'apporter la preuve que les avantages qu'elles ont consentis ont été justifiés par l'obtention de contreparties favorables à leur propre exploitation.
En ce qui concerne l'existence d'un transfert indirect de bénéfices :
4. Il est constant que la société AMDF, créée en 2003, est détenue en totalité par la société Menarini France. Cette dernière est détenue par la société italienne A. Menarini Industrie Farmaceutiche Riunite SRL (Menarini IFR) à hauteur de 86,50 % de son capital, directement ou par l'intermédiaire de la filiale, la société A. Menarini Farmaceutica Internazionale (AMFI). La société AMDF exerce une activité d'achat et de revente d'appareils et de produits de diagnostics dans le domaine, d'une part, de l'autodiagnostic, consistant en la distribution de lecteurs de glycémie et la vente de consommables liés, branche dite " Check-up ", et d'autre part, des laboratoires consistant en la vente et l'installation de matériels dans les laboratoires, branche dite " Laboratoires ". Il est tout aussi constant que la société Menarini IFR assure le suivi de la création et du développement des produits nouveaux, que les produits que le groupe vend sont acquis auprès de sociétés tierces qui les fabriquent, que les contrats d'approvisionnement sont négociés au niveau du groupe pour l'ensemble des sociétés qui les distribuent en Europe, à l'exception de certains produits de la branche " Laboratoires " que la société AMDF achète directement auprès de sociétés tierces, et que la société italienne A. Menarini Diagnostics SRL (AMDI) sélectionne les produits qui sont distribués par les sociétés du groupe. Il résulte également de l'instruction que la société AMDF a pour activité fonctionnelle le développement de l'image de marque et des produits sur le marché français, qu'elle gère les commandes et leur suivi, le recouvrement et la facturation, qu'elle prend ainsi en charge la fonction logistique, commercialise les produits grâce à ses propres forces de vente et, depuis 2012, à l'aide également, contre rémunération, du personnel commercial de la société Menarini France pour l'activité " Check-up ". Du fait de ses fonctions, la société AMDF assume l'intégralité des risques de stocks, des délais de paiement et des créances douteuses, les risques de marché étant partagés pour leur part entre les sociétés AMDF et AMDI. La société italienne Menarini IFR a, quant à elle, la fonction d'entrepreneuse principale, celle-ci déterminant les orientations stratégiques du groupe et gérant la marque au niveau international. La société AMDF ne conteste pas exercer, ainsi que l'a relevé l'administration dans la proposition de rectification du 22 juin 2015, la fonction principale de distributeur du groupe Menarini en France, en dépit de la circonstance qu'elle acquiert une partie de ses produits directement auprès d'une société tierce pour la branche " Laboratoires ".
5. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la société AMDF réalise des pertes d'exploitation récurrentes depuis sa création en dépit de la rentabilité propre à chaque branche d'activité et quelle que soit l'évolution de son chiffre d'affaires, alors même qu'elle n'est plus en phase de pénétration du marché, comme elle le reconnaît elle-même dans le questionnaire sur sa politique de prix de transfert. Il est constant que la société AMDF a bénéficié d'importantes et régulières recapitalisations en nombre et en montant depuis sa création sous la forme d'abandon de créance de sommes en compte courant en contrepartie d'une augmentation de capital. Il résulte également de l'instruction que le groupe, au niveau consolidé, réalise d'importants bénéfices et dégage des taux de marge nette importants tout comme le fournisseur du groupe, la société AMDI. Si la société fait valoir en défense que la référence à la situation bénéficiaire du groupe est inexacte dans la mesure où la date de création des différentes entités diffère, que les fonctions et les risques supportés sont sensiblement différents et que le groupe exerce plusieurs activités dans le domaine pharmaceutique, de la médication hors prescription et du diagnostic, elle ne conteste pas sérieusement le fait qu'elle enregistre des pertes récurrentes dans un groupe dont les résultats sont positifs, quand bien même serait retenu au niveau du groupe le résultat net et non le résultat d'exploitation consolidé. Si la société AMDF fait également valoir que sa situation n'est pas isolée, que d'autres filiales de l'activité " Check-up " ont enregistré des résultats déficitaires durant les exercices en litige tandis que d'autres ont réalisé des résultats bénéficiaires, cette circonstance n'est pas de nature à exclure par principe, comme elle le soutient, l'existence d'une politique de transfert inadaptée.
6. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que les taux de marge brute sur les produits de la gamme G-IHCO, acquis auprès de la société Leica par la société AMDI et revendus à la société AMDF en vue de leur distribution par cette dernière sur le marché français sont très faibles par rapport aux autres produits commercialisés par la société AMDF et sont quasiment vendus à prix coûtant. L'administration a relevé que cette gamme de produits représentait néanmoins une part importante du chiffre d'affaires de la société requérante et que celle-ci n'avait aucun intérêt propre à la vente de ces produits et de les maintenir à un volume aussi important tandis que l'intérêt du groupe était lui indéniable, les contrats d'approvisionnement conclus avec le fournisseur tiers étant négociés au niveau du groupe pour l'ensemble des structures de distribution afin d'obtenir les marchandises au meilleur prix et assurer un débouché pour leur distribution. Si la société fait valoir que les bénéfices réalisés par la société AMDI proviennent très majoritairement de ses ventes sur le marché italien et non des ventes intragroupe, il résulte des propres chiffres produits par la société requérante que le taux de marge de la société AMDI sur les ventes intragroupe est positif. En outre, alors que la société AMDF a soutenu lors de la procédure de vérification de comptabilité que le prix des produits acquis auprès de la société AMDI et revendus sur le marché français était fixé selon la méthode du prix de revente, cette méthode, comme le relève l'administration, aurait dû lui permettre par essence de dégager un bénéfice sur ses ventes. Si la société requérante fait valoir désormais que la société AMDI réalise des pertes nettes sur ses ventes avec elle et qu'il aurait été en réalité recouru à une autre méthode basée sur des achats à prix fixe, la grille d'achat étant la même pour l'ensemble des filiales en charge de la distribution des produits sur le marché européen, et sur des prix de vente adaptés au marché local, elle ne produit aucun élément étayé de nature à appuyer ces allégations alors qu'elle a refusé de produire les contrats de distribution conclus au niveau du groupe. La société requérante ne peut davantage raisonnablement soutenir que les prix fixés entre AMDI et AMDF correspondent à des prix de pleine concurrence au motif qu'ils seraient également pratiqués avec les autres filiales du groupe, lesquelles sont également des entreprises liées.
7. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que les taux de marge nette de la société AMDF sont négatifs sur l'ensemble des produits qu'elle distribue, en dépit de la rentabilité propre à chaque branche, et qu'elle ne dégage aucun bénéfice. Il résulte de l'instruction que la marge nette négative constatée sur l'ensemble des produits s'explique essentiellement par un poste de dépenses " autres charges et charges externes " très élevé en proportion du chiffre d'affaires réalisé, le montant de ce poste associé à la somme des achats de marchandises revendues étant égal, voire supérieur certaines périodes, au chiffre d'affaires généré par la société AMDF. La société fait valoir qu'elle a procédé à des investissements significatifs pour conquérir des parts de marché et assurer la pérennité de son activité, qu'elle supporte des coûts directs et indirects importants notamment pour la promotion de la branche " Check-up ", laquelle est aussi assurée par la société Menarini France au titre d'un contrat de prestations de service qui a conduit, corrélativement, à une réduction significative de sa masse salariale qui n'a pas été prise en compte par l'administration. Toutefois, même en intégrant la diminution de la masse salariale, le poste " autres charges et charges externes " reste très élevé en proportion du chiffre d'affaires. La société requérante ne justifie par ailleurs pas de son intérêt propre à exposer de telles dépenses pour commercialiser des produits qui ne lui permettent pas de dégager un bénéfice alors qu'elle assure sans contrepartie la présence du groupe Menarini sur le marché français, y compris pour ses autres activités, ainsi qu'un débouché pour les produits achetés par les autres sociétés du groupe auprès de fournisseurs tiers à des conditions tarifaires négociées.
8. En quatrième lieu, la société soutient que ses pertes proviennent en réalité de difficultés économiques étrangères au groupe tenant, d'une part, aux difficultés liées à la revente des produits Leica pour la branche " Laboratoires " et, d'autre part, à l'environnement macro-économique défavorable et à la complexité du marché du diagnostic in vitro. Toutefois, s'agissant des difficultés liées aux produits Leica pour lesquels les marges brutes constatées sont particulièrement mauvaises et ne représentent qu'une partie de l'activité de la société AMDF, cette dernière a refusé de fournir les contrats d'approvisionnement conclus avec la société Leica par elle et au niveau du groupe. Si elle expose qu'elle a dû acquérir un stock de marchandises importants sans possibilité de le distribuer en totalité, une telle circonstance est sans incidence sur l'appréciation de la marge puisque l'administration n'a tenu compte que des achats revendus et non du stock. En outre, la société ne peut valablement recalculer la marge des ventes en intégrant rétrospectivement le prix de cession du fonds de commerce à la société Leica qui est intervenue postérieurement aux années en litige et qui, au demeurant, inclut pour sa valorisation des actifs corporels et incorporels sans lien direct avec le calcul de la marge brute. Enfin, s'agissant de la complexité du marché que la société présente comme en recomposition, caractérisé par des acteurs de taille importante, hautement concurrentiel, dans une industrie de la santé comportant de nombreuses contraintes réglementaires, ces difficultés concernent également les entreprises concurrentes ainsi que l'a relevé l'administration fiscale et cette dernière en a tenu compte dans son analyse de comparabilité en distinguant une période de 2007 à 2011 et une autre période de 2012 à 2013, sans que la société requérante n'en conteste la pertinence.
9. En dernier lieu, l'administration s'est également fondée, pour conclure à un transfert indirect de bénéfices, sur une étude de comparabilité avec un panel d'entreprises indépendantes mettant en évidence que le poste " autres charges et achats externes " représentait 13,04 % du chiffre d'affaires de ces sociétés contre 28 % à 43 % de celui de AMDF et que ces entreprises réalisaient toutes des marges nettes positives, à l'exception d'une entreprise qui, pour l'exercice 2011, justifiait d'une marge nette négative de 0,16%, tandis qu'AMDF a réalisé des marges nettes négatives entre 23,48 % et 33,96 % sur la même période. Les résultats globaux de la société AMDF étant déficitaires, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la branche " Laboratoires " aurait dû être exclue de cette étude. Par ailleurs, l'administration a sélectionné des entreprises actives, créées avant 2005 et ne pouvant plus être considérées, au même titre que la société AMDF, comme en phase de pénétration du marché et exerçant une activité similaire de commerce de gros via des critères tels que " laboratoire ", " diagnostic " et " médical " et portant principalement sur la distribution de produits, les entreprises ayant une activité de production, d'exportation ou de prestations de services trop importante ayant été exclues du panel. Ces entreprises étaient indépendantes sur les exercices vérifiés, y compris les sociétés Jasco et Pari Pulmoned, elles exerçaient dans le même secteur des activités comparables, sans être nécessairement strictement identiques et visaient le même type de public de sorte que la société requérante n'est pas non plus fondée à soutenir que les entreprises choisies n'auraient pas été comparables ou indépendantes.
10. Il résulte de tout ce qui précède que l'administration, qui, contrairement à ce qui est soutenu, ne se fonde pas sur la seule situation déficitaire de la société AMDF et ne peut être regardée comme s'étant immiscée de manière infondée dans la gestion de cette dernière, apporte la preuve qui lui incombe de l'existence de pratiques entrant dans le champ des dispositions de l'article 57 du code général des impôts et consistant en un transfert de bénéfices, d'une part, au profit de la société AMFI qui a procédé à des majorations des prix d'achat des produits de la gamme G-IHCO, et d'autre part au profit de Menarini IFR, concernant des dépenses importantes supportées par la société requérante au profit du groupe sans contreparties équivalentes.
En ce qui concerne la détermination de la rémunération de pleine concurrence :
11. Il résulte de l'instruction que, pour procéder à la réintégration dans les bénéfices imposables des années 2011 à 2013 de la rémunération que la société AMDF aurait dû percevoir, l'administration a retenu deux méthodes de calcul. S'agissant des prix d'achat majorés sur la gamme G-IHCO, la méthode dite " du prix comparable sur le marché libre " a été utilisée pour réévaluer, en se basant plus précisément sur la gamme G-ECCH qui est la seule gamme de produits acquise auprès de la société AMDI et de fournisseurs tiers. Le taux de marge brute moyen réalisé sur cette gamme ressortant à 40,54 % sur la période 2007-2013, les prix des achats de marchandises de la société AMDF auprès de la société AMDI pour la gamme G-IHCO ont été ajustés en conséquence. L'administration a également appliqué la méthode transactionnelle de la marge nette pour calculer la juste rémunération globale de la société distributrice, en se basant sur une comparaison avec le panel de sociétés indépendantes. Elle a retenu comme taux la médiane de pleine concurrence du panel correspondant à des taux de marge nette de 3,60 % pour la période 2007-2011 et de 2,18 % pour la période 2012-2013. L'application de cette méthode a enfin été circonscrite par défalcation des résultats retenus au titre de l'application de la première méthode pour éviter une double imposition.
12. En premier lieu, s'agissant de l'application de la méthode du prix comparable, la société requérante critique la référence unique, à savoir la gamme de produits G-ECCH, à laquelle l'administration a recouru et qui, selon elle, ne représente pas un échantillon représentatif du marché pertinent permettant d'opérer une distribution statistique satisfaisante en application des préconisations de l'Organisation de coopération et de développement économiques. Elle ajoute que l'administration n'a procédé à aucune analyse des facteurs de comparabilité en termes de produits, de volumes, d'analyse fonctionnelle et de marché et à aucun ajustement pour pallier le défaut de comparabilité alors que les spécificités des gammes G-ECCH et G-IHCO sont différentes. Toutefois, il est constant que l'administration a recouru au seul comparable interne correspondant à des produits acquis directement par la société auprès de fournisseurs tiers. En outre, il résulte de l'instruction que ces deux gammes de produits s'adressent à la même clientèle, dans le même secteur d'activité, que la gamme des produits G-IHCO représente une part de chiffre d'affaires au sein de la gamme G qui est suffisamment représentative, que la seule circonstance qu'il n'existe qu'une gamme de produits comparable ne la rend pas moins fiable en tant que telle et que la société requérante ne mentionne, par ailleurs, pas les ajustements qu'il serait opportun de réaliser. Enfin, la circonstance qu'un autre produit de la gamme, non acquis directement auprès d'un tiers et représentant une part très marginale du chiffre d'affaires, génère une marge brute moyenne inférieure à celle de la gamme G-IHCO n'est pas de nature à remettre en cause le bien-fondé de la méthode employée par l'administration.
13. En deuxième lieu, s'agissant de l'application de la méthode transactionnelle de la marge nette, la société AMDF fait tout d'abord valoir que l'administration ne remet pas valablement en cause la méthode utilisée du prix de revente, qui a été validée par un cabinet indépendant et qui est préconisée par l'Organisation de coopération et de développement économiques. Il résulte toutefois de l'instruction que la méthode du prix de revente, qui est certes préconisée par l'Organisation de coopération et de développement économiques, n'est néanmoins pertinente que lorsque la marge permet de couvrir les frais de vente. Or, en l'espèce, cette marge est très faible voire négative et en tout état de cause, la société AMDF n'a pas fourni les contrats de commercialisation conclus au niveau du groupe afin d'étudier la répartition des coûts et des marges réalisés. À l'inverse, la méthode transactionnelle qui s'applique au niveau de la marge nette plutôt qu'à celui de la marge brute tient compte de l'ensemble des charges supportées par la société et permet ainsi d'examiner la rémunération globale de l'entreprise au regard des fonctions qu'elle assume et de l'intégralité de l'activité opérationnelle. Après avoir analysé les fonctions de distributeur de la société AMDF, l'administration pouvait valablement retenir le panel de sociétés comparables exerçant sur un marché similaire pour opérer une comparaison des marges nettes sur l'ensemble des activités de la société AMDF. Si comme le soutient la société requérante, certaines des entreprises du panel ont des chiffres d'affaires moindres ou au contraires plus élevés que le sien, il ne résulte pas de l'instruction que compte tenu des taux de marge nette comparés, leur prise en compte lui serait défavorable. En outre, si les deux sociétés ayant l'activité la plus éloignée de la requérante étaient exclues du panel, la médiane recalculée serait supérieure et serait donc défavorable à la société requérante. Enfin, la société requérante ne présente aucune alternative, se bornant à soutenir qu'aucun comparable externe n'est mobilisable. Par suite, la société AMDF n'est pas fondée à remettre en cause le bien-fondé de la méthode transactionnelle de la marge nette.
14. En dernier lieu, la société requérante demande à la Cour, à titre subsidiaire, qu'au lieu de la médiane qui a été retenue par l'administration pour déterminer l'intervalle de pleine concurrence, qui constitue la fourchette de prix acceptable, soit appliqué l'intervalle interquartile bas pour le calcul des rehaussements résultant de l'application de la méthode de la marge transactionnelle de la marge nette. Toutefois, d'une part l'administration a comparé la marge nette de la société avec la médiane interquartile du panel, éliminant ainsi les valeurs extrêmes et les risques d'erreur, et a retenu deux périodes différentes afin de tenir compte des difficultés conjoncturelles invoquées par la société. D'autre part, et en tout état de cause, la société ne justifie pas que l'application d'un intervalle interquartile bas serait plus appropriée pour le calcul des rehaussements. Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de retenir l'intervalle interquartile bas pour le calcul desdits rehaussements.
15. Il résulte de tout ce qui précède que la société AMDF n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Sa requête doit dès lors être rejetée, y compris ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Menarini Diagnostics France est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SASU Menarini Diagnostics France et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Ile-de-France (division juridique).
Délibéré après l'audience du 8 novembre 2023, à laquelle siégeaient :
- Mme Topin, présidente,
- M. Magnard, premier conseiller,
- Mme Fullana, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 novembre 2023.
La rapporteure,
M. FULLANA La présidente,
E. TOPIN
Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 21PA06233