Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse suivante :
Mme A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier de prescrire une expertise afin d'évaluer l'ensemble des préjudices résultant du syndrome anxiodépressif imputable au service dont elle souffre depuis le 20 novembre 2019.
Par une ordonnance n° 2300283 du 14 septembre 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 20 septembre 2023 sous le n° 23TL02344, Mme B..., représentée par Me Passet, demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance du 14 septembre 2023 du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'enjoindre la mesure d'expertise sollicitée ;
3°) de confier cette expertise à un expert psychiatre sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative chargé de :
- communiquer les documents médicaux utiles à sa mission, l'examiner et décrire son état actuel en ce qui concerne son syndrome anxiodépressif ;
- décrire les modalités de ses traitements en précisant, le cas échéant, la durée des hospitalisations, les services concernés ainsi que la nature des soins reçus, concernant son syndrome anxiodépressif ;
- procéder contradictoirement à un examen clinique détaillé en fonction des lésions initiales et des doléances exprimées ;
- indiquer les périodes pendant lesquelles elle a été, du fait de son déficit fonctionnel temporaire, dans l'incapacité d'exercer totalement ou partiellement son activité professionnelle eu égard à son syndrome anxiodépressif ;
- en cas d'incapacité partielle, préciser le taux et la durée ;
- fixer la date de consolidation et, en l'absence de consolidation, dire à quelle date il conviendra de la revoir, préciser dans ce cas les dommages prévisibles pour l'évaluation d'une éventuelle provision et ce, eu égard à son syndrome anxiodépressif ;
- indiquer si, après la consolidation, elle subit un déficit fonctionnel permanent, évaluer l'altération permanente d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles mentales ou psychiques en en chiffrant le taux, décrire les conséquences de ces altérations permanentes et de ces douleurs sur la qualité de sa vie ;
- décrire les soins futurs et les aides techniques compensatoires au handicap de la victime (prothèses, appareillages spécifiques, véhicule) en précisant la fréquence de leur renouvellement ;
- indiquer si le fait générateur entraîne l'obligation pour elle de cesser totalement ou partiellement son activité professionnelle, d'adapter celle-ci ou de changer d'activité professionnelle ;
- indiquer si le fait générateur entraîne d'autres répercussions sur son activité professionnelle actuelle ou future (obligation de formation pour un reclassement professionnel, pénibilité accrue dans son activité, " dévalorisation " sur le marché du travail, etc...) ;
- décrire les souffrances physiques, psychiques ou morales découlant de blessures subies pendant la maladie traumatique (avant consolidation), les évaluer distinctement dans une échelle de 1 à 7 ;
- décrire et donner un avis sur l'existence, la nature et l'importance du préjudice esthétique, en distinguant éventuellement le préjudice temporaire et définitif et évaluer distinctement les préjudices temporaire et définitif de 1 à 7 ;
- indiquer s'il a existé ou s'il existera un préjudice sexuel (perte ou diminution de la libido, impuissance ou frigidité, perte de fertilité) ;
- dire si elle subit une perte d'espoir ou de chance de normalement réaliser un projet de vie familiale ;
- indiquer si elle est empêchée en tout ou partie de se livrer à des activités spécifiques de sport ou de loisir ;
- dire si elle subit des préjudices permanents exceptionnels correspondant à des préjudices atypiques directement liés aux handicaps permanents ;
- dire si son état est susceptible de modifications en aggravation.
Elle soutient que suite à une agression reconnue imputable au service et à son état de santé dépressif en ayant découlé, une expertise est utile pour évaluer l'ensemble des préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux dont elle souffre et dont elle peut obtenir l'indemnisation.
Par un mémoire en défense enregistré le 29 janvier 2024, la rectrice de l'académie de Montpellier conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir que la mesure sollicitée est prématurée dès lors qu'un médecin psychiatre agréé a été sollicité pour réaliser une expertise le 27 février 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., professeur de lycée professionnel de classe exceptionnelle était affectée du 1er septembre 2011 au 1er décembre 2020 au lycée professionnel Léonard de Vinci à Montpellier. Le 20 novembre 2019, deux élèves de troisième ont fait irruption dans la salle de classe alors que Mme B... donnait un cours à des étudiants en deuxième année de brevet de technicien supérieur. Victime de propos insultants à caractère sexuel de la part d'un des élèves, Mme B... a déposé le 27 novembre 2019 une plainte pour des faits d'outrage à une personne chargée d'une mission de service public dans un établissement scolaire. Placée en arrêt de travail du 2 décembre 2019 au 20 décembre 2019, Mme B... a adressé le 7 janvier 2020 une déclaration de maladie professionnelle en raison de sa pathologie survenue suite à cet incident. Par un courrier en date du 6 novembre 2020, la rectrice de l'académie de Montpellier a rejeté la demande tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service concernant l'incident du 20 novembre 2019. Cette décision a été annulée par un jugement du tribunal administratif de Montpellier le 8 avril 2022. Mme B... a formé une demande d'expertise auprès du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier aux fins d'évaluer l'ensemble des préjudices résultant du syndrome anxiodépressif imputable au service dont elle souffre depuis le 20 novembre 2019. Elle relève appel de l'ordonnance du 14 septembre 2023 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande comme étant prématurée.
2. Aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction (...) ". Cette utilité doit être appréciée, d'une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d'autres moyens et, d'autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l'intérêt que la mesure présente dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher. Il appartient au juge des référés, saisi en application de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, d'apprécier l'utilité de la mesure d'expertise demandée au vu des pièces du dossier, notamment des expertises déjà réalisées, et des motifs de droit et de fait qui justifient, selon la demande, cette mesure.
3. La requérante fait valoir que l'expertise sollicitée est utile dès lors qu'elle lui permettra de faire évaluer l'ensemble de ses préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux en vue d'une action indemnitaire liée à sa maladie professionnelle alors que celles réalisées à la demande de l'administration ont une portée plus étroite. S'il est exact que les diverses expertises effectuées notamment par les docteurs Menard et Chiariny, n'ont pas porté sur l'ensemble des préjudices pouvant être invoqués par la requérante dans le cadre d'une action en responsabilité, il résulte du dernier rapport d'expertise rédigé le 7 mars 2023 que l'état de la requérante n'est pas consolidé et qu'une expertise réalisée à ce stade ne permettrait pas d'apprécier utilement les préjudices de l'intéressée. Dans ces conditions particulières, même si l'absence de consolidation ne constitue pas forcément un obstacle au prononcé d'une mesure d'instruction en référé et alors qu'elle devra nécessairement être à nouveau examinée par un expert mandaté par l'administration pour fixer la date de consolidation, une expertise contradictoire ordonnée par voie juridictionnelle serait, comme l'a jugé le tribunal administratif, prématurée et ne présente donc pas le caractère d'utilité requis par l'article R. 532-1 du code de justice administrative.
4. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par l'ordonnance attaquée du 14 septembre 2023 le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a refusé d'ordonner l'expertise susmentionnée.
O R D O N N E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme A... B... et à la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Copie en sera adressée à la rectrice de l'académie de Montpellier.
Fait à Toulouse, le 4 mars 2024.
Le président,
J-F. MOUTTE
La République mande et ordonne à la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.
Pour expédition conforme,
La greffière en chef,
N°23TL02344 2