Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La commune de Mérindol a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision révélée par un communiqué de presse du 14 octobre 2020 par laquelle la communauté d'agglomération Luberon Monts de Vaucluse a décidé de fermer la déchetterie de Mérindol et de réorienter ses usagers vers la déchetterie de Lauris à compter du 3 novembre 2020.
Par un jugement n° 2003315 du 21 juin 2022, le tribunal administratif de Nîmes a annulé la décision non formalisée, révélée par communiqué de presse, par laquelle la communauté d'agglomération Luberon Monts de Vaucluse a décidé la fermeture de la déchetterie implantée au lieudit " La petite Garrigue " à Mérindol et rejeté le surplus des conclusions de la commune de Mérindol.
Procédure devant la cour :
Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 12 juillet 2022, le 12 mai 2023 et le 28 juillet 2023, la communauté d'agglomération Luberon Monts de Vaucluse, représentée par Me Tartanson, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par la commune de Mérindol devant le tribunal administratif de Nîmes ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Mérindol une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de la commune de Mérindol devant le tribunal administratif dès lors que la délibération du conseil communautaire du 7 juillet 2022 approuvant la fermeture de la déchetterie " vide de toute substance le présent recours " ;
- la demande présentée par la commune de Mérindol devant le tribunal administratif était irrecevable dès lors que le communiqué de presse critiqué ne constitue pas une décision administrative faisant grief ;
- son président était compétent pour décider la fermeture de la déchetterie de Mérindol dès lors, d'une part, que sa décision n'a pas supprimé un service public mais l'a seulement déplacé géographiquement, d'autre part, qu'il était titulaire du pouvoir de police spéciale en matière de règlementation de la collecte des déchets, par application de l'article L. 5211-9-2 du code général des collectivités territoriales ;
- l'annulation prononcée par le tribunal administratif n'a plus lieu d'être maintenue dès lors que, par une délibération du 7 juillet 2022, le conseil communautaire a approuvé le déplacement géographique et la fermeture de la déchetterie de Mérindol.
Par trois mémoires, enregistré le 21 novembre 2022, le 16 juillet 2023 et le 21 décembre 2023, la commune de Mérindol, représentée par Me Boulisset, conclut au rejet de la requête et, en outre, à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la communauté d'agglomération Luberon Monts de Vaucluse au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par la communauté d'agglomération Luberon Monts de Vaucluse ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 27 décembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 31 janvier 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Virginie Restino,
- les conclusions de M. Clen, rapporteur public,
- et les observations de Me Moiroud-Besse, représentant la communauté d'agglomération Luberon Monts de Vaucluse.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 7 mai 2019, le préfet de Vaucluse a mis en demeure la communauté d'agglomération Luberon Monts de Vaucluse de régulariser, dans un délai maximum de trois mois, la situation administrative de la déchetterie située au lieudit " La petite Garrigue " sur le territoire de la commune de Mérindol (Vaucluse), soit en déposant un dossier de demande d'exploiter ces installations conformes aux dispositions du code de l'environnement et notamment son titre V, soit en cessant ses activités et en procédant à la remise en état prévue par le code de l'environnement. Par un communiqué de presse du 14 octobre 2020, la communauté d'agglomération a annoncé la fermeture définitive de la déchetterie située à Mérindol à compter du 31 octobre 2020 et la réorientation des usagers vers la déchetterie située à Lauris à compter du 3 novembre 2020. La communauté d'agglomération relève appel du jugement du 21 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a annulé sa décision non formalisée révélée par le communiqué de presse du 14 octobre 2020 de fermer la déchetterie de Mérindol.
2. La délibération du 7 juillet 2022, postérieure au jugement attaqué, par laquelle le conseil communautaire de la communauté d'agglomération Luberon Monts de Vaucluse a approuvé la fermeture définitive de la déchetterie de Mérindol n'a, en tout état de cause, pas privé d'objet la demande de la commune de Mérindol devant le tribunal administratif de Nîmes.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la recevabilité de la demande de la commune de Mérindol devant le tribunal administratif :
3. Le communiqué de presse publié le 14 octobre 2020 par la communauté d'agglomération Luberon Monts de Vaucluse indique que : " Pour répondre à l'injonction de l'Etat, l'actuelle déchetterie de Mérindol fermera définitivement ses portes le samedi 31 octobre 2020, à 12 heures " et que : " Le maintien de ce service public étant capital, la [communauté d'agglomération Luberon Monts de Vaucluse] a opté pour une réorientation des usagers, à compter du mardi 3 novembre 2020, vers le site le plus proche, en l'occurrence celui de Lauris ". Dès lors que, comme exposé au point 1, l'arrêté du préfet de Vaucluse du 7 mai 2019 offrait une alternative à la communauté d'agglomération pour régulariser la situation administrative de la déchetterie de Mérindol, le communiqué de presse critiqué doit être regardé comme révélant par lui-même l'existence de la décision non formalisée, prise par la communauté d'agglomération, de fermer définitivement la déchetterie de Mérindol. Dans ces conditions, et alors que cette décision faisait grief à la commune de Mérindol, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Nîmes a écarté la fin de non-recevoir opposée par la communauté d'agglomération Luberon Monts de Vaucluse à la demande de la commune de Mérindol, tirée de ce que le communiqué de presse critiqué n'avait pas le caractère d'une décision administrative.
En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par les premiers juges :
4. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 5211-6 du code général des collectivités territoriales : " Les métropoles, communautés urbaines, communautés d'agglomération et communautés de communes sont administrées par un organe délibérant composé de représentants des communes membres désignés dans les conditions prévues au titre V du livre Ier du code électoral " et aux termes de l'article L. 5211-9 du même code : " Le président est l'organe exécutif de l'établissement public de coopération intercommunale. / Il prépare et exécute les délibérations de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale. (...) / Le président est le chef des services de l'établissement public de coopération intercommunale (...) ".
5. Aux termes de l'article L. 5216-5 du code général des collectivités territoriales : " I. - La communauté d'agglomération exerce de plein droit au lieu et place des communes membres les compétences suivantes : / (...) / 7° Collecte et traitement des déchets des ménages et déchets assimilés (...) ", aux termes de l'article L. 5211-9-2 du même code : " I. - A. - (...) / Sans préjudice de l'article L. 2212-2 et par dérogation à l'article L. 2224-16, lorsqu'un groupement de collectivités est compétent en matière de collecte des déchets ménagers, les maires des communes membres de celui-ci ou membres d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre membre du groupement de collectivités transfèrent au président de ce groupement les attributions lui permettant de réglementer cette activité. (...) / III. - Dans un délai de six mois suivant la date à laquelle les compétences mentionnées au A du I ont été transférées à l'établissement ou au groupement, un ou plusieurs maires peuvent s'opposer, dans chacun de ces domaines, au transfert des pouvoirs de police. A cette fin, ils notifient leur opposition au président de l'établissement public de coopération intercommunale ou du groupement de collectivités territoriales. Il est alors mis fin au transfert pour les communes dont les maires ont notifié leur opposition (...) ", et aux termes de son article L. 2224-16 : " Le maire définit les règles relatives à la collecte des déchets collectés en application des articles L. 2224-13 et L. 2224-14 en fonction de leurs caractéristiques. Il impose les modalités de collecte séparée, y compris le cas échéant la présentation et le lieu de collecte, au minimum pour les déchets suivants : / 1° Les déchets de papier, de verre, de métal et de plastique ; / 2° Les déchets de fractions minérales, de bois et de plâtre pour les déchets de construction et de démolition ; / 3° Les déchets de textiles et les déchets dangereux, à compter du 1er janvier 2025. / Il impose également les modalités de collecte séparée, y compris le cas échéant la présentation et le lieu de collecte, pour les biodéchets remis au service public local, conformément à l'article L. 541-21-1 du code de l'environnement (...) ".
6. Il résulte de ces dispositions que, si le président d'une communauté d'agglomération est compétent pour prendre les décisions relatives à l'organisation interne des services en sa qualité de chef des services et pour fixer les règles relatives à la présentation et aux conditions de remise des déchets en vertu des pouvoirs de police spéciale qui lui sont, sauf opposition, automatiquement transférés par les maires des communes membres, il appartient au conseil communautaire de régler par ses délibérations les affaires de l'établissement public et, en particulier, de prendre les mesures d'organisation du service public affectant la consistance du service offert aux usagers et aux modalités de sa délivrance.
7. Il ressort des pièces du dossier que la décision de fermer définitivement la déchetterie de Mérindol à compter du 31 octobre 2020 n'a pas été prise par le conseil communautaire de la communauté d'agglomération Luberon Monts de Vaucluse. Cette décision, qui affecte la consistance même du service de collecte des déchets offert aux usagers et relève des affaires de cet établissement, ressortissait à la compétence du conseil communautaire. La circonstance que cette décision n'avait pas pour objet de supprimer le service public de la collecte des déchets est sans incidence à cet égard. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Nîmes a considéré que cette décision était entachée d'incompétence.
8. La circonstance que le conseil communautaire a, par une délibération du 7 juillet 2022 qui n'a pas de portée rétroactive, approuvé la fermeture définitive de la déchetterie de Mérindol est sans incidence sur la légalité de cette décision, qui s'apprécie à la date à laquelle elle a été révélée, le 14 octobre 2020.
9. Il résulte de tout ce qui précède que la communauté d'agglomération Luberon Monts de Vaucluse n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a annulé sa décision non formalisée, révélée par communiqué de presse du 14 octobre 2020, de fermer définitivement la déchetterie de Mérindol à compter du 31 octobre 2020.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Mérindol, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme à verser à la communauté d'agglomération Luberon Monts de Vaucluse au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette communauté d'agglomération le versement à la commune de Mérindol d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de ces dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la communauté d'agglomération Luberon Monts de Vaucluse est rejetée.
Article 2 : La communauté d'agglomération Luberon Monts de Vaucluse versera à la commune de Mérindol une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la communauté d'agglomération Luberon Monts de Vaucluse et à la commune de Mérindol.
Délibéré après l'audience du 28 mars 2024, à laquelle siégeaient :
M. Barthez, président,
M. Lafon, président assesseur,
Mme Restino, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 avril 2024.
La rapporteure,
V. Restino
Le président,
A. Barthez
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au préfet de Vaucluse en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°22TL21571