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13/12/2005 | FRANCE | N°JURITEXT000006946889

France | France, Cour d'appel d'agen, Chambre sociale, 13 décembre 2005, JURITEXT000006946889


ARRÊT DU 13 DÉCEMBRE 2005 CL/SBA ----------------------- 05/00520 ----------------------- Jean-Claude X... C/ S.A. RANDO ----------------------- ARRÊT no 421 COUR D'APPEL D'AGEN Chambre Sociale Prononcé à l'audience publique du treize décembre deux mille cinq par Nicole ROGER, Présidente de Chambre, assistée de Solange BELUS, Greffière, La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : Jean-Claude X... né le 1er septembre 1942 à NANTES (44000) 4 rue des Ursulines 65000 TARBES Rep/assistant : Me Martine JAUZE-MOLIERES (avocat au barreau de TOULOUSE) APPELANT d'un jugeme

nt du Conseil de Prud'hommes d'AUCH en date du 7 mars 2005...

ARRÊT DU 13 DÉCEMBRE 2005 CL/SBA ----------------------- 05/00520 ----------------------- Jean-Claude X... C/ S.A. RANDO ----------------------- ARRÊT no 421 COUR D'APPEL D'AGEN Chambre Sociale Prononcé à l'audience publique du treize décembre deux mille cinq par Nicole ROGER, Présidente de Chambre, assistée de Solange BELUS, Greffière, La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : Jean-Claude X... né le 1er septembre 1942 à NANTES (44000) 4 rue des Ursulines 65000 TARBES Rep/assistant : Me Martine JAUZE-MOLIERES (avocat au barreau de TOULOUSE) APPELANT d'un jugement du Conseil de Prud'hommes d'AUCH en date du 7 mars 2005 d'une part, ET : S.A. RANDO 4 rue du Maye Lane 65420 IBOS Rep/assistant : Me Bruno VITAL-MAREILLE (avocat au barreau de BORDEAUX) INTIMÉE

d'autre part,

A rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique le 15 novembre 2005 devant Nicole ROGER, Présidente de Chambre, Catherine LATRABE et Françoise MARTRES, Conseillères, assistées de Solange BELUS, Greffière, et après qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu. * * * FAITS ET PROCÉDURE

En 1976, Jean-Claude X... a été à l'initiative de la création de l'Association Randonnées Pyrénéennes ayant pour objet de créer des hébergements "gîtes étapes" sur le massif pyrénéen, de favoriser leur fréquentation par les randonneurs et de développer l'économie locale. L'association ayant été amenée à développer une activité commerciale (fabrication de la cartographie, publications dédiées à la randonnée et à la montagne en général), une société a été créée en 1992, sous la dénomination de S.A. RANDO.

Lors de la mise en place de ces deux structures, Jean Claude X... a exercé les fonctions de trésorier de l'association et d'administrateur de la S.A.

Le 11 septembre 1996, il a été désigné par le Conseil d'Administration en qualité de Président de la S.A. RANDO avant d'en devenir le Président Directeur Général à compter de mars 1997 puis d'être nommé le 25 juin 1999, à la suite d'un changement dans le mode

d'administration et de direction de la société, Président du Directoire.

La S.A. RANDO ayant connu d'importantes difficultés en 1999, un administrateur ad'hoc lui a été désigné le 3 février 2000 avec notamment pour mission de rechercher une solution de recapitalisation ; le 15 mars 2000, le Groupe Sud-Ouest en est, ainsi, devenu l'actionnaire majoritaire.

Estimant qu'il avait été écarté de la structure de la S.A. RANDO, le 1er avril 2000, sans préavis ni indemnités et qu'il avait été licencié sans respect des règles régissant le contrat de travail, Jean-Claude X... a saisi, le 10 décembre 2003, le conseil de prud'hommes d'Auch aux fins notamment d'obtenir les indemnités liées à une telle rupture.

Suivant jugement en date du 7 mars 2005, cette juridiction s'est déclarée incompétente en l'absence de contrat de travail liant juridiquement Jean-Claude X... et la S.A. RANDO et a renvoyé l'affaire devant le Tribunal de Commerce d'Auch.

Jean-Claude X... a formé contredit à l'encontre de cette décision MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Jean-Claude X... soutient pour l'essentiel, qu'il exerçait au sein de la S.A. RANDO des fonctions d'une technicité et d'une spécificité réelle distinctes de ses fonctions sociales, soumises à la surveillance et à l'autorité du conseil de surveillance, l'intéressé faisant état de ce qu'il avait, ainsi, en charge les secteurs inhérents aux domaines de l'administratif, des finances, de la formation et du développement.

Il ajoute que le mandat de président du directoire n'est pas en lui même incompatible avec des fonctions de salarié.

Il prétend, par ailleurs, que le lien de subordination juridique est avéré puisqu'il n'était pas actionnaire majoritaire, celui-ci étant

le Groupe Sud-Ouest, et qu'il devait rendre des comptes au conseil de surveillance, étant précisé que, dès l'origine, il s'est vu délivrer des bulletins de salaire.

Il fait état, enfin, de ce que les deux situations étant juridiquement indépendantes, la cessation du mandat social n'emporte pas de plein droit la résiliation du contrat de travail.

Considérant, dès lors, qu'il cumulait bien au sein de la S.A. RANDO des fonctions salariales indépendantes de ses fonctions sociales caractérisant ainsi l'existence d'un contrat de travail justifiant la compétence de la juridiction prud'homale pour connaître du litige l'opposant à la S.A. RANDO, il demande à la cour d'user de son pouvoir d'évocation pour statuer sur le caractère abusif du licenciement dont il estime avoir fait l'objet et sur ses conséquences financières.

Il demande, par conséquent, à la cour de :

- accueillir le contredit formé à l'encontre de la décision entreprise, de le déclarer recevable et bien fondé, de dire que la juridiction prud'homale est bien compétente pour connaître du litige l'opposant à la S.A. RANDO,

- usant du pouvoir d'évocation :

[* statuer sur la nature du licenciement et sur ses conséquences,

*] dire qu'il cumulait au sein de la S.A. RANDO des fonctions sociales et des fonctions salariées dans le cadre d'un contrat de travail,

[* dire qu'il a fait l'objet d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et faire droit à ses demandes,

*] condamner la S.A. RANDO à lui payer les sommes de 13.400,72 ç au

titre du préavis, de 15.634,18 ç au titre de l'indemnité de licenciement, de 13.441,40 ç au titre des congés payés, de 4.466,94 ç à titre de dommages intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement, de 53.603,28 ç à titre de dommages intérêts pour rupture abusive du contrat de travail et enfin, de 3.000 ç au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. * * *

La S.A. RANDO demande, au contraire, à la cour de confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions, de dire Jean-Claude X... infondé dans sa prétention à faire admettre l'existence d'un contrat de travail cumulé avec ses fonctions de dirigeant de la S.A. RANDO, de le dire irrecevable et en tout cas mal fondé en ses demandes, de l'en débouter et enfin, de le condamner au paiement d'une indemnité de 3.000 ç en application de l'article 700 précité.

Elle soutient, principalement, que l'ensemble des fonctions techniques revendiquées par Jean-Claude X... était en réalité assumé par des responsables opérationnels, l'intéressé supervisant toute une équipe de collaborateurs et faisant, de surcroît, appel à de nombreux consultants ou cabinets externes.

Elle souligne que le groupe SUD-OUEST n'est entré dans son capital que le 15 mars 2000, date à laquelle la Présidence du Directoire jusqu'alors assumée par Jean-Claude X... a pris fin, l'intéressé ayant été jusqu'alors, contrairement à ce qu'il prétend, l'actionnaire le plus important.

Elle fait état, par ailleurs, de ce que l'appelant qui détenait la signature sociale, disposait aussi d'un compte courant dans l'entreprise d'un montant de 200 KF qui a été intégralement remboursé à sa demande, le 31 mars 2000.

Elle considère, enfin, que le lien du subordination qui caractérise le contrat de travail salarié n'est nullement établi et qu'il ne

saurait, en tout état de cause découler du fait que Jean-Claude X... devait en sa qualité de Président du Directoire rendre compte au conseil de surveillance pas plus que de l'établissement de bulletins de paie. SUR QUOI,

Attendu que si un mandat social et notamment un mandat de Président de Directoire n'est pas, en lui même, incompatible avec des fonctions de salarié, encore faut il que le contrat de travail du mandataire social corresponde à l'exercice effectif de fonctions techniques dans un lien de subordination avec la société.

Que dans le cas présent, il suffit de rappeler que Jean-Claude X... a été désigné par le Conseil d'Administration de la S.A. RANDO pour exercer les fonctions de Président du Conseil d'Administration à compter du 11 septembre 1996 puis celles de Président Directeur Général à compter de mars 1997 et enfin, celles de Président du Directoire à compter du 25 juin 1999 et ce, jusqu'au 15 mars 2000.

Qu'une seule rémunération a été reçue par l'appelant, celle ci ayant été fixée, à l'issue des Conseils d'Administration du 28 février 1997 et du 28 avril 1999, pour un montant annuel initial de 351.000 Francs, "hors remboursement de frais et éventuelle garantie sociale non couverte par son statut de mandataire", l'intéressé disposant, par ailleurs, d'un véhicule de fonction et la S.A. RANDO ayant effectivement souscrit une garantie sociale à son profit pour perte de mandat social, moyennant le règlement d'une cotisation annuelle de 35.200 Francs HT.

Que Jean-Claude X..., actionnaire principal de la S.A. RANDO jusqu'à la fin de son mandat, exerçait effectivement toutes les prérogatives d'un dirigeant social, celles-ci résultant notamment du fait qu'il disposait de la signature bancaire ainsi que d'un compte courant dans l'entreprise d'un montant de 200.000 Francs qui lui a été intégralement remboursé lorsqu'il a été démis de ses fonctions de

Président du Directoire, qu'il recrutait le personnel (pas moins de 40 contrats de travail ayant été signés par l'intéressé entre 1996 et 2000), qu'il signait les lettres de licenciement, qu'il a désigné le Directeur Général Adjoint placé directement sous son autorité et qu'il représentait et engageait la société vis-à-vis des tiers, l'intéressé ayant, ainsi, signé l'accord d'entreprise portant sur la réduction et l'aménagement du temps de travail, un contrat d'exclusivité commerciale et un accord spécifique de collaboration et ayant saisi le Président du Tribunal de Commerce aux fins de nomination d'un administrateur ad'hoc.

Qu'aucune convention écrite n'a été passée entre Jean-Claude X... et la S.A. RANDO visant des fonctions techniques exercées par l'intéressé, distinctes du mandat social, faisant ressortir le lien de subordination juridique entre ce dernier et la société et indiquant le montant et le mode d'une rémunération attribuée sous forme salariée, étant précisé que le lien de subordination qui constitue l'élément essentiel du contrat de travail ne saurait se confondre avec les directives que peut recevoir un mandataire de la part de ses associés, du conseil d'administration ou de surveillance lesquelles sont la conséquence logique de son mandat.

Que ni la délivrance de bulletins de paie qui se justifie par les exigences de la législation en matière de sécurité sociale ni a fortiori l'immatriculation à cet organisme ne suffisent à caractériser par elles mêmes le contrat de travail.

Que la réalité d'un emploi salarié ne saurait découler de la remise de bulletins de paie ne faisant référence, comme en l'espèce, au titre de l'emploi occupé, qu'à des fonctions de mandataire social, ne visant aucune rémunération spécifique au titre d'une quelconque fonction salariée et ne portant mention d'aucune cotisation au régime d'assurance chômage.

Qu'il n'est, au surplus, nullement démontré au regard des pièces du dossier et notamment des organigrammes de la S.A. RANDO tels qu'ils sont produits aux débats que Jean-Claude X... qui était investi de l'ensemble des pouvoirs nécessaires à la direction de la société exerçait effectivement des fonctions techniques distinctes de son mandat social ni surtout que l'exercice de telles fonctions répondait aux conditions du salariat c'est-à-dire qu'il existait un lien réel de subordination juridique entre l'intéressé et la société, étant ajouté qu'aucune note de service ou correspondance ne permet de caractériser l'existence d'une telle dépendance.

Qu'il s'ensuit que Jean-Claude X... qui ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de l'existence d'un contrat de travail distinct du mandat social ne peut être que débouté de l'ensemble de ses demandes. Attendu, par conséquent, que le contredit formé par l'intéressé à l'encontre de la décision querellée doit être rejeté, celle-ci devant être confirmée en toutes ses dispositions.

Attendu qu'il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la S.A. RANDO la totalité des frais non compris dans les dépens qu'elle a pu être amenée à exposer dans le cadre de la présente procédure.

Attendu que les dépens de l'appel seront mis à la charge de Jean-Claude X... qui succombe.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressrort,

Rejette le contredit formé par Jean-Claude X... à l'encontre de la décision déférée,

Confirme cette décision en toutes ses dispositions,

Rejette comme inutile ou mal fondée toutes demandes plus amples ou contraires des parties,

Condamne Jean-Claude X... aux dépens de l'appel.

Le présent arrêt

Le présent arrêt a été signé par Nicole ROGER, Présidente de Chambre, et par Solange BELUS, Greffière présente lors du prononcé.

LA GREFFIÈRE :

LA PRÉSIDENTE :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006946889
Date de la décision : 13/12/2005
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, FORMATION - Définition - Cumul avec un mandat social - Conditions - /JDF

Si un mandat social et notamment un mandat de président de Directoire n'est pas, en lui-même, incompatible avec les fonctions de salarié, encore faut-il que le contrat de travail du mandataire social corresponde à l'exercice effectif de fonctions techniques dans un lien de subordination avec la société. Dans le cas présent l'appelant a été désigné par le conseil d'administration de la société pour exercer les fonctions de président du conseil d'administration puis celle de président-directeur général et enfin celle de président du directoire. L'appelant, actionnaire principal de la société jusqu'à la fin de son mandat, exerçait effectivement toutes les prérogatives d'un dirigeant social, disposant notamment de la signature bancaire ainsi que d'un compte courant dans l'entreprise qui lui a été intégralement remboursé lorsqu'il a été démis de ses fonctions de président du Directoire alors qu'il est établi qu'il recrutait le personnel, signait les lettres de licenciement, désignait le Directeur Général Adjoint placé directement sous son autorité et qu'il représentait et engageait la société vis-à-vis des tiers. La réalité d'un emploi salarié ne peut découler de la remise de bulletins de paie qui ne fait référence au titre de l'emploi occupé qu'à des fonctions de mandataire social ne visant aucune rémunération spécifique au titre d'une quelconque fonction salariée et ne portant mention d'aucune cotisation au régime d'assurance chômage. Il s'ensuit que l'appelant ne rapporte par la preuve qui lui incombe de l'existence d'un contrat de travail distinct du mandat social


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2005-12-13;juritext000006946889 ?
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