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18/11/2022 | FRANCE | N°21/04408

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Tarification, 18 novembre 2022, 21/04408


ARRET

N° 250





S.A. [14]





C/



Organisme CARSAT HAUTS-DE-FRANCE













COUR D'APPEL D'AMIENS



TARIFICATION





ARRET DU 18 NOVEMBRE 2022



*************************************************************



N° RG 21/04408 et N° RG 22/00873







PARTIES EN CAUSE :





DEMANDEUR





La société [14] (SA), agissant poursuites et diligences de ses représentants lÃ

©gaux domiciliés en cette qualité audit siège

( M. [I] [C])

[Adresse 3]

[Adresse 6]

[Localité 1]





Représentée et plaidant par Me FOURNIER, avocat au barreau de LYON substituant Me Elodie BOSSUOT-QUIN de la SELAS CMS FRANCIS LEFEBVRE LYON AVOCATS, avocat au...

ARRET

N° 250

S.A. [14]

C/

Organisme CARSAT HAUTS-DE-FRANCE

COUR D'APPEL D'AMIENS

TARIFICATION

ARRET DU 18 NOVEMBRE 2022

*************************************************************

N° RG 21/04408 et N° RG 22/00873

PARTIES EN CAUSE :

DEMANDEUR

La société [14] (SA), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

( M. [I] [C])

[Adresse 3]

[Adresse 6]

[Localité 1]

Représentée et plaidant par Me FOURNIER, avocat au barreau de LYON substituant Me Elodie BOSSUOT-QUIN de la SELAS CMS FRANCIS LEFEBVRE LYON AVOCATS, avocat au barreau de LYON

ET :

DÉFENDEUR

La CARSAT HAUTS-DE-FRANCE, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée et plaidant par Mme [K] [X] dûment mandatée

DÉBATS :

A l'audience publique du 17 Juin 2022, devant Monsieur Renaud DELOFFRE, Président assisté de Mme Véronique OUTREBON et Mme Andréa ANSEL, assesseurs, nommés par ordonnances rendues par Madame la Première Présidente de la Cour d'appel d'Amiens les 03 mars 2022, 07 mars 2022, 30 mars 2022 et 27 avril 2022.

Monsieur Renaud DELOFFRE a avisé les parties que l'arrêt sera prononcé le 18 Novembre 2022 par mise à disposition au greffe de la copie dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme Audrey VANHUSE

PRONONCÉ :

Le 18 Novembre 2022, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Monsieur Renaud DELOFFRE, Président et Mme Marie-Estelle CHAPON, Greffier.

*

* *

DECISION

Monsieur [I] [C], ancien salarié de la société [14], a établi en date du 16 juillet 2020,une déclaration de maladie professionnelle, «inscrite au tableau numéro 30 des maladies professionnelles au titre d'un Cancer broncho-pulmonaire »,

Par courrier du 10 décembre 2020, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM) a notifié à la société [14] sa décision de prise en charge de cette maladie au titre des risques professionnels, dont la date administrative a été fixée au 17 février 2020 .

Les incidences financières de la maladie professionnelle du 17 février 2020 de Monsieur [I] [C] ont été inscrites par la Caisse d'Assurance Retraite et de la Santé au Travail (CARSAT) des Hauts-de-France sur le compte employeur de la société [14] et prises en compte dans la détermination du taux de cotisation AT/MP de la société .

Par courrier du 5 février 2021, la société [14] a saisi la Commission de recours amiable (CRA) de la CPAM du Hainaut afin de contester la décision de prise en charge de la maladie professionnelle du 17 février 2020 de Monsieur [I] [C].

La CRA a rejeté le recours de la société [14] en ce qui concerne la décision de prise en charge de la maladie professionnelle du 17 février 2020 de Monsieur [I] [C], et transmis à la CARSAT des Hauts-de-France la demande de la société d'inscription au compte spécial de la maladie, considérant qu'une demande de cette nature figurait dans le courrier précité du 5 février 2021.

Par courrier du 22 juin 2021, la CARSAT des Hauts-de-France a confirmé le maintien de la maladie professionnelle du 17 février 2020 de Monsieur [I] [C] sur le compte employeur de la société [14].

Par courrier du 11 août 2021, la société [14] a saisi le Tribunal Judiciaire de Laon d'un recours contre la décision implicite de rejet de la CRA .

Par acte délivré le 12 août 2021, la société [14] a assigné la CARSAT des Hauts-de-France d'avoir à comparaître devant la Chambre de la Protection Sociale de la Cour d'appel d'Amiens à l'audience du 4 mars 2022,

Elle y conteste l'inscription sur son compte employeur de la maladie professionnelle du 17 février 2020 de Monsieur [I] [C] et sollicite un sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir du Tribunal Judiciaire de Laon.

Cette procédure, enregistrée sous le numéro 21/04408, a été renvoyée à l'audience du 17 juin 2022.

Par acte délivré le 15 février 2022, la société [14] a assigné à nouveau la CARSAT des Hauts-de-France d'avoir à comparaître devant la Chambre de la Protection Sociale de la Cour d'appel d'Amiens à l'audience du 4 mars 2022 renvoyée au 17 juin 2022.

Elle conteste l'inscription sur son compte employeur de la maladie professionnelle du 17 février 2020 de Monsieur [I] [C] et sollicite le recalcul de son taux AT/MP pour l'année 2022.

Elle maintient par ailleurs sa demande de sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir du Tribunal Judiciaire de Laon.

Cette procédure a été enregistrée sous le numéro 22/00873.

En ce qui concerne la procédure 21/04408, par conclusions visées par le greffe à la date du 29 mars 2022 et soutenues oralement par avocat, la société [14] demande à la Cour de':

In limine litis,

- SURSEOIR A STATUER dans l'attente de l'issue du recours exercé devant le pôle social du Tribunal Judiciaire de LAON ;

Subsidiairement,

- ORDONNER l'inscription au compte spécial, par application de l'article 2-4° de l'arrêté du 16 octobre 1995, des dépenses résultant de la prise en charge de l'affection déclarée par Monsieur [C] au titre du tableau n°30 des maladies professionnelles ;

- ORDONNER, en conséquence, le retrait du compte employeur de la société [14] des dépenses afférentes à la maladie de Monsieur [C] et la rectification du ou des taux de cotisation correspondants.

Elle fait en substance valoir que':

On rappellera qu'en application de l'article D.242-6-1 du Code de la sécurité sociale, le taux de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles est déterminé par établissement.

Ainsi, sont inscrits au compte employeur de l'établissement les coûts des accidents du travail et maladies professionnelles imputables à l'activité de cet établissement.

S'il existe, en matière de tarification, une présomption d'imputabilité de la maladie au dernier employeur chez lequel la victime a été exposée au risque avant sa constatation médicale, il n'existe pas de présomption d'exposition au risque auprès du dernier employeur du salarié avant la survenance de la maladie.

La prise en charge d'une maladie au titre de la législation professionnelle ne prive pas l'employeur à laquelle elle est opposable de la possibilité, en démontrant qu'elle n'a pas été contractée à son service, d'en contester l'imputabilité si une faute inexcusable lui est reprochée ou si les cotisations d'accidents du travail afférentes à cette maladie sont inscrites à son compte (Cass. civ. 2ème 19 décembre 2013, pourvoi n°12-19995, Cass. civ. 2ème 20 juin 2019, pourvoi n°18-17049, Cass. civ. 2ème 25 novembre 2021, pourvoi n°20-18477).

Il appartient donc à la Cour de céans de statuer sur l'imputabilité de la maladie à l'activité exercée par Monsieur [C] au sein de l'établissement de [Localité 12] de la société [14].

Il revient à cette société, en qualité de dernier employeur de démontrer, soit qu'elle n'a pas exposé Monsieur [C] au risque, soit que celui-ci a été exposé au risque dans ses précédents emplois.

La Cour constatera que la démonstration est faite par la société [14] qu'il n'est pas établi que Monsieur [C] a été exposé au risque amiante de manière avérée et habituelle en son sein comme l'exige la jurisprudence de la Cour de cassation et que la preuve est, en revanche, rapportée qu'il a été exposé à l'amiante chez les précédents employeurs pour le compte desquels il a travaillé avant d'entrer à son service.

En effet, on rappellera, en l'espèce, que Monsieur [C] a travaillé au sein de la société [14] du 23 novembre 1983 au 31 janvier 2008 selon la carrière suivante :

- du 23 novembre 1983 au 30 mars 1986 en qualité de magasinier,

- du ler avril 1986 au 31 décembre 1989 aux fonctions de magasinier pièces détachées,

- du ler janvier 1990 au 31 janvier 2008 en tant que gestionnaire pièces techniques.

Au terme de sa lettre de réserves du 25 septembre 2020, la société [14] a rappelé (pièce n°3) :

Monsieur [C] [I] a été embauché en CDI le 23 Novembre 1983 en tant que magasinier. Ses fonctions ont évolué de « magasinier pièces détachées » à « gestionnaire pièces détachées », selon la chronologie suivante :

Du 01/04/1986 au 31/12/1989 (3 ans et 12 mois) : poste de « Magasinier Pièces détachées ».

Du 01/01/1990 au 31/01/2008, date de départ en retraite) (18 ans et 1 mois): poste de « Gestionnaire pièces détachées ».

Dans le cadre de ses fonctions, le salarié commandait et manipulait uniquement des pièces neuves, livrées et emballées (aucune pièce usagée ou dégradée).

Il n'avait donc aucun contact « à risque » avec du matériel altéré contenant des fibres d'amiante inhalables.

Il n'intervenait pas dans le processus de fabrication et ne découpait donc pas des matériels contenant de l'amiante (ce point n'est d'ailleurs pas contesté par l'intéressé).

Le salarié ne travaillait pas non plus dans un espace confiné ou mal ventilé et ne côtoyait pas d'autres salariés qui auraient pu être en contact avec des fibres d'amiante.

En dehors de ses fonctions habituelles, M [C] a pu intervenir de façon ponctuelle et espacée (une fois par mois) pour des opérations de démarrage de l'usine.

Par roulement, (sur une équipe de quatre salariés), une fois par mois le dimanche soir, le salarié mettait en route les chaudières permettant le démarrage de l'activité de production du site le lundi matin.

Pour cette mise en route, M [C] s'assurait de l'entretien des chaudières (lorsque la température de celles-ci était abaissée), et il pouvait être alors amené à remplacer des joints d'étanchéité, dits joints klingérit (diamètre 60mm et épaisseur 15mm).

L'opération de pose des joints opérée par le salarié s'effectuait avec des joints

neufs, non découpés, non chauffés ou travaillés préalablement.

Leur étanchéité imposait qu'ils soient forcément graissés avant leur pose (avec de la graisse dite «graphitée »). Cette lubrification empêchait alors le relargage éventuel des fibres d'amiante inclues dans la composition des joints.

Lors de cette intervention mensuelle, 2 à 4 joints pouvaient être remplacés par le salarié (qui assurait la dépose des joints à changer et la pose des joints de remplacement) ... ».

Compte tenu de ce qui précède l'exposition au risque allégué de manière avérée et habituelle de Monsieur [C] au sein de la société [14] n'est certainement pas démontrée.

Au surplus, on soulignera ici qu'au terme du procès-verbal de contact téléphonique dressé le 28 septembre 2020 par l'agent enquêteur de la CPAM du HAINAUT, Monsieur [C] n'a pas fait état d'une exposition à l'inhalation de poussières d'amiante au sein de la société [14] (pièce n°11) :

'J'ai beaucoup été exposé à l'amiante lorsque j'étais dans l'armée.

Ensuite lorsque j'ai pris ma carrière militaire j'ai travaillé au sein des Moteurs Duvant à [Localité 13]. J'allais monter les moteurs directement chez le client (en France ou à l'étranger). Je montais les moteurs des groupes électrogènes, il y avait de l'amiante au niveau des échappements. Je montais également les moteurs sur les bateaux.

Au sein de l'entreprise [O] [N], j'effectuais l'entretien et la réparation des véhicules légers avec notamment changement du système de freinage revêtu d'amiante ...'.

On rappellera, par ailleurs, qu'avant d'entrer dans les effectifs de la société [14], Monsieur [C] a travaillé successivement auprès de plusieurs employeurs l'ayant exposé de manière avérée et habituelle à l'inhalation de poussières d'amiante.

En effet, il résulte de la synthèse de l'enquête administrative diligentée par la CPAM du HAINAUT que :

Il ressort des différentes investigations que :

Monsieur [C] indique avoir été exposé à l'amiante :

- De 1965 à 1981 au sein de la marine nationale en qualité de mécanicien: entretien et changement et nettoyage de filtres avec changement de joints de vannes et repose des calorifuges au niveau des ventilateurs, entretien des machines à vent

- De mars 1981 à février 1982 au de la société [9] en qualité de mécanicien : il effectuait le montage des moteurs directement chez le client et notamment les moteurs des groupes électrogènes où l'amiante était présent au niveau de l'échappement.

- De mars à novembre 1982 au sein des [8] en qualité de mécanicien : entretien des autocars avec des interventions sur des systèmes de freinage (contenant de l'amiante à l'époque) et notamment leur nettoyage et leur rectification.

De novembre 1982 à juillet 1983 au sein du garage [11] en qualité de mécanicien : entretien et réparation des véhicules légers avec changement des systèmes de freinage revêtus d'amiante.

[...]

La société [9] à [Localité 13] est reprise dans la liste des établissements et des métiers de la construction et de la réparation navale susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité fixée par un arrêté du 7 juillet 2000.

'Elle est en effet citée dans arrêté du 30 septembre 2005 modifiant la liste des établissements de la construction et de la réparation navales susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité de l'amiante....'

Compte tenu du temps de latence des maladies professionnelles liées à l'inhalation de poussières d'amiante qui est en moyenne de 20 à 40 ans, il est médicalement avéré que la maladie de Monsieur [C] a été contractée à l'occasion des tâches qu'il a effectuées au sein des entreprises pour le compte desquelles il a travaillé avant d'entrer au service de la société [14].

Dans ce contexte, la CARSAT ne peut se contenter de soutenir que la société [14] ne rapporte pas la preuve que Monsieur [C] aurait été exposé à l'amiante chez son précédent employeur en faisant état des déclarations de son salarié sur ses conditions de travail chez cet autre employeur, reprises dans le rapport d'enquête administrative de la CPAM du HAINAUT.

En effet, le dernier employeur ne dispose, le plus souvent, d'aucun élément concret sur les conditions de travail et d'exposition du salarié chez ses précédents employeurs, étant précisé que la CPAM, qui a pour obligation de mener l'instruction à l'encontre du dernier employeur, ne se préoccupe que très rarement d'interroger les précédents employeurs.

Le dernier employeur ne dispose ainsi que de preuves tenant aux déclarations du salarié et / ou à des circonstances telles qu'une inscription de l'établissement concerné sur la liste des établissements ouvrant droit à l'ACAATA, comme cela est le cas en l'espèce.

Ainsi, la preuve doit être considérée comme rapportée par ces éléments, sauf à faire peser sur le dernier employeur une preuve impossible à rapporter.

Il résulte, en tout état de cause, de ce qui précède qu'il n'est pas possible de déterminer l'établissement dans lequel l'exposition au risque a provoqué la maladie.

En ce qui concerne la procédure 22/00873 la société [14] soutient par avocat ses conclusions en réponse et récapitulatives n° 2 par lesquelles elle demande à la Cour de':

In limine litis,

- SURSEOIR A STATUER dans l'attente de l'issue du recours exercé devant le pôle social du Tribunal Judiciaire de LAON ;

Subsidiairement,

- ORDONNER l'inscription au compte spécial, par application de l'article 2-4° de l'arrêté du 16 octobre 1995, des dépenses résultant de la prise en charge de l'affection déclarée par Monsieur [C] au titre du tableau n°30 des maladies professionnelles ;

- ORDONNER, en conséquence, le retrait du compte employeur de la société [14] des dépenses afférentes à la maladie de Monsieur [C] et la rectification du ou des taux de cotisation correspondants.

En tout état de cause,

- Ordonner à la CARSAT HAUTS DE France de faire une stricte application des dispositions de l'article D.242-6-4 du code de la sécurité sociale dès lors qu'elle produira une décision de justice définitive concernant la prise en charge au titre de la législation professionnelle par la CPAM DU HAINAUT le 10 décembre 2020 de la maladie de Monsieur [C] le 17 février 2020.

Elle fait valoir les mêmes moyens que ceux soutenus dans la procédure n°21/04408 et, comme il est indiqué à la note d'audience, insiste sur le fait qu'elle n'a pas exposé le salarié au risque.

Par conclusions enregistrées par le greffe à la date du 20 mai 2022 et soutenues oralement par sa représentante dans les deux procédures 21/04408 et 22/00873, la CARSAT HAUTS DE France demande à la Cour de':

-constater que la société [14] conteste la décision d'imputation prise par la CARSAT des Hauts-de-France devant le Tribunal Judiciaire de Laon

- se déclarer seule compétente pour se prononcer sur la décision de la CARSAT des Hauts-de-France d'imputer sur son compte employeur les incidences financières de la maladie professionnelle du 17 février 2020 de Monsieur [I] [C] ;

- prendre acte que la CARSAT des Hauts-de-France fera une application stricte des dispositions de l'article D.242 6-4 alinéa 4 du Code de la sécurité sociale dès lors que la société [14] produira une décision définitive concernant la prise en charge de la maladie professionnelle du 17 février 2020 de Monsieur [I] [C];

- constater qu'il résulte du rapport d'enquête administrative que Monsieur [I] [C] a été exposé au risque au sein de la société [14] ;

- constater que la société [14] n'apporte pas la preuve de l'exposition de Monsieur [I] [C] au risque de sa maladie professionnelle du 17 février 2020 au sein d'autres entreprises ;

dire et juger que les conditions d'application de l'article 2 4° de l'arrêté du 16 octobre 1995 ne sont pas remplies

- confirmer la décision de la CARSAT des Hauts-de-France d'imputer sur le compte employeur de la société [14] les incidences financières de la maladie de Monsieur [I] [C].

Et, en conséquence de :

- rejeter la demande de sursis à statuer de la société [14] et rejeter son recours;

Elle fait en substance valoir ce qui suit':

En ce qui concerne la demande de sursis à statuer.

La demanderesse fait notamment valoir à l'appui de son recours devant le Tribunal Judiciaire de Laon que le salarié n'aurait pas été exposé au risque en son sein mais au sein de plusieurs autres entreprises.

Elle conteste ainsi l'imputation des coûts de la maladie ce qui ressortit à la compétence du contentieux de la tarification ce dont il résulte que la Cour ne pourra que rejeter cette demande de sursis à statuer.

En ce qui concerne la demande d'inscription au compte spécial de la maladie de Monsieur [C].

Monsieur [C] a bien été exposé à l'amiante au sein de la société demanderesse.

Les seules déclarations du salarié ne suffisent pas à apporter la preuve d'une exposition du salarié au risque au sein d'autres entreprises.

La liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée des travailleurs de l'amiante est une liste à portée générale ne donnant aucune indication sur les conditions réelles d'exercice de l'emploi et ne constitue pas un élément de preuve suffisant de l'exposition chez un ou plusieurs précédents employeurs.

MOTIFS DE L'ARRET.

Sur la jonction des deux procedures 21/04408 et 22/00873

Attendu que les deux procédures 21/04408 et 22/00873 tendant exactement aux mêmes fins, il apparaît conforme à une bonne administration de la justice d'en ordonner la jonction et de dire qu'elles seront désormais suivies sous le numéro le plus ancien, à savoir le 21/04408.

Sur la demande de sursis a statuer'.

Attendu qu'aux termes de l'alinéa 4 de l'article D.242-6-4 l'ensemble des dépenses constituant la valeur du risque est pris en compte par les caisses mentionnées à l'article L.215-1 (les CARSAT) dès que ces dépenses leur ont été communiquées par les caisses primaires, sans préjudice de l'application des décisions de justice ultérieures.

Qu'il résulte de ce texte que si le taux de cotisation dû, conformément à l'article D. 242-6-3 du Code de la sécurité sociale, au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles, est déterminé par les caisses régionales d'assurance maladie, il peut être remis en cause par une décision de justice ultérieure qui en modifierait les éléments de calcul.

Qu'en application de ce texte il appartient aux CARSAT de retirer du compte de l'employeur les incidences financières des accidents du travail et maladies professionnelles déclarés inopposables à ce dernier.

Qu'il appartiendra donc à la CARSAT de retirer les coûts litigieux du compte de la société demanderesse s'il intervient une décision passée en force de chose jugée lui déclarant inopposable la décision de prise en charge de la maladie de Monsieur [C], ce qu'il convient d'ordonner en tant que de besoin selon les modalités prévues au dispositif, mais qu'il n'apparaît ni utile à une bonne administration de la justice ni nécessaire à la défense de ses intérêts par la société [14] de surseoir à statuer dans l'attente d'une telle décision.

Sur la contestation par la societe [14] de l'application qui lui est faite de la presomption d'imputabilite au dernier employeur exposant avant la constatation medicale de la maladie et sur sa demande d'inscription des couts de la maladie au compte special.

Attendu qu'il résulte de l'article 2, 4°, de l'arrêté interministériel du 16 octobre 1995 pris pour l'application de l'article D. 242-6-3 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable, que la maladie doit être considérée comme contractée au service du dernier employeur chez lequel la victime a été exposée au risque avant sa constatation médicale sauf à cet employeur à rapporter la preuve dans les conditions prévues à l'article 2 de l'arrêté du 16 octobre 1995 et en particulier le 4° de cet article, que la victime a également été exposée au risque chez d'autres employeurs.

Qu'il résulte de ces textes et de l'article D.242-6-17 du Code de la sécurité sociale qu'un employeur autre que le dernier employeur exposant peut également se voir imputer la présomption précitée et mettre à sa charge les coûts correspondant sauf si cet établissement est nouveau au sens de l'article D.242-6-17 du Code de la sécurité sociale et qu'il ne soit pas considéré comme issu du précédent ce qui suppose que le nouvel établissement n'exerce pas une activité similaire avec les mêmes moyens de production et qu'il n'ait pas repris au moins la moitié du personnel du précédent établissement .

Que c'est sur le fondement de cette présomption d'imputabilité au dernier employeur exposant ou à son successeur au sens tarifaire prévue par les textes précités et sous le contrôle du juge de la tarification que les CARSAT et la CRAMIF inscrivent les coûts des maladies professionnelles aux comptes des employeurs.

Attendu qu'il convient de bien distinguer les deux problématiques tout à fait différentes des conditions d'application de la présomption ( qui suppose que l'employeur soit le dernier employeur ayant exposé le salarié au risque avant la constatation médicale de la maladie ou qu'il soit le successeur de ce dernier employeur ) et de la preuve contraire à cette dernière ( qui suppose que la multiexposition du salarié soit établie et qu'il soit impossible de déterminer dans quelle entreprise l'affectée a été contractée ou bien qu'un des autres cas d'inscription au compte spécial soit retenu).

Que la question se pose de manière générale en ce qui concerne les litiges portant sur l'application d'une présomption légale simple ou mixte pour lesquels est susceptible de se poser de manière tout à fait distincte la question de l'applicabilité de la présomption et celle de la preuve contraire.

Qu'ainsi, par exemple, l'employeur d'un salarié intérimaire est-il présumé par la loi avoir commis une faute inexcusable si ce dernier occupe un poste à risque et qu'il ne lui a pas été dispensé une formation renforcée à la sécurité et il peut apporter la preuve contraire de son absence de faute inexcusable.

Que l'employeur peut ainsi contester l'applicabilité à son encontre de la présomption en contestant que le poste soit à risque ou qu'il n'ait pas dispensé une formation renforcée à la sécurité mais il peut également, sans nécessairement contester que la présomption lui soit applicable, s'attacher à apporter la preuve qu'il n'a pas commis de faute inexcusable.

Que de même, l'accident survenu au temps et au lieu du travail est-il présumé en application de l'article L.411-1 du Code de la sécurité sociale être un accident du travail, sauf à l'employeur à établir que la lésion a une cause totalement étrangère au travail.

Que le litige est donc susceptible de susciter une discussion distincte portant d'une part sur l'application de la présomption d'accident du travail, l'employeur contestant l'existence d'une lésion survenue au temps et au lieu du travail, et d'autre part sur la preuve de la cause totalement étrangère au travail.

Que s'agissant de la présomption d'imputabilité de la maladie au dernier employeur exposant avant sa constatation médicale ou au successeur de ce dernier , il en va exactement de même.

Que l'employeur peut en effet contester devant le juge l'application même qui lui est faite de la présomption légale en contestant que ses conditions d'application soient remplies.

Qu'il peut également, sans contester que la présomption lui soit applicable, tenter d'en renverser les effets en établissant qu'il est fondé à obtenir l'inscription des coûts litigieux au compte spécial.

Qu'il peut également, comme tel est le cas en l'espèce, à la fois contester l'application qui lui est faite de la présomption et s'attacher à y apporter la preuve contraire.

Attendu que les règles de droit substantiel concernant les conditions d'application de la présomption d'imputabilité et de sa preuve contraire résultant de l'article 2 de l'arrêté du 16 octobre 1995 et en particulier du 4° de ce texte doivent s'articuler avec les charges processuelles résultant des articles 6 et 9 du Code de procédure civile dont il résulte qu'il appartient à l'auteur d'une prétention d'alléguer les faits concluants propres à la fonder puis de les prouver ( sur la charge de l'allégation et de la preuve qui constituent les charges processuelles et qui, selon ces auteurs, «' déterminent le plaideur qui perdra le procès si l'édifice de fait apparaît comme insuffisant'» Messieurs [J] et [V] [S] au Dalloz Action droit et pratique de la procédure civile n° 321-101 et 321-82 et suivants édition 2021-2022).

Qu'il incombe ainsi à l'employeur contestant la présomption précitée d'alléguer puis de prouver des faits de nature à l'en exonérer.

Qu' il lui appartient ainsi, en fonction des termes du litige, de faire valoir de manière argumentée des faits permettant d'exclure que la présomption précitée lui soit directement appliquée faute pour lui d'être le dernier employeur exposant ou des faits permettant de caractériser la nouveauté de son établissement par rapport à celui du dernier employeur exposant ou, en cas de succession d'établissements, des faits de nature à établir dans la chaine des établissements successifs allant de l'établissement dernier exposant à son propre établissement l'existence d'un ou plusieurs établissements nouveaux et donc d'une rupture de risque et qu'il peut également faire valoir l'absence d'exposition au risque du salarié antérieurement à la première constatation médicale de sa maladie dans l'établissement dont il est le successeur en application des règles de tarification.

Qu'il lui appartient ensuite en application de l'article 9 du Code de procédure civile d'apporter la preuve des faits concluants ainsi allégués ( dans ce sens au visa des articles L. 461-1 du code de la sécurité sociale et 9 du code de procédure civile 2e Civ., 15 juin 2017, pourvoi n° 16-14.901, Bull. 2017, II, n° 137 aux termes duquel il appartient à l'employeur, s'il entend contester l'imputabilité au travail de la maladie, d'en rapporter la preuve et ce même s'il n'est pas le dernier employeur / dans le même sens déjà 2e Civ., 19 décembre 2013, pourvoi n° 12-19.995, Bull. 2013, II, n° 245 selon lequel la prise en charge d'une maladie au titre de la législation professionnelle ne prive pas l'employeur à laquelle elle est opposable de la possibilité, en démontrant qu'elle n'a pas été contractée à son service, d'en contester l'imputabilité si une faute inexcusable lui est reprochée ou si les cotisations d'accident du travail afférentes à cette maladie sont inscrites à son compte).

Que s'agissant de faits juridiques dans les rapports entre l'employeur en cause et la CARSAT, la preuve impartie peut être apportée par tous moyens et notamment par voie de présomptions graves précises et concordantes au sens de l'article 1353 devenu 1382 du Code Civil.

Attendu que le même raisonnement doit être tenu en ce qui concerne la preuve contraire à la présomption d'imputabilité.

Qu'il appartient ainsi à l'employeur prétendant apporter la preuve contraire à cette dernière d'alléguer puis de prouver des faits de nature à apporter cette preuve en faisant valoir et en prouvant des faits de nature à justifier l'inscription au compte spécial en application de l'article 2 de l'arrêté du 16 octobre 1995 et en particulier du 4° de ce texte prévoyant une telle inscription lorsque la victime de la maladie professionnelle a été exposée au risque successivement dans plusieurs établissements d'entreprises différentes sans qu'il soit possible de déterminer celle dans laquelle l'exposition au risque a provoqué la maladie ;

Attendu qu'il convient d'examiner en premier lieu le bien fondé de la contestation par la société [14] de l'application qui lui a été faite par la CARSAT de la présomption d'imputabilité au dernier employeur ayant exposé le salarié au risque avant sa constatation médicale ce que la société résume en indiquant qu'il lui appartient de démontrer qu'elle n'a pas exposé Monsieur [C] au risque.

Attendu que si, comme l'indique la demanderesse, ce dernier n'a pas fait état de son exposition à l'amiante à son service lors de son contact téléphonique avec l'enquêteur de la caisse, il n'en a pas moins fait figurer la société [14] comme un des employeurs exposants dans la rubrique «' emplois antérieurs ayant exposé la victime au risque de la maladie'» de sa déclaration de maladie professionnelle établie en date du 16 juillet 2020.

Que le rapport d'enquête retient d'ailleurs expressément que le salarié indique bien avoir été exposé à l'amiante au service de la société demanderesse.

Attendu que la société elle-même reproduit dans ses écritures soutenues à l'audience des passages de sa lettre de réserves à la caisse primaire datée du 25 septembre 2020 dans laquelle elle indique que Monsieur [C] intervenait une fois par mois le dimanche pour la mise en route des chaudières et qu'il pouvait être amené à remplacer des joints d'étanchéité kingerit contenant de l'amiante en posant des joints neufs préalablement graissés avant leur pose et qui ne pouvaient donc diffuser des fibres dans l'atmosphère.

Que si elle reconnaît ainsi elle-même l'utilisation habituelle de produits à base d'amiante par le salarié, elle soutient que ces derniers ne dégagaient pas de fibres dans l'atmosphère ce dont il résulte que son aveu sur ces points est indivisible et ne peut donc faire preuve contre elle de son exposition à l'amiante du salarié lors de son activité à son service.

Qu'il convient cependant de relever que l'affirmation de la demanderesse selon laquelle le graissage des joints klingerit aurait empêché la diffusion atmosphérique des fibres d'amiante n'est aucunement prouvée.

Que la société [14], qui ne soutient pas que le salarié ait été exposé au risque à l'occasion d'un emploi ultérieur, n'établit aucunement que Monsieur [C] n'ait pas été exposé de manière habituelle à l'amiante alors qu'il travaillait à son service.

Que le moyen soutenu en sens contraire manquant en fait, il convient de dire non fondée sa contestation de l'application qui lui est faite par la CARSAT de la présomption d'imputabilité au dernier employeur exposant avant la constatation médicale de la maladie.

Attendu qu'il maintenant de déterminer si la demanderesse apporte la preuve contraire à la présomption d'imputabilité en établissant qu'elle est fondée à revendiquer l'inscription des coûts litigieux au compte spécial, en l'occurrence sur le fondement du 4° de l'article 2 de l'arrêté du 16 octobre 1995.

Attendu en premier lieu que la demanderesse soutient que s'il n'est pas établi que le salarié ait été exposé au risque amiante de manière avérée et habituelle en son sein, la preuve serait en revanche rapportée qu'il a été exposé à l'amiante chez les précédents employeurs pour le compte desquels il a travaillé avant d'entrer à son service.

Que les faits ainsi allégués sont concluants puisqu'il est soutenu que le salarié a été exposé dans plusieurs établissements d'entreprises différentes qui sont énumérées dans la déclaration de maladie professionnelle à savoir la marine nationale, la société [9] à [Localité 13], les cars [8] à [Localité 10] et l'entreprise [O] [N].

Qu'il s'ensuit que la demande présentée par la société [14] est conforme aux prescriptions de l'article 6 du Code de procédure civile.

Attendu qu'il appartient ensuite à la demanderesse d'établir que sa demande satisfait aux prescriptions de l'article 9 du même Code et de prouver en conséquence que le salarié a été exposé au risque chez deux au moins des 4 établissements allégués par elle comme exposants.

Attendu qu'il résulte du 4° de l'article 2 de l'arrêté du 16 octobre 1995 et de l'article 1353 devenu 1382 du Code Civil que parmi les présomptions pouvant être retenues pour caractériser l'exposition d'un salarié à l'amiante chez un précédent employeur il est possible de retenir, à condition qu'elle soit confortée par d'autres éléments du débat, l'inscription de ce dernier sur la liste de cessation anticipée des travailleurs de l'amiante concernant les établissements de fabrication de matériaux à base d'amiante, de flocage ou de calorifugeage à l'amiante.

Que cependant l'inscription sur cette liste ne suffit pas à elle seule à établir une présomption suffisante d'exposition puisqu'il s'agit d'une liste de portée générale indiquant que les salariés de l'établissement concerné ont pu être exposés au risque mais ne donnant aucune indication sur les conditions réelles d'exercice du salarié au sein de l'établissement.

Qu'ainsi un salarié d'une entreprise inscrite sur la liste peut parfaitement ne jamais avoir été exposé au risque, s'il a occupé par exemple des fonctions purement administratives ou d'entretien des locaux sans exposition environnementale voire même des fonctions d'itinérant pour lesquelles il était rattaché au site mais sans y être affecté et sans être exposé au risque.

Attendu qu'en l'espèce il résulte de la déclaration de maladie professionnelle établie par Monsieur [C] qu'il aurait été exposé à l'amiante alors qu'il travaillait au service de la société [9] du 2 mars 1981 au 28 février 1982 alors qu'il était employé par cette société en qualité de mécanicien en déplacement.

Qu'il a indiqué à l'enquêteur de la caisse qu'il allait monter les moteurs directement chez le client, en France ou à l'étranger, qu'il montait les moteurs des groupes électrogènes, qu'il y avait de l'amiante au niveau des échappements et qu'il montait également les moteurs sur les bateaux.

Attendu qu'il résulte des articles 6 et 9 précités du code de procédure civile que l'allégation non contestée est tenue pour vrai et que le juge n'a pas à vérifier l'exactitude d'un fait allégué s'il n'est pas contesté ( sur ce point voir le Dalloz Action «' Droit et Pratique de la procédure civile'» édition 2021/2022 n°321-93 p 1061 et la doctrine et la jurisprudence citées sur ce point en notes 1 et 2).

Que la CARSAT HAUTS DE France ne conteste pas les affirmations précitées du salarié reprises par l'enquêteur de la caisse puis par la demanderesse pas plus qu'elle ne conteste que l'établissement exploité par la société [9] à [Localité 13] figure bien sur la liste ACAATA mais se contente de dénier toute portée probatoire à une telle inscription pour la détermination de l'exposition d'un salarié au risque de l'amiante.

Qu'il est donc constant et que ne fait pas partie des termes du litige ni l'emploi du salarié aux fonctions de mécanicien en déplacement par l'établissement de [Localité 13] de la société [9] ni le fait que l'établissement d'emploi du salarié figure bien sur la liste ACAATA'.

Attendu que l'arrêté du 7 juillet 2000 fixant la liste des établissements et des métiers de la construction et de la réparation navales susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité mentionne , dans la liste qui y est annexée, l'entreprise suivante':

[9] et [7], [Adresse 5] : depuis 1878.

Que si l'inscription de l'établissement figurant sur la déclaration de maladie professionnelle sur la liste ACAATA n'est pas contestée par la CARSAT HAUTS DE France la consultation de la liste annexée à l'arrêté précité permet de confirmer que ce dernier figure bien sur cette liste.

Attendu ensuite que le métier de mécanicien exercé par Monsieur [C] au service de cet établissement figure sur la liste des métiers figurant en annexe de l'arrêté précité puisqu'il résulte des déclarations du salarié qu'il montait les moteurs chez les clients, c'est-à-dire en atelier, mais également sur les bateaux et que la liste des métiers comporte le métier de mécanicien tant pour les travaux d'atelier que pour les travaux de bord.

Attendu que le fait pour Monsieur [C] d'avoir travaillé dans un l'établissement de la société [9] exerçant une activité de construction et de réparation navale inscrit sur la liste de cessation anticipée des travailleurs de l'amiante et d'y avoir exercé un des métiers prévus par cette liste corrobore les déclarations du salarié concernant son exposition au risque au service de cet employeur et justifie en l'espèce qu'il soit retenu par voie de présomption grave précise et concordante que ce salarié a été exposé au risque de l'amiante alors qu'il travaillait au service de cet employeur.

Attendu par contre que si les conditions de travail de Monsieur [C] au service de l'entreprise [O] [N], qu'il a déclaré exposante dans sa déclaration de maladie professionnelle, sont en partie connues par son procès-verbal d'audition par l'enquêteur de la caisse auquel il a déclaré qu'il effectuait «' l'entretien et la réparation des véhicules légers avec notamment changement du système de freinage revêtu d'amiante, ces déclarations du salarié ne sont corroborées par aucun élément objectif et extrinsèque et sont donc insuffisantes à elles seules à établir la réalité de son exposition au risque chez cet employeur.

Qu'il en va de même des déclarations du salarié à l'enquêteur concernant ses conditions de travail pour le compte des [8] qui, si elle font bien apparaître que de mars à novembre 1982 son activité de mécanicien au sein de cette entreprise l'amenait à entretenir les autocars en intervenant sur les systèmes de freinage (contenant de l'amiante à époque) et notamment en procédant à leur nettoyage et leur rectification, ne sont pour autant corroborées par aucun élément objectif et extrinsèque aux affirmations du salarié.

Que de même si le salarié a déclaré à l'enquêteur de la caisse avoir été mécanicien au sein de la marine nationale de 1965 à 1981 et s'être vu confier l'entretien, le changement et le nettoyage des filtres avec changements des joints de vannes et repose des calorifuges au niveau des ventilateurs ainsi que l'entretien des machines à vent, toutes activités l'ayant exposé à l'amiante, ces affirmations ne sont elles non plus aucunement corroborées par des éléments extrinsèques audites déclarations.

Qu'il s'ensuit que la preuve de l'exposition au risque de Monsieur [C] alors qu'il travaillait au service de la marine nationale puis des Cars Winter puis du Garage Gerald Ellis n'est pas rapportée.

Que la demanderesse ne prouvant que la seule exposition de Monsieur [C] au risque alors qu'il travaillait au service de la société moteurs duvant, il s'ensuit qu'elle succombe dans la charge de la preuve de la multiexposition de ce salarié qui lui incombe en application des dispositions combinées des articles 2 4° de l'arrêté du 16 octobre 1995, 9 du Code de procédure civile et 1315 devenu 1353 du Code Civil et qu'il convient en conséquence de rejeter sa demande d'inscription au compte spécial.

Que manquant par le fait qui lui sert de base la demande de rectification des taux impactés par les coûts litigieux ne peut qu'être rejetée.

Attendu que succombant en ses prétentions, la demanderesse doit être condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS.

La Cour, statuant par arrêt contradictoire rendu en audience publique par sa mise à disposition au greffe,

Ordonne la jonction des deux procédures 21/04408 et 22/00873 et dit qu'elles seront désormais suivies sous le numéro le plus ancien, à savoir le 21/04408.

Rejette la demande de la société [14] de sursis à statuer dans l'attente de l'issue du recours exercé devant le pôle social du Tribunal Judiciaire de LAON et la déboute de sa demande d'inscription au compte spécial des coûts de la maladie de Monsieur [I] [C] prise en charge au titre du tableau n° 30 des maladies professionnelles ainsi que de ses demandes de retrait de son compte employeur de ces coûts et de rectification des taux de cotisation impactés par ces derniers.

Dit qu'il appartiendra à la CARSAT des Hauts de France de retirer les coûts litigieux du compte de la société demanderesse s'il intervient une décision judicaire passée en force de chose jugée lui déclarant inopposable la décision de prise en charge de la maladie de Monsieur [C]

Dit bien fondée la décision de la CARSAT des Hauts-de-France, notifiée par courrier à la demanderesse du 22 juin 2021, maintenant sur le compte employeur de la société [14] des incidences financières de la maladie de Monsieur [I] [C].

Condamne la société [14] aux dépens de la présente instance.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Tarification
Numéro d'arrêt : 21/04408
Date de la décision : 18/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-18;21.04408 ?
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