1ère CHAMBRE AVJ/IM
ARRET N 10
AFFAIRE N : 07/00279
Jugement du 23 Janvier 2007
Tribunal de Grande Instance du MANS
no d'inscription au RG de première instance 06/06723
ARRET DU 08 JANVIER 2008
APPELANTE :
LA S.A.S. HOTEL D'ANJOU actuellement dénommée ANJOU HOTEL
6 rue Jules Ferry - 34000 MONTPELLIER
représentée par la SCP CHATTELEYN ET GEORGE, avoués à la Cour
assistée de Me Philippe CHATTELEYN, avocat au barreau du MANS
INTIMEE :
LA S.A.R.L. JPME
27 boulevard de la Gare - 72000 LE MANS
représentée par Me VICART, avoué à la Cour
assistée de Me Mireille HAY, avocat au barreau du MANS
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 12 Novembre 2007 à 14 H 00, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame VERDUN, conseiller, faisant fonction de président vu l'empêchement de Madame la présidente de la 1ère chambre A et en application de l'ordonnance du 3 septembre 2007, Monsieur MARECHAL, conseiller, et Madame JEANNESSON, vice-président placé faisant fonction de conseiller, ayant été entendue en son rapport,
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame LEVEUF
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 08 janvier 2008, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.
Signé par Madame VERDUN, président, et par Madame LEVEUF, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
I - Exposé du litige
Par acte authentique en date du 4 août 2003, la SA Hôtel d'Anjou a cédé à la SARL JPME un fonds de commerce d'hôtel-café-bar-licence IV, excepté le droit au bail, sis 27 boulevard de la Gare au Mans dans lequel est exploité l'Hôtel d'Anjou. Le même jour, la SA Hôtel d'Anjou cédait à la SARL JPME le droit au bail par acte authentique dans lequel il est mentionné en page 12 que Monsieur A..., ès qualités de gérant de la SA Hôtel d'Anjou, s'engage à fournir dans les quatre mois de la signature dudit acte un procès- verbal d'avis favorable de la commission intercommunale de sécurité précisant qu'à la suite de la mise en sécurité, l'exploitation de l'hôtel peut se poursuivre normalement auprès du public.
Par jugement en date du 11 janvier 2005, le juge de l'exécution a fixé une astreinte provisoire de 250 € par jour de retard à compter de la signification de la décision et ce pendant un délai de deux mois à l'issue duquel il sera à nouveau statué, en l'absence de la fourniture par la SARL JPME de l'avis de la commission intercommunale de sécurité.
Selon procès-verbal en date du 11 juillet 2005, la commission intercommunale de sécurité maintenait, en l'absence des rapports de fin de travaux de l'organisme agréé portant au minimum sur le système de sécurité incendie, le désenfumage et les installations électriques, l'avis défavorable émis le 27 octobre 2000.
Par jugement en date du 8 novembre 2005, le juge de l'exécution a liquidé le montant de l'astreinte provisoire à la somme de 15 000 €, condamné la SA Hôtel d'Anjou au paiement de cette somme et a fixé à la charge de la SA Hôtel d'Anjou une astreinte définitive de 500 € par jour de retard à l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de la signification de la décision et ce pendant un délai d'un mois, en l'absence de la fourniture par la SARL JPME de l'avis favorable de la commission intercommunale de sécurité.
La SA Hôtel d'Anjou a interjeté appel de cette décision.
Par une ordonnance en date du 24 mai 2006, le Conseiller de la mise en état de cette cour a prononcé la radiation du rôle de la cour, faute pour l'appelante d'avoir exécuté le jugement entrepris, lequel est assorti de l'exécution provisoire.
Par acte du 21 décembre 2006, la SARL JPME a fait assigner la SA Hôtel d'Anjou devant le juge de l'exécution pour demander la condamnation de la SA Hôtel d'Anjou à lui régler la somme de 15 000 € au titre de l'astreinte définitive, cette dernière ne s'étant toujours pas exécutée, la fixation d'une nouvelle astreinte définitive de 1 000 € par jour de retard qui courra à compter de la notification du jugement à intervenir et pour une nouvelle durée de trois mois, outre la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts et celle de 3 000 € en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Par jugement en date du 23 janvier 2007, le Tribunal de grande instance du Mans a liquidé le montant de l'astreinte définitive décidée par le juge de l'exécution du Mans dans sa décision en date du 8 novembre 2005 à la somme de 15 000 €, condamné en conséquence la SA Hôtel d'Anjou au paiement de ladite somme à la SARL JPME, fixé à la charge de la SA Hôtel d'Anjou une astreinte définitive de 500 € par jour de retard à compter de la notification de la présente décision et ce pendant le délai de trois mois, en l'absence de fourniture par la SA Hôtel d'Anjou à la SARL JPME de l'avis favorable de la commission intercommunale de sécurité, débouté la SARL JPME de sa demande de dommages et intérêts et condamné la SA Hôtel d'Anjou à payer à la SARL JPME des frais irrépétibles.
La SAS Hôtel d'Anjou a interjeté appel de cette décision le 8 février 2007.
Par ordonnance en date du 2 mai 2007, le Juge des référés du Tribunal de grande instance du Mans a ordonné une expertise judiciaire afin notamment de dire si les travaux nécessaires à la conformité de l'établissement aux règles applicables au 4 août 2003 ont été réalisés.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la Cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées le 21 juin 2007 pour la SAS Hôtel d'Anjou et le 6 novembre 2007 pour la SARL JPME.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 8 novembre 2007.
***
II - Motifs
La SAS Hôtel d'Anjou sollicite de prononcer la jonction entre les instances portant sur les appels des décisions du juge de l'exécution du Tribunal de grande instance du Mans des 8 novembre 2005 et 23 janvier 2007, en tous cas de les appeler à une même audience, d'infirmer le jugement entrepris et vu les articles 33 et suivants de la loi du 9 juillet 1991, de :
- déclarer la SARL JPME irrecevable et à défaut non fondée en ses demandes,
- réduire à néant, à tout le moins à un montant de principe, la condamnation intervenue au titre de l'astreinte liquidée,
- dire n'y avoir lieu à nouvelle astreinte qui de toute manière ne pourrait être définitive,
- au besoin, renvoyer la SARL JPME à saisir préalablement les juges du fond,
- à tout le moins surseoir à statuer dans l'attente du dépôt du rapport de l'expert désigné en référé en cours d'instance,
- le tout pour l'ensemble des causes énoncées dans les motifs,
- décharger la SAS Hôtel d'Anjou de toutes condamnations entreprises à son encontre et contraires aux présentes,
- condamner la SARL JPME à lui payer la somme de 2 500 € en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La SARL JPME conclut à la confirmation du jugement et sollicite la condamnation de la SAS Hôtel d'Anjou à lui payer la somme de 6 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive outre celle de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La SAS Hôtel d'Anjou fait valoir que la décision du premier juge de fixer une nouvelle astreinte définitive est dénuée de toute base légale dans la mesure où elle n'est pas conforme à l'article 33 alinéa 2 de la loi du 9 juillet 1991 qui prévoit que le juge de l'exécution peut assortir d'une astreinte une décision rendue par un autre juge si les circonstances en font apparaître la nécessité. Elle soutient qu'en l'espèce l'obligation principale de faire des travaux, à la charge de la SA Hôtel d'Anjou est issue d'un acte authentique de vente et non de la décision d'un autre juge.
Elle expose ensuite que l'astreinte liquidée a été fixée par une précédente décision dont il a été interjeté appel, qui a fait l'objet d'une radiation mais a été remise au rôle de la cour, justifiant que les deux instances soient jointes, à tout le moins appelées à une même audience.
Elle ajoute que l'engagement de Monsieur A... tel que prévu dans l'acte authentique était seulement de fournir un avis favorable de la commission intercommunale de sécurité du fait des travaux réalisés tels que décrits dans l'acte et non de faire tous les travaux nécessaires à l'obtention de l'avis favorable, qu'elle n'est plus en mesure d'effectuer dans les lieux de quelconques travaux et qu'il s'agit d'une cause étrangère de nature à justifier la levée de l'astreinte en application de l'article 36 de la loi du 9 juillet 1991. Elle soutient aussi qu'il n'est pas de la compétence du juge de l'exécution d'interpréter les engagements pris par la SAS Hôtel d'Anjou dans l'acte du 4 août 2003. Enfin elle expose qu'à tout le moins un sursis à statuer s'impose dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise de Monsieur B....
La SARL JPME réplique que le premier juge a liquidé l'astreinte prononcée par son jugement en date du 8 novembre 2005 et fixé une nouvelle astreinte définitive pour vaincre la résistance injustifiée de la SA Hôtel d'Anjou à exécuter son obligation consacrée par le premier jugement en date du 11 janvier 2005 soit la fourniture de l'avis favorable de la commission intercommunale de sécurité, ce premier jugement étant passé en force de chose jugée. Elle fait valoir que la SARL JPME n'a pas interjeté appel de ce jugement et n'a donc pas contesté son engagement, parfaitement clair contenu dans l'acte du 4 août 2003, qu'elle est donc irrecevable à tenter d'instaurer une discussion sur l'interprétation de son engagement. Elle soutient qu'elle a un intérêt légitime à solliciter de la SAS Hôtel d'Anjou le respect de son obligation dans la mesure où elle risque la fermeture de l' établissement, soulignant que l'expert judiciaire a lors de son compte-rendu de la réunion du 10 septembre 2007 fustigé la carence de la SAS Hôtel d'Anjou.
***
Aux termes de l'article 33 alinéa 2 de la loi du 9 juillet 1991, le juge de l'exécution peut assortir d'une astreinte une décision rendue par un autre juge si les circonstances en font apparaître la nécessité.
L'article 35 de la même loi dispose que l'astreinte même définitive est liquidée par le juge de l'exécution sauf si le juge qui l'a ordonnée reste saisi de l'affaire ou s'en est expressément réservé le pouvoir.
L'article 36 prévoit que l'astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'injonction du juge provient en tout ou partie d'une cause étrangère.
L'article 37 dispose que la décision du juge est exécutoire par provision.
Il résulte de ces dispositions que le juge de l'exécution saisi de la liquidation d'une astreinte provisoire ou définitive a le pouvoir de liquider ladite astreinte et de prononcer une nouvelle astreinte définitive dès lors que sont justifiées des circonstances faisant apparaître une telle nécessité.
En liquidant l'astreinte définitive prononcée par le jugement du 8 novembre 2005 et justifiée par l'absence de fourniture par la SA Hôtel d'Anjou de l'avis favorable de la commission intercommunale de sécurité qui avait déjà été constatée par le jugement définitif du 11 janvier 2005 fixant en conséquence une astreinte provisoire, et en prononçant une nouvelle astreinte définitive du fait de l'inexécution de son obligation par la SA Hôtel d'Anjou, le juge de l'exécution n'a pas excédé les pouvoirs que lui donne la loi du 9 juillet 1991.
Néanmoins, le prononcé d'une nouvelle astreinte définitive doit être justifié par les circonstances et pour s'opposer à la liquidation de l'astreinte définitive prononcée par le jugement du 8 novembre 2005, la SAS Hôtel d'Anjou invoque une cause étrangère. Si la SAS Hôtel d'Anjou n'apparaît pas recevable à remettre en cause l'étendue de son engagement qu'elle n'a pas discuté après le jugement du 11 janvier 2005, il demeure que par ordonnance en date du 2 mai 2007, le Juge des référés du Tribunal de grande instance du Mans a ordonné une expertise judiciaire afin de dire si les travaux nécessaires à la conformité de l'établissement aux règles applicables au 4 août 2003 ont été réalisés, dans l'affirmative, dire à quelle date ils l'ont été, dans la négative, dire ceux qui relèvent de l'entretien normal et ceux qui relèvent d'une non-conformité à la date de la signature des actes de cession. La mission de l'expert a en conséquence pour fins de répondre en grande partie aux moyens opposés par la SAS Hôtel d'Anjou devant la cour.
Dans ces conditions, il y a lieu de surseoir à statuer sur les demandes de la SARL JPME dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise de Monsieur B....
Les frais et dépens seront réservés.
***
PAR CES MOTIFS
STATUANT publiquement et contradictoirement,
DIT que le juge de l'exécution n'a pas excédé les pouvoirs qu'il détient de la loi du 9 juillet 1991,
Avant dire droit,
SURSOIT À STATUER dans l'attente du dépôt du rapport de Monsieur B...,
RÉSERVE les frais de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et dépens.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
C. LEVEUF F. VERDUN