1ère CHAMBRE A
VJ/IM
ARRET N 168
AFFAIRE N : 07/00758
Jugement du 29 Mars 2007
Tribunal d'Instance d'ANGERS
no d'inscription au RG de première instance 06/0929
ARRET DU 06 MAI 2008
APPELANTE :
LA MUTUALITE FRANCAISE ANJOU MAYENNE venant aux droits de la MUTUALITE DE L'ANJOU
67 rue des Ponts de Cé - 49000 ANGERS
représentée par la SCP CHATTELEYN ET GEORGE, avoués à la Cour
assistée de Me Gérard SULTAN, avocat au barreau d'ANGERS
INTIMEE ET INCIDEMMENT APPELANTE :
LA CHAMBRE SYNDICALE DES PHARMACIENS DE MAINE ET LOIRE
30 Boulevard Saint Michel - 49000 ANGERS
représentée par la SCP GONTIER-LANGLOIS, avoués à la Cour
assistée de Me Nicole BEAUDOUIN, avocat au barreau du MANS
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 05 Février 2008 à 14 H 00, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame CHAUVEL, conseiller, désignée par ordonnance du Premier Président en date du 12 décembre 2007 pour exercer les fonctions de président, Monsieur MARECHAL, conseiller, et Madame JEANNESSON, vice-président placé faisant fonction de conseiller, ayant été entendue en son rapport,
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame LEVEUF
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 06 mai 2008, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
Signé par Madame CHAUVEL, président, et par Madame LEVEUF, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
I - Exposé du litige
La Chambre syndicale des Pharmaciens de Maine et Loire est un syndicat professionnel regroupant les pharmaciens de ce département et ayant pour objet la défense de leurs intérêts professionnels.
En 1992, la Mutualité de l'Anjou est un groupement à but non lucratif qui, au moyen des cotisations versées par ses membres, se propose de mener une action de prévoyance, de solidarité et d'entraide. Ses statuts prévoient la possibilité de créer et de gérer des oeuvres sociales mutualistes ; parmi ces oeuvres sociales ont été notamment créées deux pharmacies mutualistes à Angers et à Cholet, sans personnalité juridique distincte de celle de la Mutualité de l'Anjou.
La chambre syndicale des pharmaciens du Maine-et-Loire estimant que les pharmacies du département subissaient de la part de la Mutualité de l'Anjou une concurrence illicite, au sens de l'article 36-1 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, du fait que la cotisation forfaitaire acquittée par les adhérents qui s'engageaient à ne se fournir en médicaments qu'auprès de ces pharmacies mutualistes était inférieure à celle demandée aux adhérents qui entendaient conserver le choix de leur pharmacien exerçant à titre libéral, a assigné la Mutualité de l'Anjou en dommages et intérêts et pour faire cesser les pratiques discriminatoires dont elle prétendait être victime.
Par jugement du 24 mars 1994 rendu par le Tribunal de grande instance d'Angers, la Mutualité de l'Anjou a été condamnée à payer 3 000 000 F de dommages et intérêts à la Chambre syndicale des Pharmaciens de Maine et Loire et il lui a été ordonné de cesser les pratiques de cotisations différenciées sous astreinte de 30 000 F par jour de retard. La présente Cour a infirmé le jugement mais, par arrêt en date du 21 octobre 1997, la Cour de cassation a cassé cet arrêt et renvoyé l'affaire devant la Cour d'appel de Poitiers. L'arrêt rendu par cette dernière Cour le 19 octobre 1999 a de nouveau été cassé par arrêt de la Cour de cassation du 12 mars 2002.
Sur renvoi, la cour d'appel de Caen, par arrêt du 9 décembre 2004, devenu définitif, a confirmé partiellement le jugement du 24 mars 1994, ordonné à la Mutualité de l'Anjou de faire cesser, dans les trente jours de la signification de l'arrêt et sous astreinte de 1 000 € par jour de retard les pratiques de cotisations différenciées en fonction de la pharmacie où se fournissent les adhérents mutualistes et alloué à la Chambre syndicale des Pharmaciens de Maine et Loire un euro à titre de dommages et intérêts.
Par acte du 20 décembre 2005, la Chambre syndicale des Pharmaciens de Maine et Loire a fait assigner la Mutualité Française Anjou Mayenne, venant aux droits de la Mutualité de l'Anjou, en liquidation de l'astreinte à la somme de 712 000 €, au motif que la Mutualité Française Anjou Mayenne n'a pas rempli son obligation de faire cesser les pratiques de cotisations différenciées.
Par jugement en date du 29 mars 2007, le juge de l'exécution du Tribunal d'instance d'Angers a notamment :
- déclaré recevable l'action de la Chambre syndicale des Pharmaciens de Maine et Loire,
- liquidé l'astreinte prononcée le 9 décembre 2004 à la somme de 35 600 €,
- condamné la Mutualité Française Anjou Mayenne à payer à la Chambre syndicale des Pharmaciens de Maine et Loire la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La Mutualité Française Anjou Mayenne a interjeté appel de cette décision le 11 avril 2007.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la Cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées le 7 janvier 2008 pour la Mutualité Française Anjou Mayenne venant aux droits de la Mutualité de l'Anjou, et le 8 janvier 2008 pour la Chambre syndicale des Pharmaciens de Maine et Loire.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 24 janvier 2008.
***
II - Motifs
La Mutualité Française Anjou Mayenne conclut à l'infirmation du jugement et demande à la Cour de :
- déclarer la Chambre syndicale des Pharmaciens de Maine et Loire irrecevable, subsidiairement mal fondée en toutes ses demandes, fins et conclusions,
- rejeter l'appel incident formé par la Chambre syndicale des Pharmaciens de Maine et Loire,
- la décharger de toutes condamnations à son encontre,
-condamner la Chambre syndicale des Pharmaciens de Maine et Loire à lui payer la somme de 3 000 € au titre des frais irrépétibles de première instance et celle de 3000 € au titre des frais irrépétibles d'appel,
- condamner la Chambre syndicale des Pharmaciens de Maine et Loire aux entiers dépens de la procédure.
Elle expose qu'elle n'exerce aucune activité d'assurance, conformément aux dispositions de l'article L 111-4-1 II du Code de la mutualité et qu'en conséquence, elle ne détermine pas les montants et les taux de cotisation en la matière, que depuis 2003, il a été mis fin à la pratique des cotisations différenciées en fonction de la pharmacie, mutualiste ou libérale, où se fournissent les adhérents. Elle soulève l'irrecevabilité de la demande de la Chambre syndicale des Pharmaciens de Maine et Loire au motif que le titre exécutoire qu'est l'arrêt de la cour d'appel de Caen du 9 décembre 2004 et qui lui est opposé dans la présente procédure d'exécution ne lui a pas été signifié, en violation de l'article 503 du Code de procédure civile et des articles 33 et suivants de la loi du 9 juillet 1991 et qu'il n'a été signifié qu'à la Mutualité de l'Anjou qui avait à l'époque perdu la personnalité juridique, à la suite de la fusion absorption de celle-ci avec la Mutualité de la Mayenne.
Au fond, elle fait valoir :
- que la pratique des cotisations différenciées a disparu depuis 2003, que les mutualistes n'ont pas à régler une cotisation plus élevée pour être remboursés à conditions équivalentes dans les officines libérales et que le premier juge a confondu cotisations différenciées et "reste à charge" de l'assuré, lequel est en principe dû par le client mais peut être directement réglé par les pharmacies libérales ou mutualistes, à titre commercial,
- qu'elle est en toute hypothèse dans l'impossibilité de modifier le montant des cotisations dans la mesure où elle ne peut procéder à aucune mesure d'assurance et n'est titulaire d'aucun agrément à cet égard. Elle soutient que cette impossibilité revêt le caractère de la cause étrangère visée à l'article 36 alinéa 3 de la loi du 9 juillet 1991.
La Chambre syndicale des Pharmaciens de Maine et Loire sollicite de débouter la Mutualité Française Anjou Mayenne de son appel, de confirmer le jugement en ce qu'il a constaté que la Mutualité Française Anjou Mayenne n'avait pas respecté l'injonction qui lui avait été donnée par la cour d'appel de Caen dans son arrêt du 9 décembre 2004, de l'infirmer sur le montant de l'astreinte ramenée à 30 € par jour, de liquider l'astreinte à la somme de 712 000 €, de condamner la Mutualité Française Anjou Mayenne à lui payer la somme de 15 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais de première instance et d'appel et de la condamner aux dépens.
Elle soutient :
- sur le moyen d'irrecevabilité soulevé, que la Mutualité de l'Anjou a absorbé la Mutualité de la Mayenne pour donner naissance à la Mutualité Française Anjou Mayenne et que la mutualité absorbante a gardé sa personnalité juridique, le changement de dénomination sociale n'ayant eu aucune incidence sur l'existence de la personne morale absorbante,
- au fond, que la Mutualité Française Anjou Mayenne continue à inciter les adhérents des mutuelles d'assurances qui la composent à se fournir dans ses pharmacies en ne faisant pas payer à ceux qui ont opté pour certains contrats dits "option 90 % ou 78 %" la part du prix des médicaments qui devrait normalement rester à leur charge,
- que pour faire cesser ces pratiques, il lui suffit notamment de donner instruction à ses préposés de se faire payer par les adhérents d'une carte "option 90 % ou 78 %" les 10 % ou 22 % du coût du médicament qui devraient rester à leur charge et qui le resteraient dans d'autres pharmacies, qu'elle dispose de tous les outils juridiques nécessaires pour faire respecter l'arrêt de la cour d'appel de Caen et qu'elle ne l'a pas fait, sciemment,
- qu'elle reste l'employeur des salariés affectés à l'activité d'assurance officiellement gérée par la Mutuelle de l'Anjou, et partant a les moyens de faire cesser les pratiques discriminatoires, et que ne l'ayant pas fait, la liquidation de l'astreinte est justifiée,
- que le geste commercial allégué par la Mutualité Française Anjou Mayenne est en réalité une pratique constante et obligatoire de celle-ci.
Sur le moyen d'irrecevabilité soulevé
La fusion absorption est une forme de concentration des sociétés qui est juridiquement réalisée par la transmission intégrale du patrimoine, actif et passif, de la société absorbée dans celui de la société absorbante. La société absorbée disparaît juridiquement et la société absorbante subsiste, son patrimoine, actif et passif étant augmenté du patrimoine actif et passif de la société absorbée. La personnalité juridique de la société absorbante est donc maintenue, peu important qu'elle décide d'un changement de sa dénominations sociale.
En l'espèce, le traité de fusion absorption réalisé par acte sous seings privés le 7 octobre 2002 a consisté en l'apport par la Mutualité de la Mayenne à la Mutualité de l'Anjou de son patrimoine (pages 5 et suivantes du traité ), la Mutualité de l'Anjou prenant la dénomination nouvelle de Mutualité Française Anjou Mayenne (page 3 du traité de fusion et page 1 de l'acte notarié d'enregistrement et de publicité foncière du 16 mai 2003) sans que pour autant la Mutualité Française Anjou Mayenne soit une nouvelle entité juridique, distincte de la Mutualité de l'Anjou.
L'arrêt rendu le 9 décembre 2004 par la cour d'appel de Caen a condamné la Mutualité de l'Anjou qui n'a pas soulevé lors de la procédure son incapacité à défendre contre la Chambre Syndicale des Pharmaciens du Maine et Loire. Il a en conséquence été logiquement signifié le 4 janvier 2005 à la Mutualité de l'Anjou, à personne habilitée. De surcroît, le conseil d' administration de la Mutualité Française Anjou Mayenne a, par délibération du 7 février 2005, considéré que l'arrêt signifié à la Mutualité de l'Anjou le 4 janvier 2005 était satisfaisant dans la mesure où, malgré la condamnation de la Mutualité de l'Anjou, la Mutualité Française Anjou Mayenne pouvait démontrer la cessation effective des pratiques de cotisations différenciées et qu'elle n'envisageait pas de se pourvoir en cassation. Cette délibération démontre que la Mutualité Française Anjou Mayenne avait pleinement conscience que, quelle que soit la dénomination de la société condamnée, la condamnation sous astreinte s'adressait à elle et non à une entité juridique qui aurait disparu.
La signification de l'arrêt du 9 décembre 2004 est régulière et recevable et la fin de non-recevoir soulevée par la Mutualité Française Anjou Mayenne sera rejetée.
Sur la liquidation de l'astreinte
L'arrêt de la cour d'appel de Caen a ordonné à la Mutualité de l'Anjou de faire cesser, dans les trente jours de la signification de l'arrêt et sous astreinte de 1 000 € par jour de retard les pratiques de cotisations différenciées en fonction de la pharmacie où se fournissent les adhérents mutualistes. Le juge de l'exécution n'a pas le pouvoir de modifier les termes de cette condamnation mais il détient celui d'interpréter la décision de justice. Il convient de rechercher si les pratiques interdites ont effectivement cessé, étant observé qu'il appartient à la Chambre Syndicale des Pharmaciens du Maine et Loire, qui sollicite la liquidation de l'astreinte de rapporter la preuve, s'agissant d'une obligation de ne pas faire, qu'elles subsistent malgré la condamnation.
Il est constant que la Mutualité Française Anjou Mayenne gère deux pharmacies mutualistes, l'une à Angers et l'autre à Cholet. L'arrêt de la Cour d'appel de Caen a souligné que les pratiques incriminées ont pour effet et même pour objet de restreindre l'accès des pharmacies libérales aux adhérents des mutuelles fédérées par la Mutualité de l'Anjou en donnant à ces derniers une incitation financière à se fournir exclusivement dans les pharmacies mutualistes qu'elle exploite, que ceci a pour conséquence des conditions de vente discriminatoires entre les deux types de pharmacie, faussant ainsi le jeu de la concurrence et qu'il importe peu que cette distorsion de concurrence soit réalisée par le moyen indirect de cotisations différenciées. Elle a encore dit que, selon les déclarations de la Mutualité de l'Anjou, l'option pharmacie a été remplacée par une option 90 % permettant à l'adhérent qui fréquente une officine libérale d'être remboursé à 90 %, mais que la Mutualité de l'Anjou ne précise pas le contenu de cette option dont il paraît résulter qu'il y a toujours une discrimination entre les adhérents qui s'approvisionnent aux pharmacies mutualistes et les autres, qu'elle n'affirme pas que la demande de la Chambre Syndicale des Pharmaciens du Maine et Loire est devenue sans objet et ne démontre pas la réalité de l'évolution majeure alléguée. Ainsi, lors du prononcé de l'arrêt, la Mutualité de l'Anjou avait déjà soumis à la Cour le moyen qu'elle soulève à nouveau dans ses écritures et qui avait été rejeté.
En l'espèce, il ressort des cartes d'adhérents à la Mutuelle La Choletaise établies pour des périodes de validité postérieures au 4 février 2005 (soit 30 jours après date de la signification de l'arrêt du 9 décembre 2004) fournies par la Chambre Syndicale des Pharmaciens du Maine et Loire (pièces 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 54, 55, 58 et 59) que pour les contrats à option pharmacie 90 % (colonne "PHAR"), la prise en charge est de 100 % pour les pharmacies mutualistes ("Pharm Mut 100 % TSS") ou que pour des contrats option pharmacie 78 % (colonne "PHAR"), la prise en charge est de 88 % pour les pharmacies mutualistes ("Pharm Mut 88 % TSS) et qu'en revanche, pour les contrats option 100 % (colonne "PHAR"), la mention "pharmacie mutualiste", qui ne procure pas d'avantage supplémentaire, ne figure plus sur la carte d'adhérent.
Cette pratique est encore démontrée par les attestations d'adhérents à la Mutuelle de l'Anjou aux termes desquelles, alors que leur contrat est souscrit selon l'option 90 %, leurs dépenses sont prises en charge à 100 % dans les pharmacies mutualistes (pièces 3, 4, 15, 20 et 53 produites par la Chambre Syndicale des Pharmaciens du Maine et Loire).
Enfin, il est avéré que cette pratique que la Mutualité Française Anjou Mayenne ne nie pas mais qu'elle affirme être un geste commercial envers ses adhérents, est en fait la norme contractuelle puisqu'il résulte d'une lettre signée de Monsieur A..., directeur général de la Mutuelle de l'Anjou, en date du 30 novembre 2005, à une adhérente, que l'option 90 % a dû évoluer, que la prise en charge des médicaments "vignette blanche" passe de 90 % à 95 %, que le reste à charge pour les adhérents est donc divisé par deux, que les vignettes bleues sont toujours prises en charge à 90 % mais que "les pharmacies mutualistes (et certaines pharmacies libérales) prennent à leur compte le reste à charge".
Il s'en déduit que selon l'option du contrat, 90 % (95 % pour les vignettes blanches) ou 100 %, les adhérents à ces mutuelles fédérées par la Mutualité Française Anjou Mayenne bénéficient dans tous les cas d'une prise en charge à 100 % s'ils se fournissent dans une pharmacie mutualiste, à Angers ou à Cholet, alors que s'ils choisissent un contrat option 90 % (ou 95 %) et se fournissent dans une pharmacie libérale, la différence, 10 % (ou 5 %), reste à leur charge, ce qui revient à dire que les contrats à option 90 % (ou 95 %), dont les cotisations sont moins chères (pièce 12 de la Chambre Syndicale des Pharmaciens du Maine et Loire), offrent néanmoins aux adhérents des mutuelles qui se fournissant chez les pharmacies mutualistes les mêmes avantages que les contrats 100 %, d'un coût plus élevé (pièce 12 de la Chambre Syndicale des Pharmaciens du Maine et Loire), incitant ainsi ces adhérents à s'approvisionner exclusivement chez les pharmacies mutualistes exploitées par la Mutualité Française Anjou Mayenne. Le même raisonnement est applicable aux contrats option 78 % dont la prise en charge par les pharmacies mutualistes est de 88 %.
Dans ces conditions, il convient de constater que la pratique des cotisations différenciées s'est poursuivie au-delà de la date du 4 février 2005, causant la distorsion de concurrence que la cour d'appel de Caen a voulu faire cesser. Il importe peu que certaines pharmacies libérales prennent à leur charge le montant qui doit rester à la charge des adhérents aux contrats option 90 % ou 95 %, ces pharmacies se trouvant dans l'obligation de s'aligner sur les pratiques illicites des pharmacies mutualistes afin de rester concurrentielles et de garder leur clientèle. La Chambre Syndicale des Pharmaciens du Maine et Loire démontre en effet que des pharmaciens du Maine et Loire se sont plaints auprès de leur Conseil de l'ordre des pratiques commerciales discutables de tel pharmacien d'Angers (pièces 64, 66 et 67a) cité par la Mutualité Française Anjou Mayenne pour tenter de démontrer que celui-ci, tout comme les pharmacies mutualistes, prend en charge à 100 % les contrats de mutuelles à option 90 et 95 %, à titre commercial.
La Mutualité Française Anjou Mayenne allègue de l'impossibilité d'exécuter l'arrêt dans la mesure où, depuis la réforme du code de la Mutualité intervenue en avril 2001, elle n'exerce plus aucune activité d'assurance et n'a pas le pouvoir de modifier les taux de cotisation.
Mais d'une part la Mutualité Française Anjou Mayenne ne peut à la fois soutenir que la pratique décrite ci-dessus consiste en un geste commercial de la part des pharmacies mutualistes et en même temps qu'elle ne peut y mettre fin alors qu'elle gère les deux pharmacies en cause et qu'il lui suffit de demander à ses préposés de la faire cesser. D'autre part, il ne s'agit pas de modifier les taux mais de ne pas assurer aux adhérents des mutuelles une prise en charge totale dans les pharmacies mutualistes quelque soit le taux de cotisation, ce que la Mutualité Française Anjou Mayenne est à même de faire, étant rappelé que cette pratique a été considérée par la Cour d'appel de Caen comme discriminatoire et que la Mutualité Française Anjou Mayenne a accepté la décision, alors que l'ordonnance du 19 avril 2001, qu'elle invoque pour justifier l'impossibilité d'exécution, était en vigueur au moment de la procédure devant cette même Cour d'appel.
La cause étrangère justifiant l'impossibilité d'exécuter n'est pas démontrée.
Il reste que le prononcé d'une astreinte provisoire a un caractère comminatoire, de sorte que sa liquidation peut être limitée à un montant moindre, hors de toute autre considération ; que la Cour estime devoir liquider l'astreinte à la somme de 350 € par jour pendant 712 jours, durée prise en compte par le premier juge et dont il est demandé la confirmation par la Chambre Syndicale des Pharmaciens du Maine et Loire, soit 249 200 €.
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Il serait inéquitable de laisser à la charge de la Chambre Syndicale des Pharmaciens du Maine et Loire les frais irrépétibles qu'elle a engagés pour faire valoir ses droits. La Mutualité Française Anjou Mayenne sera condamnée à lui payer la somme de 5 000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle sera également condamnée aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement entrepris en ses dispositions non contraires à celles du présent arrêt ;
Réformant,
Liquide l'astreinte prononcée par la Cour d'appel de Caen le 9 décembre 2004 à la somme de 249 200 € ;
Y ajoutant,
Condamne la Mutualité Française Anjou Mayenne à payer à la Chambre Syndicale des Pharmaciens du Maine et Loire la somme de 5 000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Condamne la Mutualité Française Anjou Mayenne aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
C. LEVEUF S. CHAUVEL