COUR D'APPEL
d'ANGERS
Chambre Sociale
ARRÊT N°
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/00126 - N° Portalis DBVP-V-B7D-EOVV.
Jugement , origine de MAINE ET LOIRE, décision attaquée en date du 10 Décembre 2018, enregistrée sous le n°
ARRÊT DU 28 Avril 2022
APPELANTE :
Madame [M] [R] épouse [G]
[Adresse 3]
[Localité 2]
représentée par Madame [H], munie d'un pouvoir
INTIME :
LE [6]
DOAA Pôle Règlementation Récupération Contentieux
[Adresse 7]
[Localité 1]
représenté par Monsieur [K], muni d'un pouvoir
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Janvier 2022 à 9 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame GENET, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Madame Estelle GENET
Conseiller : Madame Marie-Christine DELAUBIER
Conseiller : Mme Nathalie BUJACOUX
Greffier lors des débats : Madame Viviane BODIN
ARRÊT :
prononcé le 28 Avril 2022, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame GENET, conseiller faisant fonction de président, et par Madame Viviane BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******
FAITS ET PROCÉDURE
[B] [U], née le 1er août 1920 et décédée le 13 juin 2016, a bénéficié d'une aide sociale versée par le département de Maine-et-Loire pour la prise en charge de ses frais d'hébergement en EHPAD, ce pour un montant de 41 908,14 euros.
Elle avait souscrit deux contrats d'assurance-vie auprès de la société [5] en désignant comme bénéficiaires ses deux nièces dont Mme [M] [R] épouse [G].
Au titre du recours sur succession, le département de Maine-et-Loire a récupéré une somme de 802,58 euros correspondant à l'actif net de succession.
Il a également demandé aux bénéficiaires des contrats d'assurance-vie la restitution de la part récupérable, en application de l'article L. 132-8 du code de l'action sociale et des familles, et a réclamé à chacune la somme de 7 886,31 euros, réduite par décision du 13 mars 2018 à 5 338,31 euros pour tenir compte du règlement des frais d'obsèques. Mme [G] s'est opposée à cette réclamation et a saisi la commission départementale d'aide sociale d'un recours qui a été rejeté par décision du 10 décembre 2018.
Mme [G] a formé appel contre cette décision le 7 février 2019.
Les parties ont d'abord été convoquées par lettres du 1er octobre 2019 pour l'audience du 11 mai 2020 mais ont été informées que celle-ci était annulée en raison de la crise sanitaire.
Elles ont été de nouveau convoquées pour l'audience du 18 janvier 2021. Mme [G] a indiqué par courrier électronique du 14 janvier 202 qu'elle ne pouvait se présenter à l'audience en raison de la crise sanitaire, étant de surcroît personne à risque. L'affaire a en conséquence été renvoyée à l'audience du 15 avril 2021.
Mme [G] a fait savoir par courrier électronique du 11 avril 2021 qu'elle ne pouvait se déplacer à l'audience du 15 avril 2021 en raison de la crise sanitaire. Elle n'a toutefois pas sollicité le renvoi de l'affaire.
Par arrêt réputé contradictoire et avant dire droit, en date du 15 juillet 2021, la cour a :
- ordonné la réouverture des débats à l'audience du conseiller rapporteur du mardi 11 janvier 2022 à 9 heures ;
- dit que la notification de l'arrêt aux parties vaudra convocation pour cette audience ;
- invité les parties à présenter leurs observations sur le montant des primes versées après l'âge de soixante-dix ans par [B] [U] sur les contrats d'assurance-vie n° 85601918611 et n° 91615039318 ;
- invité Mme [M] [G] à produire tout justificatif émanant de la société [5], tel qu'un historique de compte, permettant de déterminer la date exacte de versement des primes sur les deux contrats d'assurance-vie ;
- dit que Mme [M] [G] devra, le cas échéant, communiquer dans les meilleurs délais au département de Maine-et-Loire les nouveaux documents obtenus de la société [5] et, en tout état de cause, avant l'audience du 11 janvier 2022 ;
- réservé le surplus et les dépens.
À l'audience du 11 janvier 2022, toutes les parties sont présentes ou représentées.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Mme [G] indique à l'audience s'opposer à la demande du conseil départemental et fait valoir qu'elle a personnellement aidé sa tante à hauteur de 110 euros par mois, ainsi que lors de dépenses exceptionnelles. Elle conteste également le montant à prendre en compte concernant le PEP Transmission et s'interroge sur le placement Nuances 2 souscrit après 70 ans.
Par conclusions datées du 25 mars 2020 et reprises oralement à l'audience, le département de Maine-et-Loire, représenté par le président du conseil départemental, demande le rejet de la requête de Mme [G] et de toutes ses prétentions et sollicite la confirmation de la décision de la commission départementale d'aide sociale.
Il demande également la condamnation de Mme [G] au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le conseil départemental de Maine-et-Loire expose qu'en dépit de l'absence de tout justificatif concernant sa situation familiale et financière qui aurait permis d'étudier une demande de modération voire d'exonération, il a tenu compte des frais exposés par Mme [G] pour le règlement des frais d'obsèques de sa tante et a limité son recours en récupération à la somme de 5 338,31 euros. Il observe cependant que, comme l'a relevé la commission départementale d'aide sociale, le recours formé par Mme [G] n'est accompagné d'aucun justificatif susceptible de justifier une nouvelle baisse du montant de la récupération à son encontre.
MOTIVATION
L'article L. 132-8 du code de l'action sociale et des familles comporte notamment les dispositions suivantes :
'Des recours sont exercés, selon le cas, par l'Etat ou le département :
1° Contre le bénéficiaire revenu à meilleure fortune ou contre la succession du bénéficiaire ;
2° Contre le donataire, lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande d'aide sociale ou dans les dix ans qui ont précédé cette demande ;
3° Contre le légataire ;
4° A titre subsidiaire, contre le bénéficiaire d'un contrat d'assurance-vie souscrit par le bénéficiaire de l'aide sociale, à concurrence de la fraction des primes versées après l'âge de soixante-dix ans. Quand la récupération concerne plusieurs bénéficiaires, celle-ci s'effectue au prorata des sommes versées à chacun de ceux-ci. (...)
Il résulte de la déclaration partielle de succession qui a été signée par Mme [G] le 18 novembre 2016, reçue par l'administration le 21 novembre 2016, que [B] [U] avait souscrit auprès de la société [5], en désignant Mme [G] et Mme [H] bénéficiaires chacune pour moitié, les contrats d'assurance-vie suivants :
- le 3 mars 1998, un contrat Nuances 2 n° 85601918611 pour un montant de capital versé de 5 130,50 euros dont 3 582,55 euros correspondant au montant des primes versées après le 70ème anniversaire de l'assurée ;
- le 28 février 1990, un contrat PEP Transmission n° 91615039318 pour un montant de capital versé de 12 190,07 euros dont 12 190,07 euros correspondant au montant des primes versées après le 70ème anniversaire de l'assurée.
[B] [U] avait 77 ans le 3 mars 1998 lorsque le contrat n° 85601918611 a été souscrit, de sorte que la totalité des primes sont présumées avoir été versées après son 70ème anniversaire.
Dans son arrêt en date du 15 juillet 2021, la cour s'était interrogée sur la raison pour laquelle il est indiqué dans la déclaration partielle de succession que le montant des primes versées après le 70ème anniversaire de l'assurée se limite à la somme de 3 582,55 euros pour un montant de capital versé s'élevant au total à 5 130,50 euros.
Mme [G] verse aux débats un courrier de la [4] en date du 23 septembre 2021, selon lequel il est confirmé que le montant des primes versées après 70 ans par l'assurée, concernant le contrat Nuances 2 est bien de 3582,55 euros.
Dans sa précédente décision, la cour s'est également interrogée sur le PEP Transmission en remarquant que [B] [U] avait 69 ans le 28 février 1990 lorsque le contrat n° 91615039318 a été souscrit, de sorte qu'il est surprenant que le versement de l'intégralité des primes représentatives du capital de 12 190,07 euros ne soit intervenu qu'après le 1er août 1990, date de son 70ème anniversaire.
Dans le courrier du 23 septembre 2021, la [4] confirme que c'est cette dernière somme qui doit être prise en compte et déclarée au service des impôts comme le capital revenant aux bénéficiaires. Il est précisé que ce contrat a été souscrit le 5 février 2004 par le transfert d'un PEP bancaire et que dans cette hypothèse, le versement initial est considéré comme un nouveau versement et l'antériorité fiscale du contrat d'origine n'est pas conservée pour les primes versées après 70 ans.
L'historique des opérations est parfaitement établi, ainsi que les montants à prendre en considération et il n'appartient pas à la cour d'écarter l'application des règles du droit fiscal et bancaire ni même de s'interroger sur les raisons pour lesquelles il a été conseillé à [B] [U] de souscrire de nouveaux produits bancaires alors qu'elle était âgée de plus 70 ans en perdant l'antériorité fiscale du contrat d'origine et des versements déjà effectués.
Or force est de constater que la commission départementale d'aide sociale a bien retenu la somme de 7886,31 euros comme celle étant récupérable sur les contrats en raison des primes versées après 70 ans [(3582,55 + 12190,07) /2], tel que cela est indiqué dans le courrier de la [4]. A cette somme, il a été retranché les frais d'obsèques pour moitié pris en charge par Mme [G]. Il est donc justifié de la somme réclamée de 5338,31 euros.
Par ailleurs, la cour ne peut procéder à la réduction du remboursement réclamé que sur présentation de justificatifs d'autres dépenses effectuées au profit de [B] [U]. Cette preuve n'est pas rapportée dans le dossier.
Il convient par conséquent de confirmer la décision de la commission départementale d'aide sociale du 10 décembre 2018 en ce qu'elle a rejeté le recours de Mme [G] contre la décision du département de Maine-et-Loire notifiée le 13 mars 2018 concernant la récupération de la créance d'aide sociale de l'hébergement des personnes âgées relative à la prise en charge des frais d'hébergement en EHPAD de sa tante [B] [U] décédée le 13 juin 2016, pour un montant de 5338,31 euros.
La demande présentée par le conseil départemental de Maine-et-Loire sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile est rejetée.
Mme [G] est condamnée au paiement des dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La COUR,
Statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement et par mise à disposition au greffe,
Confirme la décision de la commission départementale d'aide sociale du 10 décembre 2018 en ce qu'elle a rejeté le recours de Mme [M] [R] épouse [G] contre la décision du département de Maine-et-Loire notifiée le 13 mars 2018 concernant la récupération de la créance d'aide sociale de l'hébergement des personnes âgées relative à la prise en charge des frais d'hébergement en EHPAD de sa tante [B] [U] décédée le 13 juin 2016, pour un montant de 5338,31 euros ;
Rejette la demande présentée par le conseil départemental de Maine-et-Loire sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [M] [R] épouse [G] au paiement des dépens d'appel.
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,
Viviane BODINEstelle GENET