COUR D'APPEL
D'ANGERS
CHAMBRE A - COMMERCIALE
NR/IM
ARRET N°:
AFFAIRE N° RG 18/01270 - N° Portalis DBVP-V-B7C-EKRV
Jugement du 07 Juin 2017
Tribunal de Commerce d'ANGERS
n° d'inscription au RG de première instance 13/07159
ARRET DU 13 JUIN 2023
APPELANTE :
S.A.R.L. ASSISTANCE CONSEIL EXPERTISE
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Guillaume BOIZARD de la SELARL BOIZARD - GUILLOU SELARL, avocat au barreau d'ANGERS
INTIMEE :
S.A.R.L. JP LAVAGE
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représentée par Me Guillaume CLOUZARD de la SELAS ORATIO AVOCATS, avocat postulant au barreau d'ANGERS - N° du dossier 20170602, et Me Gaston VIGUET-CARRIN, avocat plaidant au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 14 Novembre 2022 à 14 H 00, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme ROBVEILLE, conseillère qui a été préalablement entendue en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme CORBEL, présidente de chambre
Mme ROBVEILLE, conseillère
M. BENMIMOUNE, conseiller
Greffière lors des débats : Mme TAILLEBOIS
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 13 juin 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Catherine CORBEL, présidente de chambre, et par Sophie TAILLEBOIS, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE
La société (SARL) JP Lavage exploite deux stations de Lavage de voitures à [Localité 5] (53).
Elle avait pour gérant jusqu'au 10 janvier 2012 M. [Z], nommé à cette fonction le 17 avril 2007.
Selon lettre de mission du 27 avril 2010, elle a confié la tenue de sa comptabilité à la société (SARL) Assistance Conseil Expertise (ACE).
Le 31 mars 2011, à la suite de discussions avec M. [F], responsable de bureau à la société ACE, la SARL JP Lavage, représentée par son gérant M. [Z], et la SARL ACE, représentée par son gérant M. [G], ont signé une nouvelle lettre de mission, à effet au 1er avril 2011, portant sur les prestations suivantes :
- des prestations de présentation, d'assistance et de conseils, chiffrées à 2.400 euros HT pour douze mois,
- des prestations sociales (élaboration des bulletins de paie, des déclarations sociales mensuelles, trimestrielles, annuelles et de toutes déclarations de droits indirects annuelles liées aux charges sociales), chiffrées à 25 euros HT par mois et par salarié,
- des prestations juridiques (élaboration de l'assemblée générale annuelle et de documents annexes, élaboration de l'assemblée générale de rémunération, transmission pour dépôt au greffe du tribunal), chiffrées à la somme de 400 euros pour l'exercice 2010/2011 (hors frais, débours, droits du tribunal de commerce de Laval).
Il y était stipulé que les honoraires seraient revus annuellement (année civile) et fixés d'un commun accord pour les exercices suivants ; qu'ils seraient facturés annuellement ou trimestriellement à réception de la facture, l'échéance de facturation et de paiement étant décidé par le client chaque année.
Il était précisé que, selon le choix de la cliente, la facturation ACE 2012 (année civile) sera élaborée en une seule facture annuelle du premier janvier 2012, payable à réception de la facture.
Il était également précisé que la facturation n'avait aucun lien juridique ou financier avec la date d'arrêté comptable de l'entreprise ; que pour les prestations sociales, la facturation positive ou négative des mouvements de personnel s'effectuera au cours du trimestre suivant et que les travaux, non prévus dans l'état de répartition des tâches, demandées par le client, feront l'objet d'un mission et d'une facturation distincte.
La lettre de mission contenait en outre une clause de résiliation, au terme de laquelle le contrat sera résilié automatiquement, notamment en cas de changement de gérant ou de conseil, à l'initiative du client (Article résiliation - 1) d) et e)).
Au titre des conséquences de la résiliation dans l'un des cinq cas prévus au contrat, il était stipulé que :
1) les honoraires payés resteront définitivement acquis au cabinet ACE, même en l'absence de prestations du cabinet ACE,
2) les honoraires impayés au jour de la résiliation devront être régularisés,
3) dans tous les cas, sauf décès du client, une indemnité de réparation du préjudice subi par le cabinet ACE de dix années d'honoraires annuels HT (toutes prestations confondues) sera due à la date de la résiliation.
Les 1er janvier 2011, 1er avril 2011, 1er juillet 2011 et 1er octobre 2011, la SARL ACE a établi à l'adresse de la SARL JP Lavage et de M. et Mme [Z] des 'notes d'honoraires' pour chacun des trimestres de l'année 2011.
Au 18 juillet 2011, la SARL ACE a également établi à l'adresse de la SARL JP Lavage une 'note d'honoraires" (facture n°422) pour des 'honoraires de conseils suite à accord du vendredi 15 juillet 2011', pour un montant de 3.675 euros HT (soit 4.395,30 euros TTC).
Aux termes d'une délibération prise à l'assemblée générale ordinaire du 10 janvier 2012 de la société J2F Services, M. [V] [Z] a été révoqué de ses mandats de gérant de ladite société et de ses mandats de gérant des sociétés Corail Lavage et JP Lavage dont la société J2F Services était l'associée unique.
M. [V] [Z] a saisi le tribunal de commerce de Laval aux fins de voir juger que sa révocation de ses mandats ne reposait pas sur de justes motifs et d'indemnisation des conséquences préjudiciables de celle-ci.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 19 janvier 2012, la société ACE indiquait à l'associée unique, la société J2F Services, et à M. [J], l'un des nouveaux gérants de la société JP Lavage, qu'en raison de la décision de confier une mission comptable au cabinet Groupe Experts Conseils à compter du 1er janvier 2012 prise à la suite de la révocation de M. [Z] de ses fonctions de gérant, elle avait missionné un avocat pour mettre en place un rendez-vous le 27 janvier 2012 ayant pour objet la transmission du dossier de la société JP Lavage, dans le respect de la lettre de mission liant la société ACE à la société JP Lavage.
Le 20 janvier 2012, la société Groupe Experts Conseils adressait à la société ACE une lettre aux termes de laquelle elle l'informait avoir été sollicitée par les nouveaux co-gérants de la SARL JP Lavage, en vue d'assurer une mission de comptabilité et lui demandait de lui faire savoir si rien ne s'opposait à son entrée en fonction sur ce dossier.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 27 janvier 2012, la SARL ACE indiquait aux co-gérants de la SARL JP Lavage qu'elle considérait que le contrat liant le cabinet ACE à la SARL JP Lavage se trouvait résilié conformément aux points 1-d et 1-e dudit contrat et précisait qu'elle transmettrait tous les documents à l'avocat missionné par elle en vue de leur mise à disposition à la société JP Lavage, après paiement de tous les honoraires lui restant dus ainsi que de l'indemnité due à la réparation du préjudice subi du fait de la résiliation de la lettre de mission du 31 mars 2011, sur la période du 1er février 2012 au mois de novembre 2015.
La SARL ACE a joint à cette lettre une 'note d'honoraires-2012" (facture n°039) pour une indemnité conventionnelle de résiliation d'un montant de 36.750 euros HT (43.953 euros TTC).
Le 30 janvier 2012, la SARL ACE a présenté à l'encaissement un chèque n°0304541 d'un montant de 43.953 euros établi à son ordre, daté du 26 décembre 2011, signé par M. [Z], tiré sur le compte bancaire de la SARL JP Lavage n°14021061940 ouvert auprès de la Banque Populaire de l'Ouest (BPO).
Ce chèque n'a cependant pas été honoré suite à un avis de rejet du 8 février 2012 pour le motif de 'chèque irrégulier, signature non conforme'.
Le montant correspondant a été bloqué, dans l'attente du résultat de la plainte déposée par la SARL JP Lavage devant le juge d'instruction, à l'encontre de M. [Z] pour escroqueries, contrefaçon ou falsification de chèque, usage de chèque contrefaisant ou falsifié et à l'encontre de M. [F], responsable de bureau au sein de la société ACE intervenu pour rédiger et signer la lettre de mission du 31mars 2011, pour acceptation d'un chèque contrefaisant ou falsifié et escroquerie.
Par ordonnance du 27 mars 2012, signifiée le 6 avril 2012, le juge des référés du tribunal de commerce d'Angers, au visa des articles 872 et 873 du code de procédure civile, a ordonné la remise de la totalité de la comptabilité de la SARL JP Lavage par la SARL ACE, dès le lendemain de la signification de l'ordonnance, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, en se réservant le droit de liquider l'astreinte.
Par ordonnance du 18 juin 2012, le juge des référés du tribunal de commerce de Laval saisi par la société ACE d'une demande de condamnation de la société JP Lavage au paiement d'une somme provisionnelle de 43.953 euros, a constaté l'existence d'une contestation sérieuse, invitant les parties à mieux se pourvoir.
Par actes d'huissier du 29 août 2012, la SARL JP Lavage a fait assigner la SARL ACE et M. [F] devant le tribunal de commerce de Laval, aux fins de les voir condamner au remboursement de sommes versées selon elle à tort par son ancien gérant M. [Z].
Par jugement du 15 mai 2013, le tribunal de commerce de Laval s'est déclaré incompétent territorialement au profit du tribunal de commerce d'Angers.
Parallèlement, selon arrêt du 5 mai 2015, la cour d'appel d'Angers, infirmant partiellement le jugement rendu le 30 janvier 2013 par le tribunal de commerce de Laval, a jugé que la révocation de M. [Z] de son mandat de gérant de la société JP Lavage ne reposait pas sur de justes motifs, a condamné cette dernière à verser la somme de 7 000 euros de dommages et intérêts à M. [Z] et a rejeté la demande reconventionnelle de dommages et intérêts formée par la SARL JP Lavage à l'encontre de M. [Z].
Parallèlement encore, par jugement du 9 octobre 2015, le tribunal correctionnel d'Angers a déclaré M. [Z], coupable des faits d'escroquerie, de contrefaçon ou de falsification de chèques ou d'usage de chèques contrefaisants ou falsifiés, déclaré M. [F] coupable des faits d'escroquerie et d'acceptation d'un chèque contrefaisant ou falsifié et ordonné la confiscation du chèque de 43.953 euros aux fins de destruction.
Sur l'action civile, ce même jugement a déclaré recevable la constitution de partie civile de la SARL JP Lavage, mais l'a déboutée de ses demandes de dommages et intérêts en réparation des préjudices financier et moral invoqués, comme non justifiées.
En l'état de ses dernières écritures devant le tribunal de commerce d'Angers auquel l'affaire introduite par la société JP Lavage a été renvoyée, la SARL JP Lavage a demandé à celui-ci de :
- déclarer nulle et de nul effet la clause pénale stipulée dans la lettre de mission du 31 mars 2011, pour être fondée sur une fausse cause et avoir pour effet de faire échec au principe d'ordre public de libre révocation des dirigeants de sociétés,
- juger que la signature par M. [Z] de la lettre de mission du 31 mars 2011, contenant la clause litigieuse, constitue un acte anormal de gestion, contraire à l'intérêt social,
- condamner solidairement la SARL ACE et M. [F] à lui payer :
* la somme de 4.395 euros en réparation du préjudice causé par le blocage de la somme de 43.950 euros du mois de janvier 2012 au mois de novembre 2015, soit pendant 3 ans et 10 mois,
* la somme de 4.395 euros avec intérêts au taux légal à compter du 3 janvier 2012 en remboursement de la facture du 1er janvier 2012, payée par chèque du 2 janvier 2012, pour des prestations non réalisées,
* la somme de 5.470,50 euros en remboursement d'une facture du 18 juillet 20211, ne correspondant à aucune prestation, avec intérêts au taux légal à compter du 29 août 2012, date de l'assignation valant mise en demeure,
* la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice qu'elle a subi,
* la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir,
- condamner la SARL ACE et M. [F] solidairement en tous les dépens.
En défense, la SARL ACE et M. [F] ont sollicité du tribunal qu'il constate l'autorité de chose jugée attachée au jugement du tribunal correctionnel d'Angers du 9 octobre 2015 et de la qualité de salarié de M. [F] ; en conséquence, qu'il juge l'action diligentée par la SARL JP Lavage à leur encontre irrecevable ; pour le surplus, qu'il la déclare infondée en ses prétentions et l'en déboute ; qu'il la condamne au paiement de la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
Par jugement du 7 juin 2017, le tribunal de commerce d'Angers a :
- déclaré la SARL JP Lavage recevable en ses demandes,
- débouté la SARL JP Lavage de toutes ses demandes à l'encontre de M. [W] [F],
- jugé la clause pénale de la lettre de mission du 31 mars 2011 nulle et sans effet,
- condamné la société ACE à payer à la SARL JP Lavage la somme de 4.395 euros au titre du blocage de la somme de 43.950 euros,
- condamné la société ACE à payer à la SARL JP Lavage la somme de 5.000 euros au titre de son préjudice pour rétention de ses pièces comptables, sociales et fiscales,
- débouté la SARL JP Lavage de sa demande de remboursement des factures du 1er janvier 2012 et du 18 juillet 2011,
- condamné la société ACE aux dépens,
- condamné la société ACE à payer à la SARL JP Lavage la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.
Par déclaration du 31 août 2017, la SARL ACE a relevé 'appel partiel des dispositions du jugement qui ont condamné la société ACE à payer à la SARL JP Lavage la somme de 5.000 euros au titre de son préjudice pour rétention de ses pièces comptables, sociales et fiscales et au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens' ; intimant la SARL JP Lavage.
La société JP Lavage a formé appel incident.
Par ordonnance du 19 avril 2018, le magistrat chargé de la mise en état de la cour d'appel d'Angers a ordonné la radiation de l'affaire.
Par message RPVA du 12 juin 2018, le conseil de la SARL ACE a sollicité la réinscription de l'affaire au rôle de la cour, suite au règlement des condamnations prononcées avec exécution provisoire par le tribunal de commerce d'Angers à son encontre.
L'affaire a été réinscrite au rôle de la cour d'appel d'Angers le 18 juin 2018, sous le n°RG 18/01270.
Selon avis du 6 juillet 2018, le conseiller de la mise en état de la cour d'appel d'Angers a invité les parties à s'interroger sur l'opportunité pour elles de trouver une solution dans le cadre d'une médiation judiciaire.
Une partie s'étant opposée à la mise en oeuvre d'une telle mesure, aucune médiation n'a pu avoir lieu.
Les parties ont conclu depuis la réinscription de l'affaire au rôle de la cour d'appel d'Angers.
Une ordonnance du 17 octobre 2022 a clôturé l'instruction de l'affaire.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
La SARL ACE demande à la cour de :
- la dire et juger recevable et bien fondée en son appel,
- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce d'Angers le 7 juin 2017 du chef suivant :
* déboute la SARL JP Lavage de sa demande de remboursement des factures du 1er janvier 2012 et du 18 juillet 2011,
- infirmer le jugement entrepris du chef des dispositions suivantes :
* condamne la société ACE à payer à la SARL JP Lavage la somme de 4.395 euros au titre du blocage de la somme de 43.950 euros,
* condamne la société ACE à payer à la SARL JP Lavage la somme de 5.000 euros au titre de son préjudice pour rétention de ses pièces comptables, sociales et fiscales,
* condamne la société ACE aux dépens,
- condamne la société ACE à payer à la SARL JP Lavage la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
statuant à nouveau,
- débouter la SARL JP Lavage de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- la condamner au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers dépens de l'instance.
La SARL ACE estime que la société JP Lavage ne démontre pas avoir subi un préjudice qui résulterait du blocage de la somme de 43.950 euros à raison de l'émission d'un chèque de ce montant par son précédent gérant, en relevant qu'elle ne prouve pas s'être retrouvée dans une situation financière très difficile, faisant valoir qu'elle ne justifie pas de démarches effectuées auprès de sa banque en vue d'obtenir un découvert en compte courant exceptionnel, ni d'apports en compte courant des associés de la société, ou encore d'une demande d'ouverture d'une procédure collective auprès du tribunal de commerce, à raison de difficultés de trésorerie qui auraient été causées par le blocage de la somme de 43.950 euros.
Elle conclut ainsi à l'infirmation du jugement entrepris qui l'a condamnée au paiement de la somme de 4 395 euros à titre de dommages intérêts.
Elle conteste en outre toute responsabilité au titre d'une prétendue rétention de pièces comptables, sociales et fiscales de la SARL JP Lavage.
Elle prétend ainsi justifier de la remise de la comptabilité de la SARL JP Lavage par le dépôt des pièces comptables au cabinet de son avocat, en faisant valoir que la société JP Lavage a fait le choix de ne pas les retirer alors qu'elles se trouvaient ainsi à sa disposition.
Elle souligne que par ordonnance du 15 mai 2012, le juge des référés du tribunal de commerce de Laval a débouté la société JP Lavage de sa demande de liquidation de l'astreinte assortissant la condamnation de la société ACE à remettre la comptabilité à celle-ci prononcée par ordonnance du 27 mars 2012, en reconnaissant que sa décision ne précisait pas le lieu de la remise de la comptabilité et en retenant que les deux parties n'avaient pas accompli les diligences s'imposant pour que la remise de la comptabilité s'effectue dans les conditions fixées par l'ordonnance du 27 mars 2012.
Elle indique qu'à la suite de l'ordonnance du 15 mai 2012, elle s'est exécutée, en soulignant que cela n'est pas contesté.
Elle conclut qu'il n'est rapporté la preuve par la société JP Lavage ni d'une faute commise par la société ACE à l'occasion de la remise de la comptabilité, ni d'un quelconque préjudice subi par elle.
Elle approuve par ailleurs le premier juge d'avoir rejeté la demande adverse de remboursement de la facture du 1er janvier 2012, en soutenant qu'elle est conforme aux tarifs qu'elle pratiquait habituellement pour l'ensemble de sa clientèle et aux stipulations de la lettre de mission du 31 mars 2011, en précisant avoir adressé à sa clientèle une lettre type du 21 décembre 2011 les informant d'une majoration de ses tarifs de 5% au 1er janvier 2012 et en concluant qu'elle a légitimement majoré ses honoraires de 5%, lesquels sont passés à 1 098,83 euros par trimestre.
Elle ajoute que la lettre de mission du 31 mars 2011 prévoyait que les honoraires payés lui resteront définitivement acquis, même en l'absence de prestation, en faisant valoir que cette clause pénale avait pour objet de l'indemniser de la perte d'un client et de faire face à ses charges de personnel avant d'envisager une éventuelle restructuration de ses effectifs.
Elle sollicite également la confirmation du jugement en son rejet de la demande de remboursement de la facture du 18 juillet 2011.
Affirmant que, suite à des difficultés relationnelles avec les autres associés intervenues au cours de l'année 2011, M. [Z] avait décidé de lui confier le traitement complet du dossier de la SARL JP Lavage sur les plans comptable, fiscal et social, elle soutient que la facture litigieuse établie au titre de l'exercice du 1er avril 2011 au 31 mars 2012 est conforme à la lettre de mission signée le 31 mars 2011 et justifiée par le fait qu'elle a exécuté les prestations auxquelles elle s'était engagée.
Elle fait également valoir que selon lettre de mission du 31 mars 2011, ses honoraires étaient facturés trimestriellement et payables à réception de la facture, soit en une seule échéance, soit en trois échéances mensuelles par chèques joints à réception de la facture.
Elle conclut que la somme de 2 780 euros correspondant aux factures des 2ème, 3ème et 4ème trimestres 2011, correspondant à des prestations exécutées conformément à la lettre de mission, lui sont dues.
La SARL JP Lavage demande à la cour de :
- confirmer le jugement en ses dispositions concernant les condamnations prononcées à l'encontre de la SARL ACE,
- débouter la SARL ACE en toutes ses demandes,
sur son appel incident,
- condamner la SARL ACE à lui rembourser :
* la somme de 4.395 euros correspondant à une facture d'honoraires du 1er janvier 2012 avec intérêts au taux légal à compter du 29 août 2012 ensuite de l'annulation de la clause de résiliation de la lettre de mission du 31 mars 2011 dont elle constituait une clause pénale,
* la somme de 5.478,50 euros correspondant à une facture d'honoraires du 18 juillet 2011 indue avec intérêts au taux légal à compter du 29 août 2012, en application des dispositions de l'article 1235 ancien ou 1302 nouveau du code civil,
- condamner la SARL ACE à lui payer la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SARL ACE aux entiers dépens de première instance et d'appel.
La SARL JP Lavage considère qu'elle justifie d'un préjudice causé par le blocage pendant 45 mois de la somme de 43.950 euros.
Elle souligne que son compte ne présentait plus qu'un solde de 3.817,34 euros au 31 janvier 2012.
Elle ajoute que le seul fait pour une personne morale d'être privée de la possibilité d'utiliser son crédit comme elle l'entend, notamment pour le placer aux fins d'en tirer bénéfice, constitue un préjudice certain.
Elle s'estime en outre en droit d'obtenir la condamnation de la SARL ACE à l'indemniser d'un préjudice lié à la rétention injustifiée des pièces comptables, sociales et fiscales sur le fondement de l'article 1382 ancien du code civil.
Elle reproche ainsi à l'appelante d'avoir délibérément refusé la remise de ces pièces afin de la contraindre à payer la somme de 43.953 euros résultant d'une escroquerie commise par son salarié M. [F] et par M. [Z].
Elle fait valoir que le refus de la SARL ACE de lui remettre les pièces comptables, sociales et fiscales, l'a contrainte à engager une procédure de référé puis, à défaut d'exécution de l'obligation sous astreinte de remise immédiate de la comptabilité, à saisir à nouveau le juge des référés en liquidation de l'astreinte.
Elle soutient que la société ACE a volontairement remis une partie des pièces comptables le jour de l'audience en soutenant qu'il n'en existait pas d'autres et affirme qu'elle ne lui a remis le reste des documents attendus qu'après la signification de l'ordonnance du 15 mai 2012, à l'exception du grand livre comptable et du tableau des immobilisations.
Elle fait valoir que le refus persistant de l'appelante de remise des pièces comptables lui a causé un grave préjudice, dès lors qu'il l'a empêchée d'arrêter son bilan de l'exercice clos au 31 mars 2012, l'a contrainte à engager deux procédures de référé et à solliciter de l'administration fiscale et du président du tribunal de commerce de Toulouse un délai supplémentaire pour arrêter ledit bilan.
Elle s'estime fondée par ailleurs à obtenir le remboursement du montant de la facture d'honoraires de la SARL ACE du 1er janvier 2012.
Elle soutient que le montant de cette facture, soit 4 395 euros, a été payé d'avance et frauduleusement par son ancien gérant, par chèque du 2 janvier 2012, alors que la SARL ACE n'avait accompli aucune prestation correspondante.
Elle prétend que le rejet de sa demande par le tribunal est contraire à l'annulation prononcée par celui-ci de la clause de résiliation prévoyant notamment que les honoraires payés seront définitivement acquis à la société ACE même en l'absence de prestation du cabinet, dont la facture litigieuse est le reflet.
Elle soutient en outre qu'elle est fondée à solliciter le remboursement du montant de la facture du 18 juillet 2011, dont elle affirme qu'elle a été réglée par M. [Z], de connivence avec M. [F], en contrepartie de l'aide que ce dernier a apporté personnellement à l'ancien gérant de la société JP Lavage, dans le cadre d'une réunion du 5 juillet 2011 pour résoudre ses difficultés avec les deux autres associés.
Elle fait valoir que M. [F] n'avait aucune qualité juridique pour donner des conseils et que l'assistance au profit de M. [Z] n'entrait pas dans les prestations visées à la lettre de mission qui ne concernaient que la seule société et non un de ses associés.
Elle en déduit que le règlement de la facture constitue un indu au sens de l'article 1302 (1235 ancien) du code civil.
MOTIFS DE LA DECISION
Liminairement, il est rappelé qu'en vertu de l'article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction applicable à l'appel introduit par déclaration du 31 août 2017, l'appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément ou implicitement et ceux qui en dépendent.
La dévolution s'opère pour le tout lorsque l'appel n'est pas limité à certains chefs, lorsqu'il tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.
En l'espèce, il est relevé que l'appel principal et l'appel incident sont des appels partiels.
Au regard des chefs de jugement non critiqués par l'appel principal partiel et par l'appel incident partiel, il a été définitivement jugé que la clause pénale de la lettre de mission du 31 mars 2011est nulle et sans effet et que la société ACE est condamnée à payer à la SARL JP Lavage la somme de 4.395 euros au titre du blocage de la somme de 43.950 euros.
Par ailleurs, il est observé que si l'appelante conclut que la somme de 2 780 euros correspondant aux factures des 2ème, 3ème et 4ème trimestres 2011lui est due, la société ACE n'a formé aucune demande de ce chef, seul étant en débat, au titre de cette année, le remboursement d'une note d'honoraires du 18 juillet 2011 émise au titre d''honoraires de conseils suite à accord du vendredi 15 juillet 2011', pour un montant de 3.675 euros HT.
- Sur la demande d'indemnisation au titre d'une rétention de pièces de la société JP Lavage
Il résulte des pièces versées aux débats que, le 20 janvier 2012, la société Groupe Experts Conseils a adressé à la société ACE une lettre aux termes de laquelle elle l'informait avoir été sollicitée par les nouveaux co-gérants de la SARL JP Lavage, en vue d'assurer une mission de comptabilité et lui demandait de lui faire savoir si rien ne s'opposait à son entrée en fonction sur ce dossier.
Par lettre du 27 janvier 2012, à la suite d'une réunion qui s'est tenue dans les locaux de son conseil, la société ACE a entendu se prévaloir des dispositions de la lettre de mission du 31 mars 2011 prévoyant qu'à défaut d'exécution par la cliente d'une ou de conséquences de la résiliation du contrat (dont le défaut de paiement de l'indemnité de résiliation), elle se réservait le droit d'exercer son droit de rétention de tous documents directs, indirects ou informatiques appartenant à la cliente, en indiquant qu'elle transmettrait tous les documents à l'avocat missionné par elle en vue de leur mise à disposition à la société JP Lavage, après paiement de tous les honoraires lui restant dus ainsi que de l'indemnité due réparation du préjudice subi du fait de la résiliation de la lettre de mission du 31 mars 2011, sur la période du 1er février 2012 au mois de novembre 2015.
Néanmoins, par ordonnance du 27 mars 2012, signifiée le 6 avril 2012, le juge des référés du tribunal de commerce d'Angers saisi par la société JP Lavage qui avait vainement tenté d'obtenir la remise des documents conservés par la société ACE, a ordonné la remise de la totalité de comptabilité de la SARL JP Lavage par la SARL ACE, dès le lendemain de la signification de l'ordonnance, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, se réservant le droit de liquider l'astreinte.
Au soutien de sa demande d'indemnisation du préjudice subi du fait de la privation anormale de ses documents comptables pendant plusieurs mois malgré l'ordonnance du 27 mars 2012, la société JP Lavage verse notamment aux débats une lettre du 25 avril 2012 de la société Groupe Experts Conseils lui indiquant que le conseil de la SARL ACE n'avait pas transmis plusieurs pièces nécessaires, en particulier en matière comptable (grands livres et balances comptables généraux et auxiliaires au 31 décembre 2011), ainsi qu'une lettre de la même du 18 septembre 2012 lui indiquant que la situation comptable arrêtée au 31 décembre 2011 par la SARL ACE qui lui avait été transmise ne remplaçait pas le grand livre comptable et le tableau des immobilisations arrêté au 31 décembre 2011, indispensables pour procéder aux travaux de clôture de l'exercice clos le 31 mars 2012, en précisant que ces documents existaient puisqu'ils avaient permis d'établir la situation au 31 décembre 2011.
Il est ainsi établi qu'en dépit de l'injonction qui lui était faite par l'ordonnance du 27 mars 2012, la SARL ACE n'a remis les documents essentiels aux travaux du nouvel expert comptable pour l'exercice 2012 que plusieurs mois après, à une date qui n'est cependant pas exactement déterminée.
Cette circonstance est de nature à caractériser une faute, alors que la SARL ACE ne pouvait pas opposer de droit de rétention de la comptabilité de l'intimée au regard de la décision du 27 mars 2012.
La privation de sa comptabilité pour une entreprise durant plusieurs mois est de nature à lui faire prendre un risque.
Néanmoins, la société JP Lavage qui affirme au soutien de sa demande indemnitaire qu'à raison du refus persistant de l'appelante de lui remettre les pièces comptables nécessaires, elle a été contrainte de solliciter de l'administration fiscale et du président du tribunal de commerce de Toulouse un délai supplémentaire pour arrêter ledit bilan de l'exercice clos au 31 mars 2012, ne justifie pas de ses prétendues démarches.
Elle ne justifie pas avoir été sanctionnée pour défaut d'établissement de son bilan de l'exercice clos au 31 mars 2012.
Ainsi, au vu des pièces seules pièces versées aux débats, elle n'établit aucun préjudice autre que celui lié aux tracas d'avoir dû s'adresser à la justice pour obtenir la communication des éléments qui lui faisaient défaut.
Le jugement sera infirmé quant au quantum alloué à la SARL JP Lavage au titre de son préjudice et la SARL ACE sera condamnée à lui verser la somme de 1 000 euros de ce chef.
- Sur la demande de remboursement du montant de la facture d'honoraires du 18 juillet 2011
La SARL ACE a établi à l'adresse de la SARL JP Lavage, une 'note d'honoraires" (facture n°422) au 18 juillet 2011, renvoyant à des 'honoraires de conseils suite à accord du vendredi 15 juillet 2011' pour des prestations d'assistance, conseil en matières d'expertise, sociale et juridique, pour un montant de 4.395,30 euros TTC.
Aux termes de la lettre de mission signée entre les parties à effet au 1er avril 2011, il était prévu que la SARL ACE assurerait des prestations de présentation des comptes, d'assistance et de conseils, outre des prestations sociales et juridiques au profit de la société JP Lavage.
Les affirmations de la société JP Lavage, selon lesquelles la facture litigieuse émise en son nom par la société ACE et réglée par elle sur ordre de M. [Z] qui était alors son gérant, correspondrait au paiement de prestations de conseils sollicitées par ce dernier dans son intérêt personnel exclusif, afin de l'aider à résoudre ses difficultés avec les co-associés, ne sont corroborées par aucune pièce versée aux débats.
Aucun indu n'est ainsi démontré par la société JP Lavage.
Le jugement sera en conséquence confirmé pour avoir à bon droit rejeté la demande de remboursement de la facture du 18 juillet 2011.
- Sur la demande de remboursement du montant de la facture d'honoraires du 1er janvier 2012
Suivant la lettre de mission du 31 mars 2011, il était prévu que, selon le choix de la cliente, la facturation ACE 2012 (année civile) sera élaborée en une seule facture annuelle du 1er janvier 2012, payable à réception de la facture.
La SARL ACE a établi à l'adresse de la SARL JP Lavage et de M. et Mme [Z], une 'note d'honoraires-2012' (facture n°002) au 1er janvier 2012, pour un montant total de 4.395,30 euros TTC, renvoyant à des honoraires pour des prestations d''assistance, conseil/production expertise' (à raison de 2.940 euros), d''assistance, conseil/production sociale' (pour 315 euros) et d''assistance, conseil/production juridique' (pour 420 euros).
Il n'est pas contesté que cette note d'honoraires, qui correspond au paiement de prestations incluses dans la mission de la société ACE pour 2012, a été acquittée pour le compte de la société JP Lavage.
Il résulte des pièces produites que la société JP Lavage a décidé de changer d'expert comptable, en confiant à un nouveau cabinet à compter de janvier 2012 une mission de comptabilité.
L'annulation de la clause pénale insérée dans la lettre de mission du 31 mars 2011, prononcée par le jugement du 7 juin 2017, ne concernait que l'indemnité de réparation du préjudice subi par le cabinet ACE de dix années d'honoraires annuels HT (toutes prestations confondues) et n'a pas affecté la clause selon laquelle il était prévu au titre des conséquences de la résiliation du contrat pour l'un des cinq motifs énoncés dans la lettre de mission, dont celui du changement d'expert comptable, que les honoraires payés resteront définitivement acquis au cabinet ACE, même en l'absence de prestations du cabinet ACE.
C'est donc justement que le tribunal a retenu que la clause relative à l'acquisition définitive des honoraires payés, même en l'absence de prestations du cabinet ACE, devait trouver application.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande en remboursement de la note d'honoraires du 1er janvier 2012 formée par la société JP Lavage.
- Sur les demandes accessoires
Eu égard au caractère partiel des appels principal et incident et compte tenu de l'accueil partiel des demandes de l'appelante en appel, il y a lieu d'infirmer le jugement critiqué en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles.
Les dépens de première instance et d'appel seront supportés par moitié par chacune des parties.
Il n'apparaît pas inéquitable de laisser aux parties la charge de leurs frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe,
- DIT que la dévolution ne s'opère pas sur le chef de jugement qui a condamné la société ACE à payer à la société JP Lavage la somme de 4.395 euros au titre de l'indemnisation due au blocage de la somme de 43.953 euros ;
- CONFIRME le jugement rendu le 7 juin 2017 par le tribunal de commerce d'Angers en ce qu'il a débouté la SARL JP Lavage de sa demande de remboursement des factures du 1er janvier 2012 et du 18 juillet 2011 ;
- INFIRME le jugement pour le surplus des dispositions critiquées ;
statuant à nouveau des seuls chefs infirmés et y ajoutant,
- CONDAMNE la SARL ACE à payer à la société JP Lavage la somme de 1 000 euros à titre de dommages intérêts au titre de son préjudice pour rétention de ses pièces comptables, sociales et fiscales ;
- DEBOUTE les parties de leurs demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;
- PARTAGE les dépens de première instance et d'appel par moitié entre les parties ;
- DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes et de leurs demandes contraires.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
S. TAILLEBOIS C. CORBEL