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13/06/2023 | FRANCE | N°19/00748

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre a - commerciale, 13 juin 2023, 19/00748


COUR D'APPEL

D'ANGERS

CHAMBRE A - COMMERCIALE







CC/IM

ARRET N°



AFFAIRE N° RG 19/00748 - N° Portalis DBVP-V-B7D-EPS6



Jugement du 06 Mars 2019

Tribunal de Commerce d'ANGERS

n° d'inscription au RG de première instance : 2017013123





ARRET DU 13 JUIN 2023



APPELANTE :



Société EIFFAGE CONSTRUCTION PAYS DE LOIRE

[Adresse 1]

[Localité 5]



Représentée par Me Jean-baptiste LEFEVRE de la SELARL 08H08 AVOCATS, avocat au barr

eau d'ANGERS





INTIMEES :



SARL DT SYSTEMES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 6]



Représentée par Me Pascal LANDAIS de...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

CHAMBRE A - COMMERCIALE

CC/IM

ARRET N°

AFFAIRE N° RG 19/00748 - N° Portalis DBVP-V-B7D-EPS6

Jugement du 06 Mars 2019

Tribunal de Commerce d'ANGERS

n° d'inscription au RG de première instance : 2017013123

ARRET DU 13 JUIN 2023

APPELANTE :

Société EIFFAGE CONSTRUCTION PAYS DE LOIRE

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Jean-baptiste LEFEVRE de la SELARL 08H08 AVOCATS, avocat au barreau d'ANGERS

INTIMEES :

SARL DT SYSTEMES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Pascal LANDAIS de la SELARL OUTIN GAUDIN ET ASSOCIES JURIDIQUE DU MAINE, avocat au barreau de LAVAL - N° du dossier 20193077

SA D'HLM IMMOBILIERE PODELIHA prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 7]

Représentée par Me Jean BROUIN de la SCP AVOCATS DEFENSE ET CONSEIL, avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier 117075

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue publiquement, à l'audience du 04 Avril 2023 à 14 H 00, Mme CORBEL, présidente de chambre ayant été préalablement entendue en son rapport, devant la Cour composée de :

Mme CORBEL, présidente de chambre

Mme ROBVEILLE, conseillère

M. BENMIMOUNE, conseiller

qui en ont délibéré

Greffière lors des débats : Mme TAILLEBOIS

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 13 juin 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Catherine CORBEL, présidente de chambre, et par Sophie TAILLEBOIS, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

~~~~

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant contrat du 7 septembre 2015, la société (SA) d'HLM Immobilière Podeliha a confié à la société Eiffage construction Pays de Loire (ci-après la société Eiffage) la réhabilitation et la résidentialisation de 114 logements d'habitation dans la résidence La Baraterie, située [Adresse 4] (49). La durée des travaux était estimée à 15 mois à compter de la date de l'ordre de service général.

Par contrat du 21 octobre 2015, la SAS Eiffage, en tant qu'entrepreneur principal, a sous-traité à la société (SARL) DT Systèmes la pose de menuiserie PVC et des finitions de menuiseries existantes (lot n°6 partiel), pour un montant de 92.258,95 euros HT comprenant l'option fourniture et pose des cornières (pour 4.544,80 euros HT).

L'article 22 (pages 17 et 18) définissait les cas et encadrait les modalités de résiliation du contrat de sous-traitance.

En vertu de cet article 22, pour sa partie lisible au vu de l'état de la copie produite, il était prévu :

'(...)

La défaillance contractuelle dûment établie du sous-traitant pourra également justifier la résiliation du contrat, après envoi préalable d'une mise en demeure adressée par lettre recommandée AR comportant l'indication précise des manquements reprochés au sous-traitant et éventuellement les dispositions attendues du sous-traitant.

Faute pour le sous-traitant d'y avoir procédé dans le délai de 8 jours suivants la réception de la lettre recommandée précitée, l'entrepreneur principal pourra procéder à la résiliation du contrat.

L'entrepreneur principal notifiera au sous-traitant par lettre recommandée AR sa décision de résiliation et la date à laquelle il sera procédé, si nécessaire, à un état des travaux exécutés.

En l'absence du sous-traitant, ce constat sera réputé contradictoire et lui sera opposable.

Cette résiliation sera effectuée sans préjudice de la mise à la charge du sous-traitant de tous les coûts (...), retards et conséquences dommageables dus à sa défaillance, y compris le coût de son remplacement.

Par ailleurs, en cas de manquement aux dispositions sur le travail illégal ou de fraude au regard des engagements souscrits par le sous-traitant, le contrat pourra, à titre exceptionnel, faire l'objet d'une résiliation immédiate et de plein droit sans mise en demeure préalable.

Le contrat est également résilié après mise en demeure RAR restée 8 jours sans effet, aux torts exclusifs du sous-traitant dans les cas suivants :

- abandon de chantier, - retard de plus de 21 jours par rapport au calendrier d'exécution ou aux obligations de délai fixées à l'article 15 ci-dessus, - sous-traitance, sans autorisation, des travaux objets du contrat, - défaut ou résiliation d'assurance.

Le délai de 8 jours peut être réduit à 48 heures en cas d'urgence.

Ce délai court à compter de la réception par le sous-traitant de la mise en demeure notifiée par recommandé ou, à défaut, à compter de la date de première présentation du recommandé l'en avisant.

Dans tous les autres cas de résiliation du contrat, le sous-traitant disposera de huit jours francs à compter de la notification de la résiliation pour démonter et évacuer son matériel et ses installations de chantier faute de quoi il sera procédé à cette évacuation à ses frais, risques et périls, par les soins de l'entrepreneur principal.

En outre, il appartient au sous-traitant de solliciter, dans les 8 jours de la résiliation, un relevé contradictoire des travaux exécutés. En cas de silence de sa part, ce relevé sera effectué par l'entrepreneur principal et lui sera opposable.

L'entrepreneur principal pourra saisir et utiliser les prestations réalisées sur le chantier (par le) sous-traitant, à charge seulement pour celui-ci d'en faire dresser un inventaire contradictoire ; (leur valeur sera) établie à l'aide de cet inventaire et des factures correspondantes que le sous-traitant aura (obligation de) produire. Cette valeur sera portée à son crédit.

Le sous-traitant supportera les frais et conséquences financières de la résiliation de son contrat (et de son) remplacement par une autre entreprise sans préjudices des dommages et intérêts éventuels.

Les sommes correspondantes seront remboursées par le sous-traitant à l'entrepreneur principal (ou à) défaut seront déduites par l'entrepreneur principal du montant des situations et/ou du projet (de décompte) final présenté(s) par le sous-traitant.

Dans tous les cas de résiliation imputable au sous-traitant, ce dernier supportera une pénalité (égale à 10%) de son marché TTC, sauf préjudice réel plus important subi par l'entrepreneur principal.

Il est ajouté que l'entrepreneur principal peut (après mise en demeure adressées dans les formes et délais) prévus ci-avant, réaliser lui-même ou faire réaliser (une partie des travaux du S.T., en cas de) défaillance de ce dernier dans l'exécution de ses obligations.'

Par contrat du 23 novembre 2015, la SAS Eiffage a sous-traité à la SARL DT Systèmes la fourniture et la pose de menuiseries extérieures en aluminium (lot n°7), pour un montant de 52.209,08 euros HT.

L'article 13.1 des conditions particulières de ce contrat (pages 5 et 6) définissait les cas et encadrait les modalités de résiliation du contrat de sous-traitance.

Selon cet article 13.1, il était prévu :

'En complément de l'article 14 des C.G, le présent sous-traité est également résilié d'office et de plein droit après mise en demeure RAR restée huit (8) jours sans effet, aux torts exclusifs du ST dans les cas suivants :

- abandon de chantier, - retard de plus de 21 jours par rapport au calendrier d'exécution ou aux obligations de délai fixées au 7. ci dessus, - sous-traitance, sans autorisation, des travaux objets du présent contrat, - défaut ou résiliation d'assurance.

Le délai de huit jours peut être réduit à quarante heures en cas d'urgence. Le délai court à compter de la réception par le S.T. de la mise en demeure notifiée par recommandé ou, à défaut, à compter de la date de première présentation du recommandé l'en avisant.

En cas de manquement aux dispositions sur le travail illégal ou de fraude au regard des engagements souscrits par le S.T, le contrat pourra à titre exceptionnel faire l'objet d'une résiliation immédiate et de plein droit sans mise en demeure préalable.

Dans tous les autres cas de résiliation du présent sous-traité, le S.T. disposera de huit jours francs à compter de la notification de la résiliation pour démonter et évacuer son matériel et ses installations de chantier, faute de quoi il sera procédé à cette évacuation à ses frais, risques et périls, par les soins de l'E.P. En outre, il appartient au S.T. de solliciter, dans les huit jours de la résiliation, un relevé contradictoire des travaux exécutés. En cas de silence de sa part, ce relevé sera effectué par l'E.P. et lui sera opposable. L'E.P. pourra saisir et utiliser les approvisionnements réalisés sur le chantier par le S.T. à charge seulement pour celui-là d'en faire dresser un inventaire contradictoire ; la valeur de ces approvisionnements sera établie à l'aide de cet inventaire et des factures correspondantes que le S.T. aura l'obligation de produire. Cette valeur sera portée à son crédit.

Le S.T. supportera les frais et conséquences financières de la résiliation de son contrat et de son remplacement par une autre entreprise sans préjudice des dommages-intérêts éventuels.

Les sommes correspondantes seront remboursées par le S.T. à l'E.P. ou à défaut seront déduites par l'E.P. du montant des situations et/ou du projet de décompte final présenté(s) par le S.T.

Dans tous les cas de résiliation imputable au S.T. , ce dernier supporte une pénalité égale à 10% de son marché TTC, sauf préjudice réel plus important subi par l'E.P.

L'article 13.2 disposait que 'l'E.P peut, après mise en demeure adressée dans les formes et délais prévus à l'article 13.1 précité, réaliser lui-même ou faire réaliser une partie des travaux du S.T., en cas de défaillance de ce dernier dans l'exécution de ses obligations.'

Selon avenant du 8 mars 2016, le marché initial au titre du lot n°6 a été porté à hauteur de 122.036,55 euros HT.

Selon avenant du 7 juin 2016, le marché initial au titre du lot n°6 a été porté à hauteur de 117.141,70 euros HT.

Sur la base des situations n°7 et n°4 arrêtées respectivement les 21 juillet 2016 et 21 septembre 2016, la SARL DT Systèmes s'est prévalue de créances au titre du solde des lots n°6 et n°7, dont elle n'est pas parvenue au recouvrement auprès de la SAS Eiffage Construction Pays de Loire.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 20 octobre 2016, la SAS Eiffage a indiqué que la situation de paiement restait en l'état, tant que les travaux et réserves (halls d'entrées, cages, manque de réglage des portes Cibox, portes intérieures) ne seraient pas terminés. Elle a indiqué que le retard de la SARL DT Systèmes perturbait l'avancement et l'intervention des autres corps de métier. Elle a laissé à la SARL DT Systèmes un délai d'un jour pour intervenir, sous peine de considérer son refus implicite et de missionner une entreprise à ses frais et risques pour réaliser les travaux restants.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 octobre 2016, la SAS Eiffage a reproché à la SARL DT Systèmes d'avoir par son représentant, le 21 octobre 2016, agressé verbalement puis physiquement un de ses collaborateurs, conducteur de travaux du chantier, lui occasionnant des blessures ayant suscité un arrêt de travail de deux jours. Elle a précisé qu'une plainte avait été déposée auprès du procureur de la République d'Angers. En conséquence, elle lui a notifié la 'résiliation immédiate et de plein droit' des deux contrats de sous-traitance passés avec la SARL DT Systèmes, lui a indiqué qu'elle allait faire dresser par constat d'huissier l'état d'avancement du chantier et faire établir un chiffrage par une autre entreprise du coût d'achèvement des travaux.

Le 27 octobre 2016, la SAS Eiffage a mandaté un huissier de justice afin de faire constater l'état d'avancement des travaux et différentes malfaçons sur le chantier de son sous-traitant.

Par lettre recommandée avec accusé de réception de son conseil du 21 février 2017, la SARL DT Systèmes qui a émis une facture n°1701037 en date du 18 février 2017 d'un montant de 7 267,90 euros au titre du lot n°6 et une facture n°1600818 en date du 21 septembre 2016 d'un montant de 22 985 euros au titre du lot n°7, a mis en demeure la SAS Eiffage de valider les sommes lui étant dues au titre des lots n°6 et 7 auprès du maître de l'ouvrage, la SA Immobilière Podeliha, pour que cette dernière puisse lui adresser les règlements correspondants. Par ailleurs, elle a estimé que les contrats de sous-traitance devaient toujours suivre leurs cours dès lors que leurs dispositions afférentes à la résiliation n'autorisaient pas la SAS Eiffage à procéder à une rupture immédiate au vu des faits qu'elle lui reprochait.

Par lettre officielle de son conseil de 10 mars 2017, la SARL DT Systèmes a adressé une nouvelle mise en demeure à la SAS Eiffage.

Par lettre recommandé avec accusé de réception du 13 avril 2017, la SAS Eiffage a répondu que compte tenu de la réalisation du marché prononcée aux torts de la SARL DT Systèmes, elle ne donnait pas de suites favorables à ces différentes relances en paiement. Elle s'est prévalue de ce que la résiliation était prononcée à raison tant des manquements de son sous-traitant dans l'exécution du chantier que de l'agression du conducteur de travaux. Elle a indiqué qu'elle avait levé diverses réserves signalées par mail du 11 octobre 2016 qui avaient été laissées en l'état au jour de la résiliation, relatives au lot n°6, de sorte que le montant réellement dû à la SARL DT Système n'était que de 104.326,28 euros HT, moindre que la somme déjà acquittée ; qu'à raison des travaux et démarches qu'elle a engagés pour achever les travaux laissés par la SARL DT Système au titre du lot n°7, et des dispositions de la convention de compte courant contractuellement prévue entre elles, cette dernière ne peut désormais plus que revendiquer un reste à percevoir de 3 589,07 euros à ce titre.

Par lettre recommandée avec accusé de réception de son conseil du 22 mai 2017, maintenant ses demandes de paiement, la SARL DT Système a observé que les cas de résiliation contractuellement prévus se limitaient aux manquements aux dispositions sur le travail illégal, à la fraude au regard des engagements souscrits par le sous-traitant, à l'abandon de chantier, au retard de plus de 21 jours par rapport au calendrier d'exécution ou aux obligations de délais fixées à l'article 15, à la sous-traitance, sans autorisation, des travaux objets du contrat, au défaut ou à la résiliation d'assurance.

Selon lettres recommandées avec accusé de réception de son conseil du 3 juillet 2017, la SARL DT Systèmes , se prévalant de ce que les contrats de sous-traitance prévoyaient expressément un paiement direct à son bénéfice par le maître de l'ouvrage, a mis en demeure la SA Immobilière Podeliha de régler, dans un délai d'un mois, respectivement les sommes de 7 267,90 euros et de 22 985 euros, au titre des lots n°6 et n°7.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 juillet 2017, la SA Immobilière Podeliha a indiqué qu'elle avait été informée par l'entreprise générale, le 15 novembre 2016, de la résiliation des deux contrats de sous-traitance aux torts exclusifs de la SARL DT Systèmes. Se référant à diverses lettres et constat d'huissier annexés à sa lettre motivant le refus de la SAS Eiffage de régler les sommes demandées par son sous-traitant, elle a considéré qu'elle ne pouvait pas régler les sommes demandées par la SARL DT Systèmes. Elle a précisé que les sommes restant dues au titre de ces contrats étaient bloquées dans l'attente du règlement du litige entre l'entrepreneur principal et son sous-traitant.

Par actes d'huissier du 20 octobre 2017, la SARL DT Systèmes a fait assigner la SAS Eiffage et la SA Immobilière Podeliha devant le tribunal de commerce d'Angers.

En l'état de ses dernières écritures devant le tribunal, la SARL DT Systèmes lui a demandé, au visa des articles 1103 et 1004 du code civil, de :

- à titre principal, condamner la SAS Eiffage à lui verser les sommes suivantes :

* 7 267,90 euros au titre du lot n°6,

* 22 985 euros au titre du lot n°7,

- à titre subsidiaire, condamner la SAS Eiffage à lui verser la somme de 4.231,03 euros HT qu'elle a expressément reconnue devoir,

- condamner la SA Immobilière Podeliha à garantir la SAS Eiffage du paiement des sommes qui lui sont dues au titre des travaux entrepris par le maître de l'ouvrage,

En défense, la SAS Eiffage sollicite du tribunal, au vu des articles 1134 et suivants et 1147 anciens du code civil qu'il déboute la SARL DT Systèmes de ses entières demandes, qu'il constate que les relations contractuelles la liant à la SARL DT Systèmes ont cessé à la notification de la lettre du 24 octobre 2016, aux torts exclusifs de la demanderesse, qu'il constate que l'exécution défaillante de la SARL DT Systèmes lui a occasionné des frais restés à sa charge, lesquels doivent être déduits des sommes facturées par l'appelante, qu'il juge que ces frais doivent être fixés à la somme de 29 300 euros, mise à la charge de la SARL DT Systèmes, qu'il constate que l'exécution déloyale des relations contractuelles par l'appelante a occasionné des retards sur le chantier et un préjudice pour elle, qu'il condamne la SARL DT Systèmes à lui verser la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison de cette exécution déloyale.

De son côté, la SA Immobilière Podeliha a demandé au premier juge, au regard notamment de la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance, de débouter la SARL DT Systèmes de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions formées à son encontre, comme irrecevables et mal fondées ; subsidiairement, de condamner la SAS Eiffage à la garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre.

Par jugement du 6 mars 2019, le tribunal de commerce d'Angers a :

- condamné la SAS Eiffage à payer à la SARL DT Systèmes la somme de 7.267,90 euros au titre du solde de son marché pour le lot n°6,

- condamné la SAS Eiffage à payer à la SARL DT Systèmes la somme de 22.985 euros HT au titre du solde de son marché pour le lot n°7,

- condamné la SA Immobilière Podeliha à payer à la SARL DT Systèmes en garantie de la dette de la SAS Eiffage, la somme de 7.267,90 euros et la somme de 22 985 euros,

- condamné la SAS Eiffage à payer à la SA Immobilière Podeliha la somme de 7 267,90 euros et la somme de 22.985 euros,

- débouté la SAS Eiffage de toutes ses demandes,

- condamné la SAS Eiffage à payer 1 500 euros à la SARL DT Systèmes et 1 000 euros à la SA Immobilière Podeliha, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- n'a pas ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,

- a condamné la SAS Eiffage aux dépens.

Par déclaration du 17 avril 2019, la SAS Eiffage a interjeté appel de ce jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à la SARL DT Systèmes la somme de 7 267,90 euros au titre du solde de son marché pour le lot n°6, l'a condamnée à payer à la SARL DT Systèmes la somme de 22 985 euros HT au titre du solde de son marché pour le lot n°7, a condamné la SA Immobilière Podeliha à payer à la SARL DT Systèmes en garantie de sa dette, la somme de 7 267,90 euros et la somme de 22 985 euros, l'a condamnée à payer à la SA Immobilière Podeliha la somme de 7 267,90 euros et la somme de 22 985 euros, l'a déboutée de toutes ses demandes, l'a condamnée à payer 1 500 euros à la SARL DT Systèmes et 1 000 euros à la SA Immobilière Podeliha, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'a condamnée aux dépens ; intimant la SARL DT Systèmes et la SA Immobilière Podeliha.

Par ordonnance du 20 juin 2019, la présidente de la chambre A - commerciale de la cour d'appel d'Angers a ordonné une médiation, désignant à cet effet le Centre Anjou Maine médiation et Arbitrage Maison de l'Avocat.

Le 4 novembre 2020, le médiateur désigné par le Centre Anjou Maine médiation et Arbitrage Maison de l'Avocat a informé la cour que la réunion de médiation du 17 septembre 2020 n'avait pas permis d'aboutir à un accord.

La SA Immobilière Podeliha a formé appel incident.

Toutes les parties ont conclu.

Une ordonnance du 4 avril 2022 a clôturé l'instruction de l'affaire.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La SAS Eiffage demande à la cour de :

vu les articles 1134 et 1147 du code civil en leur rédaction antérieure à la réforme de 2016,

- réformer le jugement déféré en ce qu'il l'a condamnée à verser à la société DT Systèmes une somme de 7.267,90 euros au titre du solde du marché relatif au lot n°6, 22.985 euros au titre du solde du marché relatif au lot n°7 outre 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- réformer le jugement déféré en ce qu'il l'a condamnée à verser à la société Podeliha 1 000 euros et 1 500 euros à la société DT Systèmes au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et 1.500 euros (sic),

et, statuant à nouveau,

- la dire et juger bien fondée à prononcer la résiliation à effet immédiat des contrats la liant à la société DT Systèmes compte tenu des carences de la société DT Systèmes, de la mise en demeure qu'elle lui a adressée et de l'agression physique subie par son conducteur de travaux pour toute réponse,

- dès lors, débouter la société DT Systèmes des demandes formulées au titre du solde du chantier relatif aux lots n°6 et n°7,

- débouter la société DT Systèmes de ses demandes nouvelles en cause d'appel tendant à obtenir 3.403,86 euros au titre de prétendues retenues de garantie outre 3.501,26 euros au titre du solde de ses factures,

- dire et juger que l'exécution défaillante de la société DT Systèmes lui a occasionné des frais restés à sa charge à hauteur de 29.300 euros,

- dès lors, condamner la société DT Systèmes à lui verser 29.300 euros au titre du préjudice matériel subi et, le cas échéant, prononcer la compensation si d'aventure la cour devait estimer que les demandes de la société DT Systèmes sont fondées,

- condamner la société DT Systèmes à lui verser la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamner la société DT Systèmes à lui verser la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société DT Systèmes aux entiers dépens de la procédure d'instance de celle d'appel.

La SARL DT Systèmes sollicite de la cour qu'elle :

- confirme le jugement entrepris ;

y ajoutant,

- condamne la SAS Eiffage à lui verser la somme de 3.403,86 euros HT au titre des retenues de garantie impayées sur les factures au titre des lots n°6 et 7,

- condamne la SAS Eiffage à lui verser la somme de 3.501,26 euros HT au titre des soldes des autres factures impayées se rapportant aux lots n°6 et 7,

- déboute la SAS Eiffage et la SA Immobilière Podeliha de l'intégralité de leurs demandes plus amples ou contraires formées à son encontre,

- condamne la SA Immobilière Podeliha à garantir la SAS Eiffage du paiement de ces sommes auprès d'elle,

- condamne la SAS Eiffage et la SA Immobilière Podeliha, chacune, à lui verser la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamne solidairement aux entiers dépens de l'instance d'appel.

La SA Immobilière Podeliha prie la cour de :

- la déclarer recevable et bien fondée en son appel incident,

- débouter la société DT Systèmes de ses demandes tendant à la voir condamner à garantir la société Eiffage des sommes au paiement desquelles cette dernière pourrait être condamnée,

- en conséquence, infirmer le jugement dont appel en ce qu'il l'a condamnée à payer à la SARL DT Systèmes, en garantie de la dette de la SAS Eiffage, la somme de 7 267,90 euros et la somme de 22.985 euros,

- constater que la SAS Eiffage s'est formellement opposée au paiement du sous-traitant la SARL DT Systèmes et s'est engagée à la garantir contre tout recours de la part de la SARL DT Systèmes,

- en toutes hypothèses, condamner la SAS Eiffage à la garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre,

- condamner la SARL DT Systèmes et à défaut la SAS Eiffage à lui payer une indemnité de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SARL DT Systèmes et à défaut la SAS Eiffage aux entiers dépens de l'instance.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement déposées au greffe :

- le 10 décembre 2020 pour la SAS Eiffage,

- le 16 avril 2021 pour la SARL DT Systèmes,

- le 22 septembre 2020 pour la SA Immobilière Podeliha.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la rupture des contrats

Pour déclarer la société Eiffage mal fondée à dénoncer les contrats la liant à la société DT Systèmes aux torts exclusifs de cette dernière, les premiers juges ont retenu que le motif de la rupture des relations contractuelles invoqué dans sa lettre du 24 octobre 2016, ne fait pas partie des motifs de rupture prévus par les contrats de sous-traitance et que les conditions de forme prévues aux articles traitant de la résiliation desdits contrats n'ont pas été respectées en l'absence de mise en demeure préalable d'avoir à terminer les travaux et/ou corriger les malfaçons dans un délai de huit jours et de l'indication de la date de l'état contradictoire des lieux et d'avancements des travaux.

La société DT Systèmes approuve cette motivation en faisant valoir qu'elle n'a pas été mise en demeure préalablement de s'exécuter, et que le grief invoqué, à savoir l'agression d'un salarié de l'entreprise générale, ne figure pas parmi la liste de cas de résiliation expressément mentionnés dans le contrat liant les parties autorisant la rupture unilatérale du contrat, en rappelant que s'agissant de clauses résolutoires, elles sont d'interprétation stricte.

Mais en application de l'article 1184 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement, de sorte que la gravité du comportement d'une partie à un contrat peut justifier que l'autre partie y mette fin de manière unilatérale à ses risques et périls, sans être tenue de mettre préalablement son cocontractant en demeure de respecter ses obligations ni de caractériser une situation d'urgence et sans avoir à respecter les modalités formelles de résiliation contractuelle.

Dans le cas présent, après avoir reçu une lettre de la société Eiffage lui faisant part de ses griefs tirés de manquements réguliers à ses obligations, il est constant que le dirigeant de la société DT Systèmes a agressé physiquement, après l'avoir insulté, un conducteur de travaux de la société Eiffage, lui occasionnant, selon un certificat médical produit aux débats, un traumatisme crânien sans perte de connaissance, avec un hématome sous-cutané au niveau pariéto-occipital de trois centimètres de diamètre, responsable d'une céphalée irradiant en occipital et un érythème cutané cervical gauche, justifiant un arrêt de travail de deux jours.

Une telle agression compromet irrémédiablement la poursuite des relations contractuelles dès lors que, d'une part, comme le fait à juste titre valoir la société Eiffage, celle-ci étant tenue d'une obligation de sécurité à l'égard de ses salariés, elle ne pouvait prendre le risque qu'un tel comportement se renouvelle, et, d'autre part, qu'elle entraînait une perte de confiance de la société Eiffage dans les capacités de son sous-traitant à faire face aux difficultés rencontrées dans la bonne conduite des travaux.

La société Eiffage était donc en droit de notifier à la société DT Systèmes la rupture des contrats, ce qu'elle a fait par lettre du 24 octobre 2016

Il s'ensuit que le jugement sera réformé de ce chef et la résiliation des deux contrats de sous-traitance sera prononcée aux torts de la société DT Systèmes, à la date du 24 octobre 2016.

Sur les comptes entre les parties

La société DT Systèmes demande le règlement de ses factures outre les retenues de garanties.

Elle conteste tout manquement de sa part et fait valoir que la preuve n'en est pas rapportée en l'absence d'état des lieux établis contradictoirement, conformément aux stipulations des contrats et d'opposabilité du procès-verbal de constat dressé par un huissier de justice, le 27 octobre 2016, à la seule demande de la société Eiffage.

La société Eiffage s'oppose à la demande en paiement en invoquant divers manquements contractuels de la part du sous-traitant dont la réalité résulterait, selon elle, des mails échangés entre elles, de la mise en demeure envoyée le 20 octobre 2020, du procès-verbal de constat dressé par un huissier de justice le 27 octobre 2016 et des interventions d'entreprises tierce missionnées pour terminer le chantier. Elle prétend que les manquements de la sous-traitante l'ont obligée à prendre en charge des travaux d'un coût de 29 300 euros.

Sur l'absence de relevé contradictoirement établi

Il est constant que la société Eiffage n'a pas invité le sous-traitant à un état des lieux des travaux exécutés.

Elle se prévaut des stipulations figurant à l'article 22 du contrat mettant à la charge du sous-traitant, dans les huit jours de la résiliation du contrat, l'obligation de solliciter un constat contradictoire des travaux exécutés et qu'en cas de silence du sous-traitant, le relevé établi par l'entreprise générale lui sera opposable.

La société DT Systèmes se prévaut des autres stipulations de ce même article 22 prévoyant que, dans le cas de défaillance contractuelle dûment établie du sous-traitant, l'entreprise générale notifie au sous-traitant la date à laquelle il sera procédé, si nécessaire, à un état des travaux exécutés.

Les stipulations des deux contrats de sous-traitance prévoyant qu'il 'appartient au sous-traitant de solliciter, dans les 8 jours de la résiliation, un relevé contradictoire des travaux exécutés. En cas de silence de sa part, ce relevé sera effectué par l'entrepreneur principal et lui sera opposable', sont applicables, aux termes de ces contrats, à tous les 'autres cas de résiliation' que ceux visés plus avant dans lesdites clauses et donc, comme en l'espèce, au cas de résiliation pour manquement grave.

Pour autant, force est de constater que la société Eiffage n'a pas fait procédé à un relevé des travaux en dehors du procès-verbal de constat qu'elle produit et qui semble se rapporter au seul lot n°7 en ce qu'il ne concerne que les portes et parties vitrées des halls d'entrée. Pour le reste, il lui appartient, dès lors qu'elle oppose à la demande du sous-traitant une contestation sur l'exécution complète des travaux et sur leur mauvaise exécution, d'en rapporter la preuve.

S'agissant de faits juridiques, la preuve peut en être apportée par tous moyens.

Il ne suffit donc pas, comme elle le prétend, d'invoquer la défaillance de la société DT Systèmes pour s'exonérer de l'obligation de payer le prix convenu.

Sur le coût des travaux de reprise ou d'achèvement

Argumentation des parties

Dans sa lettre du 13 avril 2017, après notification de la résolution du contrat, la société Eiffage a listé les prestations inachevées ou mal exécutées comme suit :

S'agissant du lot n° 6, elle a indiqué que le manque de réglage des portes Cibox installées l'a obligée à revoir par ses propres moyens le système de fixation des habillages en PVC en mettant en place un système de fixation mécanique à l'aide de vis et qu'elle en a profité pour lever les autres réserves signalées par mail du 11 octobre 2016 pour un coût de 6 315 euros HT dont le détail est donné ci-après :

- la prise de rendez-vous + prise de côtes 15 heures x 60 € = 900 € Ht ;

- l'intervention d'un technicien 10 heures x 35 € HT = 350 € ;

- un échafaudage : 5 jours x 42 euros HT = 210 euros ;

- un forfait déplacement, véhicule = 300 € HT;

- au vitrage à remplacer (cassé à la pose) = 1 500 € HT ;

- au remplacement d'une façade de coffre de volet roulant avec utilisation nécessaire d'une nacelle = 2 000 € HT ;

- au réglage de volet roulant pour les cinq logements situés au-dessus des halls 8 heures x 35 € HT;

- au remplacement d'une poignée défectueuse sur baie vitrée : 65 € HT ;

- au réglage des coulissants dans logement 20, 86, 108 et 110 : 6 heures x 35 € HT;

- à la reprise de pose défectueuse d'un châssis en mezzanine avec nécessité d'échafauder dans logement 74 : 500 € HT.

Le total s'élève à la somme de 6 315 euros HT.

S'agissant du lot n°7, la somme de 20 581,20 euros HT réclamée dans la lettre du 13 avril 2017 correspondait, au titre des travaux laissés inachevés :

- à la reprise des plans des halls DT SYSTEMES erronés : 1,5 jour x 400 € HT = 600 € ;

- au constat d'huissier nécessité pour établir l'état du chantier : 429,20 € ;

- à la commande Satel pass (réglage, fourniture et pose de moteur Dorma, reprise de la pose des pare-closes et poignées des portes automatiques intérieures de hall) : 7 872 € ;

- à l'encadrement des travaux : 75 heures à raison d'un tarif horaire de 60 € = 4.500 € ;

- au nettoyage des vitrages : 700 € ;

- à la commande AFC (reprise de toutes les finitions indiquées dans le constat d'huissier sur les châssis des halls) : 5 890 € ;

- au rangement et évacuation des menuiseries stockées dans les locaux vélos 4 heures x 60 € = 240 € ;

- à l'intervention Cibox pour réglage des portes automatiques : 350 €.

Cependant, ce ne sont pas ces sommes que réclame la société Eiffage au titre du coût de travaux d'achèvement et de reprise mais celle de 29 300 euros correspondant aux factures suivantes :

- la location de nacelles à la société Locamod d'un montant de 2 993,81 € HT (2 003,81 € + 990 €) ;

- l'intervention de la société Satel pass pour les portes automatiques pour un montant de 6 500 € HT ;

- l'intervention de la société HSA home pour le nettoyage des vitrages équipant les menuiseries installées par la société DT SYSTEMES à hauteur de 1 745 € HT (150 € + 150 € + 225 € + 450 € + 95 € + 675 €) ;

- l'intervention de la société Cibox au titre des travaux relatifs à l'ouverture de portes automatiques à hauteur de 2 398 € HT (1 848 € + 550 €) ;

- l'intervention de la société AFC pour la reprise des menuiseries à hauteur de 5 893,73 € HT ;

outre la mobilisation du personnel de la société Eiffage pour un montant estimé de 8.211 € dont le décompte avait été communiqué au conseil de la société DT Systèmes par lettre du 13 avril 2017.

La société DT Systèmes reprend les contestations qu'elle avait élevées en réponse à la lettre précitée du 13 avril 2017, à savoir :

*pour le lot n°6 :

- concernant des prises de rendez-vous et prises de côtes, seul est prévu dans le marché qu'elle a conclu la prise de côtes des châssis. Il n'est pas fait référence à de quelconques prises de rendez-vous. La prise de côtes est facturée dans le marché 380 euros. Un tarif de 900 euros, alors que les menuiseries ont été posées, ce qui suppose donc que des côtes aient été prises en amont.

Ce poste de travaux n'est donc pas fondé et en tout état de cause surévalué.

- concernant l'échafaudage loué, l'intervention d'un technicien et du forfait déplacement, aucun détail n'est produit.

- au sujet des vitrages à remplacer, ils n'ont pas été cassés lors de la pose mais ont été reçus rayés du fournisseur. Elle devait, à titre de travaux supplémentaires, effectivement procéder au remplacement de ces vitrages mais n'a jamais reçu de la part de la société Eiffage les cotes. Les vitrages coûtent à l'achat 30. Le tarif avancé de 1 500 euros pour ce poste de travaux est surévalué.

- s'agissant de la façade de coffre de volet roulant nécessitant l'utilisation d'une nacelle, elle n'a, tout au long des six mois passés sur le chantier, jamais constaté le recours à ce type de matériel par les opérateurs pour la réalisation de leurs travaux.

Aussi, l'installation d'une façade de coffre de volet roulant ne nécessite pas plus de 30 minutes de travail. Ce poste de travaux n'est alors pas fondé et son coût proprement surévalué.

- pour le réglage des cinq volets roulants, si de tels travaux ont été rendus nécessaires, c'est en raison de la rehausse des sols des balcons imputable à la société Eiffage après la pose des menuiseries. En effet, cette rehausse a eu pour conséquence d'obliger au redimensionnement des volets roulants qui se trouvaient être trop longs. La société Eiffage ne peut donc pas faire peser sur elle le coût de ce poste de travaux dont la responsabilité lui incombe exclusivement.

- au sujet du remplacement d'une poignée défectueuse, elle ne s'est chargée sur ce chantier que de la pose des menuiseries. Aussi, il ne lui incombait pas d'assumer le remplacement de la dite poignée, laquelle charge repose uniquement sur le fabricant des menuiseries en question.

- au sujet de l'intervention pour réglages des coulissants et la reprise de la pose d'un châssis, elle n'a jamais été informée de l'existence de difficultés sur ces postes de travaux. Elle n'a donc pu intervenir, dans l'hypothèse où ces difficultés seraient vérifiées, pour leur réparation.

*pour le lot n°7

- sur la reprise des plans des halls : elle n'a fourni aucun plan.

- sur le constat d'huissier établi unilatéralement, sans son accord et surtout sans sa participation : la société Eiffage n'est pas fondée à lui en faire supporter le coût.

- réglage, fourniture et pose de moteur Dorma, reprise de la pose des pare-closes et poignées des portes automatiques intérieures de hall sur la commande Satel pass (réglages et fourniture des moteurs DORMA) : ces moteurs ont été fournis par la société DT Systèmes ; en ce qui concerne la reprise de la pose des parclos et poignées des portes automatiques du hall : les poignées de portes ont été fournies par la société DT Systèmes, sur recommandation expresse et après accord de la société Eiffage et du maître de l'ouvrage. Aussi, si un tel poste de dépense a été réalisé, c'est par simple convenance personnelle de leur part ou parce qu'une erreur a été commise par la société Eiffage lors de la validation de ces matériels en concertation avec le maître de l'ouvrage.

- sur l'encadrement des travaux : pour la gestion du chantier, un prorata d'un montant de 619.08 € a déjà été retenu. Ce poste de dépense fait donc double emploi avec ledit prorata et ne saurait être fondé.

- sur le nettoyage des vitrages : il n'incombe pas au poseur des menuiseries de nettoyer les vitrages.

- sur la reprise de toutes les finitions indiquées dans le constat d'huissier : la société DT Systèmes n'a pas été avertie de l'établissement de ce constat d'huissier, de même qu'elle n'en a nullement eu communication. N'ayant pas été alertée sur les défauts de finition constatés, elle n'a pu intervenir pour leur réfection.

- sur l'intervention sur les portes Cibox : elles ont toutes été montées par la société DT Systèmes et réglées à plusieurs reprises par elle. De nouveaux réglages sont incompréhensibles et en tout cas pas démontrés.

Par ailleurs, elle conteste les factures produites par la société Eiffage pour justifier des sommes réclamées.

Réponse de la cour :

Les contrats ayant été rompus aux torts exclusifs de la société DT Systèmes, l'entreprise générale est en droit de mettre à la charge de celle-ci le coût des travaux d'achèvement même sans l'avoir mise en demeure d'y procéder.

* s'agissant du lot n° 6 :

Il sera, d'abord, souligné que le procès-verbal de constat produit ne porte pas sur les travaux relevant de ce lot et que la société Eiffage ne produit pas le procès-verbal de réception comportant les réserves dont elle fait état dans sa lettre du 13 avril 2017. Les réclamations ne reposent que sur les factures produites, les mails de la société Eiffage, la lettre de mise en demeure du 20 octobre 2016 et ses lettres postérieures.

Il est retenu que :

- aucune facture n'est produite pour justifier le coût de remplacement du vitrage cassé ;

- pour le remplacement d'une façade de coffre de volet roulant, dont la nécessité n'est pas contestée, l'utilisation d'une nacelle sur les lieux est justifiée par l'une des deux factures indiquant précisément le chantier en cause, d'un montant de 2 003,81 euros € HT ;

- la responsabilité du défaut de réglage de volet roulant pour les cinq logements situés au-dessus des halls est contestée par la société DT Systèmes sans qu'aucune contradiction ne soit apportée par la partie adverse sur l'origine de ce défaut.

- il n'est pas démontré que le remplacement d'une poignée défectueuse sur baie vitrée incombe à la société DT Systèmes à la lecture des documents contractuels.

- la nécessité de procéder au réglage des coulissants dans les logements 20, 86, 108 et 110 et à la reprise de pose défectueuse d'un châssis en mezzanine avec nécessité d'échafauder dans le logement 74 n'est pas démontrée.

- les postes 'prise de rendez-vous + prise de côtes', 'intervention d'un technicien' à raison de 10 heures, 'échafaudage' pendant 5 jours, 'forfait déplacement, véhicule' ne sont pas autrement explicités. A défaut de savoir à quels travaux ils se rapportent, ils seront écartés ;

Il ne sera donc retenue que la somme de 2 003,81 euros.

*s'agissant du lot n° 7 :

Le procès-verbal de constatation dressé par l'huissier de justice le, 27 octobre 2016, fait apparaître divers défaut de fonctionnement des portes automatiques des halls de plusieurs immeubles et défaut de finition sur les parties en vitrage. Force est de constater que la société DT Systèmes ne produit aucun élément de nature à mettre en doute les constatations de l'huissier de justice.

Il est retenu ce qui suit :

- aucune justification n'appuie la demande de 'reprise des plans des halls DT Systèmes erronés', qui n'est pas autrement explicitée ;

- le remboursement des frais du constat d'huissier nécessité pour établir l'état du chantier doit être mis à la charge de la société DT Systèmes aux torts de laquelle la résolution du contrat est prononcée n'est pas demandé ;

- la société DT Systèmes est contredite lorsqu'elle affirme avoir fourni tous les moteurs par le procès-verbal de l'huissier de justice qui a constaté que la deuxième porte du sas de l'immeuble n°25 est dépourvue de motorisation ; en l'absence d'élément contraire permettant d'évaluer le prix de cet élément manquant, la cour se fonde sur l'avoir établi par la société Cibox, d'un montant de 1 848 euros.

- s'agissant de l'encadrement des travaux, la société Eiffage ne donne aucun élément permettant d'évaluer ce poste ;

- pour le nettoyage des vitrages, qui incombe au poseur juste après la pose, il sera alloué la somme de 500 € ;

- la reprise des finitions dont la nécessité ressort des constatations de l'huissier de justice sur les châssis des halls est justifiée et son coût sera évalué selon le devis établi par la société AFC, d'un montant de 5 890 € ;

- le rangement et l'évacuation des menuiseries stockées dans les locaux vélos, qui incombe au sous-traitant, sera évalué à 240 € ;

- l'intervention de la société Satel pass pour le réglage des portes automatiques, dont le mauvais fonctionnement ressort du procès-verbal de constat, et alors que pèse sur la société DT Systèmes une obligation de résultat, doit être mise à la charge de celle- ci, soit la somme de 6 560 euros HT suivant facture de la société Satel pass qui comporte bien un détail des prestations.

En revanche, la facture de la société Cibox dont l'objet indiqué comme étant 'ZCARTEED2001" n'est pas identifiable ne peut être retenue.

Le coût de reprise et d'achèvement des travaux est ainsi évalué à 15 038,20 euros.

Sur le solde restant dû au titre des factures

Au titre du lot n° 6, selon la situation définitive établie par la DT Systèmes le solde restant dû s'élève à la somme de 7 267,90 euros.

Il convient d'en déduire la somme de 2 003,81 euros correspond au coût de reprise, soit un solde restant dû de 5 267,90 euros.

Au titre du lot n° 7, la somme qui restait due sur le prix du marché s'élevait à 22 985 euros. Il y a lieu d'enduire de coût de reprise et d'achèvement des travaux d'un montant de 15 038,20 euros, soit un solde de 7 946,80 euros.

En appel, la société DT Systèmes forme des demandes nouvelles en paiement de sommes restées impayées sur les précédentes factures, d'un montant de 3 501,26 euros et en paiement des retenues de garantie non restituées.

Si la société Eiffage qualifie ces demandes de nouvelles, elle n'en demande pas l'irrecevabilité.

Elle ne démontre ni même ne prétend avoir payé la somme de 3 501,26 euros HT alors que la charge de ce paiement lui incombe en application de l'article 1315, ancien, du code civil.

La retenue de garantie a pour objet de protéger le maître de l'ouvrage contre les risques d'inexécution ou de mauvaise exécution de la construction prévue au contrat ayant donné lieu à des réserves à la réception et non pour assurer la bonne fin du chantier.

La libération de la retenue de garantie par le maître de l'ouvrage à un sous-traitant est subordonnée à la réception des travaux.

La société DT Systèmes demande le paiement de la somme de 3 403, 86 HT qu'elle indique avoir été retenue, ce que ne conteste pas la partie adverse.

La société Eiffage n'a opposé aucun moyen de défense à cette demande. Elle ne conteste pas que l'ouvrage ait fait l'objet d'une réception. Cette demande sera donc accueillie.

Il s'ensuit que la société Eiffage est condamnée à payer à la société DT Systèmes la somme de 20 119,82 euros HT (5 267,90 + 7 946,80 + 3 501,26 +3 403, 86).

Sur l'indemnisation demandée par l'entreprise générale

La société Eiffage demande l'indemnisation d'un préjudice que lui aurait causé les manquements de la société DT Systèmes, l'agression de l'un de ses salariés, la désorganisation du chantier après le départ de la société DT Systèmes

L'agression de l'un de ses salariés, la désorganisation du chantier qui a suivi le départ de la société DT Systèmes avant qu'elle ne procède aux réglages et finitions des éléments que la sous-traitante était chargée de poser ont causé à la société Eiffage un préjudice qui sera justement réparé par l'allocation d'une somme de 2 000 euros.

Sur la demande au titre du paiement direct formée contre la société Podeliha

Pour soutenir que la société DT Systèmes n'est pas fondée à lui demander le paiement direct des sommes dues par l'entreprise générale, la société Podeliha invoque la clause 7.1 insérée dans les contrats de sous-traitance selon laquelle le paiement direct n'est prévu que si le marché principal est conclu avec l'Etat et qui se réfère, d'ailleurs, expressément à l'article 6 de la loi du 31 décembre 1975, lequel ne s'applique qu'aux marchés publics.

La société DT Systèmes n'a pas répondu à ce moyen. Elle n'a pas précisé en vertu de quelle clause elle se prévalait du droit au paiement direct du maître de l'ouvrage. Elle n'a versé aux débats comme pièces contractuelles que les contrats de sous-traitance auxquels n'est pas partie la société Podeliha.

Elle ne prétend pas que la société Podeliha entre dans la catégorie de 'l'Etat, les collectivités locales, les établissements et entreprises publicsqui, aux termes de l'article 4 de la loi du 31 décembre 1974, dans sa version applicable à l'espèce, énonce les personnes à l'égard desquelles s'applique le paiement direct.

Elle est présumée adopter les motifs du jugement selon lesquels, en dépit des stipulations de l'article 7.1 du premier contrat, les parties avaient entendu appliquer la règle du paiement direct et que pour le second contrat, à l'article 4.7, sur les trois choix possibles de paiement, la case correspondant à celle du paiement direct avait été cochée.

Le contrat de sous-traitance du 21 octobre 2015 portant sur le lot n° 6 partiel ne prévoit à l'article 7 'paiement' la délégation de paiement qu'à l'article 7-1 'si le marché le marché principal est conclu avec l'Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics (titre II de la loi du 31 décembre 1975)".

Le contrat de sous-traitance du 23 novembre 2015, portant sur le lot n°7 prévoit à l'article 4-7 des conditions spéciales sur les conditions de paiement le paiement direct par le maître de l'ouvrage en renvoyant aux articles 6-2-1 et 6-2-2 des conditions particulières. Or, les conditions particulières jointes ne prévoient le bénéfice du paiement direct que si le marché principal est conclu avec l'Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics. Pour les autres marchés, comme en l'espèce, il est renvoyé aux dispositions de l'article 14 de la loi du 31 décembre 1975.

L'article 14 de la loi no 75-1334 du 31 décembre 1975 impose à l'entrepreneur principal de garantir le paiement des sommes dues au sous-traitant à l'aide d'une caution bancaire ou d'une délégation de paiement acceptée par le maître de l'ouvrage. L'entrepreneur principal dispose donc d'une option entre ces deux formes de garanties.

En l'espèce, il est constaté que la société DT Systèmes ne fonde pas sa demande sur une délégation de paiement mais sur le paiement direct et qu'elle ne rapporte pas la preuve de ce qu'elle est en droit d'exiger, sur ce fondement, de la société Podeliha le paiement des sommes restant dues par l'entreprise générale.

Sa demande sera rejetée.

Sur les demandes accessoires

Les dépens de première instance et d'appel seront mis à la charge de la société DT Systèmes aux torts de laquelle la résiliation du contrat est prononcée et dont les travaux n'ont pas tous été correctement achevés.

Les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile par la société Eiffage et la société DT Systèmes seront rejetées.

La société DT Systèmes sera condamnée à payer à la société Podeliha la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement, par arrêt mis à disposition au greffe,

Infirme le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

Prononce la résiliation des deux contrats de sous-traitance aux torts de la société DT Systèmes à la date du 24 octobre 2016.

Condamne la société Eiffage construction Pays de Loire à payer à la société DT Systèmes la somme de 20 119,82 euros HT au titre du solde des travaux, y compris les retenues de garantie.

Condamne la société DT Systèmes à payer à la société Eiffage construction Pays de Loire la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Rejette la demande de la société DT Systèmes contre la société Podeliha.

Condamne la société DT Systèmes aux dépens de première instance et d'appel.

Condamne la société DT Systèmes à payer à la société Podeliha la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Rejette les autres demandes.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

S. TAILLEBOIS C. CORBEL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre a - commerciale
Numéro d'arrêt : 19/00748
Date de la décision : 13/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-13;19.00748 ?
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