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02/09/2024 | FRANCE | N°19/02383

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre a - civile, 02 septembre 2024, 19/02383


COUR D'APPEL

D'ANGERS

CHAMBRE A - CIVILE





YW/CG

ARRET N°:



AFFAIRE N° RG 19/02383 - N° Portalis DBVP-V-B7D-ETHT



jugement du 08 Novembre 2019

Tribunal d'Instance de CHOLET

n° d'inscription au RG de première instance 19-000005





ARRET DU 02 SEPTEMBRE 2024



APPELANTE :



S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

[Adresse 1]

[Localité 5]



Représentée par Me Guillaume QUILICHINI de la SCP PROXIM AVOCATS, avocat postulant au barreau d'ANGE

RS - N° du dossier 2019558 et par Me Aurélie DEGLANE, avocat plaidant au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT





INTIMEES :



Madame [X] [P]

née le 06 Juin 1981 à [Localité 7] (44)

[Adresse 3]...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

CHAMBRE A - CIVILE

YW/CG

ARRET N°:

AFFAIRE N° RG 19/02383 - N° Portalis DBVP-V-B7D-ETHT

jugement du 08 Novembre 2019

Tribunal d'Instance de CHOLET

n° d'inscription au RG de première instance 19-000005

ARRET DU 02 SEPTEMBRE 2024

APPELANTE :

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Guillaume QUILICHINI de la SCP PROXIM AVOCATS, avocat postulant au barreau d'ANGERS - N° du dossier 2019558 et par Me Aurélie DEGLANE, avocat plaidant au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

INTIMEES :

Madame [X] [P]

née le 06 Juin 1981 à [Localité 7] (44)

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Aude POILANE, avocat au barreau d'ANGERS

SELARL DE BOIS-[W], prise en la personne de Me [T] [W], ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL FORCE ENERGIE

[Adresse 2]

[Localité 6]

N'ayant pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 13 Novembre 2023 à 14 H 00, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. WOLFF, conseiller qui a été préalablement entendu en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame MULLER, conseillère faisant fonction de présidente

Monsieur WOLFF, conseiller

Madame ELYAHYIOUI, vice-présidente placée

Greffière lors des débats : Madame LEVEUF

Greffier lors du prononcé : Monsieur DA CUNHA

ARRET : réputé contradictoire

Prononcé publiquement le 02 septembre 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Yoann WOLFF, conseiller, pour la présidente empêchée et par Tony DA CUNHA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

~~~~

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Le 2 juin 2016, Mme [X] [P] a conclu hors établissement avec la société Force Énergie (la société), société à responsabilité limitée, un contrat (le contrat principal) portant sur l'installation à son domicile de douze panneaux solaires, l'isolation de la toiture et des murs extérieurs, ainsi que la rénovation de la toiture, moyennant le prix total de 24 500 euros TTC.

Le 24 juin suivant, elle a souscrit auprès de la société BNP Paribas Personal Finance (la banque), société anonyme, un crédit affecté à cette opération (le contrat de crédit), d'un montant de 24 500 euros également.

La société a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 24 mai 2018.

Souhaitant obtenir l'annulation des deux contrats, Mme [P] a fait assigner devant le tribunal d'instance de Cholet la société De Bois-[W] (le liquidateur), société d'exercice libéral à responsabilité limitée, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société, ainsi que la banque par acte d'huissier de justice du 17 décembre 2018.

Par jugement du 8 novembre 2019, le tribunal a :

Déclaré recevable la demande d'annulation ou de résolution du contrat principal ;

Prononcé la nullité du contrat principal ;

Constaté la nullité du contrat de crédit ;

Ordonné au liquidateur de reprendre l'ensemble des matériels vendus et posés au domicile de Mme [P] dans les six mois de la signification du jugement ;

Dit qu'à défaut le liquidateur sera réputé avoir abandonné ses droits sur le matériel et Mme [P] pourra en disposer comme bon lui semble ;

Rejeté la demande de la banque tendant au remboursement du capital versé ;

Condamné la banque à payer à Mme [P] la somme de 4 690,69 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement ;

Rejeté la demande de la banque tendant à la fixation de sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société ;

Condamné in solidum le liquidateur et la banque à verser à Mme [P] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamné in solidum le liquidateur et la banque aux dépens ;

Rejeté les demandes plus amples ou contraires des parties.

La banque a relevé appel de ces chefs du jugement par déclaration du 5 décembre 2019, intimant les deux autres parties.

La clôture de la liquidation judiciaire de la société a été prononcée pour insuffisance d'actif par jugement du 3 mars 2022.

Par ordonnance du 21 juin 2023, le conseiller de la mise en état a notamment constaté le désistement de l'appel à l'égard du liquidateur, sans que cela n'entraîne le dessaisissement de la cour à son égard compte tenu des demandes faites subsidiairement par Mme [P] contre lui.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 31 octobre 2023.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 18 octobre 2023, la banque demande à la cour :

D'écarter des débats les conclusions n° 2 et les pièces nos 38 et 39 de Mme [P], notifiées tardivement le 17 octobre 2023 ;

De réformer le jugement en ce qu'il l'a :

Déboutée de sa demande de remboursement du capital versé ;

Condamnée à payer à Mme [P] la somme de 4 690,69 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement ;

Condamnée à verser à Mme [P] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamnée aux dépens ;

Déboutée de toute demande plus ample ou contraire ;

De confirmer le jugement pour le surplus ;

Statuant à nouveau sur les chefs réformés :

De condamner Mme [P] à lui payer la somme de 24 500 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, et ce, au titre de l'obligation pour l'emprunteur de restituer le capital prêté diminué des remboursements effectués ;

Subsidiairement, en cas de faute de sa part, de limiter le montant des dommages et intérêts dus à Mme [P] à la somme de 1 250 euros et d'ordonner la compensation des sommes mises à la charge de chacune des parties ;

De rejeter les demandes de Mme [P] ;

De juger que les éventuelles condamnations prononcées le seront en deniers et quittances ;

De condamner Mme [P] à lui verser la somme de 3 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les procédures de première instance et d'appel ;

De condamner Mme [P] aux dépens de première instance et d'appel.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 18 octobre 2023, Mme [P] demande à la cour :

De rejeter la demande de la banque tendant à ce que ses conclusions et pièces notifiées le 17 octobre 2023 soient écartées ;

De confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

Subsidiairement, en cas d'infirmation du jugement sur la privation de la restitution du capital, de condamner la banque à lui verser la somme de 24 500 euros à titre de dommages et intérêts, d'ordonner la compensation de cette somme avec celle réclamée par la banque au titre de la restitution du capital, et de confirmer le jugement pour le surplus ;

De rejeter les demandes de la banque ;

De condamner la banque à lui verser la somme de 2 850 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, incluant le coût des constats d'huissier ;

De condamner la banque aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

MOTIVATION :

Le jugement, qui n'est plus critiqué à cet égard aux termes des dernières conclusions de la banque, sera d'ores et déjà confirmé en ce qu'il a constaté la nullité du contrat de crédit.

Par l'effet du désistement de l'appel à l'égard du liquidateur, et en l'absence d'appel incident les concernant, la cour n'est plus saisie des dispositions suivantes, pour lesquelles la banque a renoncé de manière subséquente à demander la réformation du jugement, et par lesquelles le tribunal a :

Déclaré recevable la demande d'annulation ou de résolution du contrat principal ;

Prononcé la nullité de ce contrat ;

Ordonné au liquidateur de reprendre l'ensemble des matériels vendus et posés au domicile de Mme [P] dans les six mois de la signification du jugement ;

Dit qu'à défaut le liquidateur sera réputé avoir abandonné ses droits sur le matériel et Mme [P] pourra en disposer comme bon lui semble ;

Rejeté la demande de la banque tendant à la fixation de sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société ;

Condamné le liquidateur à verser à Mme [P] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamné le liquidateur aux dépens.

Ainsi, Mme [P] ayant elle-même renoncé à sa demande subsidiaire de fixation de sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société, désormais clôturée pour insuffisance d'actif, la cour est entièrement dessaisie à l'égard du liquidateur.

1. Sur la demande de rejet des conclusions et pièces notifiées par Mme [P] le 17 octobre 2023

Moyens des parties

La banque soutient que :

Mme [P] a agi avec une particulière déloyauté procédurale. Elle a attendu la veille de la clôture de l'instruction pour modifier substantiellement son argumentation, alors qu'elle pouvait parfaitement répliquer à ses conclusions depuis le 26 juin 2020 au moins. Ainsi, elle ne lui a pas fait connaître cette nouvelle argumentation technique en temps utile au sens de l'article 15 du code de procédure civile. En outre, les pièces qu'elle a communiquées ne sont pas nouvelles, mais étaient en sa possession depuis plusieurs années.

Mme [P] soutient que :

La communication litigieuse ne résulte pas d'une stratégie déloyale. Elle a été accompagnée d'une demande de report de la clôture de l'instruction, ainsi que d'un courriel officiel et urgent à l'attention des avocats postulant et plaidant de la banque, dans lequel son avocate a présenté ses excuses et expliqué cette communication tardive. En outre, ses nouveaux développements sur le droit communautaire font suite à un arrêt de la Cour de cassation du 28 juin 2023 qui, sur un autre sujet ' celui de la déchéance du droit aux intérêts ', est venu insister sur l'effectivité du droit de la consommation. Ils ne pouvaient être faits plus tôt, la jurisprudence étant inexistante sur ce point.

Réponse de la cour

Il résulte des articles 15, 16, 135 et 783 du code de procédure civile que les conclusions et les pièces qui sont communiquées avant l'ordonnance de clôture sont en principe recevables. Le juge a néanmoins la faculté de les écarter si elles ne l'ont pas été en temps utile, c'est à dire dans un temps permettant à la partie adverse d'en prendre connaissance, d'examiner l'opportunité ou la nécessité d'une réplique, et le cas échéant d'élaborer cette dernière, ou si elles l'ont été de manière déloyale. Le juge doit alors préciser les circonstances particulières qui, indépendamment de la date du dépôt des conclusions et pièces, caractérisent l'atteinte portée au principe de la contradiction ou un comportement contraire à la loyauté des débats. Ces circonstances de fait relèvent de son pouvoir souverain d'appréciation.

En l'espèce, si les conclusions et pièces litigieuses ont effectivement été communiquées le 17 octobre 2023 alors que la clôture de l'instruction avait été annoncée pour le lendemain, cette dernière n'a finalement été prononcée que 13 jours plus tard, le 31 octobre 2023, après que chacune des parties en a demandé le report. Ainsi, indépendamment de la seule date à laquelle la communication a été faite, la banque a disposé concrètement d'un délai de deux semaines pour en prendre connaissance et le cas échéant y répliquer. À cet égard, la nouvelle « argumentation technique » de Mme [P], comme la banque la qualifie, consistait essentiellement en une critique de l'évolution de la jurisprudence de la Cour de cassation, rappelée par la banque dans ses précédentes conclusions, sur la restitution par l'emprunteur du capital prêté. Elle ne faisait donc que prolonger un débat qui était déjà connu de l'appelante. Dans ces conditions, les conclusions et pièces litigieuses ne sauraient être écartées.

En outre, l'avocate de Mme [P] a accompagné sa communication d'un message adressé à la cour et à la partie adverse, dans lequel elle a appelé leur attention sur la situation et pris l'initiative de demander le report de la clôture au bénéfice de son contradicteur. Ce message a été accompagné d'un courriel envoyé directement aux avocats. Il s'agit là d'un comportement respectueux de la loyauté des débats.

Par conséquent, la demande sera rejetée.

2. Sur les conséquences de l'annulation du contrat de crédit

Il est constant que l'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu'il finance, emporte pour l'emprunteur l'obligation de restituer au prêteur le capital prêté.

Cependant, le prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l'emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.

2.1. Sur la faute de la banque

Moyens des parties

La banque soutient que :

Elle n'a pas commis de faute dans la délivrance des fonds. Elle les a versés au regard d'une attestation suffisamment précise de Mme [P] lui demandant de procéder ainsi. En outre, il ne lui appartenait pas de vérifier la régularité du contrat principal au regard du droit de la consommation.

Mme [P] soutient que :

La banque ne conteste plus la nullité du contrat principal qui est donc définitive. Celui-ci est nul en raison de ses irrégularités formelles dont la banque, professionnelle avisée du crédit, ne l'a pas alertée. En outre, la banque n'est pas fondée à se prévaloir du procès-verbal de livraison signé le 11 juillet 2016 et de l'appel de fonds figurant au verso de cette pièce. En effet, ces documents ne font pas mention notamment des démarches administratives relatives à l'installation photovoltaïque, qui étaient contractuellement à la charge de la société.

Réponse de la cour

La banque a bien commis une double faute.

Tout d'abord, alors d'une part qu'elle ne critique pas le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat principal aux motifs que celui-ci ne comprenait notamment ni les caractéristiques essentielles des biens concernés ni le délai d'exécution de la prestation, et d'autre part que ces manquements ressortaient d'une simple lecture, même superficielle, du contrat et étaient donc particulièrement flagrants, la banque, professionnelle du crédit affecté, ne justifie pas les avoir relevés.

Ensuite, il est constant que commet une faute le prêteur qui libère les fonds au vu d'une attestation de livraison et de demande de financement signée par l'emprunteur, insuffisamment précise pour rendre compte de la complexité de l'opération financée et permettre au prêteur de s'assurer de l'exécution effective des prestations de mise en service de l'installation auxquelles le vendeur s'était également engagé, ou bien encore d'une attestation mentionnant que les travaux terminés ne concernent pas les prestations de raccordement ni l'obtention des autorisations administratives auxquelles le vendeur s'était engagé (1re Civ., 10 juillet 2024, pourvoi n° 23-12.122, publié). Or en l'espèce, alors que le contrat principal prévoyait l'installation de panneaux solaires mais aussi la rénovation de la toiture à hauteur de 5400 euros TTC pour cette dernière, et qu'il stipulait que les « démarches pour obtenir le Contrat d'Obligation d'Achat ERDF pendant 20 ans », les « démarches pour obtenir l'attestation de conformité photovoltaïque du CONSUEL », ainsi que les « démarches administratives et mairie » étaient à la charge de la société, le procès-verbal de réception du 11 juillet 2016 produit par la banque et au regard duquel elle a libéré les fonds se contente de faire état d'une « réception ['] prononcée sans réserve », sans plus de précision. Ce document, qui ne suffisait pas à rendre compte de la complexité de l'opération financée, n'autorisait pas la banque à procéder à cette libération, et ce, d'autant moins qu'il ressort des pièces versées aux débats par Mme [P] qu'une partie au moins des démarches relatives à l'installation photovoltaïque n'avait pas été réalisée le 11 juillet 2016, et que la rénovation de la toiture n'a jamais été effectuée (la facture du 10 août 2016 n'en fait pas état et applique finalement le prix total contractuel de 24 500 euros TTC à l'installation solaire et à des travaux d'isolation). En le faisant néanmoins, la banque a commis une faute.

2.2. Sur le préjudice de Mme [P]

Moyens des parties

La banque soutient que :

Mme [P] ne fait état d'aucun dysfonctionnement de son installation, laquelle doit donc être considérée comme fonctionnelle. La Cour de cassation juge que lorsque l'emprunteur ne justifie pas que son installation ne fonctionne pas, il ne subit aucun préjudice et la responsabilité du prêteur doit être exclue. Subsidiairement, si la cour devait retenir qu'elle a commis une faute dans le déblocage des fonds, cette faute doit s'analyser en une perte de chance de ne pas contracter. À cet égard, Mme [P] ne démontre pas que si elle avait été alertée sur la nullité du contrat principal, elle n'aurait pas conclu ce contrat. La probabilité qu'elle ne se serait pas engagée doit être évaluée au maximum à 5 %, portant le préjudice de Mme [P] à 1250 euros.

Mme [P] soutient notamment que :

Elle n'est pas en mesure de récupérer le prix du contrat annulé auprès de la société, compte tenu de la liquidation judiciaire de cette dernière qui a été clôturée pour insuffisance d'actif.

Réponse de la cour

Il est constant que lorsque la restitution du prix à laquelle le vendeur est condamné, par suite de l'annulation du contrat de vente ou de prestation de service, est devenue impossible du fait de l'insolvabilité du vendeur ou du prestataire, l'emprunteur, privé de la contrepartie de la restitution du bien vendu, justifie d'une perte subie équivalente au montant du crédit souscrit pour le financement du prix du contrat de vente ou de prestation de service annulé en lien de causalité avec la faute de la banque qui, avant de verser au vendeur le capital emprunté, n'a pas vérifié la régularité formelle du contrat principal (1re Civ., 10 juillet 2024, pourvoi n° 22-24.754, publié).

En l'espèce, la société a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire qui a été clôturée pour insuffisance d'actif, ce qui prive Mme [P] de sa créance de restitution du prix, découlant de plein droit de l'annulation du contrat principal. Cette dernière justifie ainsi d'un préjudice qu'elle n'aurait pas subi sans la faute de la banque, qui a libéré les fonds alors que le contrat principal était irrégulier et imparfaitement exécuté. Ce préjudice équivaut au montant du crédit souscrit.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la banque tendant au remboursement du capital versé tout en la condamnant à payer à Mme [P] une somme équivalente à celles que cette dernière lui avait déjà réglées, et dont le montant retenu par le tribunal n'est contesté par aucune des parties. Il n'y a pas lieu à cet égard de prévoir une condamnation en deniers ou quittances.

3. Sur les frais du procès

La banque perdant définitivement le procès, les dispositions du jugement relatives aux frais de celui-ci seront confirmées.

La banque sera également condamnée aux dépens de la procédure d'appel, avec application de l'article 699 du code de procédure civile, et à verser à Mme [P] la somme de 2850 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Ses demandes faites à ce titre seront quant à elles rejetées.

PAR CES MOTIFS :

La cour :

CONSTATE le dessaisissement de la cour à l'égard de la société De Bois-[W], en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Force Énergie ;

REJETTE la demande de la société BNP Paribas Personal Finance tendant à ce que des conclusions et pièces de Mme [X] [P] soient écartées ;

CONFIRME le jugement en ses dispositions soumises à la cour ;

Y ajoutant :

CONDAMNE la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens de la procédure d'appel ;

ACCORDE le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile à l'avocat de Mme [X] [P] ;

CONDAMNE la société BNP Paribas Personal Finance à verser à Mme [X] [P] la somme de 2850 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE les autres demandes des parties.

LE GREFFIER P/LA PRESIDENTE, empêchée

T. DA CUNHA Y. WOLFF


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre a - civile
Numéro d'arrêt : 19/02383
Date de la décision : 02/09/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-09-02;19.02383 ?
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