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26/11/2012 | FRANCE | N°09/01289

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 26 novembre 2012, 09/01289


VF-BR

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRET No 402 DU VINGT SIX NOVEMBRE DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 09/ 01289

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 8 septembre 2009- Section Encadrement.

APPELANT

Monsieur Patrice X...
...
...
97190 LE GOSIER
Représenté par la SELARL JFM substituée par Maître Pauline BAZZET, avocat au barreau de la Guadeloupe

INTIMÉE

S. A. S. POTOMITAN
Z. I. de Jaula
97129 LAMENTIN
Représentée par Maître SZWARCBA

RT (SCP MORTON et ASSOCIES (Toque 104), avocat au barreau de la Guadeloupe

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositi...

VF-BR

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRET No 402 DU VINGT SIX NOVEMBRE DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 09/ 01289

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 8 septembre 2009- Section Encadrement.

APPELANT

Monsieur Patrice X...
...
...
97190 LE GOSIER
Représenté par la SELARL JFM substituée par Maître Pauline BAZZET, avocat au barreau de la Guadeloupe

INTIMÉE

S. A. S. POTOMITAN
Z. I. de Jaula
97129 LAMENTIN
Représentée par Maître SZWARCBART (SCP MORTON et ASSOCIES (Toque 104), avocat au barreau de la Guadeloupe

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, L'affaire a été débattue le 18 Juin 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Jacques FOUASSE, conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président,
M. Jacques FOUASSE, Conseiller, rapporteur
Mme Marie-Josée BOLNET, conseiller

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 10 septembre 2012 date à laquelle le prononcé de l'arrêt a été prorogé au 15 octobre puis au 26 novembre 2012.

GREFFIER Lors des débats Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative Principale, faisant fonction de greffier,
ARRET :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC.
Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Valérie FRANCILLETTE, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
Faits et procédure :

Par contrat de travail à durée indéterminée, M. X...était engagé par la Société GROUPE C... en qualité de projeteur au sein du bureau des méthodes à compter du 11 septembre 2000. Il était précisé que pour chaque dossier il était chargé de la réalisation des études de charpente/ couverture pour l'ensemble des activités Martinique (maisons individuelles, charpente/ couverture), et de la mise au point des dossiers techniques. Le poste de travail était situé en Martinique, au siège de l'employeur au ROBERT.

Par une convention tripartite conclue entre la Société GROUPE C..., la Société KAZECO et M. X..., il était stipulé que M. X..., qui avait fait part de son souhait de rejoindre la Société KAZECO en GUADELOUPE, afin d'occuper un poste de responsable secteur charpente/ couverture, démissionnait de la Société GROUPE C... à compter du 1er septembre 2003 sans aucun préavis, et que le même jour la Société KAZECO l'engageait conformément à un contrat de travail à durée indéterminée annexé à ladite convention, en qualité de responsable du secteur charpente/ couverture, avec reprise de l'ancienneté acquise au sein de la Société GROUPE C....

Il était stipulé dans le contrat de travail conclu avec la Société KAZECO, qu'à terme M. X...serait responsable de :
- devis,
- des coefficients d'engagement en relation avec son responsable,
- du chiffre d'affaires et des marques du secteur.

Par courrier du 29 avril 2005, le président de la Société KAZECO faisait savoir à M. X...qu'à la suite d'une décision de regroupement d'activité, et en application de l'article L 122-12 du code du travail, son contrat de travail était transféré à compter du 1er avril 2005 à la Société POTOMITAN, ce contrat de travail se poursuivant auprès de la nouvelle société employeur dans les mêmes conditions, l'intéressé conservant le bénéfice de l'ancienneté acquise au service de son précédent employeur.

Par courrier du 24 août 2005, le président de la Société POTOMITAN adressait à M. X...un avertissement, en exposant que 15 chantiers étaient alors arrêtés faute de charpentes industrialisées à poser, et en reprochant au salarié de ne pas se consacrer aux études de charpentes. M. X...était mis en demeure de fournir d'ici son départ en congé des études ayant fait l'objet d'un prévisionnel en date du 22 juillet.

Par courrier du 26 août 2005, M. X...répondait à son employeur que la réalisation de dossiers " Etudes Charpente " ne faisait pas partie de ses attributions, que depuis le 1er septembre 2003, il avait réalisé " non seulement, en plus de ses tâches salariales quotidiennes mais également en supplément d'heures de travail, des études de charpentes, compte tenu d'une diminution de personnel au sein même du bureau d'études ", et que c'était la raison pour laquelle il ne pouvait répondre favorablement à sa demande.

Néanmoins, M. X...qui avait prévu de partir en congé du 26 août au 19 septembre 2005, acceptait de reporter ses congés.

Dans un courrier du 22 septembre 2005, l'employeur adressait une seconde mise en demeure à M. X...en constatant que dans la réponse de celui-ci en date du 26 août 2005, il indiquait que la réalisation de dossiers « Etudes charpentes » ne faisait pas partie de ses attributions, alors que cette fonction était expressément visée à l'article 2 de son contrat de travail du 11 septembre 2000. Relevant que M. X...n'avait pas tenu compte du précédent avertissement en ne reprenant pas son travail productif, l'employeur mettait à nouveau celui-ci en demeure de reprendre ce travail.

Par courrier du 18 octobre 2005, M. X...était convoqué à un entretien préalable au licenciement, fixé au 26 octobre 2005.

Son licenciement lui était notifié par courrier du 4 novembre 2005. Il était dispensé de l'exécution de son préavis d'une durée de 3 mois.

Le 11 avril 2006, M. X...saisissait le Conseil de Prud'hommes de Pointe-à-Pitre pour contester son licenciement et obtenir indemnisation.

Par jugement du 8 septembre 2009, la juridiction prud'homale retenait que le licenciement de M. X...était fondé sur des causes réelles et sérieuses, mais condamnait la Société POTOMITAN à lui payer la somme de 2900 euros à titre d'indemnité de congés payés, le requérant étant débouté de ses autres demandes.

Par déclaration du 23 septembre 2009, M. X...interjetait appel de cette décision.

****

Par conclusions notifiées à la partie adverse le 23 décembre 2011, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, M. X...sollicite l'infirmation du jugement déféré sauf en ses dispositions condamnant la Société POTOMITAN à lui payer la somme de 2900 euros au titre des indemnités de congés payés.

Il entend voir juger que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse et réclame paiement des sommes suivantes :
-88   251, 95 euros au titre des heures supplémentaires,
-47   385, 97 euros au titre des commissions sur les devis réalisés et ceux facturés,
-6000 euros au titre de billets d'avion,
-8700 euros à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice financier découlant des mentions de licenciement pour faute et d'une ancienneté de 3 ans au lieu de 6 ans sur l'attestation ASSEDIC,
-8700 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier découlant du retard dans la remise du certificat destiné à la caisse des congés payés du bâtiment,
-29   000 euros de dommages et intérêts pour licenciement abusif et vexatoire,
-21   700 euros représentant le manque-à-gagner depuis son licenciement,
-3000 euros de dommages intérêts au titre de son préjudice moral pour harcèlement moral,
-3500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

À l'appui de ses demandes M. X...explique que son contrat de travail du 11 septembre 2000 invoqué par la Société POTOMITAN a pris fin avec sa démission de la Société GROUPE C... pour rejoindre la Société KAZECO le 1er septembre 2003 et qu'un nouveau contrat de travail a été signé à cette occasion, déterminant ses nouvelles fonctions, dans lesquelles ne rentre par la mission de réaliser des études de charpentes.
Il explique qu'en transférant son contrat de travail à la Société POTOMITAN, qui n'a aucune activité commerciale, il lui était imposé un changement de son contrat de travail en lui supprimant toutes ses tâches commerciales telles que figurant dans son contrat signé le 1er septembre 2003 avec la Société KAZECO.

Il invoquait par ailleurs un courrier du 5 avril 2005 dans lequel il avait réclamé la régularisation de son contrat de travail par un avenant prenant en compte outre son salaire de 2900 euros, les primes sur les devis réalisés et ceux des chantiers réalisés, ainsi que les billets d'avion qui lui avaient été promis. Il faisait mention de nombreuses heures de travail supplémentaires réalisées en effectuant les études charpentes en plus de ses missions contractuelles, compte tenu du licenciement de M. A..., dessinateur.

Il ajoute qu'en lui reprochant l'installation de logiciels informatiques sur son poste de travail, pour lesquels les droits d'utilisation n'auraient pas été payés, l'employeur invoque la violation de dispositions contractuelles qui n'existent pas dans le contrat de travail de 2003. Par ailleurs il soutient qu'il n'a jamais introduit ni installé de logiciels sur son ordinateur et n'a jamais reçu aucune mise en garde de la société informatique prestataire de services GLOBAL SYSTEM, et relève qu'aucune pièce n'est versée aux débats venant étayer les accusations mensongères et purement gratuites de l'employeur.

Pour caractériser le harcèlement moral qu'il dénonce, il fait état de nombreuses manoeuvres de l'employeur visant à le déstabiliser, celui-ci tentant de lui imposer un changement important et substantiel de son contrat de travail en lui imposant des études de charpentes comme travail à temps plein, s'agissant d'une manoeuvre de déclassement et de rétrogradation. Il précise que le 9 septembre 2005 il a sollicité la médecine du travail, laquelle l'a dirigé vers l'inspection du travail, le comportement du président de la Société POTOMITAN étant devenu insupportable, tous ses dossiers lui étant retirés.

****

Par conclusions notifiées à la partie adverse le 14 octobre 2011, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, la Société POTOMITAN sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a fait droit à ses prétentions, son infirmation pour le surplus. Elle conclut au rejet de toutes les demandes de M. X...et réclame paiement de la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

À l'appui de ses demandes la Société POTOMITAN fait valoir que M. X...a été engagé en qualité de « responsable du secteur charpente/ couverture » et qu'il avait des fonctions bien précises qui comprenaient la réalisation des études de charpentes, et qu'il a refusé de réaliser ce type d'études alors que son employeur lui en a fait la demande par courriers des 24 août et 22 septembre 2005.

Elle conteste le contenu des attestations produites par M. X.... En ce qui concerne l'introduction de logiciels informatiques sur son poste de travail, la Société POTOMITAN fait valoir que M. X...ne conteste pas avoir commis le fait reproché.

Par ailleurs la Société POTOMITAN conteste le fondement contractuel de la demande de paiement de commissions, et de celle présentée au titre de billets d'avion.

Elle relève l'absence d'éléments probatoires au support de la demande de paiement d'heures supplémentaires, ainsi que l'absence d'éléments permettant de qualifier une situation de harcèlement moral, faisant valoir en particulier que l'exigence de répétition d'actes de harcèlement n'est pas réalisée.

***

Motifs de la décision :

Sur le licenciement :

Si dans le contrat de travail initial conclu avec la Société GROUPE C..., M. X..., qui était alors engagé sur le poste de " projeteur charpente " au sein du bureau des méthodes, avait bien en charge la réalisation des études de charpentes/ couvertures pour l'ensemble des activités Martinique (maisons individuelles, charpente/ couverture) et la mise au point des dossiers techniques, il n'en est nullement de même dans le contrat de travail le liant à la Société KAZECO à compter du 1er septembre 2003, l'article 6 de ce contrat prévoyant précisément que M. X..., s'il occupait le poste de « responsable secteur charpente/ couverture », serait responsable de :
- de devis,
- des coefficients d'engagement en relation avec son responsable,
- du chiffre d'affaires et des marques du secteur.

Dans ce contrat de travail il n'est donc nullement question de la réalisation d'études de charpentes/ couvertures. Manifestement les missions confiées à M. X...au sein de la Société KAZECO étaient orientées sur une activité exclusivement commerciale.

Ceci est corroboré d'ailleurs par l'attestation établie par M. Jean-François B..., ancien responsable du bureau d'études charpente et du service tous corps d'états de la Société GROUPE C..., qui indique qu'étant supérieur hiérarchique de M. X...au sein de cette société, il a collaboré pendant 3 années durant avec celui-ci en Martinique avant sa mutation en Guadeloupe, et qu'au cours de l'année 2003 le directeur de la Société KAZECO a proposé à M. X..., dans la perspective de relancer la charpente industrielle en Guadeloupe, abandonnée depuis plusieurs années par M. Yvon C..., le poste de responsable du service charpente/ couverture en Guadeloupe, et qu'en tant que supérieur hiérarchique il a assisté aux négociations entre les parties et qu'il avait été convenu que les missions de M. X...porteraient sur le chiffrage et les prix sous la direction de M. Luc D..., sur les coefficients d'engagement chantiers et le développement du chiffre d'affaires externe, ainsi que sur la formation de dessinateur de M. A...Rudy afin de le soulager des études, et de pouvoir se consacrer à 100 % au développement du service.

Le contrat de travail de M. X...avec la Société KAZECO, ayant été transféré à la Société POTOMITAN en application des dispositions de l'article L 122-12 ancien du code du travail, n'a pu subir aucune modification de contenu du fait de ce simple transfert. Par ailleurs aucun avenant n'est venu modifier la nature des missions confiées à M. X....

Il convient de relever que si fin 2004 il a été procédé à la création de la Société POTOMITAN, il s'agissait d'opérer la séparation des métiers commerce/ travaux afin d'optimiser les tâches et éviter les retards de réalisation. Ainsi la Société KAZECO au sein de laquelle M. X...avait été recruté, devait rester un constructeur de maisons individuelles, mais ne plus prendre en charge directement la construction des maisons, laquelle devait être sous-traitée à la Société POTOMITAN. Ces constatations résultent de la note d'information rédigée le 13 janvier 2005 par M. Yvon C... (pièce no 33 de l'appelant).

Ainsi il apparaît que le transfert de M. X..., qui avait été affecté à des missions de nature commerciale au sein de la Société KAZECO, au profit de la Société POTOMITAN peut être considéré comme une erreur d'aiguillage dans la mesure où la Société KAZECO conservait l'activité de commercialisation. C'est d'ailleurs ce que M. Yvon C... paraît avoir admis lors d'un entretien du 31 janvier 2007 avec M. Laurent E...(pièce no 31 de l'appelant).

En conséquence il apparaît que l'employeur, en l'occurrence la Société POTOMITAN, a entendu modifier le contenu des tâches contractuellement confiées à M. X..., en l'affectant exclusivement à des travaux de réalisation d'études de charpentes/ couvertures.

Au demeurant, dans ses conclusions, la Société POTOMITAN apparaît avancer des contrevérités lorsqu'elle soutient en page 12 que M. A...n'a jamais réalisé d'étude de charpente car il n'en avait pas la compétence. En effet il ressort des pièces produites (no 44 de l'appelant, que M. A...était en charge au cours des années 2001 à 2004 de la réalisation d'études techniques de charpentes, comme le montrent les nombreux plans portant ses initiales. Ceci est d'ailleurs confirmé par l'attestation de Monsieur F...Joël qui déclare que son embauche a fait suite au licenciement de M. A..., après que M. X...ait refusé d'être rétrogradé au simple poste de dessinateur " études charpentes " pour lequel il avait formé M. A.... D'ailleurs dans une note interne en date du 11 août 2005, M. Cyrille I...fait savoir à M. Yvon C... que M. X...lui a indiqué que M. F...conviendrait parfaitement au poste de dessinateur charpentes au vu de son CV et de son BTS Construction Bois et Habitat, ce qui permettrait de reprendre les études de Rudy A....

Ainsi le premier motif invoqué dans la lettre de licenciement du 4 novembre 2005, tenant au refus imputé à M. X...de respecter les dispositions de son contrat de travail relatives à la réalisation des études de charpentes/ couvertures, n'est pas fondé.

En qui concerne le second motif du licenciement résidant dans le refus imputé à M. X...de ne pas respecter les dispositions de son contrat de travail relatives à l'interdiction d'introduire et/ ou d'utiliser tout logiciel informatique pour lequel les droits d'utilisation n'ont pas été règulièrement payés, il y a lieu de constater que M. X...conteste expressément les faits qui lui sont ainsi imputés, et que la Société POTOMITAN n'apporte aucun élément de preuve permettant de corroborer ses allégations à ce sujet.

En conséquence il y a lieu de considérer que le licenciement de M. X...est sans cause réelle et sérieuse.

Sur les demandes pécuniaires de M. X...:

Ayant été recruté en qualité de " Projeteur Charpente ", mais ayant accédé grâce à ses compétences personnelles et à son travail, au statut de cadre, au sein du groupe de sociétés de M. Yvon C..., ayant obtenu une orientation de ses activités sur des missions non plus techniques mais commerciales, M. X...a perdu, par l'effet du licenciement prononcé à son égard, non seulement son emploi, mais toute perspective de retrouver un statut équivalent, compte tenu de la particularité de son cursus professionnel personnel dans le groupe d'entreprises Yvon C.... Il sera en conséquence alloué à M. X...une indemnité de 50   000 euros en réparation du préjudice professionnel mais aussi financier que lui cause ce licenciement.

M. X...sollicite paiement de la somme de 88   251, 95 euros au titre des heures supplémentaires mais ne produit aucun élément précis permettant d'étayer cette demande. Il ne peut donc y être fait droit.

Certes il peut paraître paradoxal que M. X...qui a été engagé en 2003 pour exercer des fonctions à orientation essentiellement commerciales, se soit vu proposer par la Société KAZECO un contrat de travail ne prévoyant aucune commission sur chiffre d'affaires ; c'est d'ailleurs ce qui a suscité de vives réclamations de la part de l'intéressé comme en atteste Mme Isabelle H..., chargée, au sein de l'entreprise, des appels de fonds au cours de la période 2002-2005, qui déclare qu'elle a été témoin de plusieurs altercations entre M. X...et le directeur de la Société KAZECO au sujet de sa rémunération, le premier cité réclamant la mise à jour de son contrat de travail de commercial, la recherche de marchés extérieurs, les appels d'offres et devis n'étant pas pris en compte et n'étant pas rémunérés. Une réclamation écrite avait d'ailleurs été adressée le 5 avril 2005 au directeur de la Société KAZECO par M. X....

Toutefois en l'absence de dispositions contractuelles prévoyant l'attribution de telles commissions, il ne peut être fait droit à la demande de paiement formée à ce titre par M. X....

De même la demande de paiement de billets d'avion à hauteur de 6000 euros, qui serait justifiée par le fait qu'il aurait été convenu que M. X...verrait prendre en charge par son employeur deux billets d'avion aller-retour pour la métropole par an, n'est fondée sur aucune disposition contractuelle figurant dans les documents versés aux débats. Il ne peut donc y être fait droit.

Les conditions dans lesquelles se sont poursuivies les relations de travail entre M. X...et son employeur au cours de l'année 2005, sont constitutifs de harcèlement moral, caractérisé par divers agissements de la direction ayant eu pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteint à ses droits et à sa dignité et de compromettre son avenir professionnel.

Il résulte des messages adressés par M. X...et figurant au dossier que dès le mois de juillet 2005, il constatait que des dossiers lui étaient retirés (pièces no 46 et 49 de l'appelant). On peut citer également sa convocation à une réunion d'expert fictive le 27 juillet 2005, les lettres d'avertissement des 24 août et 22 septembre 2005 adressées par le président de la Société POTOMITAN à M. X..., par lesquelles ce dernier est mis en demeure de fournir d'ici son départ en congé (prévu au 26 août 2005) un certain nombre d'études techniques, lui reprochant de n'avoir produit aucune étude de charpente au mois d'août 2005, lui imputant la paralysie de l'entreprise, faisant état de sa détermination à porter préjudice à la société qui l'emploie, et lui reprochant de porter atteinte à l'existence même de son employeur et de menacer l'emploi de l'ensemble des salariés..

M. X...invoque aussi la demande de restitution de son véhicule de service avant ses congés. Si l'employeur fait valoir que la mise à disposition de ce véhicule est à usage professionnel uniquement, selon les stipulations du contrat de travail, il ne rapporte pas la preuve qu'une note interne à l'entreprise fasse obligation aux bénéficiaires d'un véhicule de service de restituer ce véhicule lors de leurs congés annuels, ni qu'une telle demande ait été formulée auprès des autres bénéficiaires de véhicule de service, le caractère vexatoire de la demande de l'employeur apparaissant caractérisée à l'égard de M. X....

Dès le 7 septembre 2005, M. X...constate que la ligne de son téléphone professionnel est coupée, sans qu'il ait été prévenu de cette résiliation. Il relève par ailleurs dans un courrier du 7 septembre 2005 que depuis le 3 septembre les tickets restaurant sont distribués seulement à ses collègues, et que le salaire du mois d'août ne lui a toujours pas été versé alors que celui de ses collègues l'était le 5 septembre, rappelant par ailleurs que depuis sa date d'entrée dans l'entreprise, son salaire s'effectuait par virement le 5 de chaque mois au plus tard et que si tel n'était pas le cas il était prévenu pour pouvoir en tenir compte, alors que pour le salaire du mois d'août il n'a été informé d'aucun retard, l'intéressé ayant reçu le 9 septembre un chèque en paiement de son salaire dont les délais d'encaissement en retarderont le bénéfice.

En outre bien que convoqué par un courrier du 18 octobre 2005 à un entretien préalable au licenciement, ce licenciement est annoncé lors d'une réunion des délégués du personnel dès le 13 septembre 2005, comme le montre le compte rendu de cette réunion selon lequel M. Yvon C... a annoncé que M. X..., " responsable extérieur marché ", ne veut plus travailler pour la maison individuelle.

Ainsi le comportement de la direction de l'entreprise à l'égard de M. X..., au moins depuis le mois de juillet 2007 jusqu'en septembre 2007, est constitutif de harcèlement moral, dont le salarié est fondé à solliciter indemnisation, laquelle sera fixé à la somme de 3000 euros.

M. X...expose que la Société POTOMITAN a attendu le mois de juin 2006, pour adresser le certificat destiné à la caisse de congés payés du bâtiment, ce qui a aurait eu pour conséquence, un retard de prise en charge ASSEDIC, et un délai de carence de 3 mois. L'employeur ne conteste pas le retard apporté à délivrer le certificat destiné à la caisse de congés payés. Ce retard a nécessairement causé préjudice à M. X..., dans la mesure où le versement des sommes qui lui étaient dues s'en est trouvé retardé d'autant. Il sera octroyé à titre d'indemnisation, au salarié, la somme de 2 000 euros.

L'indemnité de congés payés étant prise en charge par la caisse de congés payés du bâtiment, M. X...sera débouté de sa demande portant sur ladite indemnité.

M. X...invoque une convention collective, dont il ne précise ni le nom, ni la date, ni les références pour revendiquer un salaire mensuel de 3 244 euros. Cependant il y a lieu de rappeler que la convention collective du bâtiment et des travaux publics de Guadeloupe, ne comporte pas de disposition concernant les cadres, et que la convention nationale du bâtiment et des travaux publics qui comportent des dispositions au sujet des cadres, n'est pas applicable en Guadeloupe.

Si comme le relève M. X..., l'employeur a fait figurer à tort sur l'attestation ASSEDIC qu'il a délivrée, la mention " licenciement pour faute grave " et une ancienneté dans l'entreprise à compter du 1er septembre 2003, alors que le salarié bénéficiait d'une ancienneté remontant au 11 septembre 2000, l'appelant ne démontre pas le préjudice matériel ou financier qui en serait résulté. Ces mentions erronées justifient par contre qu'il soit ordonné à la Société POTOMITAN de délivrer à M. X...une attestation ASSEDIC rectifiée en ce qui concerne l'ancienneté du salarié, l'absence de faute grave étant suffisamment attestée par le présent arrêt.

Il paraît inéquitable de laisser à la charge de l'appelant les frais irrépétibles qu'il a exposés, il doit être en conséquence indemnisé par l'octroi de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs,

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Réforme le jugement déféré,

Et statuant à nouveau,

Dit que le licenciement de M. X...est sans cause réelle et sérieuse,

Condamne la Société POTOMITAN à payer à M. X...les sommes suivantes :

-50 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre des préjudices résultant du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-3 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du harcèlement moral subi,

-2 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du retard apporté par l'employeur à la remise du certificat destiné à la caisse de congés payés du bâtiment,

-3 000 euros d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Ordonne la remise par la Société POTOMITAN à M. X...d'une attestation ASSEDIC rectifiée portant mention d'une ancienneté à compter du 11 septembre 2000, et ce dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt, chaque jour de retard, passé ce délai, étant assorti d'une astreinte de 50 euros,

Dit que les dépens sont à la charge de la Société POTOMITAN,

Déboute les parties de toute conclusion plus ample ou contraire.

Le Greffier, Le Président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09/01289
Date de la décision : 26/11/2012
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2012-11-26;09.01289 ?
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