COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE
ARRET No 116 DU HUIT AVRIL DEUX MILLE TREIZE
AFFAIRE No : 11/ 01618
Décision déférée à la Cour : Jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de la Guadeloupe du 13 septembre 2011.
APPELANT
Monsieur Roger X...... 97180 SAINTE ANNE Comparant en personne
INTIMÉE
CAISSE GENERALE DE SECURITE SOCIALE DE LA GUADELOUPE Quartier de l'Hotel de ville-BP 486 97159 POINTE A PITRE Représentée par M. Y...
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 février 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, Mme Marie-Josée BOLNET, Conseillère, Mme Françoise GAUDIN, Conseillère.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 08 avril 2013
GREFFIER Lors des débats Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative Principale faisant fonction de greffière, serment préalablement prêté.
ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative Principale, fft de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
Faits et procédure :
Par requête du 20 septembre 2010, M. Roger X... a saisi le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de la Guadeloupe d'un recours contre la décision de la Commission de Recours Amiable de la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Guadeloupe, en date du 15 septembre 2010 ayant confirmé le refus de ladite caisse de sécurité sociale de réviser le montant de sa pension de retraite sur le fondement de l'article R351-1 du code de la sécurité sociale, lequel dispose que les droits à l'assurance retraite sont déterminés en tenant compte des cotisations versées au titre de la législation sur les assurances sociales.
M. X... a fait valoir qu'il était retraité de la fonction publique depuis le 1er août 1999 et qu'avant sa carrière de fonctionnaire, et à la suite de son service militaire, engagé volontaire pendant 2 ans, il avait travaillé pendant 4 ans dans le secteur privé de 1965 à 1968 inclus, à Paris et à Pointe-à-Pitre.
Il a soutenu qu'il était victime d'un dysfonctionnement dans le traitement de son dossier de retraite du régime général, puisqu'il n'a pas été tenu compte de l'année 1967, alors qu'il a été régulièrement employé par la Société Guadeloupéenne de Transit sise à Pointe-à-Pitre, pendant la période considérée. Il expliquait que l'impossibilité de justifier du versement des cotisations pour cette année 1967 résulte du passage du cyclone Hugo en 1989 lequel est constitutif d'un cas de force majeure. Il demandait en conséquence qu'il lui soit fait application des dispositions légales dispensant, en cas de force majeure, de l'obligation de rapporter la preuve des versements de cotisations sociales. Il versait aux débats diverses attestations émanant de collègues ayant travaillé avec lui dans ladite entreprise, durant l'année 1967.
Il critiquait également la date retenue par la caisse de sécurité sociale pour l'entrée en jouissance de sa pension, ainsi que le taux retenu.
Par jugement du 13 septembre 2011, le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de la Guadeloupe a rejeté le recours formé par M. X... contre la décision de la commission de recours amiable du 15 septembre 2010, et a constaté qu'il ne justifiait pas remplir les conditions lui permettant de prétendre à la révision de sa pension de retraite.
Par courrier adressé au greffe de la Cour, le 5 novembre 2011, M. X... interjetait appel de cette décision.
L'acte d'appel de M. X... comportait la motivation suivante.
Il indiquait que les documents en cause avaient été détruits par l'ouragan Hugo, les dégâts occasionnés à son domicile à l'époque, 119 lotissement Pointe d'Or aux Abymes, avait fait l'objet d'un dossier de déclaration de sinistre à sa compagnie d'assurances la GMF.
Il faisait état d'un certificat travail que lui aurait délivré à son départ la secrétaire de l'entreprise, une dame Z..., qui après avoir quitté l'entreprise, avec été embauchée par la caisse de sécurité sociale.
Il expliquait qu'à son avis, la date d'effet de la pension de retraite était d'ordre public et qu'en ce qui le concernait il s'agissait de l'année 2004, l'année de ses 60 ans, âge de départ à la retraite à l'époque.
Par conclusions notifiées à la partie adverse le 10 mai 2012, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, M. X... confirmait ses prétentions exprimées jusque-là, rappelant que la force majeure, le cyclone Hugo survenu en 1989, soit 22 ans après la période litigieuse (1967), l'avait privé de ses justificatifs personnels. Il faisait état de sa bonne foi et indiquait qu'il n'avait pu rencontrer sa collègue de l'époque Mme A...épouse Z...qui occupait la fonction de secrétaire de direction à la Société Guadeloupéenne de Transit, précisant que c'était elle qui lui avait établi et personnellement remis les documents salariaux afférents à son départ pour cause de licenciement. Il indiquait que cette Mme Z...qui avait été embauchée par la caisse de sécurité sociale, pourrait être en mesure d'apporter des éléments probants pouvant corroborer ses allégations.
Par ailleurs il contestait la date du 1er mai 2010 retenue par la caisse de sécurité sociale comme date d'effet de sa pension de retraite, faisant valoir que selon lui c'est l'année 2004, année de ses 60 ans, qui devait être prise en compte.
Dans ses conclusions, la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Guadeloupe, qui faisait référence aux dispositions des articles R351-1 et R531-37 du code de la sécurité sociale, sollicitait la confirmation du jugement déféré et le rejet des demandes de M. X....
Elle faisait valoir que les recherches effectuées au sein de la direction des retraites avaient révélé que l'employeur n'avait pas transmis de déclaration de salaires au titre de l'année en question, et que l'appelant ne faisait pas la preuve, par les moyens légaux, à savoir bulletins de salaire, attestation certifiée conforme aux livres de paie, du versement de cotisations.
Elle expliquait qu'en ce qui concerne la date d'effet, l'article R 351-37 disposait que chaque assuré indique la date à laquelle il désire entrer en jouissance de sa pension, cette date étant nécessairement le premier jour d'un mois et ne pouvant être antérieur au dépôt de la demande.
Par arrêt du 12 novembre 2012, la Cour de céans confirmait le jugement déféré en ce qu'il avait rejeté le recours de M. X... concernant la date d'entrée en jouissance de sa pension de retraite, fixée au 1er mai 2010, et pour le surplus invitait la Caisse a fournir l'adresse du lieu du domicile de Mme A...épouse Z..., afin que celle-ci puisse être entendue comme témoin.
À l'audience de renvoi du 25 février 2013, à laquelle Mme A...épouse Z...était régulièrement convoquée, ayant signé l'avis de réception de la lettre recommandée portant convocation, ladite Mme A...ne comparaissait pas, les services du greffe ayant été avisés téléphoniquement que celle-ci n'était pas en état de témoigner.
M. X... demandait alors à la Cour de reconsidérer les cinq attestations sur l'honneur qu'il avait produites, et éventuellement procéder à l'audition de leurs auteurs (observations écrites du 25 février 2013 de l'appelant).
Motifs de la décision :
Selon les dispositions de l'article L351-2 du code de la sécurité sociale, les périodes d'assurance ne peuvent être retenues, pour la détermination du droit à pension que si elles ont donné lieu au versement d'un minimum de cotisations. En cas de force majeure ou d'impossibilité manifeste pour l'assuré d'apporter la preuve du versement de cotisations, celle-ci peut l'être à l'aide de documents probants ou de présomptions concordantes.
Le relevé de carrière établi par les services de la caisse de sécurité sociale, fait apparaître que si pour les années 1965, 1966 et 1968 des salaires soumis à cotisations sociales, versés à M. X..., ont bien été déclarés, il n'est mentionné aucun salaire pour l'année 1967.
Comme il a déjà été relevé dans l'arrêt du 12 novembre 2012, il n'est pas contestable que le cyclone Hugo a provoqué en septembre 1989 des dégâts considérables sur tout le territoire de la Guadeloupe, ce phénomène étant effectivement susceptible de constituer un cas de force majeure telle que prévue à l'article L 351-2 sus-cité.
Toutefois comme il a déjà été fait observer dans l'arrêt précédent, si ce cyclone a pu constituer un obstacle insurmontable pour M. X... pour la production de ses bulletins de paie de l'année considérée, il y a lieu de relever que la caisse de sécurité sociale, qui a été soumise aux mêmes bouleversements climatiques, a retrouvé trace des déclarations de salaire effectuées pour le compte de M. X... pour les années 1965, 1966, et 1968, et qu'il paraît peu probable que les dégâts engendrés par le cyclone Hugo n'aient affecté que les déclarations de salaires de l'année 1967.
Il ressort de la constatation de ces éléments de fait, qu'il existe des présomptions sérieuses d'absence de travail salarié au cours de l'année 1967.
En outre il résulte des pièces versées aux débats, et plus précisément de la réponse faite le 25 mai 1998 par M. X... au questionnaire que lui a adressé la caisse de sécurité sociale, et du courrier qu'il a envoyé le 4 mai 2010 au directeur de la caisse de sécurité sociale, que l'appelant soutient qu'il a travaillé chez le même employeur de 1966 à 1968 sans discontinuer, comme agent de bureau. Or le relevé des salaires produit aux débats par la caisse de sécurité sociale montre une variation importante du montant des salaires annuels versés à M. X... entre l'année 1966 et l'année 1968, ceux-ci passant de 8880 francs à 4540 francs, celui versé au cours de l'année 1965 n'atteignant que 5143 francs. Ainsi il peut être sérieusement douté du caractère continu de l'emploi de M. X... au service du même employeur au cours des années 1966 à 1968.
Par ailleurs il a déjà été constaté que les attestations sur l'honneur versées aux débats par Monsieur X..., et émanant de Mme Alberte B..., de M. Paul C..., de M. Georges D..., de M. Serge E...et de M. Laurent F..., desquelles il ressort que ces anciens salariés de la Société Gadeloupéenne de Transit, déclarent que M. X... était bien salarié de la même entreprise, notamment en 1967, de façon permanente, ladite année 1967 étant d'autant plus mémorable qu'il s'agit de l'année du mariage de M. X... auquel tout le personnel avait été convié, sont toutes dactylographiées et rédigées de façon strictement identique, et ne répondent pas aux prescriptions de l'article 202 du code de procédure civile.
La forme dactylographiée et les contenus strictement identiques desdites attestations sont de nature à leur ôter tout caractère de sincérité et tout au moins d'exactitude.
En l'état de ces constatations il y a lieu de considérer que lesdites attestations sont insuffisantes à faire la preuve du versement pour l'année 1967 de cotisations sociales, pour le compte de M. X..., en sa qualité de salarié de la Société Guadeloupéenne de Transit, et qu'en tout état de cause ces attestations ne comportent aucune précision quant aux dates et montants des précomptes ou versements que l'employeur aurait versés.
Compte tenu de l'ancienneté de la période en cause, remontant à 46 ans, et en conséquence de la difficulté d'une part de situer précisément les faits allégués au cours d'une décennie déjà ancienne, et d'autre part de faire préciser les montants des précomptes ou versements qui auraient été effectués, l'audition des auteurs des attestations produites n'est pas de nature à permettre de recueillir des précisions fiables pouvant avoir une force probante suffisante pour renverser les présomptions établies ci-avant.
Par ces motifs,
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a rejeté le recours de M. X... concernant sa demande de révision du montant de sa pension de retraite, tendant à faire prendre en compte une activité salariée au cours de l'année 1967.
Le Greffier, Le Président.