MJB/ JG
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 21 DU VINGT SEPT JANVIER DEUX MILLE QUATORZE
AFFAIRE No : 12/ 01925
Décision déférée à la Cour : Jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de la Guadeloupe du 24 juillet 2012.
APPELANTE
CAISSE AUTONME DE RETRAITE DES MEDECINS DE FRANCE, 46 rue Saint Ferdinand 75017 PARIS Représentée par Me PHILIBIEN substituant Me Michaël SARDA (TOQUE 1), avocat au barreau de GUADELOUPE
INTIMÉ
Monsieur Max X......97100 BASSE-TERRE Représenté par Me CUARTERO substituant Me Hugues JOACHIM (TOQUE 34), avocat au barreau de GUADELOUPE
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 04 Novembre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, Mme Marie-Josée BOLNET, Conseillère, Mme Françoise GAUDIN, Conseillère. qui en ont délibéré.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 16 décembre 2013 puis le délibéré a été prorogé au 27 janvier 2014
GREFFIER Lors des débats Mme Valérie FRANCILLETTE, Greffière.
ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative Principale, fft de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Par lettre recommandée du 26 juillet 2001, reçue le 27 juillet 2001, M. Max X..., médecin, a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale (T. A. S. S.) de la Guadeloupe d'une opposition à contrainte laquelle a été signifiée le 13 juillet 2000 sur requête de la Caisse Autonome de Retraite des Médecins (C. A. R. M. F.).
Par jugement du 24 juillet 2012, le tribunal a déclaré le requérant recevable et bien fondé en son opposition en constatant la nullité de l'acte de signification du 13 juillet 2000 au motif que cet acte est antérieur à la contrainte querellée du 19 juin 2001, et a jugé en conséquence la dite contrainte nulle et de nul effet.
Ce jugement a été notifié et délivré à la C. A. R. M. F. le 30 octobre 2012 par lettre recommandée avec avis de réception.
Par déclaration reçue le 26 novembre 2012, la C. A. R. M. F. a interjeté appel de cette décision.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par conclusions récapitulatives déposées le 05 novembre 2013 auxquelles il a été fait référence à l'audience des plaidoiries, la C. A. R. M. F., représentée, demande à la cour de :- déclarer recevable son appel,- infirmer le jugement du T. A. S. S. du 24 juillet 2012,- constater en conséquence que la signification de la contrainte du 19 juin 2001 n'est pas nulle, le docteur X...ne justifiant d'aucun grief et ce conformément aux dispositions des articles 694 et 114 alinéa 2 du code de procédure civile,- constater que la contrainte du 19 juin 2001 et la mise en demeure du 15 novembre 2000 ne sont pas nulles,- déclarer le docteur X...recevable en son opposition, mais mal fondé,- débouter celui-ci de l'ensemble de ses demandes,- de valider la contrainte, relative à l'exercice 2000, en son entier montant, à savoir : * principal : 96 662 francs * majoration de retard : 1 933, 24 francs total : 98 595, 24 francs soit 15 030, 75 euros sans préjudice des majorations de retard complémentaires qui continuent de courir jusqu'au règlement définitif du principal et des frais légaux.
Sur la nullité de signification, elle met en avant l'erreur de date affectant l'acte de signification et l'absence de grief pour l'intéressé au regard des dispositions des articles 651, 694 et 114 alinéa 2 du code de procédure civile.
Elle fait observer à la cour que celui-ci a formé opposition à la contrainte litigieuse devant le T. A. S. S. par recours du 26 juillet 2001, soit dans le respect du délai de quinze jours à compter de la signification de la contrainte le 13 juillet 2001 conformément aux dispositions de l'article R. 133-3 du code de sécurité sociale.
Sur la contrainte du 19 juin 2001, elle rappelle qu'elle a été instituée par le décret du 19 juillet 1948 avec pour mission d'assurer la gestion des régimes d'assurance vieillesse et d'invalidité-décès obligatoires pour les médecins ayant une activité médicale non salariée (articles L. 642-1 et suivants du code de la sécurité sociale) ; que les montants et les taux de ces cotisations sont fixés par décrets ; que les cotisations proportionnelles sont dues au titre des régimes de base, complémentaire Vieillesse et d'Allocation de remplacement de revenu, et sont calculées en pourcentage des revenus des médecins de l'année N-2 ; qu'ainsi, ce sont les revenus de l'année 1998 qui servent de base pour la détermination de la part proportionnelle des cotisations dues au titre de l'exercice 2000 ; qu'à défaut de déclaration par le médecin de ses revenus dans les délais prévus, il est procédé d'office à l'appel d'une cotisation forfaitaire en application de l'article D. 642-3 du code de sécurité sociale, de l'article 3 des statuts du régime complémentaire Vieillesse et de l'article 8 du décret 97. 379 du 21 avril 1997 modifié relatif à l'allocation de remplacement de revenus ; qu'en l'espèce, les sommes réclamées au titre de l'exercice 2000 ont été déterminées en l'absence des revenus de l'année 1998, étant précisé que le docteur X...ne déclare pas ses revenus depuis 1991.
Sur la mise en demeure du 15 novembre 2000, elle précise que sans règlement de la part de l'intéressé et conformément à l'article L. 244-3 1er alinéa du code de la sécurité sociale, elle a adressé à celui-ci par lettre recommandée avec avis de réception une mise en demeure pour obtenir paiement des cotisations dues au titre de l'exercice 2000 ; que l'avis de réception comporte la signature du docteur X...identique à celle figurant sur l'avis de recours adressé au tribunal le 26 juillet 2001 ; qu'en outre, cette mise en demeure détaille avec précision les sommes dues au titre des différents régimes obligatoires gérés par la CARMF, ainsi que les majorations de retard ; que ce document et la contrainte ont permis au docteur X...d'avoir une connaissance claire de la nature, de la cause et de l'étendue des cotisations réclamées conformément au principe dégagé par l'arrêt " Deperne " rendu par la cour de cassation en mars 1992.
Par conclusions du 28 octobre 2013 régulièrement notifiées et soutenues oralement, M. Max X..., représenté, demande à la cour de :- déclarer l'appel mal fondé,- déclarer l'acte de signification délivré le 13 juillet 2000 nul et de nul effet,- confirmer le jugement entrepris et de condamner la CARMF à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Il fait valoir qu'aux termes de l'article 648 du code de procédure civile, la mention de la date de l'acte est une formalité substantielle et que l'acte de signification du 13 juillet 2000 est entaché de nullité pour vice de forme au regard des articles 653 et 114 du code de procédure civile ; que cet acte nul lui cause un grief car il a pour effet d'entraîner la validation de la contrainte et de la rendre définitive.
Il avance également que l'acte de signification délivré le 13 juillet 2000 fait mention d'une contrainte qui n'existait pas à la date de sa délivrance et ce en contravention des dispositions de l'article R. 133-3 du code de la sécurité sociale.
A titre subsidiaire, il soutient que la mise en demeure visée par l'article R. 133-9-2 du code de la sécurité sociale doit être détaillée et relative à une période précise ; qu'elle ne peut, de surcroît, être délivrée avant l'expiration de la période concernée, ce qui est le cas en l'espèce ; qu'il est manifeste que la CARMF a inclus dans la mise en demeure des cotisations dues pour des années antérieures, sans doute prescrites au regard des dispositions de l'article L. 244-3 al 1 du code de la sécurité sociale.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère expressément à leurs conclusions écrites.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la mise en demeure du 15 novembre 2000 :
Aux termes des articles L. 244-3 et R. 244-1 du code de la sécurité sociale, toute action ou poursuite en recouvrement de cotisations dues par un travailleur non salarié est précédée par une mise en demeure adressée à la personne même du débiteur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; cette mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées ainsi que la période à laquelle elle se rapporte.
En l'espèce, la cour constate que la mise en demeure du 15 novembre 2000 est régulière tant en la forme puisqu'il y est indiqué le montant des cotisations fixées par taxation d'office et dues au titre de chaque régime, l'année concernée et le montant des majorations de retard arrêtées au 31 octobre 2000 que dans le mode de délivrance par lettre recommandée dont l'avis de réception a été signé par le destinataire, le docteur X..., ce qui n'est pas contestable.
Sur la nullité de l'acte de signification de la contrainte du 19 juin 2001 :
Aux termes de l'article 649 du code de procédure civile, la nullité des actes d'huissier de justice est régie par les dispositions relatives aux nullités des actes de procédure.
Aux termes de l'alinéa 2 de l'article 114 du même code, la nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public.
L'indication d'une date erronée de signification dans l'acte d'huissier de justice constitue un vice de forme qui relève de l'article 114 précité, notamment en ce qui concerne l'exigence d'un grief.
La nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité portant sur la formalité substantielle de la date.
En l'espèce, l'acte de signification de la contrainte comporte une date antérieure (13 juillet 2000) à celle apparaissant sur cette contrainte (19 juin 2001).
Il est clairement établi qu'il s'agit d'une pure erreur matérielle dans la mesure où l'acte d'huissier de justice fait référence à la contrainte contestée en y indiquant également la date de celle-ci, à savoir le 19 juin 2001. Il est donc impossible matériellement de considérer que la signification de la contrainte soit intervenue en juillet 2000. Il s'agit bien du 13 juillet 2001, car délivrée à M. X...en personne, celui-ci en a fait opposition dans le délai imparti de quinze jours, par lettre déposée au secrétariat-greffe du T. A. S. S. rédigée en ces termes " Je viens ce jour, par la présente, faire opposition à la contrainte de la CARMF (Caisse Autonome de Retraite des Médecins de France), délivrée par Maître A... à la date du 13 juillet 2001 ".
M. X...ne peut aujourd'hui justifier d'un grief puisque par ses propos d'hier, il confirme l'existence de l'erreur matérielle.
Dès lors, il convient d'infirmer le jugement querellé et de reconnaître valide l'acte de signification comme ayant été délivré le 13 juillet 2001.
Sur la validité de la contrainte du 19 juin 2001 :
M. X...soutient que le montant réclamé de 98 595, 24 francs ne correspond pas aux cotisations dues au titre de l'exercice de 2000 et que la C. A. R. M. F. a pu inclure dans ce montant celles d'années antérieures susceptibles d'être prescrites.
La C. A. R. M. F. explique qu'à défaut de déclaration par le médecin de ses revenus de 1998 dans les délais prévus, il a été appliqué d'office à sa situation une cotisation forfaitaire au titre de l'année 2000 en application de l'article D. 642-3 du code de la sécurité sociale, de l'article 3 des statuts du régime complémentaire Vieillesse et de l'article 8 du décret 97. 379 du 21 avril 1997 modifié relatif à l'Allocation de Remplacement de Revenus (A. D. R.).
La cour constate que M. X...ne fait pas la preuve d'une déclaration de ses revenus de 1998, élément de référence pour la fixation de ses cotisations sociales de 2000.
Celles-ci ont été fixées par taxation d'office conformément aux dispositions des décrets applicables à chaque régime, décret no2000-1082 du 7 novembre 2000 pour le régime de retraite de base et les régimes de retraites complémentaires des professions libérales-décret no2000-256 du 20 mars 2000 pour le régime d'invalidité-décès-décret no99-238 du 26 mars 1999 pour le régime des allocations supplémentaires vieillesse (ASV)- décret du 24 juillet 2000 pour le régime de l'allocation de remplacement de revenu (ADR).
Dès lors, les cotisations de 2000 restent dues à concurrence de la somme de 98 595, 24 francs (15 030, 75 euros), sans préjudice des majorations de retard complémentaires qui continuent de courir jusqu'au règlement définitif du principal et des frais légaux.
La contrainte du 19 juin 2001 est ainsi validée.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :
Infirme le jugement du 24 juillet 2012 ;
Et statuant à nouveau,
Déclare valide la mise en demeure du 15 novembre 2000 ;
Dit que l'acte de signification du 13 juillet 2000 comporte une erreur matérielle en sa date qui n'a causé aucun grief au docteur Max X...;
Déclare en conséquence que cet acte de signification est intervenu le 13 juillet 2001 et non le 13 juillet 2000 ;
Déclare fondées les cotisations sociales fixées d'office pour l'exercice 2000 à la somme de 98 595, 24 francs (15 030, 75 euros), sans préjudice des majorations de retard complémentaires courant jusqu'au règlement définitif du principal et des frais légaux ;
valide en conséquence la contrainte du 19 juin 2001 ;
Condamne M. Max X...aux éventuels dépens ;
La greffièreLe président