FG/ JG
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 25 DU VINGT SEPT JANVIER DEUX MILLE QUATORZE
AFFAIRE No : 13/ 00027
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 24 octobre 2012, section activités diverses.
APPELANT
LE CENTRE DE GESTION ET D'ETUDES AGS (CGEA) DE FORT DE FRANCE Lotissement Dillon Stade 10 rue des Arts et Métiers 97200 FORT DE FRANCE Représenté par Me Isabelle WERTER-FILLOIS (TOQUE 8), avocat au barreau de GUADELOUPE
INTIMÉS
Monsieur Sébastien X......97170 PETIT BOURG Représenté par Me Elisabeth CALONNE (TOQUE 25), avocat au barreau de GUADELOUPE (bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2013/ 000298 du 21/ 03/ 2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASSE-TERRE)
Maître Marie Agnès Y..., ès qualités de mandataire liquidateur de GUAD @ NIME ... 97190 GOSIER Non comparante ni représentée
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 02 Décembre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, Mme Marie-Josée BOLNET, Conseillère, Mme Françoise GAUDIN, Conseillère. qui en ont délibéré.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 27 janvier 2014
GREFFIER : Lors des débats Madame Marie-Luce KOUAME, greffière.
ARRET :
Réputé contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative Principale, fft de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE :
Monsieur X...Sébastien a été engagé par l'association GUAD @ NIME, selon contrat de travail à durée déterminée dit « contrat d'accompagnement à l'emploi » du 2 mai 2010 au 30 avril 2012, en qualité d'ouvrier polyvalent, moyennant un salaire brut mensuel de 1. 151, 80 ¿, pour 130 heures par mois.
L'association GUAD @ NIME a fait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire par jugement du 15 décembre 2010 et Maître Marie-Agnès Y...a été désignée ès qualités de mandataire liquidateur ;
Par lettre recommandée du 5 janvier 2011, Me Y..., ès qualités, a rompu le contrat de travail de M. X..., au visa de l'article L. 640-1 du code de commerce.
Le 27 décembre 2010, M. X...a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé, de rappel de salaires et de dommages et intérêts pour rupture anticipée du CDD.
Par jugement du 24 octobre 2012, le conseil de prud'hommes de Pointe à Pitre a fixé la créance de M. X...sur la procédure collective de l'employeur aux sommes suivantes :
-3. 678, 33 ¿ au titre des rappels de salaires,-971, 02 ¿ au titre des indemnités de congés payés,-18. 504 ¿ au titre de l'indemnité pour rupture anticipée de contrat à durée déterminée,- l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé et du surplus de ses demandes.. Le CGEA de FORT DE FRANCE, délégation régionale de l'AGS, ayant régulièrement formé appel de cette décision le 19 novembre 2012, en sollicite la réformation et dans ses dernières conclusions demande à la cour de :
- réformer le jugement en toutes ses dispositions, contestant la réalité du contrat de travail en l'état des poursuites pénales engagées à l'encontre des dirigeants de l'association GUAD @ NIME pour des faits d'escroquerie en bande organisée par le recours à des contrats d'accompagnement à l'emploi frauduleux.- dire et juger que les dommages et intérêts pour remise tardive de l'attestation Pôle Emploi ne rentrent pas dans le cadre de la garantie de l'AGS,
- mettre hors de cause l'AGS en ce qui concerne les documents sociaux et l'astreinte.- dire et juger qu'aucune condamnation directe ne saurait intervenir à l'encontre de l'AGS,- déclarer la décision opposable au CGEA ACGS de FORT DE FRANCE dans les limites prévues aux articles L 3253-6 et L3253-8 du code du travail et les plafonds prévus aux articles L 3253-17 et D 3253-5 dudit code.
Maître Y..., ès qualités de liquidateur de l'association GUAD @ NIME n'a pas comparu, ni personne pour elle à l'audience de plaidoiries du 2 décembre 2013. Maître Y...a néanmoins été régulièrement convoquée par les soins du greffe pour l'audience du 13 mai 2013, par lettre recommandée du 21 février dont elle a signé l'accusé de réception le 25 février 2013 et a été avisée par lettre simple de la date d'audience des débats, conformément à l'article 947 du code de procédure civile.
Monsieur X...Sébastien demande à la cour de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a fixé ses créances à titre de rappel de salaires, indemnités de congés payés, et pour rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée et statuant à nouveau, fixer sa créance envers la procédure collective de ladite association à la somme de 1266, 98 ¿ à titre d'indemnité de préavis et celle de 6. 910, 80 ¿ à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé, outre 3. 000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour plus ample exposé, la cour renvoie aux écritures déposées par chaque partie et réitérées oralement à l'audience.
MOTIFS
Sur le rappel de salaire et accessoires
Attendu que le salarié réclame des salaires manquants durant la période contractuelle et des indemnités de congés payés y afférentes. Que le CGEA conteste la réalité du contrat de travail entre M. X...et l'association GUAD @ NIME en arguant du fait notamment que de son propre aveu, M. X...était mis à la disposition d'une autre association et que les dirigeants de l'association font l'objet d'une procédure pénale en cours pour des faits d'escroquerie en bande organisée par le recours à des contrats d'accompagnement à l'emploi frauduleux.
Que cependant, compte tenu de la conclusion d'un contrat de travail écrit, d'une déclaration d'embauche de M. X...et de la délivrance de bulletins de salaire accompagnés d'un travail effectif par ce dernier, il appartient au CGEA de démontrer le caractère fictif du contrat de travail apparent, ce qu'il ne fait pas. Qu'en outre, le salarié ne saurait être rendu responsable ni complice des agissements frauduleux de son employeur. Que les pièces du dossier (bulletins de salaire, relevés de compte du salarié) démontrent que M. X...n'a pas perçu l'intégralité des salaires tels qu'ils ressortent des bulletins de salaire produits et dès lors, c'est à juste titre qu'il peut prétendre à un rappel de salaire sur la base de 130 heures par mois, lequel a été justement chiffré à la somme de 3. 678, 33 ¿ bruts, à titre de solde de salaires, outre l'incidence congés payés sur la période travaillée de 971, 02 ¿.
Qu'il y a lieu à confirmation du jugement entrepris de ces chefs.
Sur la rupture du contrat de travail
Attendu qu'il est constant que les parties étaient liées par un contrat à durée déterminée dont la rupture avant l'échéance du terme conformément aux dispositions de l'article L. 1243-1 du code du travail qui lui sont applicables ne peut intervenir, à défaut d'accord des parties, qu'en cas de faute grave ou de force majeure.
Attendu que le contrat du 2 mai 2010 a été rompu avant son terme par lettre du mandataire judiciaire non motivée en date du 5 janvier 2011 au visa de l'article L. 640-1 du code commerce, soit en conséquence de la liquidation judiciaire de l'association employeur.
Que le motif économique invoqué par le représentant de l'employeur dans la lettre de rupture ne constitue pas un cas de rupture anticipée autorisé par le texte susvisé.
Que dès lors, aucune faute grave du salarié n'est caractérisée et il résulte de ce qui précède que la rupture anticipée est imputable à l'employeur dès lors que ce dernier n'a pas versé les salaires et congés payés dus à son salarié et de par ses agissements frauduleux, est à l'origine de la liquidation judiciaire de l'association.
Sur l'indemnisation
Que selon l'article L. 1243-4 du code du travail, la méconnaissance par l'employeur des dispositions de l'article L1243-2, ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts d'un montant au moins égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme du contrat, sans préjudice de l'indemnité de fin de contrat prévue à l'article L1243-8 dudit code ;
Qu'il convient donc, confirmant le jugement de ce chef, de fixer la créance de M. X...à la somme de 18. 504 ¿ à titre d'indemnisation pour rupture anticipée de son contrat de travail à durée déterminée. Qu'en revanche, cette indemnité est forfaitaire et exclusive d'une indemnité de préavis. Que la demande à ce titre sera rejetée.
Sur le travail dissimulé
Attendu qu'en application de l'article L. 8223-1 du code du travail le salarié auquel un employeur a recours en violation des dispositions de l'article L 8221-3 du code du travail (travail dissimulé par dissimulation d'activité) ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 (travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié), a le droit en cas de rupture de la relation de travail à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire, à moins que l'application d'autres règles légales ou de stipulations conventionnelles ne conduisent à une solution plus favorable ;
Attendu qu'en premier lieu, il doit être relevé que l'article L. 8221-5 susvisé (ancien article L 324-10) dans sa rédaction applicable au présent litige ne mentionne pas le cas de ne pas avoir accompli auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales les déclarations relatives aux salaires ; que cette disposition qui constitue le paragraphe no3 de l'article L. 8221-5 n'a été ajouté dans cet article que par la loi 2010-1594 du 20 décembre 2010 (article 40 J. O du 21) soit postérieurement à la situation en cause.
Qu'au demeurant, le salarié reproche à l'association GUAD @ NIME de ne pas avoir déclaré son salaire de mars 2010 au 31 décembre 2010 et de ne pas lui avoir payé les derniers salaires, en invoquant l'article L. 8221-3 du code du travail.
Que cet article vise effectivement le fait de n'avoir pas procédé aux déclarations qui doivent être faites aux organismes de protection sociale et à l'administration fiscale mais exige l'élément intentionnel en ce sens que le travail dissimulé ne peut être retenu que s'il est établi que l'employeur s'est soustrait intentionnellement à cette obligation.
Que l'existence dudit élément intentionnel relève de l'appréciation du juge du fond, lequel se détermine au vu des circonstances du cas d'espèce et des pièces versées aux débats.
Que le salarié produit, outre son contrat de travail à durée déterminée, ses bulletins de salaire sur ladite période de mars 2010 à décembre 2010.
Qu'un relevé de carrière, n'ayant qu'une valeur indicative, est provisoire et ne crée pas de droits au profit de celui envers qui il est établi.
Que lesdits relevés sont parfaitement régularisables au regard des pièces détenues par M. X...(contrat de travail et bulletins de salaire).
Qu'il n'est pas établi en l'espèce que l'association GUAD @ NIME se soit effectivement abstenue de procéder à la déclaration des salaires sur ladite période, la procédure pénale étant toujours en cours, alors qu'elle connaissait des difficultés financières ce qui la conduit à une liquidation judiciaire.
Que les seules pièces produites par M. X...sont insuffisantes pour établir une présomption de travail dissimulé et il n'appartient pas au liquidateur de démontrer le caractère non intentionnel. Que le fait que ce dernier ne soit pas en mesure de produire les déclarations trimestrielles qui ont pu être faites auprès de l'URSSAF, compte tenu du délai écoulé et de la procédure pénale en cours, ne permet pas d'établir que l'employeur ait voulu se soustraire à l'époque à son obligation de déclaration.
Que dans ces conditions, les conditions de l'article L. 8223-1 susvisé n'étant pas remplies, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. X...de sa demande d'indemnité de ce chef.
Que compte tenu de la situation économique de l'employeur, il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Attendu que les dépens sont frais privilégiés de la procédure collective.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant par arrêt réputé contradictoire à l'égard de Me Y..., ès qualités.
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Rejette toute autre demande.
Dit les dépens frais privilégiés de la procédure collective.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,