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20/06/2016 | FRANCE | N°15/01563

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 20 juin 2016, 15/01563


VS-BR
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 202 DU VINGT JUIN DEUX MILLE SEIZE

AFFAIRE No : 15/ 01563
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 29 juillet 2014- Section Industrie.
APPELANT
Monsieur Ludovic X...... 56160 LOCMALO Représenté par Maître Céline CARSALADE (Toque 57) substituée par Maître SAINT-CLEMENT, avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉE
SARL LAPLACES SERVICES Grand Cul de sac C/ o SCI JELIO 97133 SAINT BARTHELEMY Représentée par Maître Stéphanie BRINGAND-VALORA (To

que 82), avocat au barreau de la GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des di...

VS-BR
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 202 DU VINGT JUIN DEUX MILLE SEIZE

AFFAIRE No : 15/ 01563
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 29 juillet 2014- Section Industrie.
APPELANT
Monsieur Ludovic X...... 56160 LOCMALO Représenté par Maître Céline CARSALADE (Toque 57) substituée par Maître SAINT-CLEMENT, avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉE
SARL LAPLACES SERVICES Grand Cul de sac C/ o SCI JELIO 97133 SAINT BARTHELEMY Représentée par Maître Stéphanie BRINGAND-VALORA (Toque 82), avocat au barreau de la GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 avril 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard Rousseau, président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, Mme Marie-Josée Bolnet, conseiller, Mme Françoise Gaudin, conseiller,

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 20 juin 2016.
GREFFIER Lors des débats : Mme Valérie Souriant, greffier.
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Mme Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

******

Faits et procédure : Par contrat de chantier à durée indéterminée, M. X...a été engagé par la Société LAPLACES SERVICES en qualité de mécanicien chauffeur à compter du 12 mars 2007. Suite à un entretien préalable fixé au 20 décembre 2012, M. X...se voyait notifier son licenciement pour faute lourde par courrier du 28 décembre 2012. Le 15 mars 2013, M. X...saisissait le conseil de prud'hommes de Basse-Terre aux fins de contester son licenciement et obtenir indemnisation. Par jugement du 29 juillet 2014, la juridiction prud'homale déboutait M. X...de ses demandes. Par déclaration du 22 décembre 2014, M. X...interjetait appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 15 novembre 2014. Néanmoins M. X...résidant à l'époque à Saint-Barthélémy, il bénéficiait d'une prorogation de délai d'un mois pour faire appel. Son appel est donc recevable. **** Par conclusions notifiées à la partie adverse le 5 mars 2015, auxquelles il a été fait référence à l'audience des débats, M. X...sollicite la réformation du jugement déféré et demande paiement des sommes suivantes :-4000 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,-8000 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés,-24 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-10 000 euros pour préjudice distinct.-3000 euros d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

M. X...fait valoir que les juges prud'homaux ont commis une erreur de droit en retenant l'insuffisance professionnelle comme motif du licenciement pour faute grave.
Il expose qu'aucun élément ne vient prouver les accusations de l'employeur lui reprochant un état d'ébriété, et que les attestations produites par l'employeur émanent de salariés sous lien de subordination à l'égard de ce dernier, ce qui leur retire toute crédibilité.
Il fonde sa demande d'indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, et fait état d'un préjudice distinct en invoquant des conditions humiliantes entourant son licenciement puisqu'il a été accusé d'ébriété. Il soutient par ailleurs qu'il percevait entre 1000 et 1600 euros en espèces rémunérant des heures de travail ne figurant pas sur les bulletins de salaires, ce qui serait constitutif de travail dissimulé.
****

Par conclusions notifiées à la partie adverse le 11 juin 2015, auxquelles il a été fait référence à l'audience des débats, la Société LAPLACES SERVICES sollicite la confirmation de la décision entreprise en toutes ses dispositions et réclame paiement de la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La Société LAPLACES SERVICES soutient que la faute lourde reprochée à M. X...est caractérisée puisqu'il a foncé avec un tractopelle sur son patron, Gilbert A...et a déversé sur lui le contenu de son godet rempli de remblai, et a ajouté un rire insultant à une conduite démente de l'engin qui lui était confié. Elle relève que conscient de son comportement fautif, M. X...a sollicité la mise en place d'une procédure de rupture conventionnelle, laquelle n'a pas été acceptée par l'employeur compte tenu de la gravité des faits reprochés au salarié.
La Société LAPLACES SERVICES rappelle que M. X...a déjà fait l'objet par le passé de trois avertissements, mais qu'il a persisté dans sa volonté de nuire à son employeur.
La Société LAPLACES SERVICES conteste les faits de travail dissimulé et relève qu'aucune demande chiffrée n'est présentée à ce sujet.
****
Motifs de la décision :
Dans sa lettre de licenciement du 28 décembre 2012, l'employeur motive sa décision de licencier M. X...pour faute lourde de la façon suivante :
« Malgré un avertissement écrit le 21/ 12/ 2011 et de multiples mises en garde, vous avez persisté à vous présenter au travail dans un état très proche de l'état d'ébriété et nous ne pouvons vous laisser conduire des engins de terrassement dans cet état.
Le mardi 11 décembre 2012 à 15h30, sur le chantier situé à Saint-Jean, comme vous l'avez reconnu, votre état était tel que vous avez déversé un godet plein de terre sur M. Gilbert A...…. en trouvant très amusant cet accident qui aurait pu avoir des conséquences dramatiques. »
Il y a lieu de relever que M. X...ne donne pas de version personnelle de l'incident du 11 décembre 2012, et ne donne aucune explication sur ce qui s'est passé ce jour-là.
Dans son attestation en date du 19 décembre 2012, M. Domingos B...C..., lui-même chauffeur d'engin au sein de la Société LAPLACES SERVICES, déclare que lors de sa mission d'enrochement et de nivellement qu'il effectuait le 11 décembre 2012 sur le chantier de la « plaine de jeux » à Saint-Jean, où Ludovic X...était chargé de le ravitailler en roches et remblai par tractopelle, il a vu le déversement d'un godet de remblai par M. X...sur les jambes de M. Gilbert A..., enterrant celui-ci à mi-cuisse. Surpris par ce geste, il est descendu de son engin pour porter de l'aide à son patron.
Dans son attestation du 17 décembre 2012, M. Manuel B...D..., déclare qu'il était occupé à prendre des points de niveau quand soudain il a vu que le tractopelle que conduisait M. X...fonçait brutalement sur M. Gilbert A...son patron, et a déversé un godet de remblai sur les jambes de celui-ci, ajoutant qu'après ces faits, M. X...se moquait de lui en riant fortement.
Ces deux attestations précisent et concordantes, mais néanmoins rédigées de façons différentes, permettent d'établir la réalité des faits.
Il est vrai que par le passé M. X...a déjà montré un comportement inquiétant. Ainsi dans un courrier portant avertissement, en date du 21/ 12/ 2011, il était reproché à M. X...d'avoir, avec son engin, abimé une partie de la gouttière mise en place récemment sur le bâtiment d'un client, le responsable du chantier ayant fait part de son mécontentement, soulignant que la marge de manœuvre était d'environ 8 mètres de large pour un gabarit de l'engin de 2, 30 mètres.
Peu avant, le 16 novembre 2012, un client s'était plaint des dégâts occasionnés à son portail par la pelle mécanique conduite par M. X..., interdisant la fermeture de la propriété, l'ingénieur, maître d'œuvre, faisant savoir à la Société LAPLACES SERVICES, qu'à l'avenir il n'était pas souhaitable que ce chauffeur fasse partie de ceux désignés pour être en mission sur ses chantiers.
En début d'année, le 1er février 2012, au cours d'une mission sur le réseau routier, un câble d'alimentation électrique enterré avait été sectionné lors de la fouille d'une tranchée, ce qui a entraîné la mise hors tension d'une zone, celle dite « Bois-neuf », l'employeur attirant l'attention de M. X...dans son courrier du 16 mars 2012, sur le danger encouru par celui-ci et par les tiers.
Il apparaît ainsi, que malgré les avertissements qui lui ont été adressés au cours de l'année 2012, M. X...a fait preuve d'une dangerosité certaine et s'accroissant, puisqu'il a enseveli les jambes de son employeur avec son tractopelle, et n'a nullement pris conscience de la gravité de son comportement en tournant en dérision ce dernier.
Compte tenu de la succession d'incidents, révélant pour certains, et notamment le dernier, un comportement dangereux de la part de M. X..., ce dernier ne prenant manifestement pas conscience de la gravité de son comportement, l'employeur était fondé à rompre immédiatement la relation de travail, le comportement de M. X...ne permettant plus le maintien de celui-ci au sein de l'entreprise, la sécurité des matériels et des personnes devant être impérativement préservée.
Toutefois les fautes commises par M. X...ne caractérisent pas l'intention de nuire à l'entreprise, l'employeur mettant sur le compte de l'ébriété, le comportement dangereux de M. X....
En conséquence la faute grave de M. X...sera retenue, à l'exclusion de la faute lourde.
Le comportement dangereux et néanmoins désinvolte de M. X...ne pouvant être mis que sur le compte d'un état d'ébriété, comme l'a relevé l'employeur, le salarié est mal fondé à reprocher le caractère humiliant des mentions figurant sur la lettre de licenciement. Il sera débouté de sa demande d'indemnisation de préjudice distinct.
La production de bordereaux de versements d'espèces sur le compte bancaire de M. X...est insuffisante pour démontrer l'existence de faits de travail dissimulé. Au demeurant aucune demande chiffrée n'est présentée à ce titre.
M. X...demande une somme globale de 8000 euros « au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et aux congés payés » sans distinguer le montant réclamé pour les congés payés.
Si la faute grave est privative de l'indemnité compensatrice et de l'indemnité de licenciement, elle ne saurait priver le salarié de l'indemnité compensatrice de congés payés.
Il résulte des mentions figurant sur l'attestation Pôle Emploi établie par l'employeur que M. X...avait droit à 28 jours de congés payés au moment de la rupture du contrat de travail. L'indemnité correspondante devant être prise en charge par la Caisse de congés payés du bâtiment et des travaux publics.
L'équité n'implique pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs,

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme le jugement entrepris,
Y ajoutant,
Dit que l'indemnité compensatrice de congés payés prise en charge par la Caisse de congés payés du bâtiment et des travaux publics, correspond à 28 jours ouvrables,
Dit que les dépens seront supportés par moitié par les parties,
Déboute les parties de toutes conclusions plus amples ou contraires.
Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15/01563
Date de la décision : 20/06/2016
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2016-06-20;15.01563 ?
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