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19/07/2022 | FRANCE | N°22/00075

France | France, Cour d'appel de Bastia, Se. référés, 19 juillet 2022, 22/00075


ORDONNANCE N° 38



du 19 JUILLET 2022



R.G : N° RG 22/00075 - N° Portalis DBVE-V-B7G-CDLL



19/00076

07 décembre 2021



S.A.R.L. LES POULETS BASTIAIS



C/



[R]

S.E.L.A.R.L. ETUDE BALINCOURT























































COUR D'APPEL DE BASTIA







ORDONNANCE DE REFERE


>DU



DIX NEUF JUILLET DEUX MILLE VINGT DEUX





Audience publique tenue par M. François RACHOU, Premier président, assisté de Madame Vykhanda CHENG, lors des débats et Françoise COAT lors du prononcé,





DEMANDERESSE :



S.A.R.L. LES POULETS BASTIAIS

[Adresse 5]

[Localité 3]



assistée de Me Claudia LUISI, avocat au barreau de B...

ORDONNANCE N° 38

du 19 JUILLET 2022

R.G : N° RG 22/00075 - N° Portalis DBVE-V-B7G-CDLL

19/00076

07 décembre 2021

S.A.R.L. LES POULETS BASTIAIS

C/

[R]

S.E.L.A.R.L. ETUDE BALINCOURT

COUR D'APPEL DE BASTIA

ORDONNANCE DE REFERE

DU

DIX NEUF JUILLET DEUX MILLE VINGT DEUX

Audience publique tenue par M. François RACHOU, Premier président, assisté de Madame Vykhanda CHENG, lors des débats et Françoise COAT lors du prononcé,

DEMANDERESSE :

S.A.R.L. LES POULETS BASTIAIS

[Adresse 5]

[Localité 3]

assistée de Me Claudia LUISI, avocat au barreau de BASTIA

DEFENDEURS :

Monsieur [X] [R]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

assisté de Me Alexandra GOMIS, avocat au barreau de BASTIA

S.E.L.A.R.L. ETUDE BALINCOURT es qualité de mandataire judiciaire de la SARL les poulets bastiais, société d'exercice libéral à responsabilité limitée au capital de 10 000 € immatriculée au RCS de Nimes sous le N° 82479728615, représentée par Me Frederic TORELLI et Me Guillaume LARCENA

[Adresse 1]

[Localité 2]

DEBATS :

A l'audience publique du 05 juillet 2022,

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 juillet 2022

ORDONNANCE :

Contradictoire,

Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signée par M. François RACHOU, Premier président, et par Mme Françoise COAT, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par jugement du 7 décembre 2021, le conseil des prud'hommes de Bastia a :

'dit le licenciement de Monsieur [R] dépourvu de cause réelle et sérieuse

'condamné la SARL les poulets Bastiais aux sommes suivantes :

. Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 25'380 €

. Indemnité spéciale de licenciement : 23'558,57 €

. Indemnité compensatrice de préavis : 4 230 €

. Indemnité compensatrice de congés payés sur préavis : 423 euros

. Indemnité de congés payés : 947 euros

'condamné la SARL les poulets bastiais à remettre à Monsieur [X] [R] un bulletin de salaire rectifié,l' attestation pôle emploi rectifiée et un certificat pour la caisse des congés payés rectifié

'ordonné que la présente décision soit assortie de l'exécution provisoire

'condamné la SARL les poulets Bastiais à payer à Monsieur [X] [R] la somme de 500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

'condamné la SARL les poulets Bastiais aux entiers dépens

Selon déclaration du 29 décembre 2021, la SARL les poulets bastiais a interjeté appel.

Par acte d' huissier du 28 février 2022, la SARL les poulets bastiais a fait assigner devant nous Monsieur [X] [R] aux fins de :

A titre principal :

'arrêter l'exécution provisoire de la totalité du jugement du conseil des prud'hommes de Bastia du 7 décembre 2021

A titre infiniment subsidiaire :

'l'autoriser à consigner les sommes entre les mains d'un séquestre

'dire que chacun conservera ses propres dépens

Par conclusions reprises à l'audience, la SARL les poulets bastiais a maintenu ses demandes.

Après avoir rappelé les faits et la procédure la SARL les poulets bastiais fait valoir que le jugement du 7 décembre 2021 bénéficie à la fois de l'exécution provisoire de plein droit et de l'exécution provisoire par octroi en application de l'article 517 du code de procédure civile.

Sur l'arrêt de l'exécution provisoire de plein droit'celle-ci portant sur la somme globale de 29'658,57 euros'et au vu des dispositions de l'article 514'3 du code de procédure civile, elle soutient que les deux conditions cumulatives exigées sont réunies en l'espèce :

.Sur l'existence de moyens sérieux d'annulation ou de réformation du jugement.

Sur le bien-fondé du licenciement : Monsieur [X] [R] a été licencié, à bon droit, pour inaptitude non professionnelle, en l'absence de contestation de la consolidation tant de l'accident du travail (au 31 mai 2007) que de la maladie professionnelle (au 23 septembre 2017)

.ur le respect de la recherche de reclassement : malgré les recherches faites, aucun poste compatible avec l'état de santé du salarié n'existait

Sur les conséquences manifestement excessives : la situation de financière de la société s'est aggravée postérieurement à la décision de première instance, le paiement des condamnations entraînerait l'état de cessation des paiements de la société.

Sur l'arrêt de l'exécution provisoire facultative'celle-ci portant sur la somme globale de 25'880 €', elle réitère ses arguments sur l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation en y ajoutant, quant aux conséquences manifestement excessives, l'absence de garanties de représentation de la part de Monsieur [X] [R] en cas d'infirmation de la décision.

Elle conteste la qualité de propriétaire de ce dernier, celui-ci ayant fait l'objet d'une expropriation d'un immeuble rural situé à [Localité 3] selon arrêt du 22 mars 2020 de la cour d'appel de Bastia.

Elle précise que les deux véhicules dont il propriétaire ont une très faible valeur en raison de leur ancienneté et de leur vétusté et que ,vivant en France depuis 35 ans, il ne justifie d'aucune épargne

Par conclusions reprises à l'audience, Monsieur [X] [R] nous demande de :

A titre principal :

'déclarer irrecevable la demande d'arrêt d'exécution provisoire

A titre subsidiaire :

'rejeter la demande d'arrêt d' exécution provisoire

A titre infiniment subsidiaire :

'rejeter la demande d'aménagement d'exécution provisoire

en tout état de cause

'condamner la SARL les poulets bastiais à lui payer la somme de 3000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

'la condamner aux entiers dépens

Après avoir rappelé les faits et la procédure, il soutient d'abord, à titre principal, l'irrecevabilité de la demande estimant que les conditions cumulatives exigées par l'article 514'trois ne sont pas réunies

A ce titre, il fait valoir que :

Sur l'absence de moyens sérieux d'annulation de réformation de la décision

Sur le caractère professionnel de l'inaptitude :

l'inaptitude relevée par le médecin du travail selon avis du 6 février 2019 provient à la fois des séquelles de son accident de travail et de sa maladie professionnelle ;

Les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident de travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quelle que soit le moment où elle est constatée et invoquée a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement ; en l'espèce,tant les décisions de la CPAM que les restrictions émises par le médecin du travail confortentselon lui le caractère professionnel de l'inaptitude, l'employeur ne pouvant l' ignorer.

Sur la violation de l'obligation de reclassement :

l'employeur ne justifie d'aucune recherche effective de reclassement, les attestations produites étant contestables et les offres de reclassement devant être effectuées par écrit. Au surplus, les délégués du personnel n'ont pas été consultés.

Sur l'absence de conséquences manifestement excessives :

la SARL les poulets bastiais n'a fait valoir aucune observation sur l'exécution provisoire en première instance et elle fait état de difficultés financières préexistantes à la décision du CPH.

A titre subsidiaire, il estime que l'état de cessation de paiement dont il est fait état n'est en rien caractérisé.

Enfin, il conteste l'absence de garanties de représentation en cas d'infirmation de la décision dans la mesure où il vit en France depuis 35 ans, possède deux véhicules et est bien propriétaire d'un logement sur la commune de [Localité 3], l'expulsion citée concernant un morceau de terrain pour la somme de 16'000 €.

Par acte d' huissier du 22 juin 2022, la SARL les poulets bastiais a fait assigner devant nous la Selarl Etude Balincourt es qualité de mandataire judiciaire de la SARL les poulets bastiais placée en redressement judiciaire selon jugement du tribunal de commerce de Bastia en date du 31 mai 2022 aux fins de :

'juger que la Selarl Etude Balincourt es qualité de mandataire judiciaire de la SARL les poulets bastiais doit intervenir dans la procédure RG 22/75

'joindre l'instance introduite par le présent acte à l'instance pendante devant le Premier président et enregistrée sous le numéro 22/75

'juger que l'arrêt à intervenir sera déclaré commun et opposable la Selarl Etude Balincourt es qualité de mandataire judiciaire de la SARL les poulets bastiais

la Selarl Etude Balincourt es qualité a été assignée régulièrement ; elle n'est ni présente ni représentée. La présente décision sera réputée contradictoire

SUR CE,

Il y a lieu préalablement, pour une bonne administration de la justice, de joindre le dossier RG 22/119 à RG 22/75 et de conserver ce seul numéro

Sur l'irrecevabilité soulevée :

Aux termes de l'article R. 1474'28 du code du travail, « à moins que la loi ou les règlements n'en disposent autrement, les décisions du conseil des prud'hommes ne sont pas exécutoires de droit à titre provisoire. Le conseil de prud'hommes peut ordonner l'exécution provisoire de ses décisions.

Sont de droit exécutoires à titre provisoire, notamment :'

3° le jugement qui ordonne le paiement des sommes au titre des rémunérations indemnités mentionnées au deuxième de l'article R. 1454'14, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire. Cette moyenne est mentionnée dans le jugement »

Aux termes de l'article R. 1454'14 du même code, «'

a) le versement de provisions sur les salaires et accessoires du salaire ainsi que les commissions

b) le versement de provisions sur les indemnités de congés payés, de préavis de licenciement

c) le versement de l'indemnité compensatrice et de l'indemnité spéciale de licenciement en cas d'inaptitude médicale consécutive à un accident du travail ou à une maladie professionnelle mentionnée à l'article L. 1226'14

d) le versement de l'indemnité de fin de contrat prévu à l'article L. 1243'8 et de l'indemnité de fin de mission mentionnait l'article L. 1251'32' »

Dès lors, comme il est relevé, le jugement du conseil des prud'hommes en date du 7 décembre 2021 bénéficiait à la fois de l'exécution provisoire de droit pour la somme de 29'658,57 euros et de l'exécution provisoire ordonnée pour la somme de 25'880 €

Sur l'exécution provisoire de droit :

Aux termes de l'article 514'3 du code de procédure civile, « en cas d'appel, le Premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision première instance' »

Les trois conditions sont cumulatives.

En l'espèce, la SARL les poulets bastiais n'a pas fait valoir d'observation particulière portant sur l'exécution provisoire devant le juge de première instance.

Elle soutient l'existence de conséquences manifestement excessives postérieures à la décision tenant à sa situation financière « extrêmement fragilisée qui s'est aggravée postérieurement à la décision première instance du 29 décembre 2021 »

Elle expose, à ce titre, un déficit qu'elle présentait au 30 septembre 2021 et un solde négatif du montant de ces capitaux propres à cette même date sachant que depuis la situation s'est aggravée.

Elle ajoute qu'elle connaît des difficultés financières depuis 2017 qui se sont aggravées de puis la crise sanitaire de la Covid'19 tout en faisant état de pertes nettes pour les années 2019 (-363'750 €) et l'année 2020 (-58'320 €), une procédure d'alerte ayant été alors émise par le commissaire aux comptes auprès du tribunal de commerce de Bastia selon rapport du 20 février 2019

Dès lors, il résulte de ces éléments que les conséquences manifestement excessives dont il est fait mention ne sont pas révélées postérieurement à la décision rendue en première instance, celles-ci trouvant leur origine, selon les propres pièces produites dans une situation financière particulièrement fragile remontant aux années 2019' 2020'2021.

En conséquence, la demande d'arrêt d'exécution provisoire de droit doit être déclarée irrecevable, la condition exigée par le texte cité n'étant pas remplie

Sur l'exécution provisoire ordonnée :

Aux termes de l'article 517'1 du code de procédure civile, « lorsque l'exécution provisoire a été ordonnée, elle peut être arrêtée, en cas d'appel, que par le Premier président et dans les cas suivants :

- 1° si elle est interdite par la loi

- 2° lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation de la décision et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ; dans ce dernier cas, le Premier président peut aussi prendre des mesures prévues aux articles 517 et 518 à 522' »

Sur l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation de la décision, il est soutenu que l'employeur a, à bon droit, licencié Monsieur [X] [R] pour inaptitude non professionnelle, celui-ci n'ayant pas contesté sa consolidation tant pour l'accident de travail que pour la maladie professionnelle dont il a été l'objet.

Toutefois, il apparaît, au vu des pièces versées par Monsieur [X] [R], que celui-ci, s'il n'a pas repris son travail à la suite des décisions de la CPM ayant considéré que son état de santé s'était consolidé tant pour l'accident de travail du 10 juillet 2015 que pour la maladie professionnelle du 1er juin 2017 au 3 février 2019, a bénéficié d'arrêts de travail pour maladie en mentionnant, sur les arrêts travail délivrés, l'impotence fonctionnelle et les douleurs de la main droite.

Dès lors, il ne peut être contesté que l'inaptitude de l'intéressé avait, au moins partiellement, une origine professionnelle se rattachant à l'accident de travail du 10 juillet 2015, les séquelles de celui-ci étant expressément mentionnées dans les arrêts de travail délivrés après consolidation.

En conséquence,le caractère sérieux du moyen n'est pas établi et dès lors la condition exigée n'est pas réunie.

Il en est de même quant à l'obligation de reclassement, les offres n'ayant pas été effectuées par écrit et les délégués du personnel n'ayant pas été consultés

Les conditions étant cumulatives, il n'y a pas lieu d'examiner celle relative aux conséquences manifestement excessives.

En conséquence, la demande d'arrêt d'exécution provisoire ordonnée doit être rejetée

Sur la demande de consignation :

La demande d'aménagement d'exécution provisoire ordonnée par le juge n'est pas subordonnée à la condition que cette exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

Il s'agit d'un pouvoir discrétionnaire du premier président.

En l'espèce, au vu du montant de la somme à laquelle est attachée l'exécution provisoire ordonnée, il y a lieu de faire droit à la demande de consignation selon les modalités arrêtées au présent dispositif.

Sur les autres demandes :

L'équité commande qu'il soit alloué à Monsieur [X] [R] la somme de 2000 €, au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Les dépens seront supportés par la SARL les poulets bastiais

PAR CES MOTIFS :

Nous, François RACHOU, Premier président, statuant publiquement, réputée contradictoire, en matière de référé,

Ordonnons la jonction des dossiers RG/22 119 et RG 22/75, seul ce dernier numéro étant conservé.

Déclarons irrecevable la demande d'arrêt d'éxecution provisoire de droit de la SARL Les poulets Bastiais.

Déboutons la SARL les poulets bastiais de sa demande d'arrêt d'exécution provisoire ordonnée.

Ordonnons la consignation de la somme de 25'880 €entre les mains du président de la Carpa du barreau de l'ordre des avocats du barreau de Bastia

Déboutons les parties du surplus de leurs demande.

Condamnons la SARL les poulets bastiais à payer à Monsieur [X] [R] la somme de 2000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Déclarons la présente ordonnance opposable à la Selarl Etude Balincourt ès qualité de mandataire judiciaire de la SARL les poulets bastiais

Condamnons la SARL les poulets bastiais aux dépens

LE GREFFIER, LE PREMIER PRESIDENT,

Françoise COAT François RACHOU


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Se. référés
Numéro d'arrêt : 22/00075
Date de la décision : 19/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-19;22.00075 ?
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