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16/11/2022 | FRANCE | N°19/00204

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre sociale tass, 16 novembre 2022, 19/00204


ARRET N°

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16 Novembre 2022

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R N° RG 19/00204 - N° Portalis DBVE-V-B7D-B4PY

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CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA HAUTE CORSE

C/

[K] [B]

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Décision déférée à la Cour du :

17 juin 2019

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BASTIA

19/00256

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copie exécutoire



le :r>


à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUBLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE BASTIA



CHAMBRE SOCIALE





ARRET DU : SEIZE NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX





APPELANTE :



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA HAUTE CORSE...

ARRET N°

-----------------------

16 Novembre 2022

-----------------------

R N° RG 19/00204 - N° Portalis DBVE-V-B7D-B4PY

-----------------------

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA HAUTE CORSE

C/

[K] [B]

----------------------

Décision déférée à la Cour du :

17 juin 2019

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BASTIA

19/00256

------------------

copie exécutoire

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUBLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU : SEIZE NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

APPELANTE :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA HAUTE CORSE

Service Contentieux

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Valérie PERINO-SCARCELLA, avocat au barreau de BASTIA

INTIME :

Monsieur [K] [B]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

Représenté par Me Laure-Anne THIBAUDEAU, substituée par Me SANTONI Jean-Aurélien, avocats au barreau de BASTIA,

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 décembre 2021 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur JOUVE, Président de chambre, et Madame COLIN, conseillère, chargés du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur JOUVE, Président de chambre,

Madame COLIN, Conseillère

Madame BETTELANI, Vice-présidente placée auprès Monsieur le premier président

GREFFIER :

Madame CARDONA, Greffière lors des débats.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 06 avril 2022, puis prorogé au 22 juin 2022, 21 septembre 2022 et 16 novembre 2022,

ARRET

- Contradictoire

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe

- Signé par Monsieur JOUVE, Président de chambre et par Madame CARDONA, Greffière présente lors de la mise à disposition de la décision.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Le 16 janvier 2018, la société [5], exploitant le supermarché Casino de [Localité 3], a déclaré auprès de la caisse primaire d'assurance maladie (C.P.A.M.) de la Haute-Corse un accident survenu au préjudice de M. [K] [B], ouvrier professionnel de fabrication en boucherie.

Le même jour, la caisse a été destinataire d'un certificat médical initial daté du 12 janvier 2018 et faisant état d'un syndrome coronarien aigu à troponine positive.

À l'issue d'une instruction diligentée par voie de questionnaires, la C.P.A.M. a notifié à M. [B], le 12 mars 2018, son refus de prendre en charge, au titre de la législation relative aux risques professionnels, l'accident déclaré au motif d'une 'absence [de] fait accidentel survenu à l'occasion du travail'.

Cette notification a été contestée par l'assuré le 22 mai 2018 devant la commission de recours amiable (C.R.A.) de la caisse.

Par requête du 06 juillet 2018, M. [B], en présence d'une décision implicite de rejet de la C.R.A., a porté sa contestation devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Haute-Corse.

Par jugement contradictoire du 17 juin 2019, cette juridiction - devenue pôle social du tribunal de grande instance de Bastia, a :

- dit que le fait accidentel du 07 janvier 2018 était un accident du travail ;

- dit que cet accident du travail devait être pris en charge par la C.P.A.M. de la Haute-Corse au titre de la législation sur les risques professionnels ;

- débouté les parties pour le surplus et autres demandes ;

- condamné la C.P.A.M. de la Haute-Corse à payer à M. [B] la somme de 700 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par lettre recommandée adressée au greffe de la cour le 18 juillet 2019, la C.P.A.M. a relevé appel à l'encontre de l'entier dispositif de ce jugement, qui lui avait été notifié le 19 juin 2019.

À l'issue de multiples renvois, l'affaire a été appelée à l'audience du 14 décembre 2021, au cours de laquelle les parties, non-comparantes, étaient représentées.

EXPOSE DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Au terme de ses écritures, réitérées et soutenues oralement à l'audience, la C.P.A.M. de la Haute-Corse, appelante, demande à la cour de :

'Décerner acte à la concluante de ce qu'elle a fait une exacte application des textes en vigueur,

Infirmer le jugement du 17 juin 2019 dans toutes ses dispositions,

Confirmer la notification du 12 mars 2018 refusant la prise en charge des faits survenus le 07 janvier 2018,

Condamner Monsieur [B] à payer à la caisse la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du CPC.'

Au soutien de ses prétentions et à titre principal, l'appelante affirme notamment que M. [B] ne démontre pas que la lésion subie est apparue au temps et au lieu du travail, de sorte qu'il ne peut bénéficier de la présomption d'imputabilité de l'accident au travail.

Au terme de ses conclusions, réitérées et soutenues oralement à l'audience, M. [K] [B], intimé, demande à la cour de :

'CONFIRMER le jugement du 17 juin 2019 par le Pôle Social du Tribunal de Grande

Instance de Bastia.

CONDAMNER la [4] à payer à monsieur [B] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 CPC, ainsi qu'au dépens.'

L'intimé rétorque notamment que les pièces médicales produites attestent de la survenance du syndrome coronarien dès son arrivée sur son lieu de travail le 07 janvier 2018, le médecin urgentiste ayant fait une erreur en mentionnant la date du 08 janvier 2018 sur le certificat médical initial. Il précise que son accident est survenu après un effort de manutention important, et que dans ces conditions, la présomption d'imputabilité de l'article L. 411-1 doit s'appliquer. Il indique enfin que la C.P.A.M. ne renverse pas cette présomption en n'apportant pas la preuve d'une cause étrangère au travail.

La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions et moyens des parties, fait expressément référence à la décision entreprise ainsi qu'aux dernières conclusions des parties, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

La recevabilité de l'appel interjeté par la C.P.A.M. n'étant pas contestée, il ne sera pas statué sur celle-ci.

- Sur la prise en charge de l'accident subi par M. [B] au titre de la législation relative aux risques professionnels :

Aux termes de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, 'Est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise. '

Constitue ainsi un accident du travail un événement ou une série d'événements survenus à des dates certaines, par le fait ou à l'occasion du travail, dont il est résulté une lésion corporelle, qu'elle soit d'ordre physique ou psychologique.

L'article susvisé instaure une présomption d'imputabilité de l'accident au travail. Ainsi, toute lésion survenue au temps et lieu du travail doit être considérée comme trouvant sa cause dans le travail, sauf s'il est rapporté la preuve que cette lésion a une origine totalement étrangère à celui-ci.

Cependant, pour que la présomption d'imputabilité au travail puisse jouer, il appartient au préalable à celui qui s'en prévaut d'établir, autrement que par ses seules affirmations, la matérialité de la lésion ainsi que sa survenance précise et soudaine au temps et au lieu de travail, la soudaineté étant le critère de distinction de l'accident du travail et de la maladie professionnelle.

En l'espèce, M. [B] soutient avoir été victime d'un syndrome coronarien sur son lieu de travail le 07 janvier 2018, s'être rendu à l'hôpital de [Localité 3] le jour-même, avoir été dans un premier temps renvoyé à son domicile, puis transporté le lendemain au centre hospitalier de [Localité 2] où il a subi en urgence une angioplastie avant d'être hospitalisé du 08 au 12 janvier 2018. La caisse ne conteste pas l'existence de cette lésion mais fait valoir qu'une confusion entoure le moment de sa survenance, le certificat médical initial, par ailleurs établi tardivement selon elle, mentionnant la date du 08 janvier 2018.

S'agissant de la date de l'accident, les propos de l'intimé sont corroborés par les pièces produites par les parties dont il ressort que :

- le 16 janvier 2018, l'employeur de M. [B] a déclaré un accident daté du 07 janvier 2018 à 9 heures 00, sans émettre de réserves et en précisant que le salarié s'était plaint de douleurs au ventre et de nausées sur son lieu de travail habituel 'depuis le matin', ses horaires de travail étant compris entre 05 heures 00 et 11 heures 00 ;

- en réponse au questionnaire qui lui avait été transmis par la caisse, l'employeur de M. [B] mentionne à nouveau un accident survenu le 07 janvier 2018 à 09 heures 00, alors que le salarié effectuait des tâches administratives après avoir accompli son travail de boucher ;

- le compte-rendu d'hospitalisation établi le 12 janvier 2018 par le Dr [V] [Y] du centre hospitalier de [Localité 2] évoque 'une douleur épigastrique depuis hier avec élévation de la troponine motivant le transfert à l'hôpital de [Localité 2]', transfert réalisé le 08 janvier 2018.

Au regard de ces éléments, il est manifeste - comme le soutient à juste titre M. [B] - que la Dre [W] [D] ayant rédigé le certificat médical initial, a commis une erreur en mentionnant la date du 08 janvier 2018 comme étant celle de la date de l'accident, le 08 janvier correspondant en réalité à la prise en charge hospitalière par les médecins bastiais. Quant au moyen selon lequel ce certificat a été établi tardivement, il ne saurait prospérer puisque la date du 12 janvier 2018 correspond au terme de l'hospitalisation de M. [B], moment propice à l'accomplissement des formalités administratives dans les établissements hospitaliers.

S'agissant de la date d'apparition des premiers symptômes de l'infarctus, l'intimé indique dans le questionnaire communiqué par la caisse : 'je me sentais mal depuis mon arrivée'. La caisse fait au contraire observer que les symptômes pré-existaient à l'arrivée de l'assuré sur son lieu de travail, en se fondant sur les déclarations de Mme [O] [A], assistante 'service santé sécurités et conditions de travail' et personne ayant procédé à la déclaration d'accident au nom de l'employeur ('Manifestement Monsieur [B] ne se sentait pas bien avant même d'arriver au magasin').

Toutefois, ces déclarations, empreintes d'incertitude, émanent d'un agent administratif n'ayant pas personnellement constaté l'état de M. [B] lorsqu'il a pris ses fonctions à 05 heures 00. Au surplus, alors que M. [B] livrait les noms de deux témoins directs (Mme [L] [F] et M. [U] [E]) en réponse aux interrogations posées dans le questionnaire, la caisse n'a pas jugé utile de les entendre alors qu'ils auraient pu étayer sa thèse selon laquelle les symptômes avaient débuté avant l'arrivée de l'assuré sur son lieu de travail.

Il résulte de ces éléments que M. [B] démontre avoir été victime d'un infarctus en phase aiguë - événement soudain - à une date certaine - le 07 janvier 2018 - sur son lieu et durant ses heures de travail - entre 05 heures 00 et 09 heures 00 dans les locaux du supermarché Casino de [Localité 3] - par le fait ou à l'occasion de son travail puisqu'il venait d'exécuter les tâches, par essence physiquement éprouvantes, du métier de boucher.

Il sera donc jugé que les conditions de la mise en oeuvre de la présomption d'imputabilité au travail de l'accident subi par M. [B] sont réunies en l'espèce.

Il appartient dès lors à la C.PA.M. de démontrer que la lésion présentée par l'assuré a une cause totalement étrangère au travail.

L'appelante se contente d'indiquer à cet effet que M. [B] présentait une surcharge pondérale. Or, le Dr [T] [C], médecin traitant de M. [B] depuis 2016, précise dans son certificat du 09 avril 2018 que son patient ne présentait pas 'd'autres facteurs de risque cardiovasculaire que son âge et sexe masculin, pas de tabagisme, pas d'hérédité, pas de cormorbidité connue.[...]'

Il résulte de ces constatations que la caisse ne rapporte pas la preuve du caractère étranger au travail des lésions médicalement constatées sur la personne de M. [B], et que les faits de l'espèce constituent un accident au sens de la législation relative aux risques professionnels, ainsi que l'ont à bon droit analysé les premiers juges.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a :

- dit que le fait accidentel du 07 janvier 2018 était un accident du travail ;

- dit que cet accident du travail devait être pris en charge par la C.P.A.M. de la Haute-Corse au titre de la législation sur les risques professionnels.

- Sur les dépens

En application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, la C.P.A.M. de la Haute-Corse, partie succombante, devra supporter la charge des entiers dépens exposés en cause d'appel.

- Sur les frais irrépétibles

Il serait inéquitable de laisser à l'intimé la charge des frais irrépétibles qu'il a été contraint d'exposer en cause d'appel.

La C.P.A.M. de la Haute-Corse sera donc condamnée au versement de la somme de 1 500 euros à M. [B], au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle sera en outre déboutée de sa propre demande formée sur ce fondement, et le jugement querellé sera confirmé en ce qu'il l'a condamnée au paiement de la somme de 700 euros au titre des frais irrépétibles de première instance.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement et par décision contradictoire mise à disposition au greffe,

CONFIRME en toutes ses dispositions déférées le jugement rendu le 17 juin 2019 par le pôle social du tribunal de grande instance de Bastia ;

Y ajoutant,

CONDAMNE la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Corse au paiement des entiers dépens exposés en cause d'appel ;

CONDAMNE la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Corse à verser à M. [K] [B] la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Corse de ses demandes plus amples ou contraires.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre sociale tass
Numéro d'arrêt : 19/00204
Date de la décision : 16/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-16;19.00204 ?
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