ARRET RENDU PAR LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX -------------------------- Le : 9 FEVRIER 2006 PREMIÈRE CHAMBRE SECTION A No de rôle : 04/05260 Monsieur André X... Madame Brigitte Y... épouse X... c/ Monsieur Michel VAN DER Z... Monsieur Pierre VAN DER Z... Madame Patricia VAN DER Z... veuve A... Madame Nadine VAN DER Z... épouse B... Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le : aux avoués
Rendu par mise à disposition au Greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 - 2o alinéa du Nouveau Code de Procédure Civile.
Le 9 Février 2006
Par Monsieur Jean-Claude SABRON, Conseiller,
en présence de Madame Chantal SERRE, Greffier,
La COUR d'APPEL de BORDEAUX, PREMIERE CHAMBRE SECTION A, a, dans l'affaire opposant :
Monsieur André X... né le 22 Février 1939 à CRAPONNE (69290), demeurant ... - 33240 AUBIE ET ESPESSAS
Madame Brigitte Y... épouse X... née le 02 Avril 1965 à FONTENAY SOUS BOIS (94120), demeurant ... - 33240 AUBIE ET ESPESSAS représentés par la SCP GAUTIER etamp; FONROUGE, avoués à la Cour, et assistés de Me Patricia GRAVELLIER substituant Me Philippe LIEF, avocats au barreau de BORDEAUX
Appelants d'un jugement rendu le 1er septembre 2004 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel en date du 24 septembre 2004,
à :
Monsieur Michel VAN DER Z... né le 19 Octobre 1964 à FOREST
(BELGIQUE), de nationalité Belge, demeurant ... - BRUXELLES - BELGIQUE
Monsieur Pierre VAN DER Z... né le 24 Mars 1960 à KATANA (CONGO), demeurant ... - 6747 CHATILLON - BELGIQUE
Madame Patricia VAN DER Z... veuve A... née le 21 Juin 1958 à KATANA (CONGO), de nationalité Belge, demeurant ... - 6850 - CARLSBOURG - BELGIQUE
Madame Nadine VAN DER Z... épouse B... née le 09 Mai 1952 à COSTERMANSVILLE (CONGO), de nationalité Belge, demeurant ... - BELGIQUE représentés par la SCP CASTEJA-CLERMONTEL etamp; JAUBERT, avoués à la Cour, et assistés de Me Véronique LASSERRE substituant Me Michel GADRAT, avocats au barreau de BORDEAUX
Intimés,
Rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue en audience publique, le 15 Décembre 2005 devant :
Monsieur Jean-Claude SABRON, Conseiller, qui a entendu les plaidoiries, les Avocats ne s'y étant pas opposés, en application de l'article 786 du Nouveau Code de Procédure Civile, assisté de Chantal SERRE, Greffier,
Que Monsieur Jean-Claude SABRON, Conseiller, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, celle-ci étant composée de :
Monsieur Alain COSTANT, Président,
Monsieur Jean-Claude SABRON, Conseiller,
Madame Elisabeth LARSABAL, Conseiller,
Et qu'il en ait été délibéré par les Magistrats du Siège ci-dessus désignés ; * * * LES DONNEES DU LITIGE
Selon acte du 29 avril 1994, Monsieur Pierre VAN DER Z... a vendu à Monsieur et Madame André X... une maison à usage d'habitation avec jardin sise à AUBIE ESPESSAS (Gironde).
Le prix, fixé à 180 000 F, était stipulé payable au moyen de 72 pactes mensuels de 2 500 F chacun, non productifs d'intérêts, le dernier de ces pactes venant à échéance le 20 avril 2000.
Une clause prévoyait que si l'acquéreur n'était pas intégralement libéré à l'époque ci dessus, la vente serait résolue de plein droit trente jours après un commandement de payer resté infructueux et contenant déclaration par le vendeur de son intention d'user du bénéfice de la présente clause.
Monsieur Pierre X... est décédé le 24 janvier 1995.
Ses héritiers ont fait délivré aux époux X... le 5 février 1998 un commandement de payer la somme de 77 000 F correspondant aux échéances de 1995 à 1997 et à huit échéances de l'année 1998.
Ce commandement qui visait la clause de déchéance du terme stipulée dans l'acte de vente au titre des conditions du règlement du prix, a rendu exigible le capital restant dû.
Le 15 juin 2000, les consorts VAN DER Z... ont fait délivrer aux époux X... un commandement avec déclaration de leur intention de se prévaloir de la clause résolutoire portant sur une somme de 21 031,15 Euros qui incluait un solde dû en capital à hauteur de 8 903,39 F, des intérêts de retard, le montant de la clause pénale prévue par la clause de déchéance du terme calculée à la date d'effet du commandement du 5 février 1998 et les frais.
Monsieur X... a obtenu de l'ONAC (Office National des Anciens combattants et Victimes de Guerre de la Gironde) une aide d'un montant de 10 000 F qui a été virée sur le compte CCP de l'huissier mandaté par les consorts VAN DER Z... le 19 juillet 2000.
Par acte du 9 mai 2003, les consorts VAN DER Z... ont saisi le tribunal de grande instance de BORDEAUX qui dans un jugement du 1er septembre 2004, a :
. constaté l'effet de la clause résolutoire à la date du 18 juillet 2000 ;
. dit que l'immeuble serait restitué à la succession VAN DER Z... qui, en application des dispositions contractuelles contenues à se sujet dans l'acte de vente, n'était pas tenue de restituer les sommes déjà perçues ;
. réduit à un Euro la clause pénale dont les époux X... étaient redevable en exécution de la clause de déchéance du terme ;
. dit qu'il pourrait être procédé à l'expulsion des époux X... et de tous occupants de leur chef à l'expiration d'un délai de six mois à compter du prononcé du jugement ;
. condamné Monsieur et Madame X... à payer aux consorts VAN DER Z... une indemnité d'occupation de 400 Euros par mois (2 627,83 F) à compter du 18 juillet 2000 et jusqu'à parfaite libération des lieux ;
. dit que les époux X... pourraient se libérer des indemnités d'occupation dues entre le 18 juillet 2000 et le 31 août 2004 dans un délai de 21 mois, à raison du versement, outre les indemnités d'occupation courante, de la somme de 8 23,65 Euros par mois, le premier versement devant intervenir le 1er octobre 2004 ;
. débouté les consorts VAN DER Z... de leur demande en
dommages-intérêts au titre d'un défaut d'entretien de l'immeuble ;
. désigné un expert afin de déterminer la plus value apportée à l'immeuble par les impenses réalisées par les époux X... ;
. sursis à statuer sur les autres demandes jusqu'au dépôt du rapport de l'expert et réservé les dépens.
Monsieur et Madame X... ont relevé appel de ce jugement dans des conditions dont la régularité ne donne pas lieu à contestation.
Dans des conclusions du 25 novembre 2005, ils demandent à la cour :
. à titre principal de réformer le jugement en ce qu'il a prononcé la résolution du contrat de vente, le fait que l'information donnée à l'huissier et le débit de la somme de 10 000 F du compte de l'ONAC aient été antérieurs au 17 juillet 2000 démontrant, selon eux, que le solde restant dû en capital, seul exigible en l'absence d'application de la dite clause, avait été réglé dans le délai du commandement ;
. à titre subsidiaire, de réformer le jugement en ce qu'il a dispensé les consorts VAN DER Z... de restituer les sommes perçues, les dispositions contractuelles prévoyant une telle dispense en cas d'application de la clause résolutoire ayant le caractère d'une clause pénale manifestement excessive dés lors que les acquéreurs perdent tout droit sur l'immeuble ;
. de confirmer le jugement à ce qu'il a réduit à 1 Euro le montant de la clause pénale relative à la déchéance du terme ;
. de le confirmer également en ses dispositions relatives aux délais accordés pour le règlement de l'arriéré d'indemnités d'occupation et à la désignation d'un expert foncier.
Sur ce dernier point, ils relèvent qu'il serait particulièrement inéquitable que les intimés retrouvent dans leur patrimoine un bien mis en valeur par les importants travaux d'amélioration qu'ils ont financés.
Enfin, les appelants demandent de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les consorts VAN DER Z... de leur demande de dommages-intérêts au titre d'un prétendu défaut d'entretien, le rapport d'expertise n'ayant pas démontré, selon eux, que la présence de termites était postérieure à la vente ou consécutive à une faute imputable aux acquéreurs.
Monsieur et Madame X... sollicitent le paiement d'une indemnité de 3 000 Euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Madame Patricia VAN DER Z..., Madame Nadine VAN DER Z..., Monsieur Pierre VAN DER Z... et Monsieur Michel VAN DER Z... ont conclu le 25 novembre 2005 à la confirmation des dispositions du jugement qui ont prononcé la résolution la vente en relevant que le paiement invoqué par les appelants n'a eu lieu que le 19 juillet 2000, après l'expiration du délai de 90 jours prévu pour l'application de la clause résolutoire.
Ils forment un appel incident en ce qui concerne :
. le montant de l'indemnité d'occupation qu'ils demandent à la cour d'élever à la somme de 700 Euros par mois, justifiée par l'évolution du marché de l'immobilier ;
. l'octroi de délais de paiement, injustifié dans la mesure où leurs débiteurs ne seraient pas de bonne foi ;
. le rejet de leur demande de dommages-intérêts, un expert désigné en référé ayant confirmé que l'immeuble était infesté par les termites et que les travaux de traitement et de remise en état s'élevaient à 20 000 Euros,
. l'organisation d'une expertise foncière, les acquéreurs n'étant pas fondés à exiger le remboursement de travaux effectués dans l'immeuble à leur seule initiative et dans leur intérêt.
Les intimés réclament le paiement d'une indemnité de 3 000 Euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
LES MOTIFS DE LA DECISION
Les parties sont d'accord en ce qui concerne l'imputation du délai de 30 jours à l'expiration duquel la clause résolutoire devenait applicable.
Ce délai qui courait depuis le 16 juin 1995, jour suivant celui de la signification du commandement de payer rappelant l'intention des vendeurs de se prévaloir de la dite clause, est venu à expiration, le 30ème jour étant un samedi, le premier jour ouvrable suivant, c'est à dire le lundi 17 juillet 2000 à 24 heures.
La date qui doit être prise en cause pour déterminer si le paiement a eu lieu dans le délai sus défini est celle à laquelle le créancier ou son mandataire a reçu ce paiement et non, comme le soutiennent les appelants, celle à laquelle l'huissier a été informé que le paiement interviendrait ou celle à laquelle la somme a été débitée sur le compte de l'organisme qui l'a effectué dans leur intérêt.
Or la somme de 10 000 F qui a été débloquée par l'ONAC n'a été virée sur le compte de l'huissier mandaté par les consorts VAN DER Z... que le 19 juillet 2000, c'est à dire après l'expiration du délai au terme duquel la clause résolutoire devait prendre effet.
Même à supposer que la somme restant à payer pour éviter l'application de la dite clause soit limitée, comme le soutiennent les appelants, au solde du prix en capital et qu'on ne puisse pas tenir compte de la clause pénale devenue exigible après la déchéance du terme, le paiement qu'ils invoquent est tardif et c'est à juste titre que le premier juge a constaté la résolution du contrat de vente, acquise de plein droit au profit des ayants droits des vendeurs par le seul effet des dispositions contractuelles.
*
La clause selon laquelle, en cas de résolution de la vente, les sommes versées par les acquéreurs resteront acquise aux vendeurs est
effectivement conçue comme une clause pénale dés lors qu'il y est précisé que ces sommes seront conservées à titre d'indemnité ée fixée à forfait .
Les époux X... s'étaient opposé devant le premier juge à la conservation des sommes litigieuses et l'allégation de ce que la clause dispensant les vendeurs de les restituer serait manifestement excessive est un nouveau moyen, autorisé en appel par l'article 563 du nouveau code de procédure civile, et non une nouvelle prétention. Toutefois la dispense de restitution n'a aucun caractère manifestement excessif au regard du préjudice qui résulte pour les vendeurs de la privation de la jouissance de l'immeuble dont la valeur locative est d'ailleurs au moins équivalente au montant des mensualités à valoir sur le prix de vente, particulièrement modérées étant donné les conditions très favorables auxquelles les appelants ont contracté.
Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a dit que les consorts VAN DER Z... n'étaient pas tenus de restituer les sommes perçues.
Le tribunal a à bon droit considéré que la clause pénale de 7 % du capital restant dû prévue par la clause de déchéance du terme avait, en revanche, un caractère manifestement excessif au regard du fait que le préjudice subi par les consorts VAN DER Z... au titre du règlement du prix de vente résultait en définitive d'un simple retard.
On doit tenir compte, par ailleurs, du cumul de cette clause avec la dispense qui est faite au vendeur de restituer les sommes versées.
*
L'indemnité d'occupation a été équitablement évaluée à 400 Euros par mois en l'absence de justification de ce que la valeur locative de l'immeuble était supérieure au montant des mensualités prévues pour le règlement du prix de vente (2 500 F, soit 381,12 Euros).
Par ailleurs, en l'absence de démonstration de ce que les débiteurs sont de mauvaise foi, c'est à bon droit qu'un délai de paiement a été accordé à ces derniers pour leur permettre de s'acquitter d'un arriéré d'indemnités d'occupation que leur position économique ne leur permettait pas de régler en une seule fois.
L'appel incident des consorts VAN DER Z... sur ce point est d'autant plus injustifié que le tribunal a prévu une disposition selon laquelle les débiteurs seraient déchus du terme en cas d'inobservation de l'échéancier qui leur était accordé.
*
Aucune clause du contrat ne dispense les vendeurs, en cas d'application de la clause résolutoire, d'indemniser les vendeurs à raison des améliorations à l'immeuble.
Ces améliorations ne sont pas la conséquence d'une voie de fait dans la mesure où les travaux ont été effectués alors que les appelants avaient un titre de propriété.
Les intimés bénéficieraient d'un enrichissement sans cause s'ils n'étaient pas tenus à indemnisation au titre de la plus value apportée au bien de leur auteur par les travaux d'amélioration que les époux X... exposent avoir financés avant la résolution de la vente.
La créance invoquée par les appelants à ce titre résulte de l'application du principe selon lequel l'annulation ou la résolution d'un contrat remet les parties dans l'état dans lequel elles se trouvaient avant d'avoir contracté.
Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a désigné un expert chargé de rechercher la réalité des améliorations invoquées par les époux X... et, le cas échéant, de déterminer en vue d'indemniser ces
derniers, la plus value qu'elles ont apporté à l'immeuble.
*
Enfin, le rapport d'expertise de Monsieur C... dont la désignation a été obtenue dans le cadre d'une procédure en référé, ne fait ressortir aucune faute d'entretien imputable aux époux X... justifiant que soit imputé à ces derniers la responsabilité de la présence de termites dans l'immeuble.
Le tribunal doit être approuvé en ce qu'il a débouté les consorts VAN DER Z... de leur demande de dommages-intérêts au titre d'une faute commise dans l'entretien de l'immeuble.
Les intimés sont en droit de réclamer sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, au titre des frais exposés en appel qui ne sont pas compris dans les dépens, une indemnité que la cour fixe à 1 500 Euros.
PAR CES MOTIFS LA COUR
Confirme en toutes ses dispositions le jugement prononcé le 1er septembre 2004 par le tribunal de grande instance de BORDEAUX.
Y ajoutant, condamne Monsieur et Madame André X... à payer aux consorts VAN DER Z... une indemnité de 1 500 Euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Les condamne aux dépens qui pourront être recouvrés par la SCP CASTEJA-CLERMONTEL-JAUBERT, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Alain COSTANT, Président, et par Madame Chantal SERRE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.