Le : 13 SEPTEMBRE 2007
PREMIÈRE CHAMBRE SECTION A
No de rôle : 06 / 01325
Madame Danielle Yvette Violette Y... épouse Z... (bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2006 / 005183 du 06 / 04 / 2006 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)
c /
Monsieur Roland Gilbert Z...
Nature de la décision : AU FOND
Rendu par mise à disposition au Greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450- 2o alinéa du Nouveau Code de Procédure Civile.
Le 13 Septembre 2007
Par Monsieur Jean-Claude SABRON, Conseiller, en présence de Madame Annick BOULVAIS, Greffier,
La COUR d'APPEL de BORDEAUX, PREMIERE CHAMBRE SECTION A, a, dans l'affaire opposant :
Madame Danielle Yvette Violette Y... épouse Z... née le 17 Décembre 1946 à BORDEAUX (33000), de nationalité Française, demeurant...
représentée par la SCP FOURNIER, avoués à la Cour, et assistée de Me Daniel A... B..., administrateur de l'étude de Me Irèné OYIE, avocat au barreau de BORDEAUX
Appelante d'un jugement rendu le 14 février 2006 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel en date du 09 mars 2006,
à :
Monsieur Roland Gilbert Z... né le 19 Avril 1946 à BORDEAUX (33000), de nationalité Française, demeurant ...-66130 ILLE SUR TET
représenté par la SCP GAUTIER et FONROUGE, avoués à la Cour, et assisté de Me DESPUJOL substituant Me GODARD, avocats au barreau de BORDEAUX
Intimé,
Rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue en audience publique, le 28 Juin 2007 devant :
Monsieur Jean-Claude SABRON, Conseiller, qui a entendu les plaidoiries, les Avocats ne s'y étant pas opposés, en application de l'article 786 du Nouveau Code de Procédure Civile, assisté de Chantal SERRE, Greffier,
Que Monsieur Jean-Claude SABRON, Conseiller, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, celle-ci étant composée de :
Monsieur Alain COSTANT, Président,
Monsieur Jean-Claude SABRON, Conseiller,
Madame Elisabeth LARSABAL, Conseiller,
Et qu'il en ait été délibéré par les Magistrats du Siège ci-dessus désignés ;
* * * LES DONNEES DU LITIGE
Un jugement du tribunal de grande instance de BORDEAUX en date du 10 mai 1988 a prononcé le divorce de Monsieur Roland Z... et de Madame Danielle Y... qui s'étaient mariés sans contrat le 28 décembre 1968, a statué sur le résidence des enfants et sur la pension contributive mise à la charge du mari et a désigné le président de la chambre des notaires de la Gironde, avec faculté de délégation, pour procéder à la liquidation de la communauté dissoute.
L'actif de la communauté était constitué, essentiellement, par un immeuble à usage d'habitation que les époux avaient fait construire sur un terrain situé....
L'ordonnance non conciliation, rendue le 1er avril 1985, avait autorisé Madame Y... a à résider dans cet immeuble avec les trois enfants du couple et mis à la charge de Monsieur Z... une pension alimentaire contributive de 2 300 F par mois, « étant précisé qu'il continuerait de régler les emprunts de la maison ».
Le président de la chambre des notaires a délégué la mission de procéder à la liquidation de la communauté à Maître A. F..., notaire à BORDEAUX.
Celui ci n'a procédé à aucune diligence et Monsieur G... a repris contact au mois de septembre 1998 avec son successeur, Maître Jean Louis F... devant lequel les parties n'ont pas trouvé d'accord.
Par lettre du 3 septembre 2002, quinze ans après le prononcé du divorce, le président de la chambre des notaires a en définitive délégué pour procéder aux opérations de liquidation partage de la communauté Maître H..., notaire à BORDEAUX, en remplacement de Maître A. F..., parti à la retraite.
Maître H... devant qui Madame Y... avait été sommée de comparaître suivant un acte du 13 mars 2003 délivré à la requête de son ancien mari, a établi un procès verbal d'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la communauté en date du 27 mars 2003 dans lequel les parties ont convenu :
. de fixer la date de la jouissance divise au 12 juin 1985, date de l'assignation en divorce ;
. de fixer la date à compter de laquelle Madame Y... qui occupait toujours l'immeuble de communauté serait redevable d'une indemnité d'occupation au 11 septembre 1993 au regard de la considération selon laquelle la prescription quinquennale avait été interrompue par la demande faite par Monsieur Z... le 11 septembre 1998 auprès du successeur de Maître A. F... afin de procéder à la liquidation ;
. de parvenir à la signature d'un état liquidatif, supposant la vente préalable de l'immeuble, avant le 27 août 2003.
Deux sommations ont été délivrées à Madame Y... le 14 août 2003 puis, celle ci ayant émis le souhait de se faire assister de Maître Jean Louis F..., le 3 février 2004.
Le 13 février 2004, Maître H... a établi un procès verbal constatant le défaut de Madame Y... et contenant un projet d'état liquidatif.
Par acte du 8 avril 2004, Monsieur Z... a fait assigner Madame Y... devant le tribunal de grande instance de BORDEAUX aux fins d'homologation de ce projet d'état liquidatif.
Le tribunal a rendu le 14 février 2006 un jugement par lequel il a :
. débouté Madame Y... de sa demande de désignation d'un nouveau notaire ;
. fixé la date des effets patrimoniaux du divorce et de la jouissance divise au 12 juin 1985, date de l'assignation en divorce ;
. dit que Madame Y... serait tenue de verser une indemnité d'occupation à compter du 11 septembre 1993 comme dit dans le procès verbal d'ouverture du 27 mars 2003 ;
. désigné aux fins de fixation d'une mise à prix et d'évaluation de l'indemnité d'occupation due par Madame Y... un expert en la personne de Monsieur I....
Renvoyé l'affaire devant le juge de la mise en état et réservé les dépens.
Madame Y... a relevé appel de ce jugement dans des conditions dont la régularité ne donne pas lieu à contestation.
Dans des conclusions du 3 juillet 2006 elle demande à la cour :
. de dire que la désignation de Maître H... est irrégulière, seule une ordonnance du président du tribunal de grande instance étant susceptible de procéder au remplacement du notaire initialement désigné pour procéder aux opérations de liquidation de la communauté ;
. de retenir sa position selon laquelle le notaire sus nommé aurait fait preuve de partialité et porté atteinte à ses droits fondamentaux ;
. de commettre un nouveau notaire afin de procéder aux opérations de liquidation et de partage de la communauté ;
. de dire qu'en l'absence d'acte interruptif de la prescription de cinq ans prévue par l'article L 815-10 du code civil, l'indemnité d'occupation dont elle et redevable à l'égard de la communauté doit être limitée aux cinq années précédant le partage à intervenir ;
. de dire que le montant des remboursements des échéances d'emprunts immobiliers effectués par monsieur Z... « seront soustraits des droits revenant à celui ci sur l'actif net de la communauté ».
Sur ce dernier point, l'appelante soutient en effet que, Monsieur Z... ayant été « condamné » à rembourser ces emprunts en complément de sa contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants qui aurait été fixée à une somme plus élevée en l'absence de cette charge, il ne peut pas en réclamer le remboursement à l'indivision.
Madame Y... demande enfin de condamner Monsieur Z... aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 3 000 Euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Monsieur Z... a conclu le 22 novembre 2006 à la confirmation du jugement.
Il reproche à Madame Y... qui réside toujours dans l'immeuble indivis d'user de tous les moyens pour retarder l'issue des opérations de liquidation de la communauté, dissoute par un jugement prononcé en 1988.
L'intimé demande à la cour de condamner l'appelante aux dépens d'appel, ceux de première instance ayant été réservés, ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 2 600 Euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, au titre des frais supplémentaires exposés devant la cour.
LES MOTIFS DE LA DECISION
Ce n'est pas Maître A. F... qui a été commis par le jugement de divorce pour procéder aux opérations de liquidation de la communauté, mais le président de la chambre des notaires de la Gironde auquel le tribunal a expressément donné la faculté de déléguer cette mission à un notaire de son choix.
C'est par conséquent de façon parfaitement régulière qu'après avoir délégué Maître A. F..., le président de la chambre des notaires de la Gironde a par courrier du 3 septembre 2002 usé de nouveau de son pouvoir de délégation en désignant Maître H... en remplacement du notaire initialement commis qui avait pris sa retraite.
Par ailleurs, l'appelante ne fait ressortir aucun motif pertinent permettant de mettre en doute l'impartialité de Maître H... qui, après avoir établi un procès verbal d'ouverture dans lequel elle a retracé les points d'accord des parties, toutes deux présentes, a organisé deux réunions aux fins de soumission de son projet d'état liquidatif auxquelles Madame Y..., sommée par des actes d'huissier dont elle a eu connaissance, s'est abstenue de comparaître sans justifier d'aucun empêchement.
Les droits fondamentaux de Madame Y... ont été respectés et c'est à bon droit que le premier juge a débouté l'appelante de sa demande tendant à la désignation d'un nouveau notaire.
Les deux parties ont comparu à la réunion d'ouverture des opérations de liquidation partage qui avait été fixée par Maître H... à la date du 27 mars 2003.
Le procès verbal établi à cette date par le notaire relate leur accord pour considérer que la prescription quinquennale résultant des dispositions de l'article 815-10 du code civil ayant été interrompu par la démarche entreprise le 11 septembre 1998 pour qu'il soit procédé à la reprise des opérations de liquidation, l'indemnité d'occupation incombant à l'épouse au titre de l'occupation privative de l'immeuble de communauté était due à partir du 11 septembre 1993.
A la page 4 de ce procès verbal qui a été signé par Madame Y..., il est mentionné que celle ci « reconnaît que cette indemnité sera due depuis le 11 septembre 1993 ».
Aux termes de l'article 2248 du code civil, la prescription est interrompue par la reconnaissance que le débiteur fait du droit de celui contre lequel il prescrit.
Par ailleurs, les dispositions de l'article 2244 du même code qui énumèrent les actes interruptifs de prescription ne sont pas d'ordre public ; elles ont un caractère supplétif et les parties, en l'espèce, ont pu y déroger en stipulant que la démarche effectuée le 11 septembre 1998 afin de reprendre les opérations de liquidation avait interrompu la prescription quinquennale qui, selon les explications exactement fournies par le notaire, est de cinq à l'égard de l'indemnité d'occupation due par un indivisaire.
Le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a fixé au 11 septembre 1993 la date à compter de laquelle, alors que les effets patrimoniaux du divorce remontaient au 12 juin 1985, Madame Y... qui continuait de résider dans l'immeuble de communauté était redevable d'une indemnité d'occupation.
Contrairement à ce qu'indique l'appelante, l'ordonnance de non conciliation du 1er avril 1985 qui l'a autorisée à résider dans l'immeuble commun avec les enfants du couple n'a pas spécifié que cette occupation serait gratuite.
Cette gratuité serait au demeurant inopérante dés lors que, par le fait de la prescription quinquennale, l'indemnité d'occupation n'est due en définitive qu'à compter d'une date postérieure au prononcé du divorce.
L'ordonnance sus visée qui a fixé la pension alimentaire contributive à la charge du mari en précisant que celui ci continuerait de régler les emprunts de la maison n'a pas pour autant, pas plus que ne l'on les décisions postérieures, privé le mari du droit d'être indemnisé dans le cadre de la liquidation de l'indivision post communautaire des règlements qu'il effectuerait pour le compte de l'indivision au titre des échéances d'emprunts postérieure aux effets patrimoniaux du jugement de divorce.
L'appel de Madame Y... est tout aussi mal fondé sur ce dernier point, le tribunal ayant à bon droit retenu qu'il convenait de tenir compte dans la liquidation des remboursements effectués par Monsieur Z... au titre des emprunts communs à compter du 12 juin 1985 qui est la date à laquelle remonte la jouissance divise.
Monsieur Z... est en droit de réclamer sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, au titre des frais non inclus dans les dépens qui ont été occasionnés par l'appel dilatoire de son ex épouse, une indemnité que la cour fixe à 1 500 Euros.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Confirme en toutes ses dispositions le jugement prononcé le 14 février 2006 par le tribunal de grande instance de BORDEAUX (première chambre civile).
Y ajoutant, condamne Madame Danielle Y... à payer à Monsieur Roland Z... une indemnité de 1 500 Euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
La condamne aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés par la SCP GAUTHIER-FONROUGE, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jean-Claude SABRON, Conseiller, en l'empêchement légitime de Monsieur Alain COSTANT, Président, et par Madame Annick BOULVAIS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.