PREMIERE CHAMBRE CIVILE- SECTION A
--------------------------
FR
ARRÊT DU : 01 AVRIL 2008
(Rédacteur : Elisabeth LARSABAL, Conseiller,)
No de rôle : 07 / 02330
S. A. CREDIT FONCIER DE FRANCE
c /
Jacques X... Maryse Y... épouse X... Stephen Z... Béatrice A... divorcée Z... (bénéficie d' une aide juridictionnelle Totale numéro 2007 / 009668 du 05 / 07 / 2007 accordée par le bureau d' aide juridictionnelle de BORDEAUX)
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avoués Décision déférée à la Cour : jugement sur incident rendu le 08 février 2007 (dossier no 99 / 00019) par le Juge de l' Exécution Chambre des Saisies Immobilières du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant acte d' appel du 19 avril 2007
APPELANTE :
S. A. CREDIT FONCIER DE FRANCE, venant aux droits de la STE ENTENIAL anciennement dénommée COMPTOIR DES ENTREPRENEURS, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis 19, rue des Capucines- 75001 PARIS 01
représentée par la SCP BOYREAU ET MONROUX, avoués à la Cour assistée de Maître Emmanuel JOLY, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉS :
Jacques Aristide X... né le 18 Juillet 1944 à GRAY (70100) de nationalité Française retraité de l' Armée demeurant ...
Maryse Y... épouse X... née le 08 Août 1944 à SAINT CHRISTOL de nationalité Française demeurant ...33140 VILLENAVE D' ORNON
représentés par la SCP LABORY- MOUSSIE et ANDOUARD, avoués à la Cour assistés de Maître NICOLAS substituant la SCP GRAVELLIER et LIEF, avocats au barreau de BORDEAUX
Stephen Z... né le 20 Novembre 1958 à BORDEAUX (33000) de nationalité Française profession : menuisier demeurant ...
représenté par la SCP GAUTIER et FONROUGE, avoués à la Cour assisté de Maître VILLARD substituant Maître Adrien X..., avocats au barreau de BORDEAUX
Béatrice Michelle A... divorcée Z... née le 02 Mai 1958 à BORDEAUX (33000) de nationalité Française demeurant ...
représentée par la SCP ARSENE- HENRY ET LANCON, avoués à la Cour assistée de Maître Magali COSTE, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
L' affaire a été débattue le 19 février 2008 en audience publique, devant la Cour composée de :
Franck LAFOSSAS, Président, Jean- Claude SABRON, Conseiller, Elisabeth LARSABAL, Conseiller,
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Annick BOULVAIS
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l' arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l' article 450 al. 2 du Nouveau Code de Procédure Civile.
******
EXPOSE DU LITIGE
Le CREDIT FONCIER DE FRANCE, nouvelle dénomination de la Société ENTENIAL, venant aux droits du COMPTOIR DES ENTREPRENEURS, a interjeté appel, dans des conditions de régularité non contestées, d' un jugement rendu le 8 février 2007 par le Juge de l' Exécution Chambre des Saisies Immobilières du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX qui, statuant sur opposition des époux Jacques X...- Maryse Y... (ci- après les époux X...) à un jugement rendu le 21 octobre 1999 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX Chambre des Saisies Immobilières statuant en matière d' incident de saisies immobilières :
- déclare recevable la tierce opposition des époux X... à l' encontre dudit jugement
- au fond, réformant ledit jugement
- dit nul et de nul effet le privilège de prêteur de deniers et l' hypothèque constituée au profit du COMPTOIR DES ENTREPRENEURS, aux droits duquel vient le CREDIT FONCIER DE FRANCE, par acte notarié de Maître Michel G... du 25 février 1985, publié à la deuxième Conservation des Hypothèques de BORDEAUX le 12 mars 1985, volume 10146 no5, en ce qu' il porte sur le lot no 1035 de l' ensemble immobilier sis à TALENCE (Gironde) dénommé résidence Les Madrigaux, chemin Lafitte, cadastré section BE no 310 et 154, d' une contenance de 95 a 42 ca
- en ordonne en conséquence la radiation au vu du présent jugement
- dit nulles et de nul effet les poursuites en saisie immobilière engagées par le CREDIT FONCIER DE FRANCE, venant aux droits de la Société ENTENIAL, anciennement dénommée COMPTOIR DES ENTREPRENEURS, poursuivant la saisie de biens immobiliers au préjudice de Stephen Z... et Béatrice Z... née A..., suivant acte de Maître H..., huissier de justice, en date du 29 mars 1999, publié à la deuxième Conservation des Hypothèques de BORDEAUX le 14 juin 1999, volume 1999 S numéro 59, en ce que le commandement porte saisie du lot no 1035 de l' ensemble immobilier sis à TALENCE (Gironde) dénommé résidence Les Madrigaux, chemin Lafitte, cadastré section BE no 310 et 154
- ordonne en conséquence la radiation dudit commandement au vu du présent jugement
- déboute Jacques X... et Maryse Y... épouse X... de leur demande tendant à voir ordonner la rectification des titres, et les renvoie à mieux se pourvoir devant le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX statuant en droit commun ou en référé
- condamne in solidum le CREDIT FONCIER DE FRANCE et Stephen Z... à payer les sommes de 2 000 € à Jacques X... et Maryse Y... épouse X..., et de 500 € à Béatrice A... divorcée Z...
- condamne in solidum le CREDIT FONCIER DE FRANCE et Stephen Z... aux dépens de l' incident.
Le litige est survenu dans les circonstances suivantes.
Suivant acte de Maître G... du 13 août 1984, les époux I... ont acquis de la SA HLM LE NOUVEAU LOGIS le lot 1037 de la résidence Les Madrigaux à TALENCE (appartement de quatre pièces principales).
Ils ont en fait pris possession du lot 1035.
Suivant acte de Maître G... du 25 février 1985, les époux Stephen Z...- Béatrice A..., (ci- après les consorts Z...- A...) ont acquis de la S. A. HLM LE NOUVEAU LOGIS, le lot 1035 de la résidence Les Madrigaux à TALENCE (appartement de quatre pièces principales), à l' aide de deux prêts consentis par le COMPTOIR DES ENTREPRENEURS et garantis hypothécairement sur ce lot.
Ils ont en fait pris possession du lot 1037.
Par jugement d' adjudication du 17 mai 1990, les époux X... ont acquis le lot 1037 saisi au préjudice des époux I....
Ils ont en fait pris possession du lot 1035 dont les époux I... eux- mêmes avaient pris en possession.
Le 2 mars 1999, les époux X... ont assigné les consorts Z...- A... alors divorcés, devant le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX pour voir constater leur propriété sur le lot 1037, et les voir condamner à leur restituer ce lot, dont ils soutenaient être propriétaires.
Le 29 mars 1999, le COMPTOIR DES ENTREPRENEURS faisait signifier aux consorts Z...- A... un commandement aux fins de saisie immobilière du lot 1035 pour non paiement des échéances des deux prêts (commandement publié le 14 juin 1999, prorogé par jugement du 14 mars 2002 publié le 28 mars 2002, prorogé par jugement du 3 février 2005 publié le 1er mars 2005).
Le 21 octobre 1999, la Chambre des Saisies Immobilières du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX déboutait Béatrice A... de sa demande de nullité de la procédure de saisie immobilière fondée sur l' existence de l' action judiciaire en cours engagée par les époux X... sur l' assignation de ceux- ci en date du 2 mars 1999.
Il était notamment indiqué dans ce jugement :
" Les pièces versées aux débats établissent, sans contestation possible, que le COMPTOIR DES ENTREPRENEURS possède un titre à l' égard des époux Z..., que l' inscription d' hypothèque faite sur le lot 1035 acquis le 25 août 1984 a été publiée et est opposable aux tiers, que la procédure intentée par les époux X... pour vérifier s' il n' y a pas eu inversion d' occupation entre les lots 1035 et 1037 ne peut avoir pour conséquence de modifier les garanties hypothécaires prises régulièrement par le COMPTOIR DES ENTREPRENEURS ".
Par jugement du 3 septembre 2002, le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX statuait sur l' assignation des époux X... du 2 mars 1999, après mise en cause de Maître L... (Notaire successeur de Maître G...) le 21 décembre 1999, de Maître G... (Notaire) le 23 mai 2000, et de la S. A. HLM NOUVEAU LOGIS (vendeur des lots en litiges) le 11 juin 2001.
Par ce jugement, les époux X... étaient déboutés de leur demande tendant à " se voir restituer ce qu' ils considèrent être leur bien " (lot 1037).
Il était notamment indiqué dans ce jugement :
" Rien ne permet de relever une quelconque confusion dans la désignation du bien acquis par les époux X... "
" Ceux- ci soutiennent toutefois ne pas être en possession de leur bien ".
" Force est de constater qu' ils se contentent de procéder par affirmation sans fournir à la juridiction un commencement de preuve susceptible d' emporter sa conviction ".
Les époux X... ont interjeté appel de cette décision.
Le 28 juin 2005, la Cour d' Appel de BORDEAUX rendait un arrêt sur l' appel du jugement du 3 septembre 2002.
La Cour confirmait le jugement qui avait débouté les époux X... de leur demande de restitution par les époux Z... du lot 1037 qu' ils estimaient être leur bien occupé par les époux Z....
Il était notamment indiqué dans les motifs de cette décision :
" En droit, la délivrance, à laquelle est tenu le vendeur, est le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l' acheteur ".
En fait, les époux X..., après avoir visité le lot 1035 saisi au préjudice de leurs auteurs, les époux I..., ont acheté en réalité cet appartement dont ils ont pris possession en le faisant occuper par les locataires ". " L' appartement adjugé aux époux X... correspond à l' objet de la vente, leur action sur le fondement de l' inexécution de l' obligation de délivrance visée dans l' assignation introductive d' instance ne peut prospérer dès lors qu' ils ont pris possession de ce lot 1035 correspondant à celui acheté réellement et effectivement ".
" L' action des époux X... sur le fondement de la revendication de l' appartement 1037, auquel s' applique leur titre mais qui ne correspond pas à l' objet de la vente par suite de l' inexistence d' un accord sur la chose vendue, est dès lors mal fondée puisque le droit de propriété sur cet appartement 1037 ne leur a pas été transféré, nonobstant les mentions des actes ".
" Le jugement sera donc confirmé en ce qu' il a débouté les époux X... tant en leur action fondée sur l' erreur dans la délivrance qu' en leur action fondée sur la revendication de propriété, sauf aux parties à procéder à l' échange de leurs titres juridiques ".
Un projet d' échange des actes juridiques par acte authentique devait être signé le 15 janvier 2007 mais n' a pu aboutir en raison du refus de Stéphen Z... et d' une opposition du TRESOR PUBLIC, créancier de Béatrice A....
Depuis lors est intervenu le jugement déféré du 8 février 2007.
Aux termes de son acte d' appel assignation du 19 avril 2007, LE CREDIT FONCIER demande à la Cour :
- de débouter purement et simplement les époux X... de toutes leurs demandes, fins et conclusions
- de déclarer irrecevable la tierce opposition des époux X... à l' encontre du jugement rendu le 21 octobre 1999 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX, Chambre des Saisies Immobilières statuant en matière d' incident de saisie immobilière
- de dire que le privilège de prêteur de deniers et d' hypothèque constitué au profit du COMPTOIR DES ENTREPRENEURS, aux droits duquel vient le CREDIT FONCIER DE FRANCE, par acte notarié de Maître Michel G... du 25 février 1985, publié à la 2ème Conservation des Hypothèques de BORDEAUX le 12 mars 1985, volume 10146 numéro 5, en ce qu' il porte sur le lot no 1035 de l' ensemble immobilier situé à TALENCE (Gironde) dénommé Résidence Les Madrigaux, chemin Lafitte cadastré section BE no 310 et 154, d' une contenance de 95 a 42 ca, est valable et qu' en conséquence il n' y a pas lieu à leur radiation
- de dire que les poursuites en saisie immobilière engagées par le CREDIT FONCIER DE FRANCE, venant aux droits de la Société ENTENIAL, anciennement dénommée COMPTOIR DES ENTREPRENEURS, poursuivant la saisie de biens immobiliers au préjudice de Stephen Z... et Béatrice Z... née A..., suivant acte de Maître H..., huissier de justice, en date du 29 mars 1999, publié à la 2ème Conservation des Hypothèques de BORDEAUX le 14 juin 1999, volume 1999 S numéro 59, en ce que le commandement porte saisie du lot 1035 de l' ensemble immobilier situé à TALENCE (Gironde) dénommé Résidence Les Madrigaux, chemin Lafitte, cadastré section BE no 310 et 154, sont valables et qu' en conséquence il n' y a pas lieu à radiation du commandement
- de dire qu' il n' y a pas lieu à condamnation du CREDIT FONCIER DE FRANCE aux dépens, à dommages et intérêts et à toutes sommes sur le fondement de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile
à titre subsidiaire, au cas où par impossible, la Cour estimerait pouvoir statuer sur la propriété des lots 1035 et 1037
- de dire que les garanties hypothécaires constituées au profit du CREDIT FONCIER DE FRANCE seraient en toute hypothèse reportées sur le lot finalement attribué aux consorts Z...- A... au même rang et avec les mêmes droits que la garantie initialement consentie
- de condamner in solidum les époux X... et les consorts Z...- A... en tous les dépens outre 2 000 € sur le fondement de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Par conclusions du 3 septembre 2007, les époux X... demandent à la Cour :
- de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris
Y ajoutant,
- de constater et juger que le droit de propriété de Jacques Aristide X... né le 18 juillet 1944 à GRAY (Haute Saône), et de X... Maryse née Y... le 8 août 1944 à ST CHRISTOL (07), mariés sous le régime de la communauté légale, porte sur les biens et droits immobiliers dépendant de l' immeuble immobilier sis à TALENCE (Gironde) dénommé Résidence Les Madrigaux, chemin Lafitte, cadastré section BE nos 300, 301, 302, 303, 304, 305, 306, 307, 308, 309, 154 et 310 pour une contenance totale de 94 a 42 ca, le tout ayant fait l' objet d' un état descriptif de division et règlement de copropriété reçu par Maître G... notaire à BORDEAUX le 9 décembre 1982, publié à la deuxième Conservation des Hypothèques de BORDEAUX le 13 décembre 1982, volume 9162, no 2, lot 1035 : un appartement de quatre pièces principales et les 1571 / 100. 000èmes dans la propriété des parties communes générales, saisis sur les époux I..., et adjugé à Jacques X... suivant jugement d' adjudication de l' audience des saisies du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX en date du 17 mai 1990
- de constater et juger que le droit de propriété de Stephen Z... né le 20 novembre 1958 à BORDEAUX (Gironde), et de Béatrice Michelle Andrée A... divorcée Z..., né le 2 mai 1958 à BORDEAUX (Gironde), porte sur les biens et droits immobiliers dépendant de l' ensemble immobilier sis à TALENCE (Gironde), dénommé résidence Les Madrigaux, chemin Lafitte, cadastré section BE no 300 à 309 et 154, pour une contenance totale de 94 a 50 ca, le tout ayant fait l' objet d' un état descriptif de division et règlement de copropriété reçu par Maître G..., notaire à BORDEAUX le 9 décembre 1982, publié à la deuxième Conservation des Hypothèques de BORDEAUX le 13 décembre 1982, volume 9162, no 2, lot 1037 : un appartement de quatre pièces principales et les 1588 / 100. 000èmes dans la propriété des parties communes générales, acquis de la Société Anonyme d' habitation à loyer modéré " LE NOUVEAU LOGIS ", par acte authentique de Maître Michel G..., notaires associé de la SCP Jacques G... et Michel G..., en date du 25 février 1985, publié à la deuxième Conservation des Hypothèques de BORDEAUX le 12 mars 1985, volume 10146 no 5
- de condamner le CREDIT FONCIER DE FRANCE et Stephen Z... au paiement aux époux X... d' une indemnité supplémentaires de 2 000 € sur le fondement de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, et des dépens.
Par conclusions du 14 septembre 2007, Stephen Z... demande à la Cour :
- de déclarer recevable et bien fondé le CREDIT FONCIER DE FRANCE dans ses demandes, fins et prétentions,
- de réformer le jugement déféré
- de débouter les époux X... de l' ensemble de leurs demandes, fins et prétentions
- de les condamner au paiement d' une somme de 1 000 € au titre des frais irrépétibles et aux dépens de première instance et d' appel.
Aux termes de ses conclusions du 8 février 2008, Béatrice A... divorcée Z... demande à la Cour de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris et de condamner le CREDIT FONCIER DE FRANCE et Stephen Z... au paiement des dépens et d' une indemnité de 1 500 € au titre de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Pour un plus ample exposé des moyens et de l' argumentation des parties, il est expressément renvoyé à leurs écritures.
MOTIFS
Le CREDIT FONCIER DE FRANCE poursuit la saisie de biens immobiliers au préjudice de Stephen Z... et Béatrice A... divorcée Z..., suivant acte de Maître H..., huissier de justice, en date du 29 mars 1999 publié à la 2ème Conservation des Hypothèques de BORDEAUX le 14 juin 1999, volume 1999 S no 59.
Après deux jugements de prorogation de la validité du commandement, plusieurs dates ont été fixées pour l' audience éventuelle et pour l' audience d' adjudication, sans que pour autant aucune date n' ait été fixée pour l' adjudication.
La saisie porte sur un appartement de quatre pièces lot no 1035 et 1571 / 100. 000èmes des parties communes dans un ensemble immobilier dénommé résidence Le Madrigaux, chemin Lafitte à TALENCE, dans le bâtiment M.
En fait, il apparaît que si, par jugement d' adjudication du 17 mai 1990, les époux X... ont acquis un appartement constituant aux termes du procès verbal descriptif du jugement le lot 1037 de la copropriété, ils ont en réalité visité et été mis en possession du lot 1035 qu' occupaient les débiteurs saisis, les époux I... qui sont leurs auteurs, et avaient eux- mêmes acquis par acte notarié du 13 août 1984 un bien décrit dans l' acte de vente comme constituant le lot 1037 de la copropriété, mais avaient mis en possession du lot 1035.
Par ailleurs, il est constant que le lot 1037 a toujours été occupé par les époux Z..., puis par Béatrice A... seule après leur divorce, et que leur titre d' acquisition porte sur le no 1035 alors qu' ils ont été mis en possession du lot 1037.
- Sur la recevabilité de la tierce opposition
Aux termes de l' article 583 du Nouveau Code de Procédure Civile, " est recevable à former tierce opposition toute personne qui y a intérêt, à condition qu' elle n' ait été ni partie ni représentée au jugement qu' elle attaque. " Il est admis qu' au sens de ce texte la tierce opposition à l' encontre d' un jugement rendu sur incident de saisie immobilière est recevable.
En l' espèce, c' est à bon droit que les époux X... dont il est constant qu' ils n' étaient pas partie ni représentés au jugement du 21 octobre 1999 font état de leur intérêt à agir, dès lors qu' ils déclarent faire l' objet d' une procédure de saisie immobilière du chef de la dette d' un tiers, les consorts Z...- A..., et sur le fondement d' une hypothèque constituée sur un bien qui n' appartient pas au débiteur, mais dont ils ont été reconnus propriétaires par décision de justice.
En effet, et contrairement à ce que soutiennent le CREDIT FONCIER DE FRANCE et Stephen Z..., il apparaît que l' arrêt de la Cour d' Appel de BORDEAUX du 28 juin 2005 confirmant le jugement du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX du 3 septembre 2002 reconnaît la propriété des époux X... sur le lot 1035.
Quand bien même le dispositif de l' arrêt, qui confirme le jugement, n' indique pas expressément que les époux X... sont propriétaires du lot 1035, ces deux décisions les déboutent de leur action en revendication du lot 1037, au motif que nonobstant les mentions des actes notariés, la propriété sur l' appartement 1037 ne leur a pas été transférée et qu' ils ont pris possession du lot 1035 correspondant à celui acheté réellement et effectivement, l' arrêt suggérant en outre aux parties de procéder à l' échange de leur titre juridique.
Cet arrêt n' a pas été frappé de pourvoi en cassation, et l' échange des titres juridiques a été envisagé dès lors qu' un projet d' acte avait été rédigé à cet effet par le successeur de Maître G..., avec signature prévu le 15 janvier 2007, cette signature n' ayant pu avoir lieu en raison du refus de Stephen Z... et d' une opposition du TRESOR PUBLIC en sa qualité de créancier de Béatrice A..., opposition ultérieurement levée, sans que le projet ait pu être mené à bien.
Il s' ensuit que le jugement sera confirmé en ce qu' il a déclaré recevable l' opposition des époux X....
- Sur les effets de la recevabilité de la tierce opposition
L' article 591 du Nouveau Code de Procédure Civile dispose :
" La décision qui fait droit à la tierce opposition ne réforme le jugement attaqué que sur les chefs préjudiciables aux tiers opposants. Le jugement primitif conserve ses effets entre les parties, même sur les chefs annulés.
Toutefois la chose jugée sur tierce opposition l' est à l' égard de toutes les parties appelées à l' instance en application de l' article 584. "
Le jugement objet de l' opposition du 21 octobre 1999 statue sur incident de Béatrice A... tendant à voir dire nulle la procédure de saisie immobilière engagée à son encontre au motif que le lot 1035 était insaisissable à raison de l' action au fond intentée par assignation du 2 mars 1999 à la requête des époux X.... Le dispositif de ce jugement déboute Béatrice A... de sa demande de nullité et fixe la date d' adjudication au 9 décembre 1999.
Cependant, si le jugement ne s' était pas prononcé sur la validité intrinsèque de l' hypothèque du CREDIT FONCIER DE FRANCE en ce qu' elle portait sur le lot 1035, il apparaît que la demande de nullité de la procédure de saisie immobilière était précisément fondée sur l' interversion des lots 1035 et 1037, ce qui entraînait nécessairement la nullité de la procédure de saisie immobilière. Par ailleurs, maintenir les effets du jugement primitif entre Béatrice A... et le CREDIT FONCIER DE FRANCE, alors même que Stephen Z... n' était pas partie aux dits incidents bien qu' il fût débiteur saisi, s' oppose à l' exception au principe posé par l' article 591 aux termes duquel le jugement primitif conserve ses effets entre les parties même sur les chefs annulés dès lors que l' indivisibilité de la décision entraînerait une impossibilité d' exécuter en même temps le jugement du 21 octobre 1999 et l' arrêt à venir de la Cour statuant sur opposition à ce jugement.
- Sur la nullité et la radiation de l' hypothèque du CREDIT FONCIER DE FRANCE
Le jugement du 21 octobre 1999 statuant sur l' incident de saisie immobilière formé par Béatrice A... l' a déboutée de sa demande de nullité de la procédure de saisie immobilière ; le Tribunal avait estimé que l' action des époux X... antérieurement engagée par assignation du 2 mars 1999 devant le Juge du fond, pour vérifier s' il n' y a pas eu d' interversion d' occupation entre les lots 1035 et 1037, ne pouvait avoir pour conséquence de modifier les garanties hypothécaires prises régulièrement par le COMPTOIR DES ENTREPRENEURS.
Depuis cette décision les époux X... ont tenté de remédier par voie judiciaire à la situation d' interversion qu' ils décrivent des titres avec la réalité, qui n' est contestée par aucune des parties.
Cependant, ils ont été déboutés de cette demande par le jugement du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX du 3 septembre 2002 statuant au fond, au motif qu' ils ne fournissaient pas à la juridiction un commencement de preuve à l' appui de leur affirmation qui soit susceptible d' emporter sa conviction.
Cette demande tendait à leur voir restituer le numéro 1037 figurant sur leur titre (jugement d' adjudication).
Si ce jugement a été confirmé par l' arrêt de la Cour d' Appel de BORDEAUX en date du 28 juin 2005, la motivation de l' arrêt fait référence notamment à un constat d' huissier en date du 16 janvier 2003 d' où il ressort que les locataires des époux X... occupent l' appartement 1035 du bâtiment M (au premier étage arrière gauche par rapport à la sortie de l' ascenseur), alors que Béatrice A... divorcée Z... occupe l' appartement 1037 (au premier étage avant droit par rapport à la sortie de l' ascenseur) ; cet arrêt mentionne également que la Société ENTENIAL, créancier des consorts Z...- A..., lors de son assignation en saisie immobilière du 18 décembre 2003 sur l' appartement 1035, a dénoncé cet acte aux époux X... qui sont en possession de l' appartement saisi, manifestant ainsi sa conscience de la difficulté existante.
Dès lors qu' il résulte de cet arrêt que les époux X... ne sont pas fondés à revendiquer la propriété du lot 1037, il s' en évince qu' ils sont propriétaires du lot 1035, qui correspondant à la prise de possession de l' appartement qu' ils avaient visité. Il est rappelé que si cet arrêt est rendu sur appel des époux X..., Stephen Z..., Béatrice A... et la Société ENTENIAL y sont parties et que cette décision leur est opposable.
En conséquence, en dépit de l' erreur sur les titres de propriété, il apparaît que le CREDIT FONCIER DE FRANCE n' est pas fondé à maintenir une hypothèque sur le lot 1035 qui n' est pas la propriété de ses débiteurs, qui sont propriétaires du lot 1037.
En effet, aux termes de l' article 2393 du Code Civil, anciennement article 2114, l' hypothèque est un droit réel sur les immeubles affectés à l' acquittement d' une dette.
Or, la propriété des époux X... n' est affectée d' aucune obligation à l' égard du CREDIT FONCIER DE FRANCE.
De plus, aux termes de l' article 2190 du Code Civil, " la saisie immobilière tend à la vente forcée de l' immeuble du débiteur " ; or le lot 1035 n' est pas la propriété des débiteurs du CREDIT FONCIER DE FRANCE, Stephen Z... et Béatrice A....
La saisie immobilière d' un immeuble n' appartenant pas aux débiteurs est nulle.
Dès lors, la procédure poursuivie par le CREDIT FONCIER DE FRANCE à l' encontre de l' immeuble appartenant aux époux X..., qui ne sont pas ses débiteurs, est nulle.
C' est en conséquence à bon droit, par des motifs pertinents que la Cour adopte, que le premier Juge a ordonné la mainlevée de l' hypothèque et sa radiation, ainsi que la nullité des poursuites en saisie immobilière et la radiation du commandement.
Le CREDIT FONCIER DE FRANCE ne saurait se prévaloir d' une spoliation dès lors qu' il lui demeure parfaitement possible d' engager une procédure de saisie immobilière à l' encontre du lot 1037 propriété des consorts Z...- A... et occupé par Béatrice A..., soit après échange des titres, soit après modification du règlement de copropriété par échange des numérotations des deux appartements, et ce, le cas échéant, après avoir obtenu une autorisation d' hypothèque judiciaire provisoire sur le lot 1037 occupé par les consorts Z...- A....
Il peut également être mentionné que si les consorts X... ont acquis par voie d' adjudication un lot portant dans les actes un numéro erroné, cela résulte pour partie de ce que l' huissier agissant pour le créancier à l' encontre des débiteurs saisis, les époux I..., ne s' est pas référé expressément au plan de l' immeuble et de l' étage, et à la situation de fait, dès lors que l' appartement laissé vide par les époux I... était le lot 1035, et au règlement de copropriété, mais seulement aux actes notariés entachés l' un et l' autre d' erreur.
- Sur la demande de rectification des titres
Les époux X... avaient présenté devant le Juge de la Saisie Immobilière une demande tendant à voir ordonner la rectification des titres.
Ils en ont été déboutés quoique cette demande soit considérée comme relevant d' une démarche nécessaire, au motif qu' elle était en l' état mal dirigée et ne relevait pas de la compétence du Juge de la Saisie Immobilière mais de celle du Tribunal de Grande Instance.
Les époux X..., tout en demandant la confirmation en toutes ses dispositions du jugement entrepris, demandent à la Cour d' y ajouter et de constater que leurs droits de propriété portent sur le lot 1035 et que le droit de propriété des consorts Z...- A... portent sur le lot 1037.
Contrairement à ce que soutiennent les époux X... dans le corps de leurs conclusions, il ne s' agit nullement d' une omission de statuer dès lors qu' ils ont été expressément déboutés de cette demande.
La Cour confirmera ce débouté par les motifs pertinents et adoptés du premier Juge dès lors qu' en effet il n' appartient pas au Juge de la Saisie Immobilière de statuer sur l' existence des titres, cette procédure relevant de la compétence du Tribunal de Grande Instance.
En outre, il est rappelé que l' échange des titres par acte notarié avait été envisagé, et que Stephen Z... y avait fait obstacle, mais que le prononcé du présent arrêt peut être de nature à permettre à cette formalité de prospérer.
De même, et pour les mêmes raisons, il ne peut être fait droit à la demande subsidiaire du CREDIT FONCIER DE FRANCE tendant à voir juger que ses garanties hyothécaires sont reportées sur le lot finalement attribué aux consorts Z...- A....
- Sur les dépens et l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile
Les dépens d' appel seront mis à la charge du CREDIT FONCIER DE FRANCE qui succombe en ses prétentions.
Tenu aux dépens, le CREDIT FONCIER DE FRANCE devra verser aux époux X... une somme de 1 500 € sur le fondement de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
L' équité ne commande pas de faire droit aux demandes formées à ce titre par Stephen Z... et Béatrice A....
P A R C E S M O T I F S
LA COUR,
Reçoit le CREDIT FONCIER DE FRANCE en son appel,
Au fond, confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,
Y ajoutant, dit n' y avoir lieu à application de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile au profit de Béatrice A... divorcée Z... et de Stephen Z...,
Condamne le CREDIT FONCIER DE FRANCE à verser à Jacques X... et Maryse Y... épouse X... la somme de 1 500 € en application de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
Condamne le CREDIT FONCIER DE FRANCE aux dépens et en ordonne la distraction au profit des SCP LABORY- MOUSSIE et ANDOUARD, ARSENE HENRY et LANCON, et GAUTIER- FONROUGE, avoués, en application de l' article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Le présent arrêt a été signé par Franck LAFOSSAS, Président, et par Annick BOULVAIS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.