COUR D'APPEL DE BORDEAUX
PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A
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ARRÊT DU : 21 JUIN 2012
(Rédacteur : Thierry LIPPMANN, conseiller,)
N° de rôle : 11/00859
[V] [B]
c/
[C] [L] épouse [I]
[Z] [I]
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 24 janvier 2011 par le Tribunal d'Instance de PERIGUEUX (RG : 11-10-000161) suivant déclaration d'appel du 10 février 2011
APPELANT :
[V] [B]
né le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 6]
de nationalité française
profession : technicien
demeurant [Adresse 4]
représenté par la SCP ANNIE TAILLARD & VALÉRIE JANOUEIX, avocats au barreau de BORDEAUX, et assisté de la SCP LEMERCIER - ATHANAZE, avocats au barreau de PERIGUEUX
INTIMÉS :
[C] [L] épouse [I]
née le [Date naissance 3] 1963 à [Localité 5]
de nationalité française
sans profession
demeurant [Adresse 7]
[Z] [I]
né le [Date naissance 2] 1954 à [Localité 8]
de nationalité française
profession : ouvrier agricole
demeurant [Adresse 7]
représentés par Maître Frédéric MOUSTROU substitué à l'audience par Maître Philippe DE MENDITTE, avocats au barreau de PERIGUEUX
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 mars 2012 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Thierry LIPPMANN, conseiller, chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Marie-Paule LAFON, président,
Jean-Claude SABRON, conseiller,
Thierry LIPPMANN, conseiller,
Greffier lors des débats : Annick BOULVAIS
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
* * *
Exposé du litige.
Par jugement du 24 janvier 2011, auquel le présent arrêt se réfère pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, le tribunal d'instance de Périgueux a condamné Monsieur [Z] [I] et son épouse Madame [C] [L] (les époux [I]) à payer à Monsieur [V] [B] la somme de 373,10€ au titre de réparations locatives, augmentée des intérêts de droit à compter de la décision et la somme de 143,98€ au titre du procès-verbal de constat d'état des lieux.
Le tribunal a condamné d'autre part Monsieur [V] [B] à payer aux époux [I] la somme de 154,95€ au titre du surplus d'allocation de logement de novembre 2004 à juin 2009, la somme de 388€ au titre d'un rappel versé le 24 mars 2005 par la caisse d'allocations familiales et la somme de 330€ au titre des loyers indus de juillet et août 2009.
Le tribunal a ordonné la compensation des sommes réciproquement dues par les parties.
Le tribunal a rejeté les autres demandes, a fait masse des dépens et en réparti la charge par moitié entre les parties.
Monsieur [V] [B] a relevé appel de ce jugement dans des conditions de forme et de délais qui ne sont pas discutées.
Par dernières conclusions Monsieur [V] [B] demande à la cour de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné les époux [I] au paiement de la somme de 143,98€ au titre du coût du constat d'état des lieux de sortie et en ce qu'il a retenu la révision du loyer à 165€ à compter du 1er janvier 2008, de l'infirmer pour le surplus, de condamner les époux [I] à lui payer la somme de 4751,72€ à titre de dommages et intérêts, de lui donner acte de son engagement à leur rembourser la somme de 414,73€, d'ordonner la compensation et de condamner les époux [I] à lui payer la somme de 2500€, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
A l'appui de ses prétentions Monsieur [V] [B] soutient que les locataires ne pouvaient bénéficier de la réduction à un mois du délai pour donner congé, alors que Monsieur [I] était entré au service de son nouvel employeur depuis déjà deux mois lorsque le congé a été notifié.
Il soutient par ailleurs qu'il résulte de l'état des lieux contradictoire dressé au départ des locataires, et dont le coût doit être réparti par moitié entre les parties, que les locataires se sont rendus responsables de désordres nécessitant des travaux de reprise pour la somme de 4751,72€.
Ils soutient encore que les locataires ont tacitement accepté l'augmentation du loyer en versant le montant révisé.
Il soutient en outre qu'il n'existe un trop perçu de loyer qu'à hauteur d'une somme de 26,73€ et que s'y ajoute la somme de 388€ versée par la CAF à titre de régularisation.
Il indique enfin qu'il accepte de remettre aux locataires les quittances de loyer tout en précisant qu'aucune demande ne lui a été faite en ce sens avant l'instance.
Par dernières conclusions les époux [I] demandent à la cour de condamner Monsieur [V] [B] à leur payer la somme de 1164,73€ en répétition de loyers indûment perçus, ou a titre subsidiaire la somme de 894,73€ et les intérêts au taux légal à compter du 12 mai 2010.
Ils demandent en outre la condamnation sous astreinte de Monsieur [V] [B] à leur remettre les quittances de loyers et charges.
Ils demandent enfin à la cour de condamner Monsieur [V] [B] à leur payer la somme de 3500€, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
A l'appui de leurs prétentions, ils prétendent qu'ils pouvaient bénéficier d'un délai de préavis réduit à un mois, qu'il n'existe aucun accord tacite sur l'augmentation du loyer initialement convenu par bail verbal, que le bailleur a perçu indûment la somme totale de 446,73€ au titre du loyer, qu'il ne peut bénéficier de la présomption établie par l'article 1731 du code civil pour avoir fait obstacle à l'établissement de l'état des lieux, que le constat de sortie établi plus de deux mois après leur départ est dépourvu de force probante et qu'il ne peut leur être imputé de quelconques dégradations.
Motifs de la décision.
L'article 15-1 de la loi du 6 juillet 1989 prévoit qu'en cas d'obtention d'un premier emploi, de mutation, de perte d'emploi ou de nouvel emploi consécutif à une perte d'emploi, le locataire peut donner congé au bailleur avec un délai de préavis d'un mois.
En l'espèce les époux [I] ont notifié au bailleur leur congé par lettre recommandée du 27 mai 2009 pour le 30 juin suivant.
Monsieur [I] a bénéficié d'un contrat de travail à durée déterminée prenant fin le 31 décembre 2008, a été engagé par un nouvel employeur suivant un autre contrat à durée déterminée du 23 mars 2009 renouvelé le 19 juin 2009 et converti le 4 septembre 2009 en contrat de travail à durée indéterminée.
Au moment où il a notifié son congé, le locataire occupait un nouvel emploi consécutif à la perte du précédent.
C'est donc à juste titre que le premier juge a considéré qu'il pouvait prétendre à un délai de congé réduit à un mois et ce d'autant plus que Monsieur [I] ne bénéficiait encore que d'un contrat de travail à durée déterminée.
L'article 17 d) de la loi du 6 juillet 1989 dispose par ailleurs que lorsque le contrat de location prévoit la révision du loyer, celle-ci intervient chaque année à la date convenue entre les parties ou, à défaut, au terme de chaque année du contrat.
Ainsi, la loi subordonne la révision du loyer à l'existence d'une clause dans le contrat la prévoyant.
Il ne saurait être dérogé à ces dispositions d'ordre public qui prévoient l'obligation de stipuler par écrit une clause de révision.
En l'espèce, le bail ayant été conclu verbalement, le bailleur ne pouvait donc procéder à une quelconque révision du loyer, sauf accord exprès et non équivoque des locataires.
Or un tel consentement ne peut se déduire du seul fait que les locataires ont payé sans protester le loyer augmenté de janvier 2008 à août 2009 et auraient ainsi renoncé implicitement au bénéfice des dispositions légale précitées.
Dans ces conditions, le loyer mensuel ayant été fixé par les parties à 150€, c'est à tort que le premier juge a estimé que Monsieur [V] [B] pouvait prétendre au paiement d'un loyer mensuel augmenté de 165€ à compter du 1er janvier 2008.
Les époux [I] établissent avoir restitué au bailleur les clés de l'appartement le 1er juillet 2009, au terme du préavis dont ils bénéficiaient.
Ils établissent en outre, par un certificat du maire de la commune, s'être présentés en vain chez le bailleur le 30 juin 2009 afin de convenir d'un rendez-vous pour dresser l'état des lieux contradictoire.
Dans ces conditions, alors qu'aucun état des lieux contradictoire n'avait été dressé en début de bail, que Monsieur [V] [B] connaissait la date de départ des locataires pour avoir reçu notification de leur congé le 27 mai 2009, il ne saurait, de bonne foi faire valoir, au demeurant à tort, que cette formalité ne pouvait être organisée avant le 30 août 2009, et exciper d'un procès-verbal de constat dressé à son initiative le 22 septembre 2009, soit deux mois et 22 jours après le départ des époux [I], pour soutenir que ceux-ci auraient commis des dégradations nécessitant des travaux de remise en état des lieux.
Le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu'il a retenu à ce titre la somme de 373,10€ et Monsieur [V] [B] sera débouté de ses demandes de ce chef.
En définitive, les loyers dus pars les locataires de novembre 2004 à juin 2009 s'élèvent à 8400€. Monsieur [V] [B] a perçu la somme totale de 8696,73€ au titre de l'allocation logement qui lui était directement versée par la caisse d'allocations familiales, somme à laquelle s'ajoute un versement supplémentaire de 388€ que le bailleur reconnaît avoir perçu.
En outre Monsieur [V] [B] a perçu des locataires la somme de 330€ au titre des loyers de juillet et août 2009, alors que le bail ayant pris fin le 30 juin 2009, ces sommes n'étaient pas dues.
En revanche, l'attestation de loyer dont se prévalent les époux [I] pour soutenir qu'ils ont versé en outre en espèces la somme de 150€ au titre du loyer du mois de novembre 2004 ne comporte aucune mention leur permettant d'établir que le bailleur a bien reçu paiement de cette somme, Monsieur [V] [B] y attestant seulement du montant du premier loyer, à l'intention de la caisse d'allocations familiale, pour permettre aux locataires de percevoir leurs allocations.
C'est donc à juste titre que le tribunal a considéré que la preuve du versement allégué n'était pas établie.
Dès lors, le bailleur doit rembourser aux locataires la somme de 1014,73€ (8696,73€ + 388€ +330€ - 8400€), sans pouvoir prétendre au remboursement de la moitié du coût du procès-verbal d'état des lieux qu'il a fait réaliser tardivement.
Monsieur [V] [B] ayant délivré en cours d'instance les quittances de loyer demandées par les époux [I], leur demande de ce chef est devenue sans objet.
Monsieur [V] [B] qui succombe dans la plupart de ses prétentions supportera la charge des dépens et sera condamné en outre à payer aux époux [I] la somme de 2000€, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ces motifs,
La cour,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Infirme le jugement déféré dans toutes ses dispositions,
Et, statuant à nouveau,
Condamne Monsieur [V] [B] à payer aux époux [I] la somme de 1014,73€, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 3 octobre 2011, date de la signification des dernières conclusions des intimés, et la somme de 2000€, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
Condamne Monsieur [V] [B] aux dépens de première instance et d'appel et dit qu'ils pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Madame Marie-Paule LAFON, président, et par Madame Annick BOULVAIS, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.