SD/SLC
N° RG 22/00892
Portalis
DBVD-V-B7G-DPMW
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M. [X] [U], demandeur au renvoi après cassation, appelant
C/
S.A.S.U. GVA BYMYCAR [Localité 4] SUD, défenderesse au renvoi après cassation, intimée
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Expéd. - Grosse
Me PIGNOL 5.5.23
Me COERCHON 5.5.23
COUR D'APPEL DE BOURGES
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 05 MAI 2023
N° 65 - 16 Pages
Décision prononcée suite à un arrêt de la Cour de cassation en date du 13 avril 2022 cassant et annulant partiellement un arrêt rendu par la cour d'appel d'ORLÉANS en date du 2 juillet 2020 statuant sur appel d'un jugement du conseil de prud'hommes d'ORLÉANS (section commerce) rendu le 15 janvier 2018.
DEMANDEUR AU RENVOI APRÈS CASSATION, APPELANT :
Monsieur [X] [U],
[Adresse 1]
Représenté par Me Pierre PIGNOL de la SELARL ALCIAT-JURIS, avocat au barreau de BOURGES
DÉFENDERESSE AU RENVOI APRÈS CASSATION, INTIMÉE :
S.A.S.U. GVA BYMYCAR [Localité 4] SUD,
[Adresse 2]
Représentée par Me Stéphane COERCHON, avocat au barreau d'ANNECY
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats :
PRÉSIDENT : Mme de LA CHAISE, présidente de chambre rapporteur, en présence de Mme CLÉMENT, présidente de chambre
en l'absence d'opposition des parties et conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile.
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GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme DELPLACE
Lors du délibéré : Mme de LA CHAISE, présidente de chambre
Mme CLÉMENT, présidente de chambre
Mme ALLEGUEDE, conseillère
DÉBATS : A l'audience publique du 10 février 2023, la présidente ayant pour plus ample délibéré, renvoyé le prononcé de l'arrêt à l'audience du 31 mars 2023 par mise à disposition au greffe. A cette date le délibéré était prorogé au 7 avril 2023 puis au 5 mai 2023.
ARRÊT : Contradictoire - Prononcé publiquement le 5 mai 2023 par mise à disposition au greffe.
* * * * *
EXPOSÉ DU LITIGE
La SAS Hoche Automobiles, nouvellement dénommée GVA Bymycar [Localité 4] Sud, est spécialisée dans le commerce de véhicules automobiles et employait plus de 11 salariés au moment de la rupture du contrat de travail.
M. [X] [U] a été embauché à compter du 02 septembre 2009 par la société Hoche Automobiles suivant contrat à durée indéterminée du même jour en qualité de vendeur, statut employé, échelon 9, moyennant un salaire brut mensuel fixe de 880 euros, outre des commissions sur les ventes.
La durée du travail était fixée à un forfait de 1 600 heures par an. Les bulletins de salaire mentionnaient une durée mensuelle de travail de 151,67 heures par mois.
En dernier lieu, la part fixe de la rémunération de M. [U] était de 1 100 euros.
La convention collective nationale du commerce et de la réparation de l'automobile, du cycle et du motocycle et des activités connexes, ainsi que du contrôle technique automobile du 15 janvier 1981 s'est appliquée à la relation de travail.
Le 30 mai 2016, l'employeur a soumis au salarié un avenant aux termes duquel la durée du travail était fixée à 39 heures par semaine sur 5 jours et sa rémunération mensuelle fixe de base portée à 1 200 euros, avec réévaluation à 1 300 euros à compter du 1er novembre 2016 en fonction des résultats obtenus.
M. [U] ayant refusé de le signer, la SAS Hoche Automobile l'a informé, par lettre remise en main propre le 08 juin 2016, que sa durée de travail resterait fixée à 35 heures, avec des horaires fixés du lundi au vendredi de 8h30 à 10h3O et de 14h à 19h, et le samedi de 9h à 11h et de 14h à 19h. L'employeur lui précisait que ses jours de repos seraient dorénavant le mercredi et le dimanche et que ses heures supplémentaires ne seraient plus rémunérées, si bien qu'il devrait quitter son poste immédiatement après ses horaires de travail.
Sollicitant principalement la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de la SAS Hoche Automobiles, la nullité de la convention de forfait et le paiement de sommes, M. [U] a saisi le conseil de prud'hommes de Bourges le 16 juin 2016.
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Il a été placé en arrêt maladie le 09 juillet 2016.
Par jugement du 19 septembre 2016, le conseil de prud'hommes de Bourges s'est déclaré territorialement incompétent et a renvoyé l'affaire et les parties devant le conseil de prud'hommes d'0rléans.
Le 02 décembre 2016, à l'issue de la première visite de reprise, M. [U] a été déclaré inapte à son poste compte tenu d'un danger immédiat pour sa santé, le médecin du travail concluant qu'aucun reclassement n'était possible au sein de l'entreprise.
Le 15 décembre suivant, la SAS Hoche Automobile a proposé à M. [U] un poste de commercial automobile VN/V0 au sein de la SAS Michelet Automobiles, située à [Localité 3].
Par lettre recommandée du même jour, le salarié a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 26 décembre suivant.
Par courrier recommandé du 21 décembre 2016, il a informé son employeur qu'il refusait sa proposition de reclassement.
M. [U] a été licencié le 29 décembre 2016 pour inaptitude à son poste et impossibilité de reclassement.
Par jugement du 15 janvier 2018, le conseil de prud'hommes d'Orléans a dit n'y avoir lieu à résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [U], l'a débouté en conséquence de la totalité de ses demandes, a débouté la SAS Hoche Automobiles de ses demandes reconventionnelles et d'indemnité de procédure et a condamné le salarié aux dépens.
Le 29 janvier 2018 M. [U] a relevé appel de cette décision.
Par ordonnance en date du 19 septembre 2018, le conseiller de la mise en état a débouté la SAS Hoche Automobiles de sa demande tendant à voir déclarer caduque la déclaration d'appel précitée et l'a condamnée à payer au salarié une indemnité de procédure de 1 200 euros.
Par arrêt en date du 16 janvier 2019, la chambre des déférés a confirmé cette dernière décision et y ajoutant, a condamné l'employeur à payer au salarié la somme de 1 000 euros pour ses frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens.
Par arrêt du 02 juillet 2020, la chambre sociale de la cour d'appel d'Orléans :
- a confirmé le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [X] [U] de ses demandes de rappel de salaire pour heures supplémentaires, contrepartie obligatoire en repos et congés payés afférents, de dommages et intérêts pour mauvaise foi, d'indemnité pour travail dissimulé et a débouté l'employeur de ses demandes reconventionnelles et d'indemnité de procédure ;
- Mais l'a infirmé en ses autres dispositions ;
Statuant des chefs infirmés et y ajoutant,
- a reçu la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail ;
- a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [X] [U] aux torts de la SAS Hoche Automobiles, avec effet au 29 décembre 2016;
- a fixé le salaire mensuel des 12 derniers mois à 2983,09 euros ;
- a condamné la SAS Hoche Automobiles à payer à M. [X] [U] les sommes suivantes :
- 5 966, 18 euros d'indemnité compensatrice de préavis et 596,61 euros de congés payés afférents,
- 4 325,48 euros a titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
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- 17 000 euros, nets de CSG-CRDS dans la limite de six mois de salaire, à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination,
- 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour atteinte à la vie privée,
- a ordonné à la SAS Hoche Automobiles de remettre à M. [X] [U], dans un délai de trente jours à compter de la signification de l'arrêt, une attestation destinée à Pôle emploi conforme à la décision ;
- a condamné la SAS Hoche Automobiles à payer à M. [X] [U] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- a condamné la SAS Hoche Automobiles aux dépens de première instance et d'appel et l'a déboutée de sa propre demande d'indemnité de procédure.
Par arrêt du 13 avril 2022, la chambre sociale de la Cour de cassation a notamment cassé et annulé, sauf en ce qu'il déclare recevable la demande de résiliation du contrat de travail, l'arrêt rendu le 02 juillet 2020 par la cour d'appel d'Orléans, a remis, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyées devant la cour d'appel de Bourges.
La Cour a notamment retenu :
- au visa de l'article 16 du code de procédure civile :
Pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'un rappel au titre des heures supplémentaires, des congés payés afférents et de la contrepartie obligatoire en repos, l'arrêt retient que le contrat de travail prévoyait en son article 5 que les horaires de travail sont fixés par le directeur et qu'il résulte d'un mail envoyé par le chef des ventes le 3 octobre 2015 à l'ensemble des salariés que les horaires de ces derniers étaient fixés et qu'ils n'avaient aucune autonomie à ce sujet.
L'arrêt constate que le salarié se prévaut de l'article 20 [ 1. 09 e] de la convention collective applicable pour soutenir que l'employeur ne pouvait pas lui appliquer une convention de forfait dès lors qu'il n'était ni cadre ni doté d'autonomie dans l'organisation de ses horaires de travail.
A ce sujet, l'arrêt retient que le forfait annuel en heures n'instaure de toute façon pas le droit pour le salarié de fixer librement ses horaires, lesquels peuvent être imposés par l'employeur. Il ajoute que l'article 28 [6.03] de la convention collective, qui organise le temps de travail des vendeurs de véhicules affectés dans un magasin d'exposition et dont l'activité d'accueil, de renseignement et, ou de négociation est réalisée dans le cadre d'un horaire de travail prescrit, ce qui est le cas du salarié, dispose qu'ils sont soit soumis à un horaire collectif, soit rémunérés au forfait. Il en déduit qu'il en résulte que la convention de forfait annuel en heures n'est pas nulle puisqu'elle est autorisée par un accord collectif et que le salarié, qui n'était ainsi pas soumis à la durée légale du travail, ne peut réclamer la régularisation des heures supplémentaires accomplies.
En statuant ainsi, alors qu'aucune des parties n'invoquait le moyen tiré de l'application de l'article 6.03 de la convention collective, la cour d'appel, qui a soulevé ce moyen d'office sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations, a violé le texte susvisé.
- au visa de l'article 624 du code de procédure civile :
La cassation prononcée sur le premier moyen du pourvoi principal entraîne par voie de conséquence la cassation des chefs de dispositifs qui se rapportent au rejet des demandes de dommages-intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail et d'indemnité pour travail dissimulé, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.
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Au visa de l'article L 1132-1 du code du travail dans sa version issue de la loi n° 2014-173 du
21 février 2014 :
Pour prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail et condamner l'employeur au
versement de sommes au titre de la rupture du contrat de travail et des dommages-intérêts pour discrimination, l'arrêt retient d'abord que le salarié ne démontre pas qu'il a été empêché de se présenter à la délégation unique du personnel.
L'arrêt relève ensuite que le salarié prétend que l'employeur l'a affecté à la préparation esthétique des véhicules, qu'en outre, il lui a demandé d'aller vendre des voitures sur les marchés, ce qui constituait pour lui un déclassement, que l'employeur reconnaît lui avoir attribué ces tâches.
Concernant ce grief, l'arrêt retient que le salarié était un vendeur qui avait sept ans d'ancienneté, que ces tâches ne correspondaient ni aux missions qui avaient été prévues contractuellement ni à la classification qui lui avait été accordée.
L'arrêt estime que le fait d'être subitement affecté à de telles tâches alors que le salarié venait de saisir, le 16 juin 2016, le conseil de prud'hommes, laisse présumer qu'il a bien subi une mesure discriminatoire, et que l'employeur échoue à démontrer qu'il a pris ces décisions pour des raisons objectives étrangères à toute discrimination, notamment qu'il imposait ces tâches à tous les vendeurs de même classification que le salarié. Il ajoute que l'attitude de l'employeur a altéré la santé du salarié.
Il en déduit, d'une part, que le salarié établit que l'employeur a bien commis ce manquement et que le préjudice subi mérite réparation, d'autre part, qu'en cherchant à diminuer sa rémunération et en adoptant à son égard une attitude discriminatoire, qui a dégradé l'état de santé du salarié, l'employeur a commis des manquements graves qui ont empêché la poursuite de la relation de travail.
En statuant ainsi, sans constater que les décisions de l'employeur prises à l'égard du salarié étaient fondées sur l'un des motifs prohibés par l'article L. 1132-1 du code du travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Par acte du 31 août 2022, M. [X] [U] a saisi la présente cour.
Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 08 février 2023, reprises oralement à l'audience, M. [U] demande à la cour par la réformation du jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Orléans le 15 janvier 2018, de :
- Déclarer son appel recevable et le juger bien fondé,
- Juger que la cour d'appel est valablement saisie de l'ensemble de ses demandes,
- Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [X] [U] avec effet au 29 décembre 2016,
- Condamner la SASU GVA Bymycar [Localité 4] Sud à lui payer :
* 45 104,77 euros à titre de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires
* 4 510,48 euros au titre des congés payés afférents
* 29 337,96 euros à titre de rappel de salaire au titre des contreparties obligatoires en repos non pris
* 2 933,80 euros au titre des congés payés afférents
* A titre subsidiaire, 53 322,42 euros au titre des heures supplémentaires sur la base d'un décompte annuel outre 5 332,24 euros au titre des congés payés afférents.
* 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour mauvaise foi
* 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral
* 7 225,38 euros à titre de préavis (2 mois)
* 722,54 euros à titre de congés payés sur préavis
* 4 951,44 euros à titre d'indemnité de licenciement
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* 43 352,28 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul et à tout le moins
sans cause réelle et sérieuse (12 mois)
* 21 676,14 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé
* 5 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Débouter la SASU GVA Bymycar [Localité 4] Sud de l'ensemble de ses demandes,
- Dire qu'au visa de l'article L242-1 du Code de la sécurité sociale, la condamnation nette doit lui revenir et que la SASU GVA Bymycar [Localité 4] Sud assurera le coût des éventuelles charges sociales dues,
- Constater que le salaire mensuel moyen des 12 derniers mois à retenir est de 3 612,69 euros,
- Condamner la SASU GVA Bymycar [Localité 4] Sud à lui remettre une nouvelle attestation pôle emploi dans un délai de 8 jours à compter de la notification du présent jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard,
- Condamner la même en tous les dépens.
Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 08 février 2023, reprises oralement à l'audience, SASU GVA Bymycar [Localité 4] Sud demande à la cour de :
Au préalable, à titre principal :
Vu les articles 562, 624, 625, 901 et 1037-1 du Code de Procédure Civile,
- Juger que la cour d'appel n'est pas valablement saisie des demandes de M. [X] [U]
- Juger irrecevables les demandes de M. [X] [U],
À titre subsidiaire, sur la seule demande de résiliation Judiciaire :
- Débouter M. [X] [U] de sa demande en résiliation judiciaire
- Juger irrecevables toutes demandes indemnitaires portant sur les conséquences de la résiliation de son contrat de travail, comme ayant été définitivement jugées
- À défaut l'en débouter,
À titre infiniment subsidiaire, si la cour s'estimait saisie de l'entier litige :
- Débouter M. [X] [U] de l'intégralité de ses demandes
- Confirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Orléans du 15 janvier 2018,
À titre extrêmement subsidiaire, sur le quantum,
- Juger que le calcul du salaire de référence exclut la période antérieure au 3 octobre 2015,
- Le Débouter de toute demande visant à faire reconnaître l'existence d'heures supplémentaires avant cette date, ainsi que de toute demande indemnitaire,
En toutes hypothèses,
- Condamner M. [X] [U] au paiement de la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux conclusions déposées.
SUR CE
I ) Sur la recevabilité de l'appel
Dans son arrêt en date du 02 juillet 2020, la chambre sociale de la cour d'appel d'Orléans a indiqué que le 29 janvier 2018 M. [U] avait régulièrement relevé appel du jugement du conseil de prud'hommes d'Orléans du 15 janvier 2018.
Par ailleurs, le conseiller de la mise en état a par ordonnance du 19 septembre 2018, confirmée par arrêt de la chambre des déférés de la cour d'appel d'Orléans du 16 janvier 2019, débouté la SAS Hoche Automobiles, nouvellement dénommée GVA Bymycar [Localité 4] Sud de sa demande de
caducité de la déclaration d'appel du 29 janvier 2018.
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Il s'en déduit que la présente cour n'est pas saisie de l'examen de la recevabilité de l'appel de M. [U] qui ne fait pas débat en ce qu'elle n'est pas critiquée par la SASU GVA Bymycar [Localité 4] Sud.
II ) Sur l'effet dévolutif
Aux termes de l'article 542 du code de procédure civile L'appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d'appel.
Et selon l'article 624 du même code La portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce. Elle s'étend également à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.
Et l'article 625 dispose que Sur les points qu'elle atteint, la cassation replace les parties dans l'état où elles se trouvaient avant le jugement cassé.
Elle entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
Si elle en est requise, la Cour peut dans le dispositif de l'arrêt de cassation prononcer la mise hors de cause des parties dont la présence devant la cour de renvoi n'est plus nécessaire à la solution du litige.
Il se déduit de ces textes que la cour d'appel de renvoi est saisie du litige lui étant dévolu par la déclaration d'appel et le dispositif de l'arrêt de cassation.
Ainsi, la cour d'appel de Bourges désignée comme juridiction de renvoi a été investie par la cassation de la connaissance de l'entier litige tel qu'il était porté devant la cour d'appel d'Orléans originairement saisie et dont l'arrêt a été partiellement cassé.
La SASU GVA Bymycar [Localité 4] Sud soutient qu'aux termes de la déclaration d'appel ne faisant référence à aucune annexe, c'est un appel total qui est dévolu à la cour, et qu'elle n'est en conséquence saisie d'aucun chef du jugement entrepris, même de l'examen de la résiliation judiciaire du contrat de travail.
C'est néanmoins de manière appropriée que M. [U] réplique que la Cour de cassation ayant cassé et annulé l'arrêt de la cour d'appel d'Orléans sauf en ce qu'il déclare recevable la demande de résiliation du contrat de travail, elle a considéré que la cour d'appel d'Orléans avait été saisie des chefs du jugement critiqués par la déclaration d'appel et le document annexé.
En effet, par l'examen des moyens soumis à son analyse, la Cour de cassation a nécessairement tranché la question de l'effet dévolutif de l'appel et par le renvoi, a saisi la présente cour de l'entier litige tel qu'il se présentait devant la cour d'appel d'Orléans.
Ainsi, la cour est régulièrement saisie des demandes présentées par M. [U].
III ) Sur la convention de forfait en heures
L'article L. 3121-42 du code du travail dispose que Peuvent conclure une convention de forfait en heures sur l'année, dans la limite de la durée annuelle de travail applicable aux conventions individuelles de forfait fixée par l'accord collectif :
1° Les cadres dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l'horaire collectif
applicable au sein de l'atelier, du service ou de l'équipe auquel ils sont intégrés ;
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2° Les salariés qui disposent d'une réelle autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps.
Aux termes de l'article 6-03 de la convention collective de l'automobile :
a - Salariés chargés de prospecter et visiter la clientèle, et autres salariés itinérants
L'activité du salarié, qui s'exerce principalement hors des locaux de l'entreprise, est
caractérisée par la difficulté de contrôler le nombre d'heures de travail nécessaire pour accomplir les missions qui lui sont confiées, ce nombre ne pouvant être prédéterminé puisque l'activité est soumise aux aléas de la durée des trajets et des délais d'attente. De ce fait, le travail peut être organisé :
- soit conformément aux dispositions de l'article 1-09 d) à g), selon les contraintes particulières de l'activité et le degré d'autonomie de l'intéressé ;
- soit dans le cadre d'un temps de travail individuel mesuré hebdomadairement.
b - Salariés affectés à un hall ou un magasin d'exposition
Cette activité d'accueil, de renseignement et/ou de négociation, sans activité particulière à l'extérieur, est réalisée dans le cadre d'un horaire de travail prescrit. En conséquence, l'employeur doit définir et mettre en oeuvre, pour cette catégorie de personnel, les modalités concrètes de mesure du temps de travail conformément aux dispositions de l'article 1-09 a). L'horaire de ce salarié est l'horaire collectif, ou un forfait conforme à l'article 1-09 d) ou e).
L'article 1-09 de la même convention auquel renvoie l'article 6-03 a) précise :
Hormis les cas expressément prévus par la présente Convention collective, le décompte des heures de travail est obligatoire. Ce décompte est assuré soit par un système d'enregistrement automatique fiable et infalsifiable, soit par tout autre système imposé par l'employeur ou établi par le salarié lui-même sous la responsabilité de l'employeur.
M. [U] argue de la nullité de la convention de forfait en heures en ce que l'employeur l'aurait imposée dans le cadre d'un horaire collectif en contradiction avec les dispositions de l'article
6-03 de la convention collective.
Pour autant, il se déduit de l'article 6-03 qui dispose que les vendeurs de véhicules affectés dans un magasin d'exposition et dont l'activité est réalisée dans le cadre d'un horaire collectif, ce qui est le cas de M. [U], sont soit soumis à un horaire collectif, soit rémunérés au forfait, que la convention de forfait annuel en heures n'est pas nulle puisque autorisée par un accord collectif.
Il soutient ensuite, sans être réellement contredit par l'employeur, que la convention de forfait en heures est privée d'effet et ne saurait lui être opposable en ce qu'il n'avait aucune autonomie dès lors qu'il devait strictement se conformer aux horaires qui lui étaient imposés et n'aurait tenu aucun décompte de ses heures de travail en contradiction avec les dispositions de l'article 1-09 de la convention susdite.
En effet, il n'est pas discuté que le salarié était affecté à un hall ou un magasin d'exposition.
Son contrat prévoyait une durée de travail selon un forfait de 1 600 heures par an et que ses horaires de travail seraient fixés par le directeur M. [O] [I], de façon à harmoniser le fonctionnement de celui-ci.
Ainsi, M. [G] directeur commercial Volkswagen atteste le 11 août 2022 qu'en 2013 le salarié qui travaillait directement sous ses ordres avait des horaires de travail obligatoires du lundi au samedi de 8h30 à 12h30 et de 14h00 à 19h00 et qu'il n'avait aucune autonomie et/ou souplesse relative à ses horaires et sa présence dans la concession.
Il était par ailleurs rappelé par email du 03 octobre 2015 l'obligation pour tous les salariés, dont
M. [U], de se conformer à l'horaire collectif de travail et l'intransigeance sur les retards
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et les heures d'ouverture/fermeture des concessions, sans qu'il ne s'en déduise qu'anté-rieurement à cette date les salariés pouvaient s'organiser à leur guise.
Enfin, par courrier remis en main propre le 08 juin 2016, l'employeur actant le refus de modification de sa rémunération fixe et de son temps de travail par le salarié indique maintenir sa durée de travail à 35 heures hebdomadaires et définit ses horaires en précisant que dès que
l'horaire sera dépassé il devra quitter son poste, les heures supplémentaires n'étant pas rémunérées.
Il s'en déduit qu'en l'absence de toute autonomie dans l'organisation de son emploi du temps, la convention de forfait en heures est privée d'effet et n'est pas opposable à M. [U].
Il est, dès lors, fondé à revendiquer l'application à son égard des dispositions relatives à la durée légale hebdomadaire du travail prévue à l'article L. 3121-27 du code du travail et fixée à trente-cinq heures par semaine.
IV ) Sur la demande en paiement d'un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et congés payés afférents
Aux termes de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.
Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
Il appartient au salarié de présenter préalablement, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
Le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande et détermine souverainement, au vu des éléments produits par chacune des parties, l'existence d'heures de travail accomplies et la créance salariale s'y rapportant.
Si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments au soutien de sa demande.
En l'espèce, M. [U] expose qu'il a régulièrement du mois de juin 2011 au mois de mai 2016 effectué des heures supplémentaires de sorte que l'employeur lui doit à ce titre la somme de 45 104,77 euros.
Il produit au soutien de ses allégations :
- un tableau récapitulatif, dactylographié, reprenant chaque semaine le nombre d'heures travaillées, le nombre d'heures supplémentaires, le total de rémunération due, ainsi que le nombre d'heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel,
- une attestation de M. [G] directeur commercial Volkswagen datée du 11 août 2022 indiquant qu'en 2013 le salarié qui travaillait directement sous ses ordres avait des horaires de travail obligatoires du lundi au samedi de 8h30 à 12h30 et de 14h00 à 19h00,
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- une attestation de [P] [T] indiquant que M. [U] était présent dans l'entreprise en tant que vendeur VN de 8h30 à 12h00 et de 14h00 à 19h00,
- une attestation d'[E] [K] indiquant que les horaires de travail des commerciaux étaient de 8h30 à 12h00 et de 14h00 à 19h00 du lundi au vendredi et le samedi de 9h00 à 12h00 et de 14h00 à 19h00 et que M. [U] était parfois en clientèle pendant l'heure du déjeuner,
- un email du 03 octobre 2015 rappelant à tous les salariés, dont M. [U], l'obligation de se conformer à l'horaire collectif de travail soit du lundi au vendredi de 8h30 à 12h00 et de 14h00 à 19h00 et le samedi de 9h00 à 12h00 et de 14h00 à 19h00.
Contrairement à ce que soutient l'intimée, les éléments produits par le salarié qui affirme avoir de manière régulière effectué des heures supplémentaires à raison de 7h50 par semaine du 16 juin 2011 au 06 janvier 2014 et de 7h25 à compter de cette date jusqu'au mois de mai 2016 sont suffisamment précis pour lui permettre d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
Par ailleurs, l'absence de réclamation ne vaut pas renonciation à un droit, de sorte qu'il est indifférent que M. [U] ne démontre pas avoir sollicité de son employeur, avant son courrier du 07 juillet 2016 puis la saisine du conseil de prud'hommes, le paiement d'heures supplémentaires et il ne peut être tiré comme conséquence de cette absence que le salarié n'a pas effectué d'heures supplémentaires durant l'exécution du contrat.
La SASU GVA [Localité 4] Sud s'oppose encore à la demande en faisant valoir d'une part que le salarié ne démontre pas par la simple référence aux horaires d'ouverture du magasin et les attestations produites dont elle conteste la valeur probante, ses horaires réellement effectués, ni que les heures accomplies l'étaient avec l'accord de l'employeur qui devait en être informé.
Néanmoins c'est à l'employeur qui assure le contrôle des heures de travail effectuées de démontrer que M. [U] n'était pas présent dans la totalité du temps allégué, sans pouvoir utilement prétendre que la présence continue des vendeurs de manière générale n'était pas assurée pendant les horaires d'ouverture et conclure que les heures supplémentaires n'ont pas été effectuées.
La SASU GVA [Localité 4] Sud verse aux débats,
- les agendas de M. [U] du mois de janvier 2013 au mois de décembre 2016,
- une attestation de Mme [M] [A] indiquant que le salarié de manière régulière n'était pas présent à l'ouverture du service commercial à 8h30 mais qu'il l'était plus tard dans la matinée,
- une attestation de M. [D] [W] [L] indiquant que M. [U] en particulier avait pris l'habitude d'arriver à l'heure qu'il désirait sans concertation ni information préalable,
- les données de la badgeuse démontrant que Mme [K] n'effectuait que 35 h de travail par semaine dans l'entreprise et ne peut attester de ce que le salarié y était présent 42h50.
L'agenda produit ne mentionne pas toutes les missions confiées au salarié, ni ne reflète la réalité des heures travaillées en ce qu'il ne comporte, à l'exception d'une livraison le 05 juillet 2013 aucune annotation pour les mois de janvier 2013 à avril 2014, et ensuite occasionnellement l'existence de rendez-vous, alors qu'il n'est pas contesté que M. [U] a bien eu une activité tout au long de cette période.
En revanche, il se déduit des attestations produites que le salarié n'était pas quotidiennement présent sur la totalité des heures d'ouverture du magasin.
Il résulte ainsi de ce qui précède que si l'employeur critique les éléments avancés par le salarié, il n'en fournit aucun de nature à justifier le nombre d'heures de travail réalisées par M. [U], et la charge de travail confiée dans le cadre du forfait en heures irrégulièrement
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mis en place étant connue de l'employeur, les heures de travail exécutées pour y faire face répondent à sa commande, fût-elle implicite.
Ainsi, au vu des éléments produits de part et d'autre, la cour a la conviction que si M. [U] n'a pas effectué toutes les heures supplémentaires qu'il met en avant, il en a réalisé de nombreuses, ce qui justifie que l'employeur soit condamné, par voie infirmative, à un rappel de salaire, que la cour évalue souverainement à la somme de 22 550 euros bruts, outre les congés payés afférents.
Le jugement sera infirmé en ce sens.
V ) Sur les demandes en paiement d'une indemnité au titre de la contrepartie obligatoire en repos, d'une indemnité pour travail dissimulé et pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail
a) sur l'indemnité au titre de la contrepartie obligatoire en repos
Aux termes de l'article D. 3121-14 du code du travail, le salarié dont le contrat de travail prend fin avant qu'il ait pu bénéficier de la contrepartie obligatoire en repos à laquelle il a droit ou avant qu'il ait acquis des droits suffisants pour pouvoir prendre ce repos reçoit une indemnité en espèces dont le montant correspond à ses droits acquis.
Cette indemnité a le caractère de salaire et comprend aussi bien la réparation du préjudice résultant du repos non pris que le montant de l'indemnité compensatrice de congés payés afférents.
M. [U] réclame, en l'espèce, une indemnité de 29 337,96 euros, outre 2 933,80 euros de congés payés afférents, en soutenant qu'il a accompli 1 063,79 heures supplémentaires au-delà du contingent annuel du mois de juin 2011 au mois de mai 2016.
La contractualisation de l'annualisation du temps travail alléguée ne se déduisant néanmoins d'aucun document versé au dossier, le contingent annuel d'heures supplémentaires est fixé à 220 heures par la convention collective.
Les décomptes versés aux débats par l'appelant font ainsi mention d'un contingent inférieur pour les années 2011 et 2016, soit 200,02 heures supplémentaires du mois de juin au mois de décembre 2011 et 133,85 heures supplémentaires pour l'année 2016.
Dès lors, M. [U] sera débouté de sa demande formulée au titre de la contrepartie obligatoire en repos, la cour considérant qu'au regard du quantum des heures supplémentaires souverainement évalué pour les années 2012 à 2015, il n'en a effectué aucune au-delà du contingent annuel applicable.
b) Sur l'indemnité pour travail dissimulé
Aux termes de l'article L. 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :
1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;
2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent
défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur ces derniers un nombre d'heures de travail
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inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;
3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.
M. [U] soutient que l'absence de mention sur ses bulletins de salaire de l'ensemble des heures supplémentaires effectuées constitue une dissimulation d'emploi salarié ouvrant droit à indemnisation en ce que l'employeur avait parfaitement connaissance de l'amplitude horaire de
son salarié caractérisant le caractère intentionnel de la dissimulation.
En l'espèce, il résulte des développements relatifs au rappel de salaire pour heures supplémentaires que les bulletins de paie de M. [U] mentionnent de manière systématique 151,67 heures de travail, soit un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli.
Cependant, il résulte de ce qui précède que l'employeur avait de manière erronée assujetti le salarié à une convention de forfait en heures et que c'est à la suite de cette erreur d'analyse qu'il a mentionné sur les bulletins de paie un nombre d'heures inférieur à celui réellement effectué. Cette inexactitude relative à l'appréciation du temps de travail ne permet pas de caractériser l'intention dissimulatrice de l'employeur.
Dès lors, le travail dissimulé ne peut être caractérisé, si bien que la demande que le salarié forme de ce chef ne peut prospérer et le jugement sera confirmé de ce chef.
c ) Sur l'indemnité pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail
Aux termes de l'article L1222-1 du code du travail le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.
Pour solliciter paiement de la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice allégué, M. [U] soutient que l'exécution de mauvaise foi du contrat de travail par l'employeur se déduit de l'absence de paiement de ses heures supplémentaires.
Il se déduit néanmoins des développements antérieurs que l'absence de paiement desdites heures supplémentaires sont la conséquence d'une application erronée de la convention de forfait en heures.
M. [U] sera en conséquence, par confirmation du jugement déféré, débouté de sa demande indemnitaire de ce chef en réparation d'un préjudice dont au demeurant il ne démontre pas la réalité.
VI ) Sur la demande de dommages-intérêts au titre d'une situation de harcèlement moral
En application des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de supposer l'existence d'un harcèlement moral au sens de la loi. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements indiqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout
harcèlement.
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Le salarié invoque le refus de l'employeur de ce qu'il puisse se présenter comme candidat aux élections professionnelles, la proposition, après qu'il a sollicité le paiement de ses heures supplémentaires, d'un avenant correspondant à une diminution de son salaire et suite à son refus de le signer la réduction de ses horaires de travail, puis son affectation à de nouvelles tâches.
Il précise que son état de santé en a été affecté selon les certificats médicaux communiqués.
M. [U] produit aux débats son email de candidature comme délégué du personnel du 21 novembre 2014 et les listes des candidats des 11 et 12 décembre 2014 sur lesquelles il n'apparaît pas, une attestation de Mme [P] [T] indiquant que son chef des ventes M. [L] lui a expliqué que M. [H] ne voulait pas de [X] [U] comme délégué car il
souhaitait s'en séparer, l'avenant à son contrat de travail du 30 mai 2016 situant son lieu de travail à [Localité 4] à compter du 1er juin 2016 pour une durée hebdomadaire de 39h sur 5 jours et une rémunération mensuelle fixe base 169 heures : 1200 € bruts, en fonction des résultats obtenus sur la période de juin à octobre 2016 une rémunération fixe de base réévaluée à 1300 € bruts par mois à compter du 1er novembre 2016, les courriers de l'employeur des 08 et 10 juin 2016 dans lequel il est indiqué le maintien de sa durée de travail à 35 heures hebdomadaires et ses courriers en réponse des 13 juin et 07 juillet 2016 relatifs notamment à ses nouvelles tâches de préparation esthétique de véhicules neufs ne lui ne lui permettant de réaliser qu'une seule vente sur le mois diminuant ainsi sa rémunération.
Ces éléments, ainsi que les certificats médicaux, pris dans leur ensemble, font supposer l'existence d'un harcèlement moral.
C'est néanmoins à bon droit que l'employeur qui verse aux débats la note 'invitant les syndicats en vue des élections professionnelles' du 06 novembre 2014 et le protocole préélectoral du 21 novembre 2014, soutient que nonobstant les propos rapportés par l'attestante, Mme [P] [T], le salarié ne démontre pas par la production d'un email du 21 novembre 2014 avoir régulièrement fait acte de candidature sur une liste de candidats, établies par collège, en distinguant titulaires et suppléants déposées contre récépissé à l'assistante de direction, candidature qui aurait été refusée.
Il se déduit par ailleurs des pièces du dossier que M. [U] ayant sollicité le paiement d'heures supplémentaires, il lui a été proposé en mai 2016 un avenant à son contrat de travail tendant à la diminution de sa rémunération et suite à son refus de le signer, la remise d'un courrier mentionnant le maintien de sa durée de travail à 35 heures hebdomadaires, puis son cantonnement à des tâches nouvelles ne lui permettant pas de réaliser les objectifs fixés pour obtenir une rémunération satisfaisante.
L'employeur ne fait valoir aucun élément objectif justifiant ses décisions, notamment de proposition de modification du nombre d'heures de travail du salarié, par la nécessité de l'organisation de l'entreprise et en conséquence de leur caractère étranger à tout harcèlement moral.
Par ailleurs, le contrat de travail et le courrier de l'employeur daté du 07 juin 2016 définissent les missions confiées au salarié : assurer la commercialisation des véhicules et produits annexes à la vente automobile proposée par la société, réaliser des transactions (achats, ventes) concernant des véhicules neufs ou d'occasion auprès des particuliers et des entreprises, présenter et proposer toute la palette des services offerts par GVG (groupe Volkswagen France) et la concession (contrat d'entretien, garantie, mobilité...) mais aussi le service après-vente, ses composantes et ses acteurs.
La SASU GVA [Localité 4] Sud reconnaît lui avoir attribué de nouvelles tâches s'agissant de
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l'entretien de véhicules de démonstration mais prétend sans l'établir, qu'elles entraient dans les missions habituellement confiées au salarié ce que celui-ci conteste.
Ainsi, son affectation à de telles tâches faisant immédiatement suite à la saisine du conseil des
prud'hommes, le 16 juin 2016, et ayant pour conséquence de l'empêcher de réaliser des ventes
lui permettant d'atteindre des objectifs garantissant sa rémunération, est constitutive de fait de harcèlement moral.
Les courriers des 08 juillet, 26 octobre et 02 décembre 2016 établissent, contrairement à ce que soutient la SASU GVA [Localité 4] Sud, un lien direct entre l'état de santé du salarié et les agissements de l'employeur, le médecin du travail ayant fini par conclure à son inaptitude en suivant la procédure d'urgence prévue par l'article R. 4624-31 du code du travail.
Ainsi, l'employeur échoue à démontrer que ses décisions ont été justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement de sorte que le harcèlement moral sera retenu.
Au regard du lien établi par M. [U] entre la dégradation de son état de santé et son travail,
la société sera condamnée, par infirmation du jugement critiqué, à lui verser la somme de 3 000 euros à titre de dommage-intérêt en réparation du préjudice résultant du harcèlement moral dont il a été victime durant l'exécution de son contrat de travail.
VII ) Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail
Le salarié peut demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail en démontrant que l'employeur est à l'origine de manquements suffisamment graves dans l'exécution de ses obligations contractuelles de telle sorte que ces manquements ne permettent pas la poursuite du contrat de travail.
Si la résiliation est prononcée, elle produit les effets d'un licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse, selon le cas.
En cas de licenciement postérieur à la résiliation, celle-ci prend effet à la date d'envoi de la lettre de licenciement.
En l'espèce, M. [U] reproche à la SASU GVA [Localité 4] Sud au titre des manquements, d'avoir été victime d'un harcèlement moral en réaction à sa demande de paiement de ses heures supplémentaires et à la saisine du conseil des prud'hommes et le défaut de paiement desdites heures supplémentaires.
Il a été statué que l'employeur était redevable d'heures supplémentaires et que le salarié avait été victime de harcèlement moral.
Ils constituent des manquements graves justifiant la résiliation judiciaire du contrat de travail avec effet au 29 décembre 2016, lequel produit les effets d'un licenciement nul.
Le jugement déféré qui a dit n'y avoir lieu à prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [X] [U] sera donc infirmé de ce chef.
M. [U], âgé de 30 ans au moment de la rupture avait une ancienneté de 7 ans et 3 mois dans l'entreprise.
Il en résulte que le salarié est fondé à obtenir le paiement d'une indemnité compensatrice de
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préavis, des congés payés afférents et d'une indemnité de licenciement telles que demandées au regard d'un salaire mensuel de référence de 3 297,84 euros, prenant en compte le quantum d'heures supplémentaires retenu.
Au regard des dispositions de l'article L. 1235-3-1 du code du travail, le montant des dommages
et intérêts pour licenciement nul ne peut être inférieur au montant des salaires des six derniers
mois.
Il sera donc accordé de ce chef à M. [U] la somme de 19 787,04 euros.
Sur les autres demandes
Il sera ordonné à la société de remettre à M. [U] une nouvelle attestation Pôle emploi régularisée conformément au présent arrêt, dans un délai de 8 jours suivant la notification du dit arrêt, sans qu'il soit néanmoins nécessaire de prononcer une astreinte à cette fin.
Par ailleurs, en application des dispositions de l'article L.1235-4 du code du travail, la société sera condamnée d'office à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées à M. [U] du jour de son licenciement au jour de l'arrêt, ce, dans la limite de six mois
d'indemnités.
La SASU GVA [Localité 4] Sud qui succombe sera condamnée aux dépens.
Elle sera condamnée en équité à verser à M. [X] [U] la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe,
CONSTATE que la cour est régulièrement saisie des demandes présentées par M. [U],
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [X] [U] de ses demandes de contrepartie obligatoire de repos et congés payés afférents, de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail, d'indemnité pour travail dissimulé, a débouté l'employeur de ses demandes reconventionnelles et indemnité de procédure,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
PRONONCE la résiliation judiciaire du contrat de travail liant M. [X] [U] à la SASU GVA BYMYCAR [Localité 4] SUD à effet au 29 décembre 2016 et dit que cette résiliation produit les effets d'un licenciement nul ;
CONDAMNE la SASU GVA BYMYCAR [Localité 4] SUD à payer à M. [U] les sommes de :
* 22 550 euros bruts au titre des heures supplémentaires
* 2 255 euros bruts d'indemnité de congés payés afférents aux heures supplémentaires,
* 6 595,68 euros bruts d'indemnité de préavis,
* 659,56 euros bruts de congés payés afférents,
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* 3 000 euros à titre de dommage-intérêt en réparation du préjudice résultant du harcèlement moral,
* 4 781,86 euros d'indemnité de licenciement,
* 19 787,04 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,
Y ajoutant :
ORDONNE à la société de remettre à M. [U] une nouvelle attestation Pôle emploi régularisée conformément au présent arrêt, dans un délai de 8 jours suivant la notification du
dit arrêt, mais DIT n'y avoir lieu à astreinte ;
CONDAMNE la SASU GVA [Localité 4] Sud à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées à M. [U] du jour de son licenciement au jour de l'arrêt, ce, dans la limite de six mois d'indemnités
CONDAMNE la SASU GVA [Localité 4] Sud à payer à M. [X] [U] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la SASU GVA [Localité 4] Sud aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus ;
En foi de quoi, la minute du présent arrêt a été signée par Mme de LA CHAISE, présidente de chambre, et Mme DELPLACE, greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
S. DELPLACE S. de LA CHAISE