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16/03/2023 | FRANCE | N°21/01033

France | France, Cour d'appel de Caen, 2ème chambre civile, 16 mars 2023, 21/01033


AFFAIRE : N° RG 21/01033 -

N° Portalis DBVC-V-B7F-GXJD

 



ARRÊT N°



JB.





ORIGINE : DECISION du Tribunal de Commerce de CAEN en date du 10 Mars 2021

RG n° 2018008649





COUR D'APPEL DE CAEN

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 16 MARS 2023









APPELANTS :



Monsieur [R] [N]

né le [Date naissance 1] 1966

[Adresse 7]

[Localité 12]





S.A.R.L. PASSION GRAPHIC venant aux droit

s de la SAS PRINT COMMUNICATION GRAPHIC

N° SIRET : 353 948 201

[Adresse 3]

[Localité 10]

prise en la personne de son représentant légal





S.A.S. P.C.G. PRINT COMMUNICATION GRAPHIC

N° SIRET : 809 304 728

[Adresse 4]...

AFFAIRE : N° RG 21/01033 -

N° Portalis DBVC-V-B7F-GXJD

 

ARRÊT N°

JB.

ORIGINE : DECISION du Tribunal de Commerce de CAEN en date du 10 Mars 2021

RG n° 2018008649

COUR D'APPEL DE CAEN

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 16 MARS 2023

APPELANTS :

Monsieur [R] [N]

né le [Date naissance 1] 1966

[Adresse 7]

[Localité 12]

S.A.R.L. PASSION GRAPHIC venant aux droits de la SAS PRINT COMMUNICATION GRAPHIC

N° SIRET : 353 948 201

[Adresse 3]

[Localité 10]

prise en la personne de son représentant légal

S.A.S. P.C.G. PRINT COMMUNICATION GRAPHIC

N° SIRET : 809 304 728

[Adresse 4]

[Localité 11]

prise en la personne de son représentant légal

Tous représentés par Me Jérémie PAJEOT, avocat au barreau de CAEN,

Tous assistés de Me Augustin DOULCET, avocat au barreau de PARIS

INTIMES :

Monsieur [G] [K]

né le [Date naissance 6] 1956 à [Localité 13]

[Adresse 2]

[Localité 5]

représenté et assisté de Me Renan DROUET, avocat au barreau de CAEN

FONDS COMMUN DE TITRISATION CASTANEA, représenté par la SAS MCS ET ASSOCIES, venant aux droits de la SA SOCIETE GENERALE

N° SIRET : 431 252 121

[Adresse 8]

[Localité 9]

représentée et assistée de Me Alicia BALOCHE, avocat au barreau de CAEN

DEBATS : A l'audience publique du 09 janvier 2023, sans opposition du ou des avocats, Mme COURTADE, Conseillère, a entendu seule les plaidoiries et en a rendu compte à la cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme LE GALL, greffier

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme EMILY, Président de Chambre,

Mme COURTADE, Conseillère,

M. GOUARIN, Conseiller,

ARRÊT prononcé publiquement le 16 mars 2023 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Madame EMILY, président, et Mme LE GALL, greffier

* * *

EXPOSE DES FAITS, DE LA PROCEDURE ET DES PRETENTIONS

Selon acte sous seing privé du 3 mars 2015, la Société générale (la banque) a consenti à la société Réalisations graphiques et publicité (la société RGP) un prêt d'un montant de 150.000 euros.

Par acte sous seing privé du même jour, M. [G] [K], dirigeant de la société RGP, s'est porté caution solidaire du remboursement de ce prêt dans la limite de la somme de 195.000 euros, couvrant le paiement du principal, des intérêts, des pénalités et intérêts de retard.

Le 3 octobre 2017, M. [K] et son associée, Mme [Y] [D], ont cédé leurs parts de la société RGP à M. [V] [A] au prix de 1 euro.

Par acte sous seing privé du même jour, une substitution de caution a été convenue entre M. [K] et la société Print communication graphic (la société PCG), dont M. [R] [N] était le gérant et unique associé.

Suivant courriel du 21 octobre 2017 ayant pour objet « transfert crédit RGP », Mme [J], conseillère de la Société générale, a indiqué que la demande de confirmation de la substitution de caution avait été transmise au service Pro.

Par courriel du 31 octobre 2017, Mme [J] a précisé que « le repreneur doit rapidement se rapprocher de nous avec les documents nécessaires au changement de signataire ».

Par jugement du 19 février 2018, le tribunal de commerce d'Evry a prononcé la liquidation judiciaire de la société RGP, la date de cessation des paiements étant fixée au 30 novembre 2017.

La banque a déclaré sa créance aux organes de la procédure collective.

Selon lettre recommandée du 23 mars 2018, la Société générale a mis en demeure M. [K] en sa qualité de caution de lui payer sous huit jours la somme de 78.793,38 euros.

Suivant acte d'huissier du 24 octobre 2018, la Société générale a fait assigner M. [K] en sa qualité de caution de la société Réalisations graphiques et publicité devant le tribunal de commerce de Caen aux fins, notamment, de voir condamner celui-ci au paiement de la somme de 78.793,38 euros.

Par acte d'huissier du 20 septembre 2019, M. [K] a fait assigner en garantie M. [N] et la société PCG.

Ces deux affaires ont été jointes.

Le 3 août 2020, la Société générale a cédé au fonds commun de titrisation Castanea (le FCT) sa créance à l'égard de M. [K].

Par jugement du 10 mars 2021, le tribunal de commerce de Caen a :

- déclaré le fonds commun de titrisation Castanea recevable en son intervention volontaire,

- condamné M. [K] à payer à celui-ci la somme de 79.793,38 euros majorée des intérêts contractuels à compter du 29 mars 2018 et jusqu'à parfait paiement,

- ordonné la capitalisation des intérêts échus à compter du 24 octobre 2018,

- condamné solidairement la société Print communication graphic et M. [N] à payer à M. [K] la somme de de 79.793,38 euros majorée des intérêts contractuels à compter du 29 mars 2018 et jusqu'à parfait paiement,

- ordonné l'exécution provisoire,

- débouté l'ensemble des parties de toutes leurs autres demandes plus amples ou contraires,

- condamné la société Print communication graphic à payer au fonds commun de titrisation Castanea la somme de 2.000 euros à titre d'indemnité de procédure ainsi qu'aux dépens comprenant les frais de greffe liquidés à la somme de 108,17 euros dont 18,03 euros de TVA.

Selon déclaration du 12 avril 2021, M. [N] et la société PCG ont interjeté appel de cette décision.

Par dernières conclusions du 17 janvier 2022, les appelants poursuivent l'infirmation du jugement attaqué en toutes ses dispositions.

Ils demandent à la cour, statuant à nouveau, de débouter M. [K] et le fonds commun de titrisation Castanea de toutes leurs demandes à l'encontre de la société Passion graphic venant aux droits de la société PCG et de M. [N] ainsi que de condamner M. [K] à leur verser la somme de 5.000 euros chacun à titre d'indemnité de procédure ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par dernières conclusions du 31 mai 2022, M. [K] sollicite l'infirmation du jugement attaqué sauf en ce qu'il a condamné solidairement la société PCG et M. [N] à payer à M. [K] la somme de de 79.793,38 euros majorée des intérêts contractuels à compter du 29 mars 2018 et jusqu'à parfait paiement.

Il demande à la cour, statuant à nouveau de ces chefs, de débouter le fonds commun de titrisation Castanea de l'intégralité de ses demandes à titre principal par compensation avec les sommes égales qui lui sont dues compte-tenu de ses manquements dans la mise en place de la substitution et à titre subsidiaire de ses demandes afférentes aux accessoires de la créance, intérêts, frais et pénalités au titre de son défaut d'information de la caution, de débouter M. [N] et la société Passion graphic venant aux droits de la société PCG de l'intégralité de leurs demandes, de condamner ceux-ci à lui verser la somme demandée par le fonds commun de titrisation Castanea en vertu de l'engagement de caution à titre de dommages-intérêts à raison de la perte résultant de l'inexécution contractuelle de l'acte de substitution de caution, celle de 15.000 euros au titre du préjudice financier et moral résultant de cette même inexécution, de condamner M. [N] et la société Passion graphic venant aux droits de la société PCG à le garantir intégralement de toutes sommes qui seraient mises à sa charge dans le cadre de la présente instance, frais irrépétibles et dépens compris, et de condamner la partie succombante au paiement de la somme de 6.000 euros à titre d'indemnité de procédure ainsi qu'aux entiers dépens.

Par dernières conclusions du 22 février 2021, le fonds commun de titrisation Castanea, ayant la société Equitis gestion pour société de gestion, venant aux droits de la Société générale, demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de débouter M. [K], la société Passion graphic venant aux droits de la société PCG et M. [N] de toutes leurs prétentions à l'encontre de la Société générale et de condamner les parties succombantes au paiement de la somme de 5.000 euros à titre d'indemnité de procédure ainsi qu'aux entiers dépens.

La mise en état a été clôturée le 7 décembre 2022.

Pour plus ample exposé des prétentions et moyens, il est référé aux dernières écritures des parties.

MOTIFS DE LA DECISION

1. Sur la recevabilité de l'intervention volontaire du FCT

Comme le relève justement le FCT, les appelants sollicitent l'infirmation de la disposition du jugement entrepris déclarant recevable l'intervention volontaire du FCT, sans toutefois articuler de moyen de fait ou de droit à l'appui de cette prétention aux motifs de leurs dernières conclusions, de sorte que cette disposition sera confirmée.

2. Sur le cautionnement

Aux termes de l'article 2288 ancien du code civil applicable au litige, celui qui se rend caution d'une obligation se soumet envers le créancier à satisfaire à cette obligation, si le débiteur n'y satisfait pas lui-même.

Selon l'article L. 333-1 ancien du code de la consommation, sans préjudice des dispositions particulières, toute personne physique qui s'est portée caution est informée par le créancier professionnel de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement non régularisé dans le mois de l'exigibilité de ce paiement.

L'article L. 343-5 ancien prévoit que lorsque le créancier ne se conforme pas à l'obligation définie à l'article L. 333-1, la caution n'est pas tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retard échus entre la date de ce premier incident et celle à laquelle elle en a été informée.

Suivant l'article L. 333-2 ancien du même code, le créancier professionnel fait connaître à la caution personne physique, au plus tard avant le 31 mars de chaque année, le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation garantie, ainsi que le terme de cet engagement.

Si l'engagement est à durée indéterminée, il rappelle la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée.

Il résulte de ces dispositions que la seule production de la copie des lettres détaillant le montant des engagements de la caution au 31 décembre de l'année précédente en principal, intérêts et accessoires ne suffit pas à justifier de leur envoi.

L'article L. 343-6 ancien prévoit que lorsqu'un créancier ne respecte pas les obligations prévues à l'article L. 333-2, la caution n'est pas tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retard échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information.

En l'espèce, il ressort des relevés de compte pour les années 2015 à 2017 produits par le FCT qu'aucun incident de paiement non régularisé n'est intervenu concernant le prêt consenti le 3 mars 2015 par la Société générale à la société RGP jusqu'à ce que sa liquidation judiciaire soit prononcée le 19 février 2018.

En revanche, la seule production par le FCT de la copie des lettres détaillant le montant des engagements de M. [K] en sa qualité de caution au 31 décembre de l'année précédente en principal, intérêts et accessoires ne suffit pas à justifier de leur envoi.

Il importe peu à cet égard que le montant du capital restant dû au titre du prêt garanti à la date du 3 octobre 2017 soit mentionné dans l'acte de substitution de caution signé à cette date par M. [K] d'une part et par M. [N] et la société PCG d'autre part, dès lors qu'une telle mention dans un acte auquel la banque n'est d'ailleurs pas partie ne saurait établir le respect par celle-ci de son obligation d'information annuelle de la caution personne physique, qui porte sur le principal, les intérêts et accessoires et non sur le seul capital restant dû.

C'est à tort que le tribunal a retenu que la somme due au titre du prêt garanti était de 79.793,38 euros, alors que la mise en demeure du 23 mars 2018 mentionnait la somme de 78.793,38 euros tout comme l'assignation délivrée par la banque et le saisissant.

Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce sens et, la cour statuant à nouveau, M. [K] sera condamné à payer au FCT la somme de 78.793,38 euros déduction à faire des pénalités ou intérêts de retard échus depuis le 31 mars 2015, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2018, date de la mise en demeure.

La disposition du jugement déféré relative à la capitalisation des intérêts n'est pas discutée.

M. [K] ne saurait, sur le fondement de l'article ancien 2314 du code civil, reprocher à la banque de ne pas avoir étudié et apporté de réponse à la demande de substitution de caution formée par ses soins, dès lors qu'il ressort des courriels adressés par la banque les 21 et 31 octobre 2017 que le défaut de réponse apportée à cette demande n'est pas le fait exclusif de la banque mais aussi celui de la société PCG qui ne lui a pas transmis les pièces nécessaires à l'examen de cette demande.

La demande de décharge de son engagement de caution et de dommages-intérêts formée de ce chef par M. [K] sera donc rejetée.

3. Sur l'acte de substitution de caution

L'acte de substitution de caution signé le 3 octobre 2017 par M. [K] d'une part et M. [N] et la société PCG d'autre part prévoit :

-La société PCG, représentée par M. [N], s'engage à entreprendre dès ce jour toutes les démarches auprès de la banque afin de se substituer à M. [K] en qualité de caution du prêt de 150.000 euros souscrit par la société RGP le 7 mai 2015 et dont le capital restant dû à ce jour est de 79.279 euros. À ce titre, la société PCG justifiera des démarches par la remise des courriers adressés à la banque et des réponses de celle-ci.

-Dans l'hypothèse où la banque refuserait la substitution de caution, M. [N] s'engage irrévocablement, tant en qualité de représentant de la société PCG qu'à titre personnel, en engageant ses ayants droit et héritiers, à faire rembourser ou à rembourser à M. [K] toutes sommes que ce dernier pourrait être amené à payer en cas de mise en jeu dudit engagement de caution.

Ainsi, l'acte de substitution de caution litigieux met à la charge de la société PGC l'obligation envers M. [K] de réaliser les démarches auprès de la banque afin de se substituer à M. [K] en qualité de caution du prêt de 150.000 euros souscrit par la société RGP le 7 mai 2015 et de justifier de ces démarches.

La preuve de la réalisation de ces démarches n'est pas rapportée par les appelants.

Dans l'hypothèse où la banque refuserait la substitution de caution, cet acte met à la charge de M. [N] en son nom personnel et de la société PCG l'obligation de faire rembourser ou de rembourser à M. [K] toutes sommes que ce dernier pourrait être amené à payer en cas de mise en jeu dudit engagement de caution.

La condition préalable de cette obligation, à savoir le refus opposé par la banque à la substitution de caution, n'est pas remplie en l'espèce, dès lors que celle-ci n'a pas pris position sur cette substitution.

L'acte de substitution de caution litigieux stipule, dans un article intitulé « contrepartie », que « M. [K] s'engage à ce que la société RGP réalise expressément tous ces travaux d'imprimerie en sous-traitance à l'imprimerie PCG ».

M. [K] ne rapporte pas la preuve de l'exécution de cet engagement.

En premier lieu, M. [N] et la société Passion graphic, venant aux droits de la société PCG, soutiennent que l'acte de substitution de caution invoqué par M. [K] ne leur est pas opposable.

Ils exposent qu'ils ont été en pourparlers avec M. [K] pour la reprise de la société RGP mais que cette négociation n'a pas abouti, les parts de la société RGP ayant été finalement acquises par M. [A] le 3 octobre 2017, et que c'est dans le cadre de ces pourparlers que l'acte de substitution de caution avait été signé, lequel ne mentionne pas M. [N] en tant que partie.

En second lieu, au visa des articles 1103, 1106, 1169, 1186, 1187 et 1217 du code civil, les appelants font valoir que la contrepartie prévue à l'acte de substitution de caution du 3 octobre 2017 invoqué consistait en l'engagement de la société RGP de réaliser tous ses travaux d'imprimerie en sous-traitance à la société PCG et que cette contrepartie était rendue impossible en raison de la cession le même jour par M. [K] de ses parts de la société RGP à M. [A], ce qui rendait l'acte de substitution nul faute de cause dès l'origine, et avait disparu ou était dérisoire voire illusoire à la suite de la procédure de liquidation judiciaire ouverte le 19 février 2018 avec une cessation des paiements fixée au 30 novembre 2017, ce qui privait l'acte de substitution de caution de toute contrepartie et le rendait caduc. Ils affirment qu'en tout état de cause cet acte encourt la résolution pour ne pas avoir été exécuté par M. [K] ou encore que l'inexécution par ce dernier de son engagement les fonde à ne pas exécuter leurs propres obligations.

M. [K] affirme que M. [A] était le prête-nom de M. [N] lors de la cession des parts de la société RGP et que la liquidation judiciaire de celle-ci a été « orchestrée » par M. [N] qui en était le gérant de fait.

Il indique que la substitution de caution constituait la contrepartie de la cession des parts de la société RGP.

Selon cet intimé, l'acte de substitution de caution est opposable à M. [N] et à la société PCG, qui en sont les signataires, et ceux-ci n'ont pas respecté leurs obligations en n'effectuant aucune démarche auprès de la banque pour obtenir l'accord de celle-ci concernant la substitution de caution, ce qui lui a causé un préjudice correspondant aux sommes qui lui sont réclamées par le FCT en sa qualité de caution ainsi qu'un préjudice moral et financier qu'il évalue à la somme de 15.000 euros.

Il réplique que l'inexécution de la contrepartie mentionnée à l'acte de substitution de caution, à savoir la sous-traitance des travaux d'imprimerie de la société RGP par la société PCG, est imputable à M. [N], gérant de fait de la société RGP suite à la cession de parts, et non à lui, dépourvu de pouvoir de direction à compter de cette cession. Il soutient qu'à compter de cette date l'obligation lui incombant en vertu de l'acte de substitution « a revêtu un caractère purement potestatif au profit des acquéreurs et de M. [N] en particulier » au sens de l'article 1304-2 du code civil.

Enfin, M. [K] fait valoir que la contrepartie prévue à l'acte litigieux n'était pas illusoire ou dérisoire, dès lors que M. [N] était parfaitement informé de la cession de parts sociales au profit de M. [A], son prête-nom, que le défaut de régularisation de la substitution de caution ne résulte que de son manquement volontaire, qu'en sa qualité de gérant de fait de la société RGP il lui était possible de sous-traiter les travaux d'imprimerie à la société PCG et que la contrepartie prévue à l'acte a été réalisée par le transfert de la clientèle de la société RGP à la société PCG.

Contrairement à ce que soutiennent M. [N] et la société Passion graphic, venant aux droits de la société PCG, l'acte de substitution de caution du 3 octobre 2017 leur est opposable en ce que cet acte, non argué de faux, a été signé par M. [N] et la société PCG dont il est le dirigeant et stipule des obligations à leur charge.

Contrairement à ce qu'affirme M. [K], aucune des pièces versées aux débats ne démontre que la cession des parts de la société RGP était la contrepartie de l'acte de substitution de caution signé le même jour, la seule contrepartie mentionnée à l'acte de substitution de caution en cause étant l'engagement de M. [K] d'assurer la sous-traitance par la société RGP de ses travaux d'imprimerie à la société PCG.

Aucune des pièces produites n'est propre à démontrer que M. [N] était le gérant de fait de la société RGP à compter du 3 octobre 2017, dès lors qu'il n'est pas établi que celui-ci exerçait en toute indépendance une activité positive de gestion de l'ensemble de la personne morale.

Au sens de l'article 1304-2 du code civil, une obligation n'est assortie d'une condition potestative que lorsque la réalisation de celle-ci dépend de la seule volonté du débiteur, qui est M. [K] lui-même en ce qui concerne l'engagement de sous-traiter les travaux d'imprimerie de la société RGP par la société PCG, selon les termes de l'acte de substitution de caution en cause. Il s'ensuit que M. [K] ne peut soutenir que cette condition était potestative en ce qu'elle dépendait de la seule volonté de M. [N] ou de la société PCG, créanciers de cette obligation.

Aucune des pièces produites n'est de nature à établir la réalité des affirmations de M. [K] selon lesquelles M. [A] ne serait que le prête-nom de M. [N] lors de la cession des parts de la société RGP, ce dernier serait le gérant de fait de la société RGP et aurait eu le pouvoir de sous-traiter les travaux d'imprimerie de la société RGP au profit de la société PCG ou la clientèle de la société RGP aurait été transférée à la société PCG. Au contraire, il ressort des productions que M. [K] est associé d'une société Brand and space exerçant son activité sous le nom commercial RGP.

Au regard de ces éléments, l'inexécution par M. [K] de son engagement d'assurer la sous-traitance des travaux d'imprimerie de la société RGP par la société PCG, contrepartie des obligations mises à la charge de ces derniers, justifie que M. [N] et la société PCG refusent d'exécuter leurs propres obligations, conformément aux dispositions de l'article 1217 du code civil.

Le jugement entrepris sera donc infirmé sur ce point et, la cour statuant à nouveau, M. [K] sera débouté de toutes ses prétentions à l'encontre de M. [N] et la société Passion graphic, venant aux droits de la société PCG.

4. Sur les demandes accessoires

Les dispositions du jugement entrepris relatives aux frais irrépétibles et aux dépens de première instance, fondées sur une exacte appréciation, seront infirmées.

M. [K], qui succombe, sera condamné aux dépens de première instance et d'appel, débouté de sa demande d'indemnité de procédure et condamné à payer à M. [N] et à la société Passion graphic, venant aux droits de la société PCG, ainsi qu'au FCT la somme de 2.000 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a déclaré le fonds commun de titrisation Castanea recevable en son intervention volontaire, ordonné la capitalisation des intérêts échus à compter du 24 octobre 2018 et ordonné l'exécution provisoire ;

Statuant à nouveau du chef des dispositions infirmées,

Condamne M. [G] [K] à payer au fonds commun de titrisation Castanea la somme de 78.793,38 euros déduction à faire des pénalités ou intérêts de retard échus depuis le 31 mars 2015, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2018 ;

Rejette la demande de décharge de son engagement de caution et de dommages-intérêts formée par M. [G] [K] à l'encontre du fonds commun de titrisation Castanea ;

Déboute M. [G] [K] de toutes ses prétentions à l'encontre de M. [R] [N] et de la société Passion graphic, venant aux droits de la société Print communication graphic ;

Y ajoutant,

Condamne M. [G] [K] aux dépens de première instance et d'appel et à payer à M. [R] [N], à la société Passion graphic, venant aux droits de la société Print communication graphic, ainsi qu'au fonds commun de titrisation Castanea, venant aux droits de la Société générale, la somme de 2.000 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

N. LE GALL F. EMILY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : 2ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/01033
Date de la décision : 16/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-16;21.01033 ?
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