AFFAIRE :N° RG 21/01801 -
N° Portalis DBVC-V-B7F-GY3C
ARRÊT N°
JB.
ORIGINE : DECISION en date du 08 Juin 2021 du Juge commissaire de CAEN - RG n° 20205144
COUR D'APPEL DE CAEN
DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE
ARRÊT DU 16 MARS 2023
APPELANTE :
S.A.S.U. C.S.I
N° SIRET : 357 503 481
[Adresse 6]
[Localité 3]
prise en la personne de son représentant légal
représentée par Me Gaël BALAVOINE, substitué par Me BENNETT, avocats au barreau de CAEN
assistée de la SELARL BERNASCONI-ROZET-MONNET SUETY-FOREST, avocat au barreau d'AIN,
INTIMES :
Maître [F] [M] mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la SA BLOC MIROIR
[Adresse 4]
[Localité 1]
représentée et assistée de Me Gervais MARIE-DOUTRESSOULLE, avocat au barreau de CAEN
S.A. BLOC MIROIR
N° SIRET : 626 550 172
[Adresse 5]
[Localité 2]
prise en la personne de son représentant légal
non représentée, bien que régulièrement assignée
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme EMILY, Président de Chambre,
Mme COURTADE, Conseillère,
M. GOUARIN, Conseiller,
DÉBATS : A l'audience publique du 12 janvier 2023
GREFFIER : Mme LE GALL, greffier
ARRÊT prononcé publiquement le 16 mars 2023 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Madame EMILY, président, et Mme LE GALL, greffier
Le 4 juillet 2014, la société SASU Anjac CSI (devenue SASU CSI), agissant en nom propre ainsi qu'au nom de ses filiales, a conclu avec la SA Bloc miroir un contrat cadre annuel reconductible chaque année, prévoyant des prestations mises en oeuvre par la SASU CSI et une clause de compensation entre ses filiales, parmi lesquelles les sociétés Thermic Charpentier et Buron.
Par la suite, ont été signés successivement un avenant, un nouveau contrat cadre et des accords commerciaux.
La société Bloc miroir a été placée en redressement judiciaire par jugement du 1er juillet 2015 du tribunal de commerce de Caen.
Par jugement du 11 octobre 2017, le tribunal de commerce de Caen a ordonné l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Bloc miroir et désigné Maître [F] [M] en qualité de liquidateur judiciaire.
Selon lettre recommandée en date du 19 décembre 2017, adressée à Me [M], ès qualités, la société Anjac CSI a déclaré sa créance au passif de la société Bloc miroir à hauteur de la somme de 19.007,20 euros.
Par lettre recommandée distribuée le 13 mai 2020, Me [M], ès qualités, a informé la société Anjac CSI qu'elle entendait demander le rejet de la créance déclarée à hauteur de 19.007,20 euros, compte tenu de l'absence des factures à l'appui de cette déclaration de créance et des éléments permettant de justifier ce montant.
Par lettre recommandée en date du 26 mai 2020, le conseil de la société Anjac CSI a indiqué maintenir sa demande d'admission de créance pour la somme totale de 19.007,20 euros.
Parallèlement à cette instance, Me [M], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Bloc miroir a assigné les sociétés Thermic Charpentier, Buron distribution et CSI devant les juridictions du fond dans le cadre d'une procédure de recouvrement des créances client aux fins d'obtenir le paiement de diverses sommes.
Dans le cadre de cette procédure, par jugement définitif du 22 février 2021, le tribunal de commerce de Rouen a condamné solidairement les sociétés CSI, Thermic Charpentier et Buron distribution à payer à Me [M] ès qualités la somme de 28.212,65 euros, ainsi que la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et débouté les mêmes sociétés de leur demande de compensation légale et conventionnelle de créance.
Par ordonnance en date du 8 juin 2021, le juge-commissaire du tribunal de commerce de Caen a :
- ordonné l'admission de la créance de la société Anjac CSI pour la somme de 16.200 euros à titre chirographaire et rejeté le surplus ;
- dit que l'ordonnance sera notifiée par le greffier au débiteur, au créancier ou à son mandataire et communiquée aux mandataires de justice ;
- passé les dépens en frais privilégiés de procédure.
Par déclaration en date du 18 juin 2021, la société Anjac CSI a interjeté appel de cette ordonnance.
La SA Bloc miroir n'a pas constitué avocat bien que la déclaration d'appel et les premières conclusions d'appelant lui ont été signifiées respectivement les 13 août 2021 et 1er octobre 2021 à personne.
Par dernières conclusions déposées le 14 mars 2022, la société SASU CSI demande à la cour de :
- L'accueillir en son appel régulier en la forme,
Et sur le fond, y faisant droit,
- Débouter Me [M] en qualité de liquidateur de la société Bloc miroir de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- Infirmer l'ordonnance entreprise,
Statuant à nouveau,
- Débouter Me [M] en qualité de liquidateur de la société Bloc miroir de son appel incident et de l'ensemble de ses prétentions,
- Inscrire la société CSI Anjac au passif de la liquidation de la société Bloc miroir pour la somme de 32.138,40 euros,
- Dire que les dépens d'instance seront inscrits au passif privilégié de la procédure collective.
Par dernières conclusions déposées le 13 décembre 2021, Me [F] [M], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la SA Bloc miroir demande à la cour de:
- Dire à tort l'appel formé par la société CSI SASU ; l'en débouter,
Recevant la concluante es qualité en son appel incident,
- Réformer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a admis la créance de la société Anjac CSI au passif de la liquidation judiciaire Bloc miroir à hauteur de 16.200 euros à titre chirographaire en rejetant le surplus,
Et statuant à nouveau,
- Admettre la créance de la société Anjac CSI au passif de la liquidation judiciaire de la société Bloc miroir pour un montant de 2.807,20 euros (19.007,20 euros - 8.400 euros - 7.800 euros = 2 807,20 euros) à titre chirographaire,
- Rejeter le surplus de la déclaration de créance pour 16.200 euros,
- Condamner la société CSI SASU à lui payer ès qualité la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et la condamner aux dépens d'appel.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 14 décembre 2022.
Il est expressément renvoyé aux écritures précitées pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
MOTIFS
I. Sur le dépassement du montant déclaré
Me [M] ès qualités fait valoir que la SASU CSI ne peut solliciter son admission pour un montant supérieur à la créance déclarée, toute somme non déclarée étant éteinte.
La SASU CSI réplique :
- qu'elle a procédé à sa déclaration de créance pour la somme de 19 007,20€, correspondant au solde dû après compensation entre sa créance sur la SA Bloc miroir (32 235,59€) et celle détenue par cette dernière avant le 11 octobre 2017, date de la liquidation judiciaire (13 228,39€) ;
- que dans sa décision du 22 février 2021, le tribunal de commerce de Rouen, qui l'a condamnée solidairement avec ses filiales au paiement de 28.212,65€, a refusé de prononcer la compensation des créances ;
- que dès lors, elle doit être admise pour un montant de 32 138,40€ et non de 19 007,20€, sous peine d'être lésée.
Cependant, en application de l'article L 622-24 du code de commerce régissant la déclaration de créance, le juge-commissaire qui statue sur l'admission d'une créance ne peut se prononcer que dans les limites du montant indiqué dans la déclaration.
La créance ne peut être augmentée après le délai légal de déclaration qui est en l'espèce expiré.
Il appartenait à la SASU CSI de déclarer l'intégralité de sa créance.
Par suite, elle ne pourra être admise au passif de la procédure collective pour un montant supérieur à 19 007,20€.
II. Sur le montant de la créance
La somme de 32 138,40€ (avant compensation), dont la SASU CSI sollicite l'admission, correspond à 9 factures de prestations émises entre le 30 juin 2014 et le 23 novembre 2017 qui sont mentionnées sur le relevé de compte joint à la déclaration de créance du 19 décembre 2017.
La SASU CSI rappelle à juste titre que le défaut de déclaration des factures de 2014 et 2015 à la procédure de redressement judiciaire du 1er juillet 2015 ne fait pas obstacle à leur déclaration dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire après résolution du plan.
Le liquidateur judiciaire conteste deux factures.
La première facture critiquée, datée du 15 octobre 2015 et d'un montant de 8400€ TTC, porte sur les prestations suivantes :
- catalogue Carré Bains
- présence sur le site internet
- animation Carré Bain
L'exécution effective de ces prestations marketing n'est pas discutée. Seule leur commande est contestée.
Si le contrat cadre Agilo n°2014-7562 du 1er juillet 2014 a été conclu pour des prestations de gestion administrative et de ducroire, il n'exclut pas pour autant l'accomplissement d'autres missions ainsi qu'il est dit à la fin de la page 14: 'les prestations ci-après définies ne sont pas exclusives d'autres prestations de nature différente ou non, qui pourraient être exécutées directement par l'une ou l'autre des sociétés et qui feraient dès lors l'objet d'une facture spécifique'.
Par ailleurs, la SA Bloc miroir n'a jamais émis de protestation ni de réserve à la réception de la facture litigieuse et a même poursuivi sa relation commerciale avec l'appelante pendant plusieurs années.
Ces éléments établissent suffisamment la preuve de la commande.
L'ordonnance est donc confirmée en ce qu'elle a retenu le caractère justifié de cette facture en son principe et son montant.
La seconde facture, datée du 31 août 2017 d'un montant de 7800€ TTC, porte sur les prestations suivantes :
* présence des produits dans les catalogues
- catalogue Carré Bains
- internet site Carré Bains
* participation à une animation comptoir
- animation Carré Bains
La prestation 'présence des produits dans les catalogues' facturée à hauteur de 4000€ HT (3500€ HT + 500€ HT), soit 4800€ TTC, est justifiée par les pièce suivantes :
- acte du 5 janvier 2017 intitulé 'négociation commerciale 2017 n°2017/0013-bloc miroir' aux termes duquel les parties ont décidé de reconduire pour l'année 2017 les clauses juridiques antérieurement conclues sauf modifications apportées ;
- acte du 12 septembre 2016 intitulé ' accord commercial ANJAC CSI en complément du contrat-cadre n°2016/0036-bloc miroir' prévoyant page 4 la souscription de la prestation 'présence des produits dans les catalogues d'ANJAC CSI' ;
- extrait du catalogue 2017.
En revanche la dernière prestation (animation), facturée à hauteur de 2500€ HT (3000€ TTC) n'est pas prévue dans l'accord commercial susvisé.
L'accord commercial en complément du contrat-cadre n°2017/7562 ne peut être retenu faute d'être signé par les parties.
Quant aux échanges de mails entre les salariés des deux sociétés, ils s'inscrivent dans le cadre de discussions préalables à la conclusion d'un nouveau contrat et sont insuffisants à établir l'existence d'un engagement contractuel.
Il convient donc de déduire de la facture la somme de 3000€ TTC, soit un solde de 4800€ TTC.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, la créance de la SASU CSI apparaît justifiée à hauteur de 32 138,40€ - 3000€ = 29 138,4€ TTC.
La SASU CSI ayant limité sa déclaration de créance à 19 007,20€, seul ce montant est admis au passif de la liquidation judiciaire de la SA Bloc miroir, à titre chirographaire.
Le jugement est infirmé à l'exception de la disposition relative aux dépens.
Me [M] ès qualités succombant partiellement, est déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les dépens d'appel seront pris en frais privilégiés de la procédure collective.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, mis à disposition au greffe,
INFIRME l'ordonnance entreprise sauf en ce qui concerne les dépens ;
Statuant à nouveau du chef des dispositions infirmées et y ajoutant,
ADMET la créance de la SASU CSI (anciennement SASU Anjac CSI) au passif de la liquidation judiciaire de la SA Bloc miroir, pour la somme de 19 007,20€ à titre chirographaire ;
DEBOUTE Maître [F] [M] en qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la SA Bloc miroir de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
DIT que les dépens d'appel seront pris en frais privilégiés de la procédure collective.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
N. LE GALL F. EMILY