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16/03/2023 | FRANCE | N°21/02124

France | France, Cour d'appel de Caen, 1ère chambre sociale, 16 mars 2023, 21/02124


AFFAIRE : N° RG 21/02124

N° Portalis DBVC-V-B7F-GZQ4

 Code Aff. :



ARRET N°



C.P





ORIGINE : Décision du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CAEN en date du 03 Juin 2021 - RG n° 18/00345









COUR D'APPEL DE CAEN

1ère chambre sociale

ARRET DU 16 MARS 2023





APPELANT :



Monsieur [S] [L]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représenté par Me Karine FAUTRAT, avocat au barreau de CAEN




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INTIMEE :



S.A.S.U. ATELIERS ET CHANTIERS DE [Adresse 2] (A.C.G. B.)

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Représentée par Me Claire VOIVENEL, avocat au barreau de CAEN









DEBATS : A l'audience publique du 09 janvier 2023, ...

AFFAIRE : N° RG 21/02124

N° Portalis DBVC-V-B7F-GZQ4

 Code Aff. :

ARRET N°

C.P

ORIGINE : Décision du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CAEN en date du 03 Juin 2021 - RG n° 18/00345

COUR D'APPEL DE CAEN

1ère chambre sociale

ARRET DU 16 MARS 2023

APPELANT :

Monsieur [S] [L]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Karine FAUTRAT, avocat au barreau de CAEN

INTIMEE :

S.A.S.U. ATELIERS ET CHANTIERS DE [Adresse 2] (A.C.G. B.)

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Claire VOIVENEL, avocat au barreau de CAEN

DEBATS : A l'audience publique du 09 janvier 2023, tenue par Mme PONCET, Conseiller, Magistrat chargé d'instruire l'affaire lequel a, les parties ne s'y étant opposées, siégé seul, pour entendre les plaidoiries et en rendre compte à la Cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme ALAIN

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme DELAHAYE, Présidente de Chambre,

Mme PONCET, Conseiller, rédacteur

Mme VINOT, Conseiller,

ARRET prononcé publiquement contradictoirement le 16 mars 2023 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme DELAHAYE, présidente, et Mme ALAIN, greffier

FAITS ET PROCÉDURE

M. [S] [L] a été embauché par la SAS ACGB (Ateliers et Chantiers de [Adresse 2]) à compter du 3 mars 2008 en qualité de responsable achats logistique. Il a occupé, à compter du 14 novembre 2014, les fonctions d'acheteur et étude de prix de revient.

Il a été placé en arrêt de travail à partir du 26 septembre 2016.

Le 13 juillet 2018, il a saisi le conseil de prud'hommes de Caen pour demander la résiliation de son contrat de travail au torts de l'employeur et obtenir une indemnité compensatrice de préavis et des dommages et intérêts.

Déclaré inapte à son poste, il a été licencié le 16 octobre 2018 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Par jugement du 3 juin 2021, le conseil de prud'hommes a débouté M. [L] de ses demandes.

M. [L] a interjeté appel du jugement.

Vu le jugement rendu le 3 juin 2021 par le conseil de prud'hommes de Caen

Vu les dernières conclusions de M. [L], appelant, communiquées et déposées le 15 octobre 2021, tendant, avant-dire droit, à voir ordonner l'audition de diverses personnes et toutes autres mesures d'instruction qui apparaîtraient utiles, tendant à voir prononcer la résiliation du contrat de travail avec effet à la date du licenciement, dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, voir la SAS ACGB condamnée à lui verser 26 154€ (outre les congés payés afférents) au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 60 000€ de dommages et intérêts outre 4 000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile

Vu les dernières conclusions de la SAS ACGB, intimée, communiquées et déposées le 4 janvier 2022, tendant, au principal, à voir le jugement confirmé et M. [L] débouté de toutes ses demandes, subsidiairement, à voir réduire le montant des dommages et intérêts à 13 077€ et à voir M. [L] débouté de sa demande au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, tendant à voir M. [L] condamné à lui verser 4 000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 14 décembre 2022

MOTIFS DE LA DÉCISION

1) Sur la demande de mesure d'instruction

Le fait que les attestations produites par les parties se contredisent, ce qui est courant, ne justifie pas que la cour, à qui il appartient d'en apprécier la valeur probante, procède à l'audition de leurs auteurs.

Il n'y a pas non plus lieu de procéder à l'audition d'autres personnes au motif qu'elles auraient été témoins de certains propos litigieux. En effet, leur présence à ce moment-là n'est pas avérée puisque les attestations produites n'en font pas état.

Quant aux autres personnes dont l'audition est requise, elle n'apparaît pas nécessaire à la solution du litige, leur témoignage n'étant susceptible de porter, selon M. [L], que sur des élément périphériques. Il n'appartient de surcroît pas à la cour de suppléer à la carence éventuelle d'une partie dans l'administration de la preuve.

M. [L] sera donc débouté de sa demande avant-dire droit.

2) Sur la résiliation du contrat de travail

M. [L] fait valoir qu'il a été mis à l'écart, systématiquement remis en cause, finalement placé à la direction de la 'supply chain' sans formation ni accompagnement, obligé plusieurs fois de changer de bureau sans en être averti, obligé de monter un dossier contre un salarié de son équipe.

' M. [C], technicien de maintenance, licencié le 19 novembre 2015, atteste que jusqu'à la reprise de l'entreprise par M. [E] (en décembre 2013), la porte de M. [L] était ouverte à tous, que M. [L] avait alors de bonne relation avec son propre supérieur, M. [V]. Il indique que depuis, à une date qu'il ne précise pas, M. [V] l'ayant vu discuter avec M. [L], l'a pris en part et lui a dit : 'pourquoi tu parles à ce connard. Tu as rien à lui dire!!! [O] (dirigeant de la supply Chain de décembre 2013 à septembre 2015) s'occupe de lui'. Il précise que c'est la raison pour laquelle M. [L] était isolé de tous et 'mal aimé'.

M. [T], indique avoir 'vécu l'isolement et l'exclusion de M. [L]'. Il atteste qu'il était ignoré des cadres dirigeants et membres du COPIl et précise qu'il 'était fortement conseillé oralement ou par sous-entendu' de ne pas le déranger au motif qu'il devait se concentrer sur sa mission. 'Toute personne vue avec M. [L] par un responsable devait justifier sa présence'. Il ajoute avoir entendu parler d'une fois où, lors d'une réunion, une chaise avait été placée dans le couloir à l'attention de M. [L]. Cette anecdote lui a également été rapportée par M. [L] qui la tenait d'une autre personne.

La SAS ACGB produit plusieurs attestations contraires.

M. [V] conteste les propos rapportés par M. [C]. Il indique également n'avoir 'jamais eu connaissance de la présence de la chaise dans le couloir'. Mme [W], responsable RH et membre du COPIL indique ne pas se souvenir d'une chaise placée à l'extérieur de la salle. M. [Z], responsable QSE écrit que M. [L] a toujours eu sa place autour de la table de la salle de réunion pour le COPIL et indique qu'il 'n'a jamais été écarté comme cela a pu être évoqué avec une chaise dans le couloir'.

M. [I], dessinateur projeteur, écrit que M. [L] était distant et renfermé, n'avait pas naturellement un contact facile avec les autres et semblait croire que l'ensemble de ses relations de travail en avait après lui. Il ajoute que son attitude et son comportement n'ont pas contribué à améliorer ses relations avec ses collègues, qu'il avait de mauvaises relations avec ses collègues administratifs et plus encore avec ses collègues de production qui avaient dû subir les propositions qu'il avait faite sans se concerter avec eux et qu'il avait tenté de faire passer en force.

Mme [W] écrit que M. [L] était distant renfermé et peu communiquant, qu'il s'isolait lui-même mais que cela n'empêchait pas qu'il soit salué et sollicité par le personnel de l'entreprise.

Les évaluations, globalement satisfaisantes de M. [L] en 2014, 2015 et 2016, insistent toutes sur son déficit de communication avec ses équipes et collègues : 'la portée de ses propositions et de ses actions est fortement altérée par sa communication. [S] ne semble pas avoir trouvé le créneau pour partager fédérer et pérenniser autour de lui les forces vives porteuse de ses actions' (22/5/2014) '[S] devra faire appel à beaucoup de diplomatie et communication avec les autres services pour réussir. C'est là qu'il est attendu : l'amélioration de ses échanges et son tutorat' (21/1/2015), 'je ne remets pas en cause tes compétences techniques d'acheteur mais plus la forme et le communication qui va avec' (12/1/2016).

Les éléments précis produits par M. [L] sont remis en cause par ceux versés au débats par la SAS ACGB : tant en ce qui concerne l'anecdote de la chaise, que l'attestant qui en fait état n'a d'ailleurs pas lui-même constatée, qu'en ce qui concerne les propos attribués à M. [V] par un salarié licencié pour faute grave. Quant à l'isolement de M. [L], les éléments produits par la SAS ACGB tendent à en imputer la responsabilité à sa propre attitude.

' M. [L] soutient que les entretiens d'évaluation traduiraient une remise en cause mais il n'analyse pas ces entretiens et ne précise pas quels propos dans ces entretiens globalement positifs caractériseraient une telle remise en cause.

Ce grief, non explicité, n'est donc pas établi.

' M. [L] a été placé à la direction de la supply Chain en septembre 2015 au départ de M. [O] selon lui sans formation ni accompagnement.

La SAS ACGB produit une convention de formation de 224H en 2015 et 2016, où il figure parmi les participants, portant sur l'amélioration de l'organisation et de performances industrielles. Elle verse également aux débats un courriel adressé à M. [L] en avril 2016 attirant son attention sur une formation sur les techniques de vente pour lui et ses collaborateurs. M. [L] ne conteste pas avoir suivi ou s'être vu proposer ses formations.

L'inspection du travail note toutefois dans son courrier adressé le 16 avril 2018 à la SAS ACGB suite à une enquête réalisée sur les conditions de travail de M. [L] que, malgré une constatation d'une dégradation du travail faite lors du dernier entretien, en janvier 2016, aucune formation ne lui a été proposée. Elle relève également que M. [L] a été placé à la direction de la supply Chain sans signature d'un avenant et sans officialisation de son nouveau positionnement dans la ligne hiérarchique.

' Il est constant que M. [L] a changé de bureau à plusieurs reprises.

M. [T] atteste avoir participé, à l'insu de M. [L], à deux reprises, au déménagement de ses affaires dans un autre bureau.

La SAS ACGB reconnaît ces déménagements mais indique qu'il y a eu des réaménagements et rénovations de bureaux qui ont nécessité ces déménagements et que, finalement M. [L] a intégré le plus grand bureau de l'entreprise avec les autres membres de la supply Chain. Mme [I] atteste de ces réaménagements et du fait, qu'à l'issue, M. [L] a intégré, avec trois autres personnes, le plus grand bureau.

Il ressort toutefois : de l'enquête menée par l'inspection du travail, que M. [L] occupait initialement un bureau individuel, qu'il n'est pas justifié que M. [L] ait été informé des changements opérés et, des propos de la SAS ACGB, qu'à l'issue de l'opération M. [L] partageait son bureau avec 3 autres personnes.

Ce grief est établi.

' M. [L] soutient avoir été obligé, sous la contrainte, de monter un dossier contre un membre de son équipe, M. [G].

La SAS ACGB indique, quant à elle, que c'est M. [L] qui s'est plaint de ce salarié. Elle produit un courriel qu'il a adressé, le 5 septembre 2016, au dirigeant insistant sur les insuffisances de ce salarié prétendument en surcharge de travail et a adressé, à cette occasion, diverses notes sur les faits marquants de l'année 2016 le concernant.

Elle précise que ce salarié ayant répondu aux critiques formulées à son encontre, elle a demandé des éléments à M. [L]. Elle lui a adressé le dimanche 25 septembre 2016 à 17H34 le courriel suivant : 'je t'avais demandé de fournir des éléments de réponse (...) pour jeudi dernier. Qu'en est-il stp ne bâcle pas la réponse lundi matin avant que j'arrive'.

Il est donc établi que l'employeur a pressé le salarié, un dimanche, de lui fournir une réponse qui, compte tenu du moment de son envoi et des demandes qu'elle contenait, ne pouvait être élaborée que ce même jour. En revanche, le seul grief que M. [L] a formulé à ce titre (l'obligation de monter un dossier contre un salarié) n'est pas établi puisque c'est M. [L] lui-même qui est à l'origine de ce dossier.

Les griefs allégués, qui ne sont que partiellement démontrés, ne justifiaient pas la rupture du contrat de travail. M. [L] sera donc débouté de sa demande de résiliation du contrat du travail.

3) Sur le bien-fondé du licenciement

M. [L] soutient que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, d'une part, parce que son inaptitude serait due à un manquement de l'employeur a son obligation de sécurité, d'autre part, parce que la SAS ACGB aurait manqué à son obligation de reclassement.

3-1) Sur le manquement de l'obligation de sécurité

M. [L] invoque les mêmes manquements que ceux allégués au soutien de sa demande de résiliation du contrat de travail.

Les manquements établis (absence d'avenant et de positionnement officiel lors de la prise de direction de la supply Chain, changement de bureaux sans information préalable) ne caractérisent pas un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité. M. [L] sera donc débouté de sa demande tendant à voir dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse sur ce fondement.

3-2) Sur l'obligation de reclassement

La SAS ACGB n'était tenue à aucune obligation de reclassement puisqu'elle en avait été dispensée par le médecin du travail

M. [L] sera donc débouté de sa demande tendant à voir dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse

4) Sur les points annexes

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la SAS ACGB ses frais irrépétibles.

DÉCISION

PAR CES MOTIFS, LA COUR,

- Déboute M. [L] de sa demande avant-dire droit

- Confirme le jugement

- Y ajoutant

- Déboute la SAS ACGB de sa demande faite en appel en application de l'article 700 du code de procédure civile

- Condamne M. [L] aux dépens de l'instance d'appel

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

M. ALAIN L. DELAHAYE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : 1ère chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/02124
Date de la décision : 16/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-16;21.02124 ?
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